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Il ne subsistait en 1948 que trois arches de la façade de cette synagogue, détruite dans la nuit du 20 au 21 mai 1948 par l’armée jordanienne. La synagogue  Tifferet Israël le a été récemment reconstruite.

Cette synagogue, la 'gloire d'Israël', dont la construction a commencé  en 1857, a été inaugurée le 18 août 1872. Elle sert de lieu de prière à la communauté Hassidique de Jérusalem. 

Son nom est un hommage au rabbin Israël Friedman, un rabbin hassidique d'Ukraine et d'Autriche au 19e siècle. Elle est aussi appelée la Nisa Bak Shul (Synagogue Nisa Bak) en hommage à l'un de ses cofondateurs.

 

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f9/Old_Jerusalem_Tiferet_Yisrael_Synagogue_Gate.JPG

 

Le projet

A l’origine, le rabbin Ysraël Bek, personnalité juive éminente de la vieille ville, cherchait à acheter un terrain pour y construire un centre communautaire. La communauté juive est pauvre et il souhaite l’aider ainsi. Ce serait un endroit pour prier mais aussi pour y partager des repas ou y y célébrer les évènement qui rythment la vie juive religieuse et familiale. Le rabbin Bek entreprend de réunir les fonds pour démarrer son projet.

Le temps court lorsqu’une rumeur lui apprend que le Tsar Nicolas Ier souhaite lui aussi acquérir le terrain, pour y construire un monastère et une église orthodoxe russe. Outre la fin du projet juif, la construction de cette église aurait pour conséquence de s’intercaler entre le quartier juif et le mur occidental.

Rabbi Bek, pressé d'acheter la propriété au nom de la communauté, envoie son fils Nissan consulter leur Grand Rabbin (Rebbe) de Rozhin, Rabbi Yisrael Friedman, qui se trouvait en Autriche-Hongrie, lui-même réfugié en Ukraine. Celui-ci lui donne une importante somme d’argent pour acheter sans tarder le terrain et commencer la construction d’une synagogue.

 

La construction

La collecte de fonds continue et la construction commencée en 1843 s’achève 28 ans plus tard en 1871.

"La synagogue a un grand avantage : autour de son sommet, il y a un toit plat et clôturé ouvert aux vents du ciel, au-dessus de la vieille et de la nouvelle ville de Jérusalem. On monte sur le toit - et voici - le pays entier s'étend devant vous. Et si la synagogue elle-même est la Gloire d'Israël Tiferet Yisrael, alors de son toit, on peut contempler la Gloire de notre Créateur".

La population juive ashkénaze de la vieille ville augmente d’ailleurs à la même époque comme l’a noté Elizabeth Finn, épouse du consul britannique à Jérusalem James Finn, dans son journal.

 

Le centre communautaire

La construction d’un centre communautaire rencontre plus d’opposition des Ottomans. C’est la maison du rabbin Bek qui sert de centre. Bek cherche alors à associer le ministère autrichien des Affaires étrangères à ses efforts, car il sait que les Ottomans veulent gagner la faveur des Autrichiens. Il obtient aussi le soutien du Baron Rothschild, et du vice-consul autrichien Josef Pizzanano afin d’influencer l'empereur François-Joseph pour qu'il fasse pression sur le sultan ottoman pour obtenir sa permission. L'autorisation tant attendue est finalement accordée.

La construction se déroule sur cinq ans à partir de 1864. En 1869, l'empereur François-Joseph qui se rend dans la région pour l'inauguration du canal de Suez, visite aussi Jérusalem, le 10 novembre. Il se rend d’ailleurs sur le site de la construction en cours où il déclare :

"Je n'oublierai jamais l'honneur sans précédent qui m'a été fait ici par les Juifs. Je ne l'oublierai jamais aussi longtemps que je vivrai. J'espère que les Juifs se souviendront de moi."

François-Joseph se tourne vers Nissan Bek, le président du projet, et lui demande : "Pourquoi n'y a-t-il pas de dôme au sommet de votre synagogue ?". Bek répondit rapidement : "La synagogue a tiré son chapeau en votre honneur, Monsieur !".

L'histoire raconte que l'empereur sourit et annonça son don personnel de 1 000 francs pour financer la construction de la coupole. Mais si ce financement était important, l'argent nécessaire pour le dôme aurait été réuni par le rabbin de Sadigor, Rabbi Avraham Yakov Friedman. La magnifique installation est inaugurée en 1872, en fanfare, avec des représentants de toutes les communautés juives du pays et de nombreux consuls européens.

Durant la guerre d’indépendance en 1948, la synagogue a servi de bastion à la Hagana, qui tentait de défendre Jérusalem contre la légion arabe. Elle a été le dernier refuge juif avant que la Légion arabe ne brûle et détruise tout le bâtiment et exile les Juifs restants de la vieille ville par la porte de Sion.

La bataille de 1948

Les Jordaniens la font sauter dans la nuit du 20 au 21 mai 1948. Lapierre et Collins décrivent cet épisode dans leur livre Ô Jérusalem. L'attaque arabe et l'histoire des batailles pour la synagogue Tiferet Yisrael sont aussi décrites par Aharon Liron1, un combattant stationné sur le site.

"C'était le deuxième jour que des obus de canon provenant du Mont des Oliviers avaient pilonné ses murs. De grands trous ont été faits dans les murs et les plafonds. L'une des deux colonnes de pierre de l'arche sainte a été détruite par un obus. Ses portes ont été brisées et les rouleaux de la Torah ont été déchirés en de nombreux endroits. Les antiques lampes en verre piriforme avaient émis des centaines de sonneries et de gémissements, comme un mauvais esprit. Les défenseurs - tendus et à bout de nerfs - étaient blottis dans des couvertures sous les rebords des fenêtres, afin de ne pas être blessés par les éclats, lorsque de temps en temps une pierre tombait du plafond, un sac était soufflé du toit, une colonne de pierre détruite, ou des tables et des bancs. Les deux enfants qui servaient de coursiers pour le poste trouvaient refuge dans les placards muraux, s'y cachant.

 

Lorsqu'ils donnaient des ordres, ils rampaient sur le sol sans lever la tête, afin de ne pas être vus par l'ennemi à travers les fenêtres, qui avaient été arrachées dans presque toutes les directions. Dans l'après-midi, des sifflets et des appels "Alehum", sortant de la gorge de nombreux Arabes, ont été entendus de loin, signalant qu'une attaque était sur le point de commencer.

Les cinq défenseurs se sont installés près des petites ouvertures dans les murs. L'un des coureurs a sauté à l'extérieur pour annoncer : "Nous sommes confrontés à une attaque et nous avons besoin de plus de personnes".

 

La rumeur selon laquelle les Arabes avaient capturé la "Nissan's Shul" se répandit rapidement, et en peu de temps, la position fut renforcée par des dizaines de combattants juifs supplémentaires pour une contre-attaque. La force, sous le commandement de Moshe Rosnak, commandant du quartier juif, attaque en direction de l'allée Hakaraim. Une deuxième force, sous le commandement d'Avraham Orenstein, commandant de secteur, a pénétré dans la synagogue par le sud, à travers une porte de sécurité cachée. La force a surpris les Arabes, qui étaient occupés à piller la synagogue, et a mené un combat face à face de courte portée, y compris à la baïonnette. Une dizaine d'Arabes ont été tués dans la synagogue, certains d'entre eux étant encore enveloppés dans l'arche et les couvertures de la Torah qu'ils avaient pillées. La victoire des défenseurs est impressionnante, mais son prix est élevé : cinq combattants perdent la vie et dix autres sont blessés. Parmi les tués se trouvait un jeune coureur, âgé de seulement quinze ans.

La nuit, les Arabes ont entrepris de venger leur défaite et, à la faveur de la nuit, ils se sont glissés dans la synagogue. Ils ont placé une puissante charge explosive dans la synagogue et ont gravement endommagé les fondations du bâtiment. Le jour suivant, une autre explosion a eu lieu, et environ la moitié du bâtiment a été détruite. Un côté de l'édifice brisé se tenait encore droit sur toute sa hauteur, mais avec son imposant dôme fendu en deux."

 

 

Vers la reconstruction

Proche de la Hourva, détruite elle aussi, sa reconstruction est projetée en 2012.

Selon le maire de Jérusalem Nir Barkat, "La municipalité accorde une grande importance à la préservation et à la reconstruction des sites du patrimoine de Jérusalem. La synagogue Tiferet Yisrael était un symbole du Yishouv juif à Jérusalem et nous sommes fiers de la ramener et de la reconstruire à nouveau".

Le projet est entériné par la commission de planification et de construction de la municipalité de Jérusalem en avril 2016 et la construction pourra démarrer dès l’achèvement des fouilles archéologiques sur le lieu de son édification.

Les fouilles du site révèlent des vestiges de la période du Second Temple, ainsi que du bois brûlé lors du sac de Jérusalem par les Romains. Les découvertes archéologiques indiquent que la zone a servi de logement aux prêtres du Temple pendant la période du Second Temple.

Du côté arabe, Le gouvernorat de Jérusalem a condamné le début de la construction d'une nouvelle synagogue portant le nom de "Le Joyau d'Israël" située à environ 200 mètres de la mosquée Al-Aqsa bénie, du côté ouest, dans le quartier Al-Sharaf, considérant cette mesure comme un nouveau crime contre les saints et une autre tentative de judaïser et de falsifier le visage arabe de la ville.

Le gouvernorat de Jérusalem a déclaré dans un communiqué «  que la synagogue est construite sur les ruines du waqf – fondation islamique de main morte - , mettant en garde contre le danger d'encercler la mosquée Al-Aqsa avec une série de synagogues et de jardins bibliques, dont la synagogue Hourva reconstruite, dans le but de judaïser Al-Aqsa, ses environs et Jérusalem dans son ensemble en effaçant de toute autre trace. ...l'occupation a délibérément construit la synagogue à l'ouest d'Al-Aqsa avec une conception architecturale énorme de sorte qu'elle déforme sa scène visuelle générale et la contrôle complètement, et afin d'imiter ses dômes, et l'église du Saint-Sépulcre dans la vieille ville, sachant qu'elle a construit des dizaines de synagogues et d'écoles religieuses talmudiques dans la vieille ville dans le but de la judaïser et d'en expulser la population arabe palestinienne….Ces mesures de colonisation racistes [visent à] prouver son droit sur Jérusalem, par la falsification de l'histoire, l'oblitération des faits, la déformation du paysage urbain islamique de la capitale occupée et la création d'un modèle hébreu dans celle-ci….La ville de Jérusalem a un visage islamique, avec une identité arabe, et que l'occupation ne la privera pas de ce fait, quelle que soit son intrusion dans la criminalité par tous les moyens et méthodes. »1

La déclaration ci-dessus, un peu excessive, omet de dire que cette synagogue existait depuis près d’un siècle quand elle a été détruite et que sa construction première avait été autorisée par le pouvoir ottoman de l’époque. A l’époque les deux dômes, Tifferet Israël et la Hourva, étaient visibles de loin, sans que le pouvoir s’en soit offusqué.

1https://elderofziyon.blogspot.com/2021/10/palestinians-say-tiferet-yisrael.html

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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