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La conférence réunie dans le seul but d'engager des négociations aboutit à la première reconnaissance d'un objectif de deux États.

Memorial Hall

Académie navale des États-Unis

Annapolis, Maryland

M. BUSH : Les représentants du gouvernement de l'État d'Israël et de l'Organisation de libération de la Palestine, représentés respectivement par le Premier ministre Ehud Olmert et le Président Mahmoud Abbas en sa qualité de Président du Comité exécutif de l'OLP et de Président de l'Autorité palestinienne, se sont réunis à Annapolis, dans le Maryland, sous les auspices du Président des États-Unis d'Amérique, George W. Bush, et avec le soutien des participants à cette conférence internationale, ayant conclu l'accord commun suivant.

 

Texte de l'accord

" Nous exprimons notre détermination à mettre fin à l'effusion de sang, aux souffrances et aux décennies de conflit entre nos peuples; à ouvrir une nouvelle ère de paix, fondée sur la liberté, la sécurité, la justice, la dignité, le respect et la reconnaissance mutuelle; à diffuser une culture de paix et de nonviolence; à nous attaquer au terrorisme et à la provocation, qu'ils émanent des Palestiniens ou des Israéliens.

Dans l'objectif de parvenir à deux Etats, Israël et la Palestine, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité, nous convenons de lancer immédiatement des négociations bilatérales en toute bonne foi pour conclure un traité de paix résolvant toutes les questions pendantes, y compris les questions essentielles sans exception, comme spécifié par les accords antérieurs.

Nous convenons de nous engager dans des négociations vigoureuses, continues et déploierons tous les efforts possibles pour parvenir à un accord avant la fin 2008. Dans ce but, il a été conclu qu'un comité de pilotage mené conjointement par le responsable de la délégation de chaque partie se réunira régulièrement.

 

Voir aussi :  La conférence d'Annapolis, ébauche d'une solution à deux Etats

 

Le comité de pilotage mettra en place un plan de travail conjoint, établira et supervisera l'avancée des équipes de négociations pour résoudre ces questions, dirigées par un représentant clé de chaque partie. La première rencontre de ce comité de pilotage aura lieu le 12 décembre 2007. Le président Abbas et le Premier ministre Olmert continueront à se rencontrer toutes les deux semaines afin de suivre les négociations et d'apporter toute l'aide nécessaire à leur avancement.

Les parties s'engagent également à remplir immédiatement leurs devoirs respectifs édictés par la "feuille de route" sur une solution permanente à deux Etats résolvant le conflit israélo-palestinien telle qu'elle a été mise en place le 30 avril 2003 par le Quartette, et conviennent de former une structure américano-palestino-israélienne, dirigée par les Etats-Unis, destinée à suivre l'application de la Feuille de route.

Les parties s'engagent en outre à continuer à remplir leurs obligations en cours en vertu de la Feuille de route jusqu'à ce qu'elles parviennent à un traité de paix. Les Etats-Unis surveilleront et jugeront de l'accomplissement de l'engagement des deux parties sur la Feuille de route.

A moins que les parties en décident autrement, la mise en œuvre du futur traité de paix sera soumise à l'application de la Feuille de route, sous la supervision des Etats-Unis."

 

Discours d'ouverture de Geroges Bush

 

L’ouverture de négociations sur la création d’un État palestinien vivant côte à côte avec Israël en paix et en sécurité

« Je vous souhaite la bienvenue à l’un des meilleurs instituts de notre pays, l’École navale des États-Unis. Nous vous sommes reconnaissants de vous joindre à nous pour ce qui, je pense, constitue une occasion historique d’encourager l’expansion de la liberté et de la paix en Terre sainte.

Nous nous sommes réunis pour poser les fondements nécessaires à l’instauration d’une nouvelle nation, un État palestinien démocratique qui vivra côte à côte avec Israël en paix et en sécurité. Nous nous sommes réunis également pour contribuer à mettre fin à la violence qui est le véritable ennemi des aspirations tant des Israéliens que des Palestiniens.

Nous sommes partis d’un bon pied. (le président Bush lit la déclaration israélo-palestinienne de la conférence d’Annapolis)

Toutes mes félicitations pour votre rôle dirigeant.

Les Palestiniens sont dotés de nombreux dons et talents. Ils veulent avoir la possibilité de se servir de ces dons pour améliorer leur vie et pour créer un avenir meilleur pour leurs enfants. Ils veulent la dignité qui accompagne la souveraineté et l’indépendance. Ils veulent la justice et l’égalité dans le cadre de l’État de droit. Ils veulent être à l’abri de la violence et de la crainte.

Le peuple d’Israël a lui aussi des aspirations légitimes. Il veut que ses enfants puissent monter dans un autobus ou aller à l’école sans craindre un attentat-suicide. Il veut que les attaques à la roquette cessent de même que les incessantes menaces d’assaut. Il veut que sa nation soit reconnue et acceptée là même où il vit.

Désormais, Palestiniens tout autant qu’Israéliens comprennent que, pour réaliser leurs propres aspirations, la clé est de s’entraider à réaliser leurs aspirations mutuelles, et que les deux peuples ont besoin d’un État palestinien indépendant, démocratique et viable. Un tel État donnerait aux Palestiniens la possibilité d’avoir une vie caractérisée par la liberté, la motivation et la dignité. Un tel État permettrait aux Israéliens d’avoir ce qu’ils recherchent depuis des générations : vivre en paix avec leur voisin.

Il ne sera pas facile de réaliser cet objectif. Si cela l’avait été, ce serait chose faite depuis longtemps. Pour parvenir à la liberté et à la paix, les Israéliens et les Palestiniens devront faire des choix difficiles. Les deux côtés ne se font pas d’illusions sur le travail qui les attend, mais ayant eu l’occasion de m’entretenir avec leurs dirigeants, (je sais) qu’ils sont prêts à s’attaquer aux questions difficiles. Ainsi que le premier ministre Ehoud Olmert l’a dit récemment, « Nous n’écarterons aucune des questions historiques ; nous n’aurons pas peur d’en parler. » Et, ainsi que l’a dit le président Abbas, « Je pense qu’une occasion se présente non seulement à nous, mais aussi aux Israéliens. Nous disposons d’une occasion historique et importante qu’il nous faut saisir. » C’est dans cet esprit que nous avons conclu - qu’ils ont conclu - la déclaration que je viens de lire.

Notre objectif, ici à Annapolis, n’est pas de conclure un accord. C’est plutôt de lancer des négociations entre les Israéliens et les Palestiniens. Pour nous, la tâche est d’encourager les parties à cette fin, et de leur donner l’appui dont ils ont besoin pour réussir.

À la lumière de récents développements, certains ont émis l’avis que le moment n’était pas propice pour rechercher la paix. Je ne suis pas d’accord. Je pense que c’est précisément le moment de commencer ces négociations, et ce pour plusieurs raisons :

Premièrement, le moment est propice parce que les Palestiniens et les Israéliens ont des dirigeants qui sont bien décidés à rétablir la paix. Le président Abbas voudrait réaliser les espoirs de son peuple d’avoir son propre État, d’avoir la dignité et la sécurité. Le président Abbas comprend bien que ce n’est pas le terrorisme qui engendrera un État palestinien mais que le terrorisme est l’ennemi qui empêche l’établissement d’un tel État. M. Abbas et le premier ministre Fayyad ont tous les deux affirmé sans hésitation qu’ils étaient opposés au terrorisme et attachés à la paix. Ils se sont engagés à traduire ces déclarations en des actions sur le terrain afin de lutter contre le terrorisme.

L’arrivée de dirigeants palestiniens responsables a donné aux dirigeants israéliens la confiance dont ils avaient besoin pour tendre la main aux Palestiniens en tant que véritables partenaires. Le premier ministre Olmert a exprimé sa compréhension des souffrances et des outrages ressentis par le peuple palestinien. Il a dit clairement que l’établissement d’un État palestinien responsable et démocratique renforcerait la sécurité d’Israël. Avec des dirigeants courageux et animés de conviction des deux côtés, le moment est venu d’effectuer un rapprochement et de rechercher la paix que les deux côtés souhaitent.

Deuxièmement, le moment est propice parce que la lutte est engagée pour l’avenir du Moyen-Orient - et nous ne devons pas concéder la victoire aux extrémistes. Avec leurs actions violentes et leur mépris pour la vie humaine, les extrémistes cherchent à imposer une sombre vision sur le peuple palestinien, une vision qui se nourrit du sentiment d’impuissance et du désespoir pour semer le chaos en Terre sainte. Si cette vision prévalait, l’avenir de la région serait marqué par un terrorisme incessant, une guerre sans fin et de perpétuelles souffrances.

Le président Abbas et son gouvernement sont opposés à cette sombre vision. Ils offrent au peuple palestinien une autre vision de l’avenir - une vision où figurent la paix, son propre territoire et une amélioration de ses conditions de vie. Si des dirigeants palestiniens responsables peuvent réaliser cette vision, ils assèneront un coup dévastateur aux forces de l’extrémisme. Et lorsque la liberté prendra racine dans le sol rocailleux de la Cisjordanie et de Gaza, elle sera une inspiration pour les millions de gens qui, aux quatre coins du Moyen-Orient, veulent que leur société soit construite sur la liberté, sur la paix et sur l’espoir.

Par contre, si les réformateurs palestiniens ne réussissent pas à réaliser cette vision d’espoir, les forces de l’extrémisme et du terrorisme seront alors renforcées, et le désespoir grandira au Moyen-Orient. Nous ne pouvons permettre une telle issue. Le moment est venu de montrer aux Palestiniens que leur rêve d’un État libre et indépendant peut se réaliser à la table de la paix, et que la terreur et la violence que prônent les extrémistes palestiniens sont les plus gros obstacles à un État palestinien.

Troisièmement, le moment est propice parce que le monde comprend l’urgence qu’il y a à appuyer ces négociations. Nous sommes reconnaissants que des représentants de tant de gouvernements et d’institutions internationales, notamment du monde arabe, soient venus se joindre à nous ici à Annapolis. Nous sommes ici parce que nous savons quels sont les enjeux. Nous sommes ici parce que nous avons tous un rôle essentiel à jouer afin d’aider les Palestiniens à forger les institutions d’une société libre. Nous sommes ici parce que nous comprenons que la portée de la réussite des efforts visant à instituer la paix entre les Israéliens et les Palestiniens s’étendra bien au-delà de la Terre sainte.

Ce sont les raisons pour lesquelles nous sommes réunis ici à Annapolis. Et maintenant nous entamons le difficile travail de la liberté et de la paix. Les États-Unis sont fiers d’accueillir cette réunion, et nous réaffirmons la voie tracée vers la paix par la feuille de route. Mais au bout du compte, l’issue des négociations lancées ici dépend des Israéliens et des Palestiniens. L’Amérique fera tout ce qui est en son pouvoir pour soutenir cette quête de la paix, mais elle ne peut pas la trouver pour eux. Le succès de ces efforts nécessitera que toutes les parties fassent preuve de patience, de souplesse et de responsabilité.

Pour que ces négociations réussissent, les Palestiniens doivent faire leur part. Ils doivent montrer au monde qu’ils comprennent que si les frontières d’un État palestinien sont importantes, la nature de cet État palestinien est tout aussi importante. Ils doivent démontrer qu’un État palestinien créera des possibilités pour tous ses citoyens, gouvernera justement et démantèlera l’infrastructure du terrorisme. Ils doivent montrer qu’un État palestinien acceptera ses responsabilités et sera capable de devenir une source de stabilité et de paix - pour ses propres citoyens, pour le peuple d’Israël et pour l’ensemble de la région.

Les Israéliens doivent également faire leur part. Ils doivent montrer au monde qu’ils sont prêts à commencer à mettre fin à l’occupation qui a commencé en 1967, par un accord négocié. Cet accord établira la Palestine comme patrie palestinienne, tout comme Israël est la patrie du peuple juif. Israël doit donner les preuves de son soutien à la création d’un État palestinien prospère et florissant en éliminant les colonies sauvages, en stoppant l’expansion des colonies et en trouvant des moyens pour l’Autorité palestinienne d’exercer ses responsabilités sans compromettre la sécurité d’Israël.

Les États arabes ont également un rôle vital à jouer. La relance de l’initiative de la Ligue arabe et son soutien à la conférence d’aujourd’hui sont des étapes positives. Tous les États arabes devraient montrer leur ferme soutien au gouvernement du président Abbas - et fournir à l’Autorité palestinienne l’aide dont elle a besoin. Les États arabes devraient également tendre la main à Israël, œuvrer à la normalisation de leurs relations avec lui et montrer tant par leurs paroles que par leurs actions qu’ils admettent qu’Israël et son peuple ont une terre permanente au Proche-Orient. Ce sont là des étapes vitales vers l’obtention d’une paix globale que nous recherchons tous.

Enfin, la communauté internationale a des responsabilités importantes. Le premier ministre Fayyad est en train de finaliser un plan visant à accroître l’ouverture, la transparence et la responsabilité dans l’ensemble de la société palestinienne, ainsi qu’à évaluer les ressources et les appuis de la communauté internationale dont elle a besoin. Avec le ferme soutien de ceux qui sont rassemblés ici, le gouvernement palestinien peut créer des institutions démocratiques qui soutiendront un État palestinien libre.

Les États-Unis aideront les dirigeants palestiniens à bâtir ces institutions - et ils honoreront leurs engagements envers la sécurité d’Israël en tant qu’État juif et patrie du peuple juif.

Les États-Unis sont convaincus que ces efforts déboucheront sur la paix que nous voulons, et c’est pourquoi ils vont continuer de soutenir le peuple libanais. La démocratie au Liban est également vitale pour la paix au Moyen-Orient. Les Libanais sont en train d’élire un président. Cette décision leur appartient, et ils doivent être en mesure de la prendre sans ingérence de l’extérieur et sans intimidation. Alors qu’ils s’engagent dans ce processus, ils doivent savoir que le peuple américain se tient à leurs côtés, et nous avons hâte de voir le jour où ils pourront jouir des bienfaits de la liberté sans craindre la violence ou la coercition.

La tâche entreprise ici à Annapolis sera difficile. C’est le début d’un processus, non son aboutissement. Il ne fait aucun doute qu’il reste encore beaucoup de travail à faire. Pourtant, les parties peuvent aborder leur travail avec confiance. Le moment est bien choisi. La cause est juste. Et si nous ne ménageons pas nos efforts, je sais que nous pouvons réussir.

Monsieur le Président Abbas et Monsieur le Premier ministre Olmert, je vous promets de consacrer le maximum d’efforts aussi longtemps que je serai président afin de vous aider à atteindre cet objectif ambitieux. Je m’engage personnellement à soutenir vos travaux avec les ressources et la résolution du gouvernement des États-Unis. Je suis convaincu que le jour viendra où la liberté engendrera la paix que nous désirons. Et la terre qui est sainte aux yeux de tant de peuples sera le phare de la paix.

Le jour approche où les Palestiniens jouiront des bienfaits de la liberté et où tous les Israéliens jouiront de la sécurité qu’ils méritent. Ce jour approche. Le jour viendra où les terroristes et les extrémistes qui menacent les Israéliens et les Palestiniens seront marginalisés et, finalement, battus. Et lorsque ce jour viendra, les générations futures se pencheront sur les travaux que nous avons entamés ici à Annapolis. Ils remercieront les dirigeants qui se sont réunis sur les rives de la Chesapeake pour leur perspicacité, leur sagesse et le courage d’avoir choisi un avenir de liberté et de paix.

Je vous remercie d’être venus. Que Dieu bénisse votre travail. »


Discours d'ouverture de Ehoud Olmert

Communiqué : Le Premier ministre israélien a énuméré les raisons qui auraient pu l’empêcher de venir à la conférence d’Annapolis : outre la mémoire des échecs des négociations précédentes, il a aussi évoqué le terrorisme qui brise la vie de milliers d’Israéliens. « J’en ai été le témoin direct quand j’étais maire de Jérusalem, à l’époque où les bombes explosaient dans les cafés, les bus et les centres de loisirs à Jérusalem ainsi que dans les autres villes de l’Etat d’Israël. » Aujourd’hui, les roquettes Qassam tirées quotidiennement contre la population civile d’Israël servent de « signal d’alerte » que l’on ne peut ignorer, a-t-il dit.

Mais malgré tous les doutes et les hésitations, « je suis venu, dit Ehud Olmert, pour vous dire, Président Mahmoud Abbas, et à travers vous, à votre peuple et à tout le monde arabe : il est temps. Nous n’avons plus le privilège, vous et moi, de nous raccrocher à des rêves déconnectés des souffrances de nos peuples. »

C’est pourquoi Ehud Olmert a répété ces évidences : « Un Etat palestinien qui recherche la paix, qui est viable, fort, démocratique et sans terrorisme, pour le peuple palestinien. Un Etat d’Israël juif et démocratique, vivant en sécurité et libre de la menace du terrorisme, comme patrie du peuple juif. »

Le Premier ministre israélien a montré de l’empathie pour les Palestiniens, évoquant leurs souffrances. « Je sais que cette douleur et cette privation sont parmi les fondements les plus profonds qui ont causé le système de haine à notre encontre. »  Nous ne sommes ni indifférents, ni insensibles à cette tragédie que vous avez vécue, ajoute-t-il. « La réalité créée dans notre région en 1967 changera significativement. Nous y sommes prêts » insiste Ehud Olmert.

S’adressant aux représentants des Etats arabes et musulmans présents à Annapolis, le Premier ministre israélien a espéré, à terme, la paix avec eux. « Il n’y a pas un seul Etat arabe (…) avec lequel nous ne recherchions pas la paix. Il n’y a aucun Etat musulman avec lequel nous ne voulions établir de relations diplomatiques. » Il les a exhortés à prendre une part active à cet effet, à cesser le boycott d’Israël : « cela ne vous sert pas, et cela nous blesse ».

Au-delà des différences qu’il a énumérées entre les pays arabes et musulmans d’un côté, et l’Etat juif de l’autre, Ehud Olmert a préféré souligner les intérêts communs, mettant en avant la possibilité d’un nouvel essor dans la région. S’adressant aux pays arabes, le Premier ministre israélien déclare : « Nous sommes un petit pays avec une population peu nombreuse, mais nous avons beaucoup de bonne volonté et de capacités à créer un partenariat qui nous conduira à la prospérité, la croissance, au développement économique et à la stabilité dans toute la région. »

Pour finir, Ehud Olmert a déclaré : « Je crois qu’il n’y pas d’autre chemin que celui de la paix. Je crois qu’il n’y a pas de solution juste autre que celle de deux Etats nations pour deux peuples. Je crois qu’il n’y a pas d’autre choix que celui qui implique des concessions douloureuses pour vous, Palestiniens, et pour nous, Israéliens. (…) Ensemble nous commencerons [dans cette voie]. Ensemble nous réussirons. »

 

Discours complet d'Ehud Olmert

à la conférence d'Annapolis le 27 novembre 2007 (Traduit de l'hébreu)


 
Nous voulons la paix. Nous exigeons qu'il soit mis fin à la terreur, à l'incitation et à la haine. Nous sommes prêts à faire un compromis douloureux, plein de risques, pour réaliser ces aspirations.

L'honorable président des États-Unis, George Bush, mon collègue, le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, les chefs de délégations, les invités de marque,
Je suis venu ici aujourd'hui de Jérusalem à votre invitation, Monsieur le Président, pour tendre, au nom du peuple et de l'État d'Israël, une main de paix au peuple palestinien et aux États arabes voisins, dont beaucoup de représentants sont ici avec nous à Annapolis.

J'avais de nombreuses bonnes raisons de ne pas venir à cette réunion.

Le souvenir des échecs du passé proche et lointain pèse sur nous. Le terrible terrorisme perpétré par les organisations terroristes palestiniennes a touché des milliers de citoyens israéliens, détruit des familles et tenté de perturber la vie de tous les citoyens d'Israël. J'en ai été personnellement témoin pendant mon mandat de maire de Jérusalem, lors des attentats à la bombe perpétrés contre des cafés, des bus et des centres de loisirs à Jérusalem et dans d'autres villes de l'État d'Israël
La poursuite des tirs de roquettes Qassam contre des dizaines de milliers d'habitants dans le sud d'Israël, en particulier dans la ville de Sderot, est un signe d'avertissement qui ne peut être ignoré.

L'absence d'instituts gouvernementaux et de mécanismes efficaces d'application de la loi, le règne du Hamas dans la bande de Gaza, l'activité continue d'organisations meurtrières dans tous les territoires de l'Autorité palestinienne, l'absence d'un système juridique répondant aux critères de base d'un gouvernement démocratique - tous ces facteurs nous empêchent d'avancer trop rapidement.
Je n'ignore pas tous les obstacles qui ne manqueront pas d'apparaître en cours de route. Ils sont juste devant moi. Je suis venu ici, malgré les inquiétudes, les doutes et les hésitations, pour vous dire, à vous, Président Mahmoud Abbas, et à travers vous, à votre peuple et à l'ensemble du monde arabe : il est temps. Nous n'avons plus, et vous n'avez plus, le privilège de vous accrocher à des rêves déconnectés des souffrances de nos peuples, des difficultés qu'ils vivent au quotidien et du fardeau de vivre dans une incertitude permanente, sans aucune chance de changement ni d'espoir.
Nous voulons la paix. Nous exigeons qu'il soit mis fin à la terreur, à l'incitation et à la haine. Nous sommes prêts à faire un compromis douloureux, truffé de risques, afin de réaliser ces aspirations.
Je ne suis pas venu ici aujourd'hui pour régler des comptes historiques entre nous sur ce qui a causé le conflit et la haine et sur ce qui, pendant de nombreuses années, a fait obstacle au compromis et à la paix.

Je tiens à dire, du fond du cœur, que je sais et que je reconnais le fait qu'à côté de la souffrance constante que beaucoup en Israël ont connue à cause de l'histoire, des guerres, de la terreur et de la haine à notre égard - une souffrance qui a toujours fait partie de nos vies sur notre terre - votre peuple a également souffert pendant de nombreuses années, et certains souffrent encore.

Depuis des dizaines d'années, de nombreux Palestiniens vivent dans des camps, déconnectés de l'environnement dans lequel ils ont grandi, croupissant dans la pauvreté, la négligence, l'aliénation, l'amertume et un sentiment profond et implacable de privation.

Je sais que cette douleur et cette privation sont l'un des fondements les plus profonds qui ont fomenté l'ethos de la haine à notre égard.

Nous ne sommes pas indifférents à cette souffrance. Nous n'ignorons pas les tragédies que vous avez vécues. Je crois qu'au cours des négociations entre nous, nous trouverons la bonne voie, dans le cadre d'un effort international auquel nous participerons, pour aider ces Palestiniens à trouver un cadre approprié pour leur avenir, dans l'État palestinien qui sera établi dans les territoires convenus entre nous. Israël fera partie d'un mécanisme international qui aidera à trouver une solution à ce problème.

Les négociations entre nous ne se dérouleront pas ici à Annapolis, mais plutôt chez nous et chez vous. Elles seront bilatérales, directes, permanentes et continues, dans un effort pour les achever dans le courant de l'année 2008.

Elle porteront sur toutes les questions qui ont été éludées jusqu'à présent. Nous le ferons directement, ouvertement et courageusement. Nous n'éluderons aucun sujet, nous traiterons toutes les questions essentielles. Je ne doute pas que la réalité créée dans notre région en 1967 changera de manière significative. Ce sera un processus extrêmement difficile pour beaucoup d'entre nous, mais il est néanmoins inévitable. Je le sais. Beaucoup de mes concitoyens le savent. Nous sommes prêts à l'affronter.

Les négociations seront basées sur les accords antérieurs conclus entre nous, les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité des Nations unies, la feuille de route et la lettre du 14 avril 2004 du président Bush au Premier ministre israélien.

À l'issue des négociations, je pense que nous serons en mesure de parvenir à un accord qui concrétisera la vision du président Bush : deux États pour deux peuples.

Un État palestinien pacifique, viable, fort, démocratique et sans terreur pour le peuple palestinien.

Un État d'Israël juif, démocratique, vivant en sécurité et libéré de la menace de la terreur - le foyer national du peuple juif.

Il est clair que la mise en œuvre d'un accord sera soumise à l'exécution de toutes les obligations de la feuille de route, dans toutes ses phases et selon son ordre, comme nous l'avons conclu entre nous dès le début. Nous respecterons toutes nos obligations, et vous aussi.

L'accord conclu avec vous et sa mise en œuvre progressive, prudente et responsable, font partie d'un ensemble beaucoup plus vaste qui nous conduira, nous l'espérons, à la paix avec tous les États arabes. Il n'y a pas un seul État arabe au nord, à l'est ou au sud avec lequel nous ne recherchons pas la paix. Il n'y a pas un seul État musulman avec lequel nous ne voulons pas établir de relations diplomatiques. Tous ceux qui veulent la paix avec nous, nous leur disons, du fond du cœur : bienvenue !

Je suis heureux de voir ici, dans cette salle, les représentants des pays arabes, dont la plupart n'ont pas de relations avec Israël, Le temps est venu pour vous aussi. Le temps est venu pour vous aussi. Vous ne pouvez pas rester indéfiniment à regarder passer le train de la paix. Il est temps de mettre fin au boycott et à l'aliénation envers l'État d'Israël. Cela ne vous aide pas, et cela nous fait du mal. Je connais l'initiative arabe de paix, née à Riyad, affirmée à Beyrouth et récemment réaffirmée par vous à Riyad.

J'apprécie cette initiative, je reconnais son importance et j'apprécie beaucoup sa contribution. Je ne doute pas qu'il y sera fait référence au cours des négociations entre nous et les dirigeants palestiniens.

Le monde arabe, représenté ici par de nombreux pays, est un élément essentiel pour créer une nouvelle réalité au Moyen-Orient.

La paix signée entre Israël et l'Égypte, puis entre Israël et le Royaume hachémite de Jordanie, est une base solide de stabilité et d'espoir dans notre région. Cette paix est un exemple et un modèle des relations que nous pouvons construire avec les États arabes.

Mes relations étroites avec le président égyptien Hosni Moubarak et Sa Majesté le roi Abdallah II de Jordanie sont extrêmement importantes pour le processus de renforcement de la confiance et de la compréhension avec les États arabes.

Toutefois, ces relations, aussi importantes soient-elles, ne suffisent pas. Nous aspirons à la normalisation avec les États arabes qui fuient, autant que nous le faisons, le fondamentalisme radical et frénétique, et qui cherchent à accorder à leurs citoyens un monde plus modéré, plus tolérant et plus prospère.

Il s'agit d'un intérêt commun pour nous tous. Beaucoup de choses nous séparent - des souvenirs et un héritage qui n'émanent pas des mêmes racines historiques, de modes de vie différents, de coutumes différentes, et de notre sens émotionnel et spontané de la solidarité avec nos voisins arabes, qui ont longtemps été pris au piège de ce conflit sanglant séculaire entre nous.

Mais il y a aussi beaucoup de choses qui nous rassemblent. Vous savez, comme nous, que le fanatisme religieux et l'extrémisme national sont une recette parfaite pour l'instabilité domestique, la violence, l'amertume et, en fin de compte, la désintégration des fondements mêmes de la coexistence qui est basée sur la tolérance et l'acceptation mutuelle.

Nous sommes un petit pays avec une petite population, mais riche en bonne volonté et avec une capacité significative à créer un partenariat qui mènera à la prospérité, la croissance, le développement économique et la stabilité pour toute la région.

La perspective d'un nouvel horizon politique, et d'un espoir renouvelé, non seulement pour les Palestiniens et les Israéliens, mais aussi, avec vous, pour toute la région, peut venir d'ici, d'Annapolis.

Honorable Président des États-Unis, mon collègue Mahmoud Abbas, chers invités,

Il y a presque deux ans, dans des circonstances très tristes, le Premier ministre israélien Ariel Sharon n'était plus en mesure d'assumer la lourde responsabilité de diriger l'État d'Israël, et cette responsabilité m'a été transmise - d'abord à la suite de procédures formelles et ensuite sur la base d'une élection dans le système démocratique de gouvernement d'Israël.

Avant mon élection, j'ai déclaré que le désir de mon cœur et celui de mon peuple était de parvenir à la paix, principalement avec le peuple palestinien. C'est ce en quoi je croyais alors et c'est ce en quoi je continue de croire maintenant, de tout mon cœur.

Les deux dernières années ont été difficiles pour nous tous. Les difficultés n'ont pas été atténuées, les organisations terroristes ne se sont pas affaiblies, les ennemis de la paix n'ont pas disparu et nous attendons toujours avec impatience le retour de nos fils disparus et captifs qui sont détenus par les organisations terroristes. J'attends avec impatience le jour où je pourrai revoir Gilad1, Eldad et Udi2 avec leurs familles, et je ne faiblirai pas dans mes efforts pour obtenir leur libération.

Je crois qu'il n'y a pas d'autre voie que la paix. Je crois qu'il n'y a pas de solution juste autre que la solution de deux États nationaux pour deux peuples. Je crois qu'il n'y a pas de voie qui n'implique pas un compromis douloureux pour vous, les Palestiniens, et pour nous, les Israéliens.

Je tiens à vous remercier, Monsieur le Président George Gush, un allié sur le chemin de la paix, pour votre volonté de contribuer au processus historique de paix et de réconciliation entre nous et nos voisins.

Je crois qu'il est temps. Nous sommes prêts. Je vous invite, mon ami Mahmoud Abbas, et votre peuple, à vous joindre à nous sur ce chemin long, tourmenté et complexe, pour lequel il n'y a pas de substitut.

Ensemble, nous commencerons. Ensemble, nous arriverons.

1 Le Caporal Gilad Shalit a été enlevé le 25 juin 2006 à la frontière de Gaza. Il sera libéré le 18 octobre 2011

2 Ehud Goldwasser et Eldad Regev , deux soldats israéliens, ont été enlevé le 12 juillet 2006. Ils sont morts le même jour. Leurs corprs seront rendus à Israël en juillet 2008 lors d'un échange avec le Hezbollah