Depuis qu'en 1989, après avoir violemment réprimé les manifestations qui réclamaient plus de démocratie, la junte a rebaptisé la Birmanie (Burma en anglais) en Myanmar, l'appellation du pays est politique.

Les opposants ont mis un point d'honneur à ne pas utiliser l'appellation Myanmar, contrairement aux apparatchiks du régime. Certains pays, dont la France ont reconnu le Myanmar, et depuis le dégel, nombreux sont ceux qui acceptent le nouveau nom d'un pays qui s'ouvre et se démocratise rapidement.

Ainsi selon David Paquette de Irrawady international cité dans courrier international du 28/03/2012,

"Jusqu'à présent, le moyen le plus sûr de passer pour un opposant au régime, un dissident ou un rebelle était de ne pas utiliser la nouvelle nomenclature. Mais depuis que le gouvernement du président Thein Sein a acquis une certaine respectabilité, un nombre croissant de commentateurs semblent prêts à accepter ces dénominations. Au début du mois de janvier, le Financial Times a annoncé sa décision de ne plus utiliser "Burma" mais "Myanmar". Il a expliqué ce changement par des raisons d'ordre politique (le gouvernement est désormais reconnu par la communauté internationale) , étymologique (l'usage de "Myanmar" est antérieur à celui de "Birmanie"), et un sens d'équilibre journalistique.

 

Le magazine The Irrawaddy, pour sa part, continue à utiliser le terme "Burma", même si le rédacteur en chef, Aung Zaw, n'écarte pas la possibilité de revenir sur sa position si le pays poursuit sa transition. D'autres médias birmans – et sûrement pas myanmarais ! – en exil, ainsi que la BBC et des publications internationales plus à gauche comme The Guardian, Le Monde et Der Spiegel, préfèrent "Burma" ou ses équivalents. Mais "Myanmar" a la faveur d'agences de presse comme Associated Press, Reuters et l'AFP [ainsi que Courrier International, qui se réfère à la terminologie officielle retenue par les Nations unies].

 

En termes d'égalité et de respect mutuel, de nombreux observateurs estiment que "Myanmar" est un terme plus restrictif que "Burma", même si la plupart des Birmans se sont toujours désignés eux-mêmes sous le nom de "Bamar". En 2010, Maung Tha Noe, le plus grand linguiste du pays, a précisé sur la radio BBC que "le terme Bamar recouvre toutes les ethnies du pays, alors que Myanmar n'inclut pas des minorités comme les Shan et les Kachin". Pour beaucoup, le mot "Burma" a des connotations coloniales. Il a vraisemblablement été adopté par les Britanniques parce qu'il était plus facile à prononcer. Le terme "Myanmar" semble d'ailleurs avoir été longtemps banni des dictionnaires anglais, alors qu'en birman myanma et bamar étaient utilisés quotidiennement. Jusqu'à ce que la junte ressuscite le mot "Myanmar", tous les Birmans appelaient leur pays "Burma" lorsqu'ils s'exprimaient en anglais."

Lors de sa visite du 19 novembre, Obama a choisi d'utiliser Myanmar en présence du président Thein Sein, alors que l'usage anglais veut que l'on dise Burma, afin de ne pas l'irriter et de ne pas compromettre le processus d'ouverture du pays, selon Ben Rhodes le conseiller en sécurité nationale du Président Américain. Tout en précisant que «Cela ne change rien au fait que la position du gouvernement des États-Unis reste sur "Burma"» 1

Le site Atlantic wire donne donc le mode d'emploi suivant «Si vous êtes président des États-Unis et que le président Thein Sein n'est pas dans la pièce: Utilisez Burma (...) Si vous êtes président des États-Unis et que le président Thein Sein est dans la pièce: Utilisez Myanmar (...) Si vous faites partie des Nations unies: utilisez le terme Myanmar.»

La secrétaire d’État Hillary Clinton, en 2011, avait réussi à ne jamais prononcer ni Myanmar ni Birmanie. Elle réussit à se cantonner à l'appellation neutre de "ce pays". Tandis que son successeur John Kerry, le 3 janvier 2014, jour anniversaire de l'indépendance de la Birmanie en 1948 a cité à deux reprises le "Myanmar" dans un communiqué de vœux qui ne faisait aucune mention du nom "Birmanie".

Du coup la porte parole Marie Harf précise que « la politique du gouvernement des États-Unis continuait de faire référence à ce pays (sous le nom) de Birmanie », comme c'est le cas depuis la fin des années 1980. Mais « dans certaines circonstances, des responsables gouvernementaux américains font référence à ce pays (sous le nom) de Myanmar, par courtoisie diplomatique ».

 

Quant à Aung San Suu Kyi elle "s'oppose à ce que le nom d'un pays soit modifié sans consulter l'avis de la population, sans avoir la courtoisie de demander aux gens ce qu'ils en pensent. C'est bien sûr le genre de choses que seules les dictatures font.» En juin 2012, la commission électorale s'était plainte de son usage exclusif de l'appellation Birmanie et l'avait sommée via le journal gouvernemental Light of Myanmar de "respecter la constitution et d'utiliser le terme approprié"

Selon le Los Angeles Times2 , les deux appellations dérivent d'un mot commun. Myanmar (Myanman en Birman) serait plus formel et littéraire tandis Birmanie (Bamar en Birman) serait un terme vernaculaire. Les jeunes générations ne connaissent que l'utilisation de Myanmar alors que les anciens et les exilés sont attachés à l'appellation Birmanie.

1 cité in Slate.fr

2 Article du 24 décembre 2012 cité in Asie-Info