Héraclius, empereur byzantin (575 - 641) est un empereur romain. Il s'est battu contre Phocas (610)  pour garder l'empire. Il a lutté contre les Perses (entre 602 et 628) et y a perdu Jérusalem. En 614, le Perse Chosroes II a conquis la ville. Il a emporté la "vraie croix" loin de Jérusalem et a finalement perdu la partie face à l'avancée irrésistibles des armées arabes d'Omar Ibn Kattan. Héracliius est ausi l'auteur d'un édit (632) qui oblige les Juifs à ce convertir au christianisme (voir le texte doctrina Jacobi)

 

Les textes ci-dessous sont extraits d'un livre édité en 1869 :

L’EMPEREUR HÉRACLIUS ET L’EMPIRE BYZANTIN AU VIIe SIÈCLE

 

L’expédition d’Héraclius contre Phocas (610)

 

Si l’initiative de l’expédition appartient incontestablement au jeune Héraclius, c’est son père, le gouverneur d’Afrique, qui nous paraît l’avoir concertée et préparée de longue main.
Sous son inspiration, il fut décidé que les deux cousins y prendraient part. Mais, tandis que l’un, avec la flotte, traverserait la Méditerranée, l’Archipel, l’Hellespont et la Propontide, l’autre, avec l’armée de terre, devait s’avancer, à travers l’Égypte, la Syrie et l’Asie Mineure, sur Constantinople. Ce plan était très heureux. Il n’était guère possible que Phocas ne succombât point sous cette double étreinte. On convint que celui des deux qui arriverait le premier et mettrait à mort le tyran, aurait l’empire. A Héraclius fut dévolue la campagne maritime, à Nicétas la campagne continentale. Les chances et les périls étaient fort inégalement répartis. La longueur du trajet devait interdire au fils de Grégoras à peu près toute espérance de régner. D’un autre côté, Héraclius s’exposait beaucoup plus, ne pouvant en chemin grossir ses forces, chose facile à son allié et à son concurrent que son voyage allait mettre en rapport avec la multitude des mécontents. A la part qu’il choisit, on voit que nulle crainte, nulle hésitation n’entravaient désormais son dessein. L’image attachée au mât de son vaisseau lui était une garantie suffisante. Quand, pénétrant dans la mer Egée, entre les îles de Crète et de Cythère, il parut au milieu des Cyclades, les prières s’élevèrent ardentes et nombreuses vers le Ciel pour le succès de l’entreprise. Il relâcha à Abydos, à l’entrée des Dardanelles, et, en chef prudent, s’informa de la situation des affaires. La complicité de Crispus, la lâcheté des généraux auxquels Phocas avait confié la garde des Longs Murs, lui donnèrent pleine confiance. Il remit à la voile avec les exilés recueillis sur ces parages. A Héraclée, qui commandait la mer de Marmara, il fit une seconde halte, et reçut des mains d’Etienne, métropolitain de Cyzique, une couronne consacrée à la sainte Vierge, heureuses prémices de sa future royauté. Peut-être laissa-t-il en cet endroit une petite partie de ses forces, afin de tromper la vigilance de Phocas et d’opérer une sage diversion. Enfin, il aborda au port de Sainte-Sophie. La capitale était en proie à un inexprimable désordre. La faction des Verts avait mis le feu à l’un des palais impériaux ; elle célébrait ostensiblement la venue du libérateur. A la vue de l’armée d’Afrique, il y eut des attroupements tumultueux. Théophane prétend que Phocas livra bataille. Il est plus probable que, semblable à Vitellius, il se cacha dans quelque ignoble retraite, au fond de son palais. Un citoyen, dont il avait déshonoré l’épouse, l’en arracha à l’aide d’une troupe de soldats. Nicéphore, qui a peu de sympathie pour le vengeur de Maurice, lui prête dans cette circonstance une conduite cruelle qui n’aurait pour excuse que l’irritation populaire. Combien nous aimerions mieux le voir frapper ce vulgaire assassin, comme l’archange Michel perce Satan, sans colère ! D’après cette version, il aurait fait conduire à Sainte-Sophie Phocas dépouillé des vêtements impériaux, les mains liées derrière le dos. « C’est ainsi, misérable, que tu as gouverné, l’empire ? » s’écria-t-il. Phocas lui répondit sans s’émouvoir : « Et toi, gouverneras-tu mieux ?1 » Dialogue supprimé par certains chroniqueurs, légèrement modifié par d’autres. Les factions du cirque se sont-elles chargées de le mettre à mort, ou bien est-ce le vainqueur lui-même ?
Ici encore, il y a doute. Nous ne pouvons, quant à nous, admettre qu’Héraclius se soit plu à contempler ce corps naturellement hideux, mutilé et livré aux flammes par une plèbe délirante. Le sens véritable de l’événement et l’attitude d’Héraclius nous paraissent mieux observés dans ces vers de George Pisidès : « Au corrupteur des vierges, il opposa le visage terrible de la Vierge sans tache. Il tua cette bête dévorante, et ne sauva pas seulement une jeune fille enchaînée, mais le monde entier2 ».La vie de Mahomet d’après les chroniqueurs Byzantins.


Il est instructif de voir Mahomet, jugé par les chroniqueurs byzantins et le Christianisme apprécié, à son tour, par le fondateur de l’Islam;


D’après Théophane, Cédrénos et Zonaras, le prophète arabe est l’homme le plus odieux et le plus pervers qui ait paru sur la terre. Il est « athée, impie, trois fois maudit, ennemi de Dieu et des hommes. » Dans ses pérégrinations en Palestine, il fréquente les Juifs et les Chrétiens et « s’en va à la chasse des textes sacrés. » Il s’adjoint un moine pire que lui, expulsé pour ses méfaits, et il en fait son conseiller de tous les instants. Il s’insinue auprès de la riche Kadidja et s’unit à elle par spéculation. Il l’effraye de ses hallucinations diaboliques et de ses attaques d’épilepsie. Mais le démoniaque a recours à l’imposture pour la tranquilliser. « C’est, dit-il, l’apparition de l’archange Gabriel, qui le fait tomber à la renverse. » Le moine confirme la vérité de ses paroles et déclare Mahomet prophète.
Flattée d’être l’épouse d’un prophète, Kadidja débite cette invention à toutes les femmes de la contrée, et celles-ci la transmettent à leurs maris. C’est ainsi que l’Arabie se trouve un beau jour livrée à d’absurdes doctrines. Il emprunte aux Hébreux l’unité de Dieu, aux Ariens le Verbe et l’Esprit créés, aux Nestoriens l’anthropolatrie. Lui-même se fait adorer. Il prétend que la Divinité est l’auteur du bien comme du mal, et lui attribue l’oeuvre de Satan. Il divinise la Volupté, c’est-à-dire la Vénus des Gentils, et la donne pour compagne à son Allah. Il fait du Saint-Esprit je ne sais quel être subtil répandu dans les airs, de Jésus-Christ le fils du Saint-Esprit, de Marie la soeur du grand-prêtre Aaron. Lui-même procède du Saint-Esprit, dispose des clefs, du paradis ; il y est entré un jour avec soixante-dix mille hommes ; il y a vu le Christ, qui se défendait d’avoir appelé le très Haut son père. Les justes et les affranchis de Dieu et de Mahomet y ont leurs demeures préparées, mais ces derniers doivent justifier leur qualité. Il existe d’ailleurs trois paradis : l’un de miel, le second de lait, le troisième de vin. On y trouve des femmes belles et voluptueuses. Quant aux Juifs et aux Chrétiens, ils ne sont bons qu’à nourrir le feu, les Samaritains qu’à servir les bienheureux. Il institue la circoncision pour les hommes et pour les femmes, et autorise tout ce que la loi défend, sauf l’usage du vin et de la viande de porc.
Certes, il est difficile de reconnaître le Mahométisme sous ce travestissement. Mais avouons que lorsque Cédrénos s’écrie : « Est-il possible d’adopter de pareilles inepties ? » cette sévère apostrophe rejaillit sur lui-même. Tel est pourtant le Mahomet de la légende grecque, « le trois fois maudit. »

 

 

Politique d’Héraclius à l’égard des Juifs et des Perses sons le coup de l’Invasion arabe.

 


Ainsi Mahomet avait deviné d’instinct la vraie politique. Il semble toutefois qu’Héraclius aurait pu aisément mettre un frein à des desseins si démesurés et affichés avec tant de naïveté et de complaisance. L’empire d’Orient possédait, depuis Trajan, une partie de l’Arabie septentrionale, sur les frontières de la Judée et de l’Égypte. De Bosra, capitale et résidence d’un gouverneur impérial, on surveillait la péninsule. On y recrutait un grand nombre de Sarrasins que le Christianisme et l’appât du gain attachaient à la domination romaine. Il convenait de les combler de prévenances pour ne pas les rejeter du côté de l’Islamisme. On devait, en outre, avoir pour alliés les Juifs, dépouillés et persécutés par Mahomet. Leur donner asile eût été un acte plein d’adresse et d’humanité. Mais l’Empereur, poussé par l’esprit d’intolérance, s’était déjà aliéné ses sujets israélites. Il leur avait intimé l’ordre de s’éloigner de la ville sainte.2 Plût à Dieu qu’il se fût contenté de les humilier ! Il ne sut pas résister aux sollicitations des Chrétiens que le désir de la vengeance aveuglait.
Les massacres recommencèrent ; les environs de Jérusalem furent inondés de sang. A Edesse, autre centre du Judaïsme, les mêmes scènes se renouvelèrent. Sur ces entrefaites, une prédiction se répandit, à savoir que l’empire serait détruit par les nations circoncises. Ignorant d’où viendrait le fléau, le superstitieux souverain ordonna de baptiser tous les Hébreux répandus dans ses possessions. Il se concerta à ce sujet avec les rois germains, et Dagobert, à son incitation, régénéra malgré eux ces infortunés. Héraclius et Dagobert, ces deux grands princes, devenus les plagiaires de Phocas ! quel sujet d’amères réflexions ! Émigrer en Arabie, tel fut le recours désespéré des Israélites. « Ils tendaient les mains vers les Sarrasins, dit un évêque d’Arménie, ils leur firent connaître leur origine, attestée par les livres saints; » L’entraînement fut si grand que des Juifs honorèrent Mahomet du nom de Christ et délaissèrent le culte de Moïse : voilà le résultat des haines si gratuitement soulevées ! La Perse était digne, elle aussi, de la plus vive attention. Il importait que ce royaume recouvrât quelque force et quelque prestige. C’était le boulevard national de l’empire. Mais, lu encore, il y eut de fausses combinaisons et des méprises. Le parricide Siroès avait rejoint ses victimes, après un règne de sept mois (octobre 628). Il avait eu pour successeur son fils, enfant débile, dont le règne menaçait d’être orageux.


Héraclius, persuadé que Sarbar saurait se faire respecter, encouragea son ancien adversaire dans ses vues ambitieuses : « Votre roi est mort. C’est à toi de prendre le trône.Je te le donne à toi et à tes enfants après toi. Prends chez moi autant de troupes que tu voudras. »

Le Sanglier royal mit à mort son neveu et ceignit le cimeterre des Sassanides (juillet 629). Tout marcha d’abord heureusement. La reconnaissance de l’ancien persécuteur des Chrétiens ne laissait rien à désirer. Il envoyait à Edesse le produit des rapines de Chosroês, des présents d’un grand prix, enfin son propre fils, qu’il déposait dans les bras, de l’Empereur, « comme la Vierge Marie avait remis Jésus dans ceux du vieillard Siméon.8 » Mais, en même temps, il immolait les seigneurs Persans qu’il suspectait. Ses sévérités et ses cruautés abrégèrent son règne. Revêtu des insignes royaux, il passait une revue de ses troupes. Des conjurés se précipitèrent sur lui à l’improviste et l’immolèrent. Une confusion épouvantable, pareille à celle des trente tyrans, suivit cet assassinat. Il y eut plusieurs princes proclamés sur différents points de l’empire. Héraclius ne put faire entendre sa voix au milieu du tumulte. Chosroês était mort depuis quatre ans à peine, et neuf Sassanides s’étaient assis sur ce trône, objet jadis de l’envie universelle, maintenant véritable siège de douleur, comme l’appelait Pisidès.

 

 Héraclius s’enfuit avec la Croix.

 


Héraclius désespéra après la perte de Damas, comme il avait désespéré après la perte de Jérusalem.

La lâcheté, la trahison et l’apostasie étaient depuis deux années le sujet de ses pensées et de ses conversations.

La bataille d’Aïznadin lui avait enlevé ses dernières illusions. Aucun doute n’était plus possible ; le Seigneur l’abandonnait à son irrésolution originelle et favorisait manifestement ses ennemis acharnés. Ses triomphes récents sur Chosroês aggravaient encore ses défiances. Il se disait qu’il n’avait ruiné la domination persane que pour faciliter la conquête des Arabes. Aurait-il été le précurseur de Mahomet ?


Cette pensée devait le faire frémir. Des signes effrayants troublaient cet esprit superstitieux : un tremblement de terre en Palestine, dans les airs une épée dont la pointe menaçait Constantinople. « C’était, s’écriait-on partout, la domination arabe qui s’annonçait. » Durant trente jours cette vue lugubre s’offrit aux regards de l’infortuné souverain. Sous une appréhension si intense, ses facultés étaient paralysées, presque anéanties.

Quelquefois, il recherchait les causes de cette catastrophe inattendue. Il se demandait comment il avait pu démériter d’un Dieu naguère si secourable.

Alors il songeait à son mariage illégal, qui remontait à vingt années, que l’Eglise avait régularisé et consacré et qu’elle lui reprochait encore tacitement comme un crime digne des plus terribles châtiments. Son frère Théodore, irrité du mauvais accueil qu’on lui avait fait après la défaite, ne cessait de dénoncer Martina, cause unique des malheurs de la chrétienté. « Son péché est toujours devant lui », disait-il en citant les psaumes de David. Héraclius, que les liens indissolubles d’un amour à la fois servile et touchant attachaient à cette femme, eut un accès de fureur, embarqua Théodore, l’envoya à Byzance, commandant au nouveau Constantin de la dégrader publiquement et de le tenir en prison. Un effort trop violent avait brisé les ressorts délicats de cette âme byzantine.

Il réunit, dans la cathédrale d’Antioche, une assemblée où figuraient ses ministres, les ecclésiastiques et le peuple lui-même. Il exprima ses terreurs et demanda conseil. Un vieillard sortit de la foule et répondit d’une voix solennelle : « Les Romains expient aujourd’hui leur mépris de l’Evangile, leurs désordres, leurs querelles, leurs concussions, leurs violences et leurs usures ! » A ces mots, qui paraissaient inspirés par Dieu, l’Empereur courba humblement la tête, convint que sa présence était funeste à la cause du Christ et jura d’abandonner le sol qu’il profanait. Mais, avant d’exécuter ce dessein qui trahissait plus de scrupules que de craintes, il résolut d’aller chercher à Jérusalem l’instrument de la Rédemption et de ses victoires.

Était-ce pour se retremper à ce contact salutaire ? Etait-ce seulement pour le soustraire aux infidèles ? Toujours est-il que ce hardi fugitif courut au Calvaire, arracha la Sainte-Croix au patriarche Sophrone, son possesseur légitime, et traversa le Liban au milieu des populations stupéfaites.

La vue du bois précieux ne le ranima pas. Sergius n’était plus là pour le remettre sur le chemin de l’honneur. Rien ne put le retenir. Arrivé aux confins de cette province délicieuse, mais fatale, où s’était évanouies sa fortune et sa gloire, il se retourna avec émotion : « Adieu, Syrie, s’écria-t-il, adieu pour la dernière fois ! »

 

Voir aussi : La vraie croix et les expéditions d'Haraclius en Perse (article de 1953 d'Anatole Frolow)

 

 

Prise de Ctésiphon et de Jérusalem et pèlerinage d’Omar (mars 637).

 


« Peuples, entrez dans la terre sainte que Dieu vous a destinée ! » Ce verset du Coran fut bientôt dans toutes les bouches. Descendant la rive droite du Jourdain, Obéidah se hâta d’investir Jérusalem. On se rappelait que « ce berceau et ce tombeau des prophètes » avait vu, dans une nuit miraculeuse, l’apparition du prophète de Médine. Sophrone aurait dû défendre la cité sainte contre les Sarrasins, comme Sergius avait défendu Constantinople contre les Avares. Mais il n’avait ni son génie ni ses ressources. Cependant, il lutta pendant quatre mois et voulut traiter avec le calife lui-même.

Omar déféra à ses désirs. Il déclara qu’il se rendrait en Palestine. Mais c’est en pèlerin, et non en chef d’empire, qu’il se montra aux nations conquises. Il était monté sur un chameau de poil roux, qui portait un sac de dattes, un sac de blé, une outre pleine d’eau et un plat de bois. Pour tout vêtement, il avait, comme saint Jean-Baptiste, une toison déchirée et souillée. Il s’avançait, confondu dans la foule de ses sujets qui le respectaient et le vénéraient. Il rendait une justice exacte et corrigeait le luxe et la licence. Parvenu au terme de son voyage, il s’assit sur la terre dure, et accorda audience au patriarche dans cet appareil négligé ou grossier qui avait bien sa grandeur et son orgueil. Il rédigea une capitulation clémente : le souvenir de Jésus protégeait encore ses fidèles. Mais ce fut pour les Chrétiens une humiliation bien navrante que le rôle effacé qui leur était imposé au nom de l’Islam. On ne sonnerait plus les cloches ; on n’érigerait pas de croix au-dessus des églises ; on y accueillerait indistinctement les Chrétiens et les Musulmans, on se garderait bien d’attirer à l’Évangile les sectateurs du Coran. Seuls, ces derniers porteraient le turban, iraient à cheval avec des selles et seraient vraiment des hommes libres. Les Juifs seraient traités sur le même pied que leurs persécuteurs.2 Quel nouveau sujet d’amères réflexions pour Héraclius qui avait cru, en frappant les mages et les rabbins, donner au christianisme une suprématie incontestée dans tout l’univers ! Les portes s’ouvrirent devant le calife devenu le souverain des saints lieux. Il entra accompagné de Sophrone. Il décida que sur les ruines du temple de Salomon s’élèverait une mosquée. C’est la mosquée d’Omar, où l’on montre encore la roche sacrée sur laquelle Jacob reposa sa tête, et les Turcs prétendent y reconnaître l’empreinte du pied de Mahomet. L’église de la Résurrection attira la piété d’Omar. Le patriarche le conjura de dépouiller ses habits lacérés et de revêtir une tunique avant de pénétrer dans l’enceinte consacrée. Il l’obtint à grand-peine. Quand il vit le vicaire de Mahomet devant l’autel où coulait le sang du Sauveur, il ne put s’empêcher de s’écrier en langue grecque et avec des larmes amères : « Voilà l’abomination de la désolation prédite par le prophète Daniel. L’auguste pèlerin voulut discrètement s’agenouiller sur les degrés du portique de Constantin : « Si je m’abstiens de prier dans vos églises, dit-il, c’est pour que les Musulmans ne vous en dépouillent pas. » Il alla ensuite faire ses dévotions à Bethléem. Les affaires de la Syrie réglées, il revint à Médine avec la même simplicité.

La capitale du Magisme succombait en même temps que celle du Christianisme. Saïd affronta ce mystérieux Ctésiphon soigneusement évité par Héraclius. Il écrivit bientôt à Omar : « Le palais de Chosroês est à nous ; la promesse de l’apôtre de Dieu est accomplie ! » Un immense pillage commença. Les trésors des mille et une nuits tombèrent entre les mains des Arabes qui en ont enrichi leur littérature. La merveille la plus admirée fut un tapis de soie de soixante coudées carrées, qui représentait l’un de ces paradis visités quelque temps auparavant par l’armée : romaine. Il fut partagé à Médine entre les chefs de l’Islamisme. La portion d’Ali se vendit vingt mille drachmes. La tiare de Chosroês orna un instant la tête d’Omar qui la rejeta avec mépris. Le grand roi fuyait vers le Turkestan. Il y avait neuf ans qu’Héraclius était entré à Dastagerd, il y avait huit ans qu’il avait rapporté la croix à Jérusalem. Se voir remplacé par Mahomet, c’était bien « l’abomination de la désolation » pour ce nouveau Daniel.

 

source : www.mediterranee-antique.fr