[ télécharger / imprimer correspondance complète en français & anglais]

[ lire aussi la correspondance complète en Anglais - Fac simile 19 pages publié en 1939 ]

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1915

La correspondance McMahon-Hussein1

Chacun des dix lettres figure en Anglais puis en Français

La première guerre mondiale oppose à partir de 1914, notamment les Français et les Britanniques aux Allemands et aux Turcs de l'empire ottomans.

Plus au sud, dans la péninsule arabique, le Chérif de la Mecque, protecteur des lieux saint du Hedjaz a été exilé jusqu'en 1908, par les Ottomans. Menacé par la famille Saoud du Nedj , le coeur de l'Arabie, il souhaite obtenir un grand royaume arabe.

C'est l'occasion pour les britanniques, qui veulent sécuriser la route des Indes par le Canal de Suez, mais aussi l'accès au pétrole de Mossous de s'allier avec le Chérif.

La correspondance entre Sir Henry McMahon, Haut Commissaire britannique en Égypte et Hussein Ibn Ali vise à déclencher une grande révolte arabe qui puisse aider à défaire l'empire Ottoman, en échange de la promesse d'une indépendance arabe à l'issue de la victoire espérée.

Cette correspondance recèle cependant des trésors d’ambiguïté de la part des Britanniques qui excluent du territoire voué à l'indépendance les terres situées à l'ouest d'une ligne Homs, Damas, Hama et Alep, car ils ne sont pas “purement” arabes. Ils en conclueront qu'il faut exclure la Palestine du royaume arabe, certes à l'Ouest, mais surtout bien au sud de ladite ligne. Les accords Sykes-Picot, entre français et britanniques prévoient dès 1916 que la Palestine doit rester une zone internationale, ce qu'elle ne sera pourtant jamais. Le nom « Palestine » n'est d'ailleurs jamais mentionné dans la correspondance.

La langue de correspondance est ici l'arabe. Le texte anglais est donc issu d'une traduction britannique. Le langage du Chérif n'est pas toujours clair, au-delà des idées exprimées.

 

Voir aussi : ce jour là correspondance MacMahon Hussein

 

Les lettres du chérif étaient elles-mêmes écrites dans un style qui ne permettait pas une traduction facile, toutefois il y écrit clairement que la conclusion de leurs négociations « dépend uniquement de s’il acceptera ou rejettera les frontières proposées ».

La plus importante des lettres, qui a eu pour effet d’entraîner les Arabes dans la guerre aux côtés des Britanniques, est celle écrite par McMahon le 24 octobre 1915 [lettre n°4 ] On y trouve le passage clé suivant, dans lequel McMahon promet que les Britanniques « reconnaissent et soutiennent l’indépendance des Arabes » dans les régions prescrites par le Chérif Hussein :

« Les districts de Mersin et d’Alexandrette, et des portions de la Syrie s’étendant à l’ouest des districts de Damas, de Homs, de Hama et d’Alep [le Liban d’aujourd’hui] ne sont pas arabes à proprement parler, et doivent par conséquent être exclus de la délimitation proposée.

« Sous réserve de cette modification, et sans préjudice des traités que nous avons conclu avec certains chefs arabes, nous acceptons cette délimitation.

« Quant aux régions qui s’étendent à l’intérieur des frontières proposées, et dans lesquelles la Grande-Bretagne est libre d’agir sans porter atteinte aux intérêts de la France, son alliée, je suis autorisé à vous conférer les gages suivants au nom du gouvernement de la Grande-Bretagne, et en répondant comme suit à votre note :

« que, sous réserve des modifications citées ci-dessus, la Grande-Bretagne est prête à reconnaître et à faire respecter l'indépendance des Arabes dans toutes la région délimitée par les frontières que propose le chérif de La Mecque." »

 

Voir aussi le rapport fait en 1939 sur la correspondance MacMahon Hussein

(Anglais, 52 pages dont 9 pages de rapport + annexes)

 

Les Britanniques ont affirmé que cette région ne faisait pas partie du territoire de l’indépendance arabe parce que la lettre de McMahon excluait les « portions de la Syrie s’étendant à l’ouest des districts de Damas, de Homs, de Hama et d’Alep ».

Aux yeux des Britanniques, le mot « district » était un équivalent de « vilayet », et ils ont avancé que « puisque le vilayet de Damas inclut la partie de la Syrie [maintenant la Jordanie] qui s’étend à l’est du Jourdain, la partie de la Syrie [Palestine] qui se trouve à l’ouest du Jourdain était l’une des portions de territoire réservé [i.e. exclue] par l’énoncé de McMahon». Autrement dit, les Britanniques ont revendiqué que, puisque le district turc qui incluait Damas s’étendait sur l’axe nord-sud, l’exclusion britannique incluait tout le territoire à l’ouest de ce district, territoire qui comprend Israël et la Palestine d’aujourd’hui.

Pour George Antonius2 cet argument est indéfendable : « D’abord, le mot district … ne pouvait pas vouloir dire la même chose que vilayet, puisqu’il n’existait pas de telles choses que le « vilayet de Damas », le « vilayet de Homs » et le « vilayet de Hama ». Il n’y avait en Syrie qu’un seul vilayet, et Damas en était la capitale, de même que deux divisions administratives plus petites, dont Homs et Hama étaient les chefs-lieux. L’énoncé de Sir Henry McMahon n’est logique que dans la mesure où ces districts sont réellement considérés dans le vrai sens du mot district, c’est-à-dire pour désigner les régions adjacentes à ces quatre villes, et où son exemption s’applique à la région de la Syrie – en gros, de Sidon à Alexandrette – qui s’étend à l’ouest de la ligne continue formée par ces quatre villes et par les districts qui leurs sont attenants ».

Plus loin, Antonius explique que « [McMahon] fait référence aux régions qu’il souhaite exclure comme étant "dans les deux vilayets d’Alep et de Beyrouth". S’il avait eu la Palestine en tête, il aurait certainement ajouté "ainsi que le sanjak de Jérusalem". Qu’il ne l’ait pas fait semble confirmer l’hypothèse voulant que les seules portions de la Syrie qu’il proposait à l’époque de garder pour la France étaient les régions côtières de la Syrie du nord [soit le Liban d’aujourd’hui]. »

Enfin, Antonius souligne que, dans des arguments formulés par les Britanniques aux Français dans d’autres documents, les Britanniques ont mentionné ne pas pouvoir donner Israël (la Palestine) aux Français, car elle avait déjà été réservée pour un État arabe indépendant selon les délimitations suivantes :

« [La Palestine] doit [ainsi], en l’absence de tout accord contraire, nécessairement demeurer dans le territoire de l’indépendance arabe tel que proposé par le chérif de la Mecque et accepté par la Grande-Bretagne. »3

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Lettre No. 1 ( Hussein)

Translation of a letter from Sharif Husayn of Mecca to Sir Henry McMahon, His Majesty’s High Commissioner at Cairo, July 14, 1915


Whereas the whole of the Arab nation without any exception have decided in these last years to accomplish their freedom, and grasp the reins of their administration both in theory and practice;

and whereas they have found and felt that it is in the interest of the Government of Great Britain to support them and aid them in the attainment of their firm and lawful intentions (which are based upon the maintenance of the honour and dignity of their life) without any ulterior motives whatsoever unconnected with this object;

And whereas it is to their (the Arabs') interest also to prefer the assistance of the Government of Great Britain in consideration of their geographic position and economic interests, and also of the attitude of the above-mentioned Government, which is known to both nations and therefore need not be emphasized;

For these reasons the Arab nation sees fit to limit themselves, as time is short, to asking the Government of Great Britain, if it should think fit, for the approval, through her deputy or representative, of the following fundamental propositions, leaving out all things considered secondary in comparison with these, so that it may prepare all means necessary for attaining this noble purpose, until such time as it finds occasion for making the actual negotiations:-

Firstly.- England will acknowledge the independence of the Arab countries, bounded on the north by Mersina and Adana up to the 37th degree of latitude, on which degree fall Birijik, Urfa, Mardin, Midiat, Jezirat (Ibn 'Umar), Amadia, up to the border of Persia; on the east by the borders of Persia up to the Gulf of Basra; on the south by the Indian Ocean, with the exception of the position of Aden to remain as it is; on the west by the Red Sea, the Mediterranean Sea up to Mersina.

England to approve the proclamation of an Arab Khalifate of Islam.

 

Secondly.- The Arab Government of the Chérif will acknowledge that England shall have the preference in all economic enterprises in the Arab countries whenever conditions of enterprises are otherwise equal.

Thirdly.- For the security of this Arab independence and the certainty of such preference of economic enterprises, both high contracting parties will offer mutual assistance, to the best ability of their military and naval forces, to face any foreign Power which may attack either party. Peace not to be decided without agreement of both parties.

Fourthly.- If one of the parties enters into an aggressive conflict, the other party will assume a neutral attitude, and in case of such party wishing the other to join forces, both to meet and discuss the conditions.

Fifthly.- England will acknowledge the abolition of foreign privileges in the Arab countries, and will assist the Government of the Chérif in an International Convention for confirming such abolition.

Sixthly.- Articles 3 and 4 of this treaty will remain in vigour for fifteen years, and, if either wishes it to be renewed, one year's notice before lapse of treaty is to be given.

Consequently, and as the whole of the Arab nation have (praise be to God) agreed and united for the attainment, at all costs and finally, of this noble object, they beg the Government of Great Britain to answer them positively or negatively in a period of thirty days after receiving this intimation; and if this period should lapse before they receive an answer, they reserve to themselves complete freedom of action. Moreover, we (the Chérif's family) will consider ourselves free in work and deed from the bonds of our previous declaration which we made through Ali Effendi.

 

Lettre No. 1 ( Hussein)

Attendu que l'ensemble de la nation arabe sans aucune exception a pris ces dernières années la décision pour obtenir sa liberté, de saisir les rênes de sa destinée en théorie mais aussi en pratique;

et attendu qu'ils ont trouvé et senti qu’il est dans l’intérêt du gouvernement de Grande-Bretagne de les soutenir et les aider dans la réalisation de leur entreprise et leurs intentions légitimes (fondées sur le maintien de l’honneur et de la dignité de leur vie) sans autre motif extérieur ou sans rapport avec cet objet;

et attendu qu’il est également de leur (les Arabes) intérêt de préférer l'aide du gouvernement de Grande-Bretagne en considération de sa situation géographique et de ses intérêts économiques, mais aussi de l'attitude du gouvernement mentionné ci-dessus, qui est connu de l'ensemble des nations et n'a donc pas à être souligné;

Pour ces raisons, la nation arabe juge opportun de se limiter, comme le temps presse, à demander au gouvernement de Grande-Bretagne, s’il jugeait opportun d'approuver, par l'intermédiaire de délégué ou représentant, des propositions fondamentales suivantes, en laissant de côté tous les choses considérées comme secondaires par rapport à ceux-ci, de sorte qu’il puisse préparer tous les moyens nécessaires pour atteindre ce noble objectif, jusqu’au moment où se trouvera l'occasion de finaliser les négociations actuelles:

Premièrement - ,

l'Angleterre reconnaîtra l'indépendance des pays arabes, délimitée

- au nord par Mersine et Adana jusqu'au 37°degré de latitude, où se trouve Birijik, Urfa, Mardin, Midiat, Jezirat (Ibn 'Umar), Amadia, jusqu'à la frontière de la Perse;

- à l'est par les frontières de la Perse jusqu'au Golfe de Bassorah;

- au sud par l'océan Indien, à l'exception d'Aden qui doit rester tel qu'il est;

- à l'ouest par la mer Rouge, la mer Méditerranée jusqu'à Mersine.

L'Angleterre doit approuver la proclamation d'un Califat arabe de l'Islam.

Deuxièmement - Le gouvernement arabe du Chérif reconnaîtra à l'Angleterre un droit préférentiel sur toutes les entreprises économiques dans les pays arabes lorsque les conditions d'entreprises sont égales par ailleurs.

Troisième point- Pour la sécurité de cette indépendance arabe et la certitude de cette préférence des entreprises économiques, les parties contractantes se prêteront mutuellement assistance, au meilleur de la capacité de leurs forces navales et militaires, pour faire face à toute puissance étrangère qui pourraient attaquer l'une ou l'autre partie. La paix ne pourra pas être décidée sans l'accord des deux parties.

Quatrième point.- Si l'une des parties engage dans un conflit agressif, l'autre partie sera adoptera une attitude neutre, et dans le cas ou cette partie souhaiterait unir ses forces à l'autre, les parties seraient amenées à se rencontrer pour en discuter les conditions.

Cinquième point.- L'Angleterre reconnaîtra l'abolition des privilèges étrangers dans les pays arabes, et assistera le Gouvernement du Cherif lors d'une Convention internationale pour confirmer cette suppression.

Sixième et dernier point.- les points 3 et 4 de ce traité resteront en vigueur pendant quinze ans. Son renouvellement sera soumis à un préavis d'un an avant l'échéance du traité.

Par conséquent, et comme l'ensemble de la nation arabe ont (Dieu soit loué) accepté et sont unis aux fins de réaliser, à tout prix et enfin, ce noble but, ils prient le gouvernement de Grande-Bretagne d'y répondre positivement ou négativement dans un délai de trente jours après la réception de cette intimation; et si cette période doit être dépassé sans avoir reçu, ils se réservent une totale liberté d'action. En outre, nous (la famille de la Chérif) nous nous considéreront comme libre dans le travail comme dans l'action des liens de notre précédente déclaration que nous avons fait par le biais Ali Effendi.

 

Lettre No. 2 (Mc Mahon)

 

August 30, 1915

To his Highness the Chérif Hussein.

(After compliments and salutations.)

WE have the honour to thank you for your frank expressions of the sincerity of your feeling towards England.

We rejoice, moreover, that your Highness and your people are of one opinion-that Arab interests are English interests and English Arab.

To this intent 'we confirm to you the terms of Lord Kitchener's message, which reached you by the hand of Ali Effendi, and in which was stated clearly our desire for the independence of Arabia and its inhabitants, together with our approval of the Arab Khalifate when it should be proclaimed.

We declare once more that His Majesty's Government would welcome the resumption of the Khalifate by an Arab of true race.

With regard to the questions of limits and boundaries, it would appear to be premature to consume our time in discussing such details in the heat of war, and while, in many portions of them, the Turk is up to now in effective occupation; especially as we have learned, with surprise and regret, that some of the Arabs in those very parts, far from assisting us, are neglecting this their supreme opportunity and are lending their arms to the German and the Turk, to the new despoiler and the old oppressor.

Nevertheless, we are ready to send your Highness for the Holy Cities and the noble Arabs the charitable offerings of Egypt so soon as your Highness shall inform us how and where they should be delivered.

We are, moreover, arranging for this your messenger to be admitted and helped on any journey he may make to ourselves.

Friendly reassurances. Salutations! (Signed) A. H. McMAHON.

 

 

 

 

 

NOUS avons l'honneur de vous remercier pour votre franchise et votre sincérité dans l'expression de votre sentiment envers l'Angleterre.

Nous nous réjouissons, en outre, que Votre Altesse et votre peuple sont d'une opinion que les intérêts arabes sont identiques aux intérêts Britanniques.

C'est pourquoi , nous vous confirmons les termes du message de Lord Kitchener, qui vous été communiqué par la main d'Ali Effendi, et qui a dit clairement notre souhait d'une indépendance de l'Arabie et de ses habitants, ainsi que notre approbation d'un Califat arabe lorsque sa proclamation sera nécessaire.

Nous déclarons une fois encore que le Gouvernement de Sa Majesté serait prêt à accueillir la reprise du Califat par un Arabe d'origine.

En ce qui concerne les questions de limites et des frontières, il semble prématuré de consacrer du temps à discuter de ces détails dans le feu de la guerre, alors que dans plusieurs portions du territoire concerné, l'occupation par les Turcs est maintenant effective; d'autant plus que nous avons appris, avec surprise et regret, que certains des Arabes dans ces mêmes territoires , loin de nous aider, négligent cette occasion suprême et prêtent main-forte aux Allemands et aux Turcs, le nouveau spoliateur et à l'ancien oppresseur.

Néanmoins, nous sommes prêts à envoyer votre Altesse pour les villes saintes et les nobles Arabes les offrandes charitables de l’Égypte dès que votre Altesse nous dira comment et où elles doivent être livrées.

De plus, nous ferons en sorte que votre messager soit accueilli et aidé dans tous les voyages qu’il entreprendra pour vous.

Avec mon amitié renouvelée. Salutations !

Lettre No. 3 (Hussein)

 

September 9, 1915

To his Excellency the Most Exalted, the Most Eminent-the British High Commissioner in Egypt; may God grant him Success.

WITH great cheerfulness and delight I received your letter dated the 19th Shawal, 1333 (the 30th August, 1915), and have given it great consideration and regard, in spite of the impression I received from it of ambiguity and its tone of coldness and hesitation with regard to our essential point.

It is necessary to make clear to your Excellency our sincerity towards the illustrious British Empire and our confession of preference for it in all cases and matters and under all forms and circumstances. The real interests of the followers of our religion necessitate this.

 

Nevertheless, your Excellency will pardon me and permit me to say clearly that the coolness and hesitation which you have displayed in the question of the limits and boundaries by saying that the discussion of these at present is of no use and is a loss of time, and that they are still in the hands of the Government which is ruling them, etc., might be taken to infer an estrangement or something of the sort.

 

As the limits and boundaries demanded are not those of one person whom we should satisfy and with whom we should discuss them after the war is over, but our peoples have seen that the life of their new proposal is bound at least by these limits and their word is united on this.

Therefore, they have found it necessary first to discuss this point with the Power in whom they now have their confidence and trust as a final appeal, viz., the illustrious British Empire.

 

 

 

C'est avec une grande satisfaction et une grande joie que j'ai reçue votre lettre datée du 30 août 1915 et je lui ai accordé la plus grande attention et considération, en dépit de l'impression qu’elle m’a laissé d'une certain ambiguïté et d’un ton hésitant et froid en ce qui concerne notre point essentiel.

Il est nécessaire de rendre bien claires à votre Excellence la sincérité de nos sentiments à l'égard de l'illustre Empire britannique et l'affirmation de notre préférence pour lui en toute occasion et en toutes les sortes de circonstances. C'est une nécessité que nous impose l'intérêt réel des fidèles de notre religion.

Néanmoins, votre Excellence me pardonnera et me permettra de lui dire clairement que la froideur et le ton hésitant avec lesquels vous avez traité la question des limites et des frontières en disant que leur discussion n'est pour l'heure d'aucune utilité et qu'elle constitue une perte de temps, et que ces territoires sont encore aux mains du gouvernement qui les domine, etc., tout cela pourrait être interprété comme exprimant un manque d’intérêt ou quelque chose d'analogue.

 

Les limites et frontières demandées ne sont pas celle d'un particulier dont les exigences pourraient attendre la fin de la guerre, mais sont bien celles d'un peuple qui a décidé que ces frontières sont le minimum vital indispensable à sa nouvelle vie, et dont les résolutions sur ce point sont définitives.

Aussi avons-nous décidé de discuter ce point en tout premier lieu avec la puissance en qui notre peuple a maintenant confiance et qu'il considère comme son ultime recours, à savoir l'illustre Empire britannique.

 

 

Their reason for this union and confidence is mutual interest, the necessity of regulating territorial divisions and the feelings of their inhabitants, so that they may know how to base their future and life, so not to meet her (England?) or any of her Allies in opposition to their resolution which would produce a contrary issue, which God forbid.

For the object is, honourable Minister, the truth which is established on a basis which guarantees the essential sources of life in future.

Yet within these limits they have not included places inhabited by a foreign race. It is a vain show of words and titles.

May God have mercy on the Khalifate and comfort Moslems in it.

 

I am confident that your Excellency will not doubt that it is not I personally who am demanding of these limits which include only our race, but that they are all proposals of the people, who, in short, believe that they are necessary for economic life.

Is this not right, your Excellency the Minister?

In a word, your high Excellency, we are firm in our sincerity and declaring our preference for loyalty towards you, whether you are satisfied with us, as has been said, or angry.

With reference to your remark in your letter above mentioned that some of our people are still doing their utmost in promoting the interests of Turkey, your goodness (lit. "perfectness") would not permit you to make this an excuse for the tone of coldness and hesitation with regard to our demands, demands which I cannot admit that you, as a man of sound opinion, will deny to be necessary for our existence; nay, they are the essential essence of our life, material and moral.

 

Up to the present moment I am myself with all my might carrying out in my country all things in conformity with the Islamic law, all things which tend to benefit the rest of the Kingdom, and I shall continue to do so until it pleases God to order otherwise.

 

Leur raison de cette union et de cette confiance est l’intérêt mutuel, la nécessité de réguler les divisions territoriales et les sentiments de leurs habitants, afin qu’ils sachent comment fonder leur avenir et leur vie, afin de ne pas l'avoir (Angleterre?) ni aucun de ses alliées opposés à leur résolution, ce qui conduirait à une issue contraire, que Dieu nous en préserve.

Monsieur le ministre, l’objet est la vérité qui est établie sur une base qui garantit les sources essentielles de la vie future.

Pourtant, à l'intérieur de ces limites, ils n'ont pas inclus les lieux habités par une race étrangère. C'est un vain spectacle de mots et de titres.

Que Dieu ait pitié du Califat et conforte les musulmans en son sein.


Je suis convaincu que votre Excellence ne doutera pas que ce n'est pas moi personnellement qui revendique ces limites qui ne concernent que notre race, mais que ce sont toutes des propositions du peuple qui, en bref, pense qu'elles sont nécessaires à la vie économique. .

N'est-ce pas vrai, votre Excellence le ministre?

En un mot, Votre Excellence, nous sommes fermes dans notre sincérité et déclarons notre préférence pour la loyauté à votre égard, que vous soyez satisfait de nous, comme cela a été dit ou fâché.

En vous référant à votre remarque dans la lettre ci-dessus, mentionnant que certains de nos peuples font toujours tout leur possible pour promouvoir les intérêts de la Turquie, votre bonté (littéralement "perfection") ne vous permettrait pas d'en faire une excuse pour le ton froid et des hésitations vis-à-vis de nos revendications, des exigences que je ne puis admettre que, en tant qu’homme de bonne foi, vous allez nier être nécessaire à notre existence; non, ils sont l'essence essentielle de notre vie, matérielle et morale.

Jusqu'à présent, de tout mon coeur , je réalise dans mon pays tout ce qui est conforme à la loi islamique, tout ce qui peut profiter au reste du Royaume et je continuerai à le faire jusqu'à ce que cela plaise à Dieu ordonner autrement.

 

In order to reassure your Excellency I can declare that the whole country, together with those who you say are submitting themselves to Turco-German orders, are all waiting the result of these negotiations, which are dependent only on your refusal or acceptance of the question of the limits and on your declaration of safeguarding their religion first and then the rest of rights from any harm or danger.

Whatever the illustrious Government of Great Britain finds conformable to its policy on this subject, communicate it to us and specify to us the course we should follow.

In all cases it is only God's will which shall be executed, and it is God who is the real factor in everything.

Please accept my best regards and salutations.

If you choose to send a reply to this, please send it with the bearer. 29th Shawal, 1333.

 

 

 

Afin de rassurer votre Excellence, je peux déclarer que l'ensemble du pays, ainsi que ceux qui se soumettent à des ordres turco-allemands, attendent tous le résultat de ces négociations, qui ne dépendent que de votre refus ou de votre acceptation de la question. des limites et sur votre déclaration de sauvegarde de leur religion, puis le reste des droits de tout préjudice ou danger.

Tout ce que l’illustre gouvernement de la Grande-Bretagne juge conforme à sa politique en la matière, communiquez-le-nous et indiquez-nous la voie à suivre.

Dans tous les cas, seule la volonté de Dieu doit être exécutée, et c'est Dieu qui est le facteur réel de tout.

S'il vous plaît accepter mes meilleures salutations et salutations.

Si vous choisissez d’envoyer une réponse, veuillez l’envoyer au porteur. 29ème Shawal, 1333.

 

 

Lettre No. 4 (Mc Mahon)

 

October 24, 1915

I have received your letter of the 29th Shawal, 1333, with much pleasure and your expressions of friendliness and sincerity have given me the greatest satisfaction.

I regret that you should have received from my last letter the impression that I regarded the question of the limits and boundaries with coldness and hesitation; such was not the case, but it appeared to me that the time had not yet come when that question could be discussed in a conclusive manner.

I have realised, however, from your last letter that you regard this question as one of vital and urgent importance. I have, therefore, lost no time in informing the Government of Great Britain of the contents of your letter, and it is with great pleasure that I communicate to you on their behalf the following statement, which I am confident you will receive with satisfaction:-

The two districts of Mersina and Alexandretta and portions of Syria lying to the west of the districts of Damascus, Homs, Hama and Aleppo cannot be said to be purely Arab, and should be excluded from the limits demanded.

With the above modification, and without prejudice of our existing treaties with Arab chiefs, we accept those limits.

As for those regions lying within those frontiers wherein Great Britain is free to act without detriment to the interest of her ally, France, I am empowered in the name of the Government of Great Britain to give the following assurances and make the following reply to your letter:-

 

 

 

 

J'ai reçu votre lettre du 29th Shawal 1333, avec beaucoup de plaisir et l'expression de votre amitié et de sincérité m'ont beaucoup touché.

Je regrette que vous ayez eu l'impression dans ma dernière lettre que je considérais la question des limites et des frontières avec froideur et hésitation: tel n'était pas le cas mais il m'était apparu que le temps n'est pas encore venu de discuter de cette question de manière définitive.

Cependant, Je me suis rendu compte, à la lecture de votre dernière lettre, que vous considérez cette question comme urgente et d'une importance vitale. C'est la raison pour laquelle j'ai informé sans délai le gouvernement britannique du contenu de votre lettre et c'est avec grand plaisir que je vous communique en son nom, la déclaration suivante, que j'en suis sûr vous recevrez avec satisfaction.

Les deux districts de Mersine et d'Alexandretta et les parties de Syrie s'étendant à l'Ouest des districts de Damas, Homs, Hama et Alep ne peuvent pas être considérés comme étant purement arabes et seraient exclus des limites et frontières envisagées.4

Avec les modifications ci-dessus, et sans causer de tort aux traités que nous avons déjà établi avec les chefs arabes, nous acceptons ces limites et frontières.

Concernant les régions à l'intérieur de ces frontières, où la Grande-Bretagne est libre d'agir sans porter préjudice aux intérêts de son alliée, la France, je suis autorisé à vous donner au nom du gouvernement de britannique, les assurances suivantes et à fournir à votre lettre la réponse suivante.-

 

1. Subject to the above modifications, Great Britain is prepared to recognize and support the independence of the Arabs in all the regions within the limits demanded by the Chérif of Mecca.

 

2. Great Britain will guarantee the Holy Places against all external aggression and will recognise their inviolability.

3. When the situation admits, Great Britain will give to the Arabs her advice and will assist them to establish what may appear to be the most suitable forms of government in those various territories.

4. On the other hand, it is understood that the Arabs have decided to seek the advice and guidance of Great Britain only, and that such European advisers and officials as may be required for the formation of a sound form of administration will be British.

 

5. With regard to the vilayets of Bagdad and Basra, the Arabs will recognise that the established position and interests of Great Britain necessitate special administrative arrangements in order to secure these territories from foreign aggression, to promote the welfare of the local populations and to safeguard our mutual economic interests.

 

 

I am convinced that this declaration will assure you beyond all possible doubt of the sympathy of Great Britain towards the aspirations of her friends the Arabs and will result in a firm and lasting alliance, the immediate results of which will be the expulsion of the Turks from the Arab countries and the freeing of the Arab peoples from the Turkish yoke, which for so many years has pressed heavily upon them.

 

1. Concernant les modifications ci-dessus, la Grande-Bretagne est prête à reconnaître et soutenir l'indépendance des Arabes dans toutes ces régions, dans le périmètre demandé par le Chérif de la Mecque.

2. La Grande-Bretagne garantira les lieux saints contre toute agression extérieure et reconnaîtra leur caractère inviolable.

3. Quand la situation le permettra, la Grande-Bretagne donnera aux Arabes ses conseils et les assistera afin d'établir la forme de gouvernement la plus adéquate pour ces divers territoires.

4. D'un autre côté, il est bien compris que les Arabes ont décidé de rechercher avis et conseils exclusivement auprès de la Grande-Bretagne, et que les conseils ou officiels européens qui pourraient être requis pour la formation des nouvelles administrations seront nécessairement Britanniques.

 

5. En ce qui concerne les vilayets de Bagdad et de Bassorah,[la Mésopotamie ] les Arabes reconnaîtront que les positions établies et les intérêts de la Grande-Bretagne exigent des accords administratifs particuliers afin de garantir ces territoires de l'agression étrangère, de promouvoir le bien-être des populations locales et à sauvegarder nos intérêts économiques mutuels.

 

Je suis convaincu que cette déclaration vous assurera la sympathie, sans aucun doute possible de la Grande-Bretagne à l'égard des aspirations de ses amis les Arabes et se traduira par une alliance solide et durable, les résultats immédiats en seront l'expulsion des Turcs des pays arabes et la libération des peuples arabes du joug turc, qui pendant tant d'années a pesé lourdement sur eux.

 

 

I have confined myself in this letter to the more vital and important questions, and if there are any other matters dealt with in your letter which I have omitted to mention, we may discuss them at some convenient date in the future.

 

It was with very great relief and satisfaction that I heard of the safe arrival of the Holy Carpet and the accompanying offerings which, thanks to the clearness of your directions and the excellence of your arrangements, were landed without trouble or mishap in spite of the dangers and difficulties occasioned by the present sad war. May God soon bring a lasting peace and freedom to all peoples!

 

I am sending this letter by the hand of your trusted and excellent messenger, Sheikh Mohammed Ibn Arif Ibn Uraifan, and he will inform you of the various matters of interest, but of less vital importance, which I have not mentioned in this letter.

(Compliments)

(Signed) A. H. McMAHON.

 

Je me suis limité dans cette lettre aux questions les plus vitales et les plus importantes, et si vous avez omis de mentionner d’autres questions dans votre lettre, nous pourrons en discuter à une date ultérieure convenable.


C’est avec un grand soulagement et une grande satisfaction que j’ai entendu parler de l’arrivée sécurisée du Saint Tapis et des offrandes qui l’accompagnaient qui, grâce à la clarté de vos instructions et à l’excellence de vos arrangements, ont atterri sans encombre, malgré les dangers et les difficultés occasionnées par la triste guerre actuelle. Que Dieu apporte bientôt une paix et une liberté durables à tous les peuples!


J'envoie cette lettre par la main de votre excellent et fidèle messager, le cheikh Mohammed Ibn Arif Ibn Uraifan, et il vous informera des divers sujets d'intérêt, mais d'importance moins vitale, que je n'ai pas mentionnés dans cette lettre.



Lettre No. 5 (Hussein)

November 5, 1915

(In the name of God, the Merciful, the Compassionate!)

To his Excellency the most exalted and eminent Minister who is endowed with

the highest authority and soundness of opinion.

May God guide him to do His Will!

I RECEIVED with great pleasure your honoured letter, dated the 15th Zil Hijja (the 24th October, 1915), to which I beg to answer as follows:

 

1. In order to facilitate an agreement and to render a service to Islam, and at the same time to avoid all that may cause Islam troubles and hardships-seeing moreover that we have great consideration for the distinguished qualities and dispositions of the Government of Great Britain-we renounce our insistence on the inclusion of the vilayets of Mersina and Adana in the Arab Kingdom.

But the two vilayets of Aleppo and Beirut and their sea coasts are purely Arab vilayets, and there is no difference between a Moslem and a Christian Arab: they are both descendants of one forefather.

 

 

We Moslems will follow the footsteps of the Commander of the Faithful Omar ibn Khattab, and other Khalifs succeeding him, who ordained in the laws of the Moslem Faith that Moslems should treat the Christians as they treat themselves. He, Omar, declared with reference to Christians:

"They will have the same privileges and submit to the same duties as ourselves." They will thus enjoy their civic rights in as much as it accords with the general interests of the whole nation.

 

 

 

 

 

 

 

J'ai reçu avec grand plaisir votre lettre d'honneur, datée du 15 Zil Hijja (24 octobre 1915), à laquelle je vous prie de répondre comme suit:

 

1. Afin de faciliter un accord et de rendre service à l'Islam, tout en évitant tout ce qui peut causer des troubles et des épreuves à l'Islam, sachant en outre que nous accordons une grande considération aux qualités distinguées et aux dispositions du gouvernement de Grande-Bretagne, nous renonçons à insister pour que les Wilayets de Mersina et Adana soient inclus dans le royaume arabe.

Mais les deux wilayets d’Alep et de Beyrouth et leurs côtes sont des wilayets purement arabes, et il n’y a pas de différence entre un musulman et un arabe chrétien: ils sont tous deux descendants d’un même père.


Nous, musulmans, suivrons les traces du commandant des fidèles, Omar ibn Khattab, et des autres Califes qui lui ont succédé, qui ont ordonné dans les lois de la foi musulmane que les musulmans traitent les chrétiens comme ils se traitent eux-mêmes.

Lui, Omar, a déclaré à propos des chrétiens: "Ils auront les mêmes privilèges et se soumettront aux mêmes devoirs que nous." Ils jouiront ainsi de leurs droits civiques dans la mesure où cela correspond aux intérêts généraux de la nation tout entière.

 

2. As the Iraqi vilayets are parts of the pure Arab Kingdom, and were in fact the seat of its Government in the time of Ali ibn Abu Talib, and in the time of all the Khalifs who succeeded him; and as in them began the civilisation of the Arabs, and as their towns were the first towns built in Islam where the Arab power became so great; therefore they are greatly valued by all Arabs far and near, and their traditions cannot be forgotten by them.

Consequently, we cannot satisfy the Arab nations or make them submit to give us such a title to nobility.

But in order to render an accord easy, and taking into consideration the assurances mentioned in the fifth article of your letter to keep and guard our mutual interests in that country as they are one and the same, for all these reasons we might agree to leave under the British administration for a short time those districts now occupied by the British troops without the rights of either party being prejudiced thereby (especially those of the Arab nation; which interests are to it economic and vital), and against a suitable sum paid as compensation to the Arab Kingdom for the period of occupation, in order to meet the expenses which every new kingdom is bound to support; at the same time respecting your agreements with the Sheikhs of those districts, and especially those which are essential.

 

3. In your desire to hasten the movement we see not only advantages, but grounds of apprehension. The first of these grounds is the fear of the blame of the Moslems of the opposite party (as has already happened in the past), who would declare that we have revolted against Islam and ruined its forces.

The second is that, standing in the face of Turkey which is supported by all the forces of Germany, we do not know what Great Britain and her Allies would do if one of the Entente Powers were weakened and obliged to make peace.

 

 

2. Les Wilayets irakiens faisant partie du pur royaume arabe, ils étaient en fait le siège de son gouvernement à l'époque d'Ali ibn Abu Talib et de tous les Califes qui lui ont succédé ; et comme chez eux a commencé la civilisation des Arabes, et comme leurs villes ont été les premières villes construites en Islam où le pouvoir arabe est devenu si grand, ils sont très appréciés par tous les Arabes, proches et lointains, et leurs traditions ne peuvent pas être oubliés.

Par conséquent, nous ne pouvons pas satisfaire les nations arabes ou les soumettre à nous donner un tel titre à la noblesse.

Toutefois, afin de faciliter la conclusion d’un accord et compte tenu des assurances mentionnées dans le cinquième article de votre lettre, nous pourrions accepter de laisser les intérêts mutuels dans ce pays, étant donné qu’ils sont identiques, pour toutes ces raisons et laisser sous administration britannique pendant une courte période, les districts actuellement occupés par les troupes britanniques sans préjudice pour les droits de l'une ou l'autre partie (notamment ceux de la nation arabe; quels intérêts lui sont économiques et vitaux), et contre une somme appropriée versée pour indemnisation du royaume arabe pour la période d'occupation, afin de faire face aux dépenses que tout nouveau royaume est tenu de supporter; tout en respectant vos accords avec les cheikhs de ces districts, et en particulier ceux qui sont essentiels.

3. Dans votre désir de hâter le mouvement, nous ne voyons pas seulement des avantages, mais des motifs d'appréhension. Le premier de ces motifs est la peur des musulmans du parti opposé (comme cela a déjà été le cas par le passé), qui déclarerait que nous nous sommes révoltés contre l’Islam et avons ruiné ses forces.

La seconde est que, face à la Turquie qui est soutenue par toutes les forces allemandes, nous ne savons pas ce que la Grande-Bretagne et ses alliés feraient si l’une des puissances de l’entente était affaiblie et obligée de faire la paix.

 

We fear that the Arab nation will then be left alone in the face of Turkey together with her allies, but we would not at all mind if we were to face the Turks alone.

Therefore it is necessary to take these points into consideration in order to avoid a peace being concluded in which the parties concerned may decide the fate of our people as if we had taken part in the war without making good our claims to official consideration.

 

 

4. The Arab nation has a strong belief that after this war is over the Turks under German influence will direct their efforts to provoke the. Arabs and violate their rights, both material and moral, to wipe out their nobility and honour and reduce them to utter submission as they are determined to ruin them entirely. The reasons for the slowness shown in our action have already been stated.

 

5. When the Arabs know the Government of Great Britain is their ally who will not leave them to themselves at the conclusion of peace in the face of Turkey and Germany, and that she will support and will effectively defend them, then to enter the war at once will, no doubt, be in conformity with the general interest of the Arabs.

 

6. Our letter dated the 29th Shaual, 1333 (the 9th September, 1915), saves us the trouble of repeating our opinions as to articles 3 and 4 of your honoured last letter regarding administration, Government advisers and officials, especially as you have declared, exalted Minister, that you will not interfere with internal affairs.

Nous craignons que la nation arabe ne soit alors laissée seule face à la Turquie avec ses alliés, mais cela ne nous dérangerait pas du tout de faire face aux seuls Turcs.

Par conséquent, il est nécessaire de prendre ces points en considération afin d'éviter la conclusion d'une paix dans laquelle les parties concernées pourraient décider du sort de notre peuple comme si nous avions pris part à la guerre sans tenir compte de nos prétentions à une considération officielle.

 

4. La nation arabe croit fermement qu'après la fin de la guerre, les Turcs sous influence allemande orienteront leurs efforts pour provoquer les Arabes et violer leurs droits, tant matériels que moraux, d’éliminer leur noblesse et leur honneur et de les réduire à une soumission totale car ils sont déterminés à les ruiner entièrement. Les raisons de la lenteur dans notre action ont déjà été exposées.

5. Que les Arabes sachent que le gouvernement britannique est leur allié qui ne les abandonnera pas lors la conclusion de la paix avec la Turquie et l'Allemagne, et qu'il les soutiendra et les défendra efficacement, pour ensuite entrer en guerre. à la fois, sera sans doute conforme à l’intérêt général des Arabes.

 

6. Notre lettre du 29 Shaual, 1333 (9 septembre 1915), nous épargne la peine de répéter nos opinions sur les articles 3 et 4 de votre dernière lettre sur l'administration, les conseillers et les fonctionnaires du gouvernement, d'autant plus que vous avez déclaré exalté ministre, que vous n'interferez pas dans les affaires intérieures.

7. The arrival of a clear and definite answer as soon as possible to the above proposals is expected. We have done our utmost in making concessions in order to come to an agreement satisfying both parties. We know that our lot in this war will be either a success, which will guarantee to the Arabs a life becoming their past history, or destruction in the attempt to attain their objects.

 

Had it not been for the determination which I see in the Arabs for the attainment of their objects, I would have preferred to seclude myself on one of the heights of a mountain, but they, the Arabs, have insisted that I should guide the movement to this end.

May God keep you safe and victorious, as we devoutly hope and desire.

27th Zil Hijja, 1333.

 

7. Une réponse claire et définitive dans les meilleurs délais aux propositions ci-dessus est attendue. Nous avons fait de notre mieux pour faire des concessions afin de parvenir à un accord satisfaisant pour les deux parties. Nous savons que notre sort dans cette guerre sera soit un succès, ce qui garantira aux Arabes une vie correspondant à leur histoire passée, ou une destruction en tentant d’atteindre leurs objectifs.

S'il n'y avait pas eu la détermination que je vois chez les Arabes pour atteindre leurs objectifs, j'aurais préféré m'isoler sur l'une des hauteurs d'une montagne, mais eux, les Arabes, ont insisté pour que je guide le mouvement à cette fin.


Que Dieu vous garde en sécurité et victorieux, comme nous l'espérons et le désirons avec dévotion.
Le 27 Zil Hijja, 1333.

 

 

 

 

Lettre No. 6 (Mc Mahon)


Translation of a letter from McMahon to Husayn, December 14, 1915


(After customary greetings and acknowledgment of previous letter.)

I AM gratified to observe that you agree to the exclusion of the districts of Mersina and Adana from boundaries of the Arab territories.

I also note with great pleasure and satisfaction your assurances that the Arabs are determined to act in conformity with the precepts laid down by Omar Ibn Khattab and the early Khalifs, which secure the rights and privileges of all religions alike.

In stating that the Arabs are ready to recognise and respect all our treaties with Arab chiefs, it is, of course, understood that this will apply to all territories included in the Arab Kingdom, as the Government of Great Britain cannot repudiate engagements which already exist.

 

With regard to the vilayets of Aleppo and Beirut, the Government of Great Britain have fully understood and taken careful note of your observations, but, as the interests of our ally, France, are involved in them both, the question will require careful consideration and a further communication on the subject will be addressed to you in due course.

The Government of Great Britain, as I have already informed you, are ready to give all guarantees of assistance and support within their power to the Arab Kingdom, but their interests demand, as you yourself have recognised, a friendly and stable administration in the vilayet of Bagdad, and the adequate safeguarding of these interests calls for a much fuller and more detailed consideration than the present situation and the urgency of these negotiations permit.

 

 

 

 

 

 

 

 

Je suis heureux de constater que vous acceptez l'exclusion des districts de Mersina et d'Adana des frontières des territoires arabes.

Je note également avec grand plaisir et satisfaction vos assurances sur le fait que les Arabes sont déterminés à se conformer aux préceptes énoncés par Omar Ibn Khattab et les premiers Califes, qui garantissent les droits et privilèges de toutes les religions.


En déclarant que les Arabes sont prêts à reconnaître et à respecter tous nos traités avec les chefs arabes, il est bien entendu que cela s'appliquera à tous les territoires compris dans le royaume arabe, le gouvernement de la Grande-Bretagne ne pouvant répudier les engagements déjà existants. .

En ce qui concerne les Wilayets d’Alep et de Beyrouth, le Gouvernement britannique a parfaitement compris vos observations et en a pris bonne note, mais, dans l’intérêt de notre allié, la France, la question devra être examinée attentivement. une autre communication sur le sujet vous sera adressée ultérieurement.


Le gouvernement de la Grande-Bretagne, comme je vous l'ai déjà dit, est prêt à donner toutes les garanties d'assistance et de soutien possibles au Royaume arabe, mais ses intérêts exigent, comme vous l'avez vous-même reconnu, une administration amicale et stable dans le Wilayet de Bagdad, et la sauvegarde adéquate de ces intérêts appelle un examen beaucoup plus complet et détaillé que la situation actuelle et l'urgence de ces négociations ne le permettent.

 

 

We fully appreciate your desire for caution, and have no wish to urge you to hasty action, which might jeopardise the eventual success of your projects, but, in the meantime, it is most essential that you should spare no effort to attach all the Arab peoples to our united cause and urge them to afford no assistance to our enemies.

 

It is on the success of these efforts and on the more active measures which the Arabs may hereafter take in support of our cause, when the time for action comes, that the permanence and strength of our agreement must depend.

Under these circumstances I am further directed by the Government of Great Britain to inform you that you may rest assured that Great Britain has no intention of concluding any peace in terms of which the freedom of the Arab peoples from German and Turkish domination does not form an essential condition.

 

As an earnest of our intentions, and in order to aid you in your efforts in our joint cause, I am sending you by your trustworthy messenger a sum of twenty thousand pounds.

(Customary ending.)

(Signed) H. McMAHON.

 

 

 

Nous apprécions pleinement votre désir de prudence et ne souhaitons pas vous inciter à prendre des mesures hâtives, qui pourraient compromettre le succès éventuel de vos projets. Cependant, il est essentiel de ne pas ménager vos efforts pour lier tous peuples arabes à notre cause commune et les exhorter à ne fournir aucune assistance à nos ennemis.

C'est sur le succès de ces efforts et sur les mesures plus actives que les Arabes pourront prendre désormais pour soutenir notre cause, lorsque le moment d'agir sera venu, que dépendra la permanence et la force de notre accord.

Dans ces circonstances, le Gouvernement britannique me charge également de vous informer que vous pouvez être assuré que la Grande-Bretagne n’a pas l’intention de conclure une paix quelconque en vertu de laquelle la liberté des peuples arabes vis-à-vis de la domination allemande et turque ne constitue pas une condition essentielle.

Soucieux de nos intentions et afin de vous aider dans vos efforts pour notre cause commune, je vous envoie une somme de vingt mille livres par votre messager digne de confiance.


(Fin habituelle.)

(Signé) H. McMAHON.

Lettre No. 7 ( Hussein)


Translation of a letter from Husayn to McMahon, January 1, 1916


(In the name of God, the Merciful, the Compassionate!)

To his Excellency the eminent, energetic and magnanimous Minister.

WE received from the bearer your letter, dated the 9th Safar (the 14th December, 1915), with great respect and honour, and I have understood its contents, which caused me the greatest pleasure and satisfaction, as it removed that which had made me uneasy.

 

Your honour will have realised, after the arrival of Mohammed (Faroki) Chérif and his interview with you, that all our procedure up to the present was of no personal inclination or the like, which would have been wholly unintelligible, but that everything was the result of the decisions and desires of our peoples, and that we are but transmitters and executants of such decisions and desires in the position they (our people) have pressed upon us.

These truths are, in my opinion, very important and deserve your honour's special attention and consideration.

With regard to what had been stated in your honoured communication concerning El Iraq as to the matter of compensation for the period of occupation, we, in order to strengthen the confidence of Great Britain in our attitude and in our words and actions, really and veritably, and in order to give her evidence of our certainty and assurance in trusting her glorious Government, leave the determination of the amount to the perception of her wisdom and justice.

 

 

 

 

 

 

 

 

A Son Excellence le ministre éminent, énergique et magnanime.

NOUS avons reçu de votre porteur votre lettre datée du 9 Safar (14 décembre 1915) avec beaucoup de respect et d’honneur, et j’en ai compris le contenu, ce qui m’a fait grand plaisir et satisfaction, car elle a effacé ce qui m’avait inquiété.


Votre honneur aura compris, après l’arrivée de Mohammed (Faroki) Chérif et son entretien avec vous, que jusqu’à présent notre procédure n’avait aucune inclination personnelle, ce qui aurait été totalement incompréhensible, mais que tout était le résultat des décisions et des désirs de nos peuples, et que nous ne sommes que des transmetteurs et des exécutants de telles décisions et de ces désirs dans la position qu’ils (notre peuple) ont exercée sur nous.

À mon avis, ces vérités sont très importantes et méritent l'attention et la considération particulières de votre honneur.


En ce qui concerne ce qui a été dit dans votre communication honorée concernant El Iraq au sujet de la compensation pour la période d’occupation, nous, afin de renforcer la confiance de la Grande-Bretagne dans notre attitude, dans nos paroles et nos actions, réellement et véritablement et, afin de témoigner de notre certitude et de notre assurance de faire confiance à son gouvernement glorieux, nous laissons la détermination du montant à sa perception de sa sagesse et de sa justice.

 

 

As regards the northern parts and their coasts, we have already stated in our previous letter what were the utmost possible modifications, and all this was only done so to fulfill those aspirations whose attainment is desired by the will of the Blessed and Supreme God. It is this same feeling and desire which impelled us to avoid what may possibly injure the alliance of Great Britain and France and the agreement made between them during the present wars and calamities; yet we find it our duty that the eminent minister should be sure that, at the first opportunity after this war is finished, we shall ask you (what we avert our eyes from to-day) for what we now leave to France in Beirut and its coasts.

 

 

I do not find it necessary to draw your attention to the fact that our plan is of greater security to the interests and protection of the rights of Great Britain than it is to us, and will necessarily be so whatever may happen, so that Great Britain may finally see her friends in that contentment and advancement which she is endeavouring to establish for them now, especially as her Allies being neighbours to us will be the germ of difficulties and discussion with which there will be no peaceful conditions.

In addition to which the citizens of Beirut will decidedly never accept such dismemberment, and they may oblige us to undertake new measures which may exercise Great Britain, certainly not less than her present troubles, because of our belief and certainty in the reciprocity and indeed the identity of our interests, which is the only cause that caused us never to care to negotiate with any other Power but you.

Consequently, it is impossible to allow any derogation that gives France, or any other Power, a span of land in those regions.

 

 

En ce qui concerne les régions septentrionales et leurs côtes, nous avons déjà indiqué dans notre précédente lettre quelles étaient les modifications les plus importantes possibles. Tout cela n'a été fait que pour réaliser ces aspirations dont la réalisation est souhaitée par la volonté du Dieu béni et suprême. C’est ce même sentiment et ce même désir qui nous ont incités à éviter tout ce qui pourrait porter atteinte à l’alliance entre la Grande-Bretagne et la France et à l’accord conclu entre eux au cours des guerres et des calamités actuelles; Cependant, nous estimons qu'il est de notre devoir que l'éminent ministre s'assure que, dès que cette guerre sera finie, nous vous demanderons (ce que nous détournons les yeux aujourd'hui) de ce que nous laissons maintenant à la France à Beyrouth et ses côtes.


Je ne trouve pas nécessaire d'attirer votre attention sur le fait que notre plan est de renforcer la sécurité des intérêts et la protection des droits de la Grande-Bretagne par rapport à nous, et qu'il en sera forcément ainsi, quoi qu'il puisse se passer, afin que la Grande-Bretagne puisse enfin voir ses amis dans le contentement et le progrès qu’elle s’efforce de leur procurer maintenant, d’autant plus que ses alliés qui nous entourent seront le germe de difficultés et de discussions sans conditions pacifiques.

En outre, les citoyens de Beyrouth n'accepteront jamais un tel démembrement et peuvent nous obliger à prendre de nouvelles mesures susceptibles d'exercer un effet bénéfique sur la Grande-Bretagne, certainement pas moins que ses problèmes actuels, en raison de notre conviction et de notre certitude quant à la réciprocité et à la réalité. l’identité de nos intérêts, qui est la seule cause qui nous a amené à ne jamais vouloir négocier avec une autre puissance que vous.

Par conséquent, il est impossible d'autoriser une dérogation donnant à la France, ou à toute autre puissance, une étendue de terre dans ces régions.

I declare this, and I have a strong belief, which the living will inherit from the dead, in the declarations which you give in the conclusion of your honoured letter.

Therefore, the honourable and eminent Minister should believe and be sure, together with Great Britain, that we still remain firm to our resolution which Storrs learnt from us two years ago, for which we await the opportunity suitable to our situation, especially in view of that action the time of which has now come near and which destiny drives towards us with great haste and clearness, so that we and those who are of our opinion may have reasons for such action against any criticisms or responsibilities imposed upon us in future.

 

 

Your expression "we do not want to push you to any hasty action which might jeopardise the success of your aim" does not need any more explanation except what we may ask for, when necessary, such as arms, ammunition, etc.

 

 

I deem this sufficient, as I have occupied much of your Honour's time. I beg to offer you my great veneration and respect.

25th Safar, 1334.

 

 

Je le déclare et j’ai la conviction profonde que les vivants hériteront des morts dans les déclarations que vous ferez dans la conclusion de votre lettre honorée.

En conséquence, l'honorable et l'éminent ministre devrait croire et être sûr, avec la Grande-Bretagne, que nous restons fermes à notre résolution communiquée à Storrs il y a deux ans, pour laquelle nous attendons l'occasion qui convient à notre situation, notamment en ce qui concerne cette action dont le temps est maintenant proche et que le destin nous guide avec précipitation et clarté, de sorte que nous, ainsi que ceux qui sommes de notre avis, puissions avoir des raisons de le faire pour nous opposer aux critiques ou aux responsabilités qui nous seraient imposées à l'avenir.


Votre expression "nous ne voulons pas vous pousser à une action précipitée qui pourrait compromettre le succès de votre objectif" n’a plus besoin d’explications, sauf ce que nous pouvons demander, le cas échéant, comme des armes, des munitions, etc.


Je considère cela suffisant, car j'ai consacré beaucoup de temps à votre honneur. Je prie de vous offrir ma grande vénération et mon respect.
25ème Safar, 1334.

Lettre No. 8 (Mc Mahon)


Translation of a letter from McMahon to Husayn, January 25, 1916


(After customary greetings.)

WE have received with great pleasure and satisfaction your letter of the 25th Safar (the 1st January) at the hands of your trusty messenger, who has also transmitted to us your verbal messages.

We fully realise and entirely appreciate the motives which guide you in this important question, and we know well that you are acting entirely in the interests of the Arab peoples and with no thought beyond their welfare.

 

We take note of your remarks concerning the vilayet of Baghdad a", and will take the question into careful consideration when the enemy has been defeated and the time for peaceful settlement arrives.

 

As regards the northern parts, we note with satisfaction your desire to avoid anything which might possibly injure the alliance of Great Britain and France. It is, as you know, our fixed determination that nothing shall be permitted to interfere in the slightest degree with our united prosecution of this war to a victorious conclusion. Moreover, when the victory has been won, the friendship of Great Britain and France will become yet more firm and enduring, cemented by the blood of Englishmen and Frenchmen who have died side by side fighting for the cause of right and liberty.

 

In this great cause Arabia is now associated, and God grant that the result of our mutual efforts and co-operation will bind us in a lasting friendship to the mutual welfare and happiness of us all.

 

 

 

 

 

 

 

NOUS avons reçu avec grand plaisir et satisfaction votre lettre du 25 Safar (1er janvier) de la part de votre fidèle messager, qui nous a également transmis vos messages verbaux.


Nous sommes pleinement conscients et nous comprenons parfaitement les motifs qui vous guident dans cette question importante, et nous savons bien que vous agissez entièrement dans l’intérêt des peuples arabes et que vous ne pensez pas au-delà de leur bien-être.


Nous prenons note de vos remarques concernant le Wilayet de Bagdad "et prendrons attentivement en considération la question une fois que l’ennemi aura été vaincu et que le temps du règlement pacifique arrivera.


En ce qui concerne les régions septentrionales, nous notons avec satisfaction votre volonté d'éviter tout ce qui pourrait nuire à l'alliance de la Grande-Bretagne et de la France. Comme vous le savez, notre ferme détermination est de ne rien laisser interferer quel qu'en soit le degré dans nos poursuites unies contre cette guerre pour parvenir à une conclusion victorieuse. De plus, une fois la victoire remportée, l’amitié entre la Grande-Bretagne et la France deviendra encore plus ferme et durable, cimentée par le sang des Anglais et des Français morts au combat, luttant pour la cause du droit et de la liberté.


Dans cette grande cause, l’Arabie est maintenant associée et Dieu accorde que le résultat de nos efforts mutuels et de notre coopération nous unira dans une amitié durable au bien-être et au bonheur mutuels de tous.

 

We are greatly pleased to hear of the action you are taking to win all the Arabs over to our joint cause, and to dissuade them from giving any assistance to our enemies, and we leave it to your discretion to seize the most favourable moment for further and more decided measures.

 

You will doubtless inform us by the bearer of this letter of any manner in which we can assist you and your requests will always receive our immediate consideration.

 

You will have heard how El Sayed Ahmed el Chérif el Senussi has been beguiled by evil advice into hostile action, and it will be a great grief to you to know that he has been so far forgetful of the interests of the Arabs as to throw in his lot with our enemies. Misfortune has now overtaken him, and we trust that this will show him his error and lead him to peace for the sake of his poor misguided followers.

We are sending this letter by the hand of your good messenger, who will also bring to you all our news.

With salaams.

(Signed) H. McMAHON.

 

Nous sommes très heureux d’apprendre que vous prenez des mesures pour convaincre tous les Arabes de défendre notre cause commune et de les dissuader de prêter assistance à nos ennemis. Nous laissons à votre discrétion le soin de saisir le moment le plus favorable pour la suite. et des mesures plus décidées.


Le porteur de cette lettre vous informera sans aucun doute de la manière dont nous pourrons vous aider et vos demandes recevront toujours notre attention immédiate.


Vous aurez sans doute appris comment El Sayed Ahmed el Chérif el Senussi a été séduit par des conseils pervers et a agi de manière hostile. Ce sera un grand chagrin pour vous de savoir qu'il a été jusqu'à présent si oublieux des intérêts des Arabes au point de remettre son sort à nos ennemis. Le malheur l'a maintenant rattrapé et nous espérons que cela lui montrera son erreur et le conduira à la paix pour le bien de ses pauvres disciples égarés.


Nous envoyons cette lettre par la main de votre bon messager, qui vous apportera également toutes nos nouvelles.


Avec des salaams.


(Signé) H. McMAHON.

 

Lettre No. 9


Translation of a letter from Husayn to McMahon, February 18, 1916


(In the name of the Merciful, the Compassionate!)

To the most noble His Excellency the High Commissioner. May God protect Vim. (After compliments and respects.)

WE received your Excellency's letter dated 25th Rabi El Awal, and its contents filled us with the utmost pleasure and satisfaction at the attainment of the required understanding and the intimacy desired. I ask God to make easy our purposes and prosper our endeavours. Your Excellency will understand the work that is being done, and the reasons for it from the following:

 

— Firstly.-We had informed your Excellency that we had sent one of our sons to Syria to command the operations deemed necessary there.

We have received a detailed report from him stating that the tyrannies of the Government there have not left of the persons upon whom they could depend, whether of the different ranks of soldiers or of others, save only a few, and those of secondary importance;

 

and that he is awaiting the arrival of the forces announced from different places, especially from the people of the country and the surrounding Arab regions as Aleppo and the south of Mosul, whose total is calculated at not less than 100,000 by their estimate;

and he intends, if the majority of the forces mentioned are Arab, to begin the movement by them;

and, if otherwise, that is, of the Turks or others, he will observe their advance to the Canal, and when they begin to fight, his movements upon them will be different to what they expect.

 

 

 

 

 

 

Au très noble Son Excellence le Haut Commissaire. Que Dieu protège Vim. (Après compliments et respects.)

NOUS avons reçu la lettre de votre Excellence datée du 25 Rabi El Awal et son contenu nous a procuré le plus grand plaisir et la plus grande satisfaction lorsque nous avons obtenu la compréhension et l’intimité souhaitées. Je demande à Dieu de faciliter nos objectifs et de faire prospérer nos entreprises. Votre Excellence comprendra le travail accompli et les raisons qui le justifient: -

Premièrement. - Nous avions informé votre Excellence que nous avions envoyé un de nos fils en Syrie pour commander les opérations jugées nécessaires dans ce pays.

Nous avons reçu un rapport détaillé de sa part indiquant que les tyrannies du gouvernement ne s'exerçaient plus sur les personnes sur lesquelles il pouvait compter, qu’il s’agisse de rangs différents de soldats ou d’autres, sauf quelques-uns et de peu d'importance;

et qu’il attend l’arrivée des forces annoncées de différents endroits, notamment des habitants du pays et des régions arabes avoisinantes, telles qu’Alep et le sud de Mossoul, dont le total est calculé à au moins 100 000 personnes selon leur estimation;

et il a l'intention, si la majorité des forces mentionnées sont arabes, de commencer le mouvement par elles;

et, sinon, des Turcs ou des autres, il observera leur avance sur le canal et, lorsqu'ils commenceront à se battre, ses mouvements sur ceux-ci seront différents de ce à quoi ils s'attendent.

 

Secondly.—We purposed sending our eldest son to Medina with sufficient forces to strengthen his brother (who is) in Syria, and with every possibility of occupying the railway line, or carrying out such operations as circumstances may admit. This is the beginning of the principal movement, and we are satisfied in its beginning with what he had levied as guards to keep the interior of the country quiet;

they are of the people of Hejaz only, for many reasons, which it would take too long to set forth; chiefly the difficulties in the way of providing their necessities with secrecy and speed (although this precaution was not necessary) and to make it easy to bring reinforcements when needed; this is the summary of what you wished to understand. In my opinion it is sufficient, and it is to be taken as a foundation and a standard as to our actions in the face of all changes and unforeseen events which the sequence of events may show.

 

 

It remains for us to state what we need at present:

Firstly.—The amount of £50,000 in gold for the monthly pay of the troops levied, and other things the necessity of which needs no explanation. We beg you to send it with all possible haste.

Secondly.—20,000 sacks of rice, 15,000 sacks of flour, 3,000 sacks of barley, 150 sacks of coffee, 150 sacks of sugar, 5,000 rifles of the modern pattern and the necessary ammunition, and 100 boxes of the two sample cartridges (enclosed) and of Martini-Henry cartridges and "Aza," that is those of the rifles of the factory of St. Etienne in France, for the use of those two kinds of rifles of our tribes; it would not be amiss to send 500 boxes of both kinds.

Thirdly.—We think it better that the place of deposit of all these things should be Port Sudan.

 

 

Deuxièmement, nous voulions envoyer notre fils aîné à Médine avec suffisamment de forces pour renforcer son frère (qui est) en Syrie et avec toutes les possibilités d'occuper la ligne de chemin de fer ou de mener à bien de telles opérations, en fonction des circonstances. C’est le début du mouvement principal, et nous sommes satisfaits à l’origine de ce qu’il avait levé en tant que gardes pour garder l’intérieur du pays au calme;

ils appartiennent uniquement au peuple du Hedjaz, pour de nombreuses raisons qu’il faudrait trop de temps pour énoncer; principalement les difficultés rencontrées pour répondre à leurs besoins de manière secrète et rapide (même si cette précaution n’était pas nécessaire) et pour faciliter l’apport de renforts en cas de besoin; c'est le résumé de ce que vous souhaitiez comprendre. À mon avis, cela est suffisant et doit être considéré comme une base et un standard pour nos actions face à tous les changements et événements imprévus que la séquence d'événements peut indiquer.

Il nous reste à préciser ce dont nous avons besoin à présent:

Premièrement. — La somme de £ 50 000 en or pour la solde mensuelle des troupes prélevées, et autres choses dont la nécessité ne nécessite aucune explication. Nous vous prions de l'envoyer dans les plus brefs délais.

Deuxièmement, 20 000 sacs de riz, 15 000 sacs de farine, 3 000 sacs d'orge, 150 sacs de café, 150 sacs de sucre, 5 000 fusils modernes et munis des munitions nécessaires et 100 cartons des deux cartouches d'échantillons (ci-joint). et des cartouches Martini-Henry et "Aza", celles des fusils de l'usine de Saint-Étienne en France, pour l'utilisation de ces deux types de fusils de nos tribus; il ne serait pas inutile d'envoyer 500 boîtes des deux types.

Troisièmement. - Nous pensons qu'il est préférable que le lieu de dépôt de toutes ces choses soit à Port-Soudan.

Fourthly.—As the above provisions and munitions are not needed until the beginning of the movement (of which we will inform you officially), they should remain at the above place, and when we need them we will inform the Governor there of the place to which they may be conveyed, and of the intermediaries who will carry orders for receiving them.

Fifthly.—The money required should be sent at once to the Governor of Port Sudan, and a confidential agent will be sent by us to receive it, either all at once, or in two installments, according as he is able, and this (§) is the (secret) sign to be recognized for accepting the man.

Sixthly.—Our envoy who will receive the money will be sent to Port Sudan in three weeks' time, that is to say, he will be there on the 5th Jamad Awal (9th March) with a letter from us addressed to Al Khawaga Elias Effendi, saying that he (Elias) will pay him, in accordance with the letter, the rent of our properties, and the signature will be clear in our name, but we will instruct him to ask for the Governor of the place, whom you will apprise of this person's arrival. After perusal of the letter, the money should be given to him on condition that no discussion whatever is to be made with him of any question concerning us. We beg you most emphatically not to tell him anything, keeping this affair secret, and he should be treated apparently as if he were nothing out of the way.

Let it not be thought that our appointment of another man results from lack of confidence in the bearer; it is only to avoid waste of time, for we are appointing him to a task elsewhere. At the same time we beg you not to embark or send him in a steamer, or officially, the means already arranged being sufficient.

 

Quatrièmement. - Les dispositions et munitions susmentionnées n'étant nécessaires qu'au début du mouvement (dont nous vous informerons officiellement), elles devraient rester à l'endroit indiqué ci-dessus et, lorsque nous en aurons besoin, nous en informerons le gouverneur. ils peuvent être acheminés et des intermédiaires chargés d'exécuter les ordres de réception.

Cinquièmement. L’argent nécessaire devrait être envoyé immédiatement au Gouverneur de Port-Soudan, et un agent confidentiel sera envoyé par nous pour le recevoir, soit en une fois, soit en deux fois, selon ses possibilités, et ce ( §) est le signe (secret) à reconnaître pour accepter l'homme.

Sixièmement. - Notre envoyé qui recevra l'argent sera envoyé à Port-Soudan dans trois semaines, c'est-à-dire qu'il sera présent le 5 mars (Jamad Awal) avec une lettre de notre part adressée à Al Khawaga Elias Effendi, en disant qu'il (Elias) lui paiera, conformément à la lettre, le loyer de nos propriétés, et la signature sera claire en notre nom, mais nous lui demanderons de demander le gouverneur de la place, qui vous sera informé de l'arrivée de cette personne. Après avoir pris connaissance de la lettre, l'argent devrait lui être remis à condition qu'aucune discussion de quelque nature que ce soit avec lui ne soit faite. Nous vous prions très instamment de ne rien lui dire, de garder cette affaire secrète, et il devrait apparemment être traité comme s'il ne tenait à rien.
Qu'on ne pense pas que la nomination d'un autre homme résulte d'un manque de confiance en son détenteur; c'est uniquement pour éviter la perte de temps, car nous le désignons pour une tâche ailleurs. En même temps, nous vous prions de ne pas l'embarquer ni de l'envoyer dans un bateau à vapeur ou officiellement, les moyens déjà prévus étant suffisants.

 

Seventhly.--Our representative, bearer of the present letter, has been definitely instructed to ensure the arrival of this, and I think that his mission this time is finished since the condition of things is known both in general and in detail, and there is no need for sending anyone else. In case of need for sending information, it will come from us; yet as our next representative will reach you after three weeks, you may prepare instructions for him to take back. Yet let him be treated simply in appearance.

Eighthly.--Let the British Government consider this military expenditure in accordance with the books which will be furnished it, explaining how the money has been spent.

To conclude, my best and numberless salutations beyond all increase.

14 Rabi al Akhar, 1334.

 

Septièmement .-- Notre représentant, porteur de la présente lettre, a été chargé de veiller à ce que cela arrive, et je pense que sa mission est terminée cette fois, car la situation des choses est connue à la fois en général et en détail, et pas besoin d'envoyer quelqu'un d'autre. En cas de besoin d'envoyer des informations, elles viendront de nous. Cependant, comme notre prochain représentant vous contactera après trois semaines, vous pouvez lui préparer des instructions. Mais laissez-le être traité simplement en apparence.

Huitièmement.-- Laissons le gouvernement britannique considérer cette dépense militaire conformément aux livres comptables qui y seront fournis, en expliquant comment cet argent a été dépensé.

Pour conclure, mes salutations les meilleures et les plus innombrables vont au-delà de tout.
14 Rabi al Akhar, 1334.

Lettre No. 10


Translation of a letter from McMahon to Husayn, March 10, 1916


(After customary greetings.)

We have received your letter of the 14th Rabi el Akhar (the 18th February), duly delivered by your trusted messenger.

We are grateful to note the active measures which you propose to take.

We consider them the most suitable in the existing circumstances, and they have the approval of His Majesty's Government.

I am pleased to be able to inform you that His Majesty's Government have approved of meeting your requests, and that which you asked to be sent with all haste is being despatched with your messenger, who is also the bearer of this letter.

 

The remainder will be collected as quickly as possible and will be deposited at Port Sudan, where it will remain until we hear from you officially of the beginning of the movement and of the places to which they may be conveyed and the intermediaries who will carry out the orders for receiving them. The necessary instructions, as set forth in your letter, have been issued to the Governor at Port Sudan, and he will arrange everything in accordance with your wishes.

Your representative who brought your last letter has been duly facilitated in his journey to Jeizan, and every assistance has been given him in his mission, which we trust will be crowned with good results.

We have arranged that, on completion, he will be brought to Port Sudan, whence he will proceed by the safest means to join you and report the results of his work.

 

 

 

 

 

 

 

Nous avons reçu votre lettre du 14 Rabi el Akhar (18 février), dûment livrée par votre messager de confiance.
Nous sommes reconnaissants de noter les mesures actives que vous proposez de prendre.

Nous les considérons comme les plus appropriés dans les circonstances actuelles et ils ont l'approbation du gouvernement de Sa Majesté.

Je suis heureux de pouvoir vous informer que le gouvernement de Sa Majesté a accepté de répondre à vos demandes et que celui que vous avez demandé à envoyer à la hâte est expédié avec votre messager, qui est également le porteur de cette lettre.

Le reste sera collecté le plus rapidement possible et sera déposé à Port-Soudan, où il restera jusqu'à ce que nous vous entendions officiellement du début du mouvement et des lieux vers lesquels ils peuvent être acheminés et des intermédiaires qui en assureront le suivi. les ordres pour les recevoir.
Les instructions nécessaires, telles qu'énoncées dans votre lettre, ont été adressées au gouverneur de Port-Soudan, qui organisera tout conformément à vos souhaits.

Votre représentant qui a apporté votre dernière lettre a été dûment facilité dans son voyage vers Jeizan, et toute l'aide lui a été fournie dans le cadre de sa mission, qui, nous en sommes sûrs, sera couronnée de succès.

Nous avons prévu qu’il soit ensuite conduit à Port-Soudan, où il procédera par les moyens les plus sûrs pour vous rejoindre et rendre compte des résultats de ses travaux.

 

We take the opportunity, in sending this letter, to explain to you a matter which might otherwise not have been clear to you, and which might have given rise to misunderstanding.

There are various Turkish posts and small garrisons along the coasts of Arabia who are hostile to us, and who are said to be planning injury to our naval interests in the Red Sea. We may, therefore, find it necessary to take hostile measures against these posts and garrisons, but we have issued strict instructions that every care must be taken by our ships to differentiate between the hostile Turkish garrisons and the innocent Arab inhabitants, towards whom we entertain such friendly feelings.

We give you notice of this matter in case distorted and false reports may reach you of the reasons for any action which we may be obliged to take.

 

 

We have heard rumours that our mutual enemies are endeavouring to construct boats for the purpose of laying mines in the Red Sea, and of otherwise injuring our interests there, and we beg of you that you will give us early information should you receive any confirmation of such reports.

We have heard that Ibn Rashid has been selling large quantities of camels to the Turks, which are being sent up to Damascus.

We hope that you will be able to use influence with him in order that he may cease from this practice and, if he still persists, that you will be able to arrange for the Arabs who lie between him and Syria to seize the camels as they pass, a procedure which will be to our mutual advantage.

I am glad to be able to inform you that those misguided Arabs under Sayed Ahmed el Senussi, who have fallen victims to the wiles of Turkish and German intriguers, are now beginning to see the error of their ways, and are coming in to us in large numbers, asking for forgiveness and friendship.

 

 

Nous profitons de l’opportunité, en vous envoyant cette lettre, de vous expliquer une question qui, autrement, ne vous aurait pas été claire, et qui aurait pu donner lieu à un malentendu.

Divers postes et petites garnisons turcs le long des côtes de l’Arabie nous sont hostiles et on nous dit qu’ils planifient de porter atteinte à nos intérêts maritimes dans la mer Rouge. Nous pouvons donc juger nécessaire de prendre des mesures hostiles contre ces postes et ces garnisons, mais nous avons émis des instructions strictes selon lesquelles nos navires doivent faire preuve de la plus grande prudence afin de faire la différence entre les garnisons turques hostiles et les habitants arabes innocents, envers qui nous entretenons de tels sentiments amicaux.

Nous vous en avisons au cas où de fausses informations ou des rapports faussés pourraient nous parvenir et nous indiqueraient les raisons de toute mesure que nous pourrions être tenus de prendre.
Nous avons entendu des rumeurs selon lesquelles nos ennemis communs s'efforceraient de construire des bateaux dans le but de poser des mines dans la mer Rouge et de nuire de toute autre manière à nos intérêts dans cette région. Nous vous prions de bien vouloir nous informer à l'avance si vous recevez une confirmation de ces rapports.
Nous avons appris qu'Ibn Rashid vendait de grandes quantités de chameaux aux Turcs, qui sont envoyés à Damas.

Nous espérons que vous pourrez user d'influence auprès de lui pour qu'il puisse mettre fin à cette pratique et, s'il persiste encore, pour que vous puissiez faire en sorte que les Arabes situés entre lui et la Syrie s'emparent des chameaux s'ils viennent à passer, une procédure qui sera à notre avantage mutuel.

Je suis heureux de pouvoir vous informer que ces Arabes égarés dirigés par Sayed Ahmed el Senussi, qui ont succombé aux plaisirs des intrus turcs et allemands, commencent maintenant à voir l’erreur de leurs façons de faire et nous viennent à nous grand nombre, demandant pardon et amitié.

We have severely defeated the forces which these intriguers had collected against us, and the eyes of the Arabs are now becoming open to the deceit which has been practiced upon them.

The capture of Erzerum, and the defeats sustained by the Turks in the Caucasus, are having a great effect in our favour, and are greatly helping the cause for which we are both working.

We ask God to prosper your endeavors and to further the work which you have taken in hand.

In conclusion, we beg you to accept our warmest salutations and expressions of friendship.

Jamad Awwal, 1334.

(Signed) A. H. McMAHON

 

 

Nous avons sévèrement battu les forces que ces intrigants avaient rassemblées contre nous et les yeux des Arabes s’ouvrent maintenant à la tromperie qui leur a été exercée.

La capture d'Erzerum et les défaites subies par les Turcs du Caucase ont un effet considérable en notre faveur et contribuent grandement à la cause pour laquelle nous œuvrons tous les deux.
Nous demandons à Dieu de prospérer dans vos entreprises et de poursuivre le travail que vous avez entrepris.

En conclusion, nous vous prions d’accepter nos salutations les plus chaleureuses et nos expressions d’amitié.

Jamad Awwal, 1334.

(Signé) A. H. McMAHON

2Historien du nationalisme arabe, auteur du 'réveil de la nation arabe. Histoire du nationalisme arabe'.1946

3Commentaire en italique CJPMO

4 Cette phrase fera couler beaucoup d'encre, la Palestine étant située à l'ouest de cette ligne, donc exclue de l'empire Arabe pour les Anglais. La Palestine est aussi au sud de cette ligne donc à inclure dans le territoire arabe pour les Arabes.

 

***

L’action de la Grande-Bretagne dans la péninsule arabique. Novembre 1918 : bilans et perspectives

Série de trois articles publié le 01/10/2018

Par Yves Brillet , site lesclesdumoyentorient.com

Le Political Intelligence (PID) fut créé le 11 mars 1918 par le Sous-secrétaire d’Etat Lord Hardinge, soucieux de restaurer le rôle et l’autorité du Foreign Office dans le processus de formulation et d’élaboration de la politique étrangère de la Grande-Bretagne (1). Le PID, sous l’autorité de William Tyrrell fut chargé de la centralisation des informations et de la préparation des notes et rapports destinés au War Cabinet ainsi qu’à l’Eastern Committee pour les questions moyen-orientales (2). Par son travail de synthèse, le PID apporta une aide précieuse aux autorités chargées de la définition des buts de paix et de la préparation des négociations dans le cadre de la future Conférence de la Paix. Le PID fit appel à un personnel recruté au sein du service de propagande du Foreign Office, ainsi qu’à des journalistes et des universitaires. Parmi ceux-ci, l’historien Arnold Toynbee fut particulièrement chargé de l’élaboration des documents concernant la situation et la politique de la Grande-Bretagne au Moyen-Orient (3).

Le bilan de l’action et des engagements de la Grande-Bretagne au Hedjaz en novembre 1918

 

Quelques jours après l’armistice et la fin des hostilités, le Political Intelligence Department (PID) du Foreign Office publia un document rappelant les engagements pris par la Grande-Bretagne envers le Chérif Hussein, roi du Hedjaz. Le Mémoire indiquait que les relations entre Hussein et le gouvernement britannique n’avaient pas été finalisées par un traité signé entre les deux parties comme cela avait été le cas pour le Nedjd et Asir. Il indiquait en outre que les rapports entre la Grande-Bretagne et Hussein étaient rendus plus complexes par la réticence de ce dernier à respecter ses engagements (4).

Concernant les garanties générales contre la restauration du statu quo ante, le document, s’appuyant sur la teneur du télégramme du 4 février à l’intention du haut-commissaire en Egypte Wingate (5), réaffirme l’appui donné par la Grande-Bretagne et ses alliés à la cause de la libération des nations opprimées et sa détermination à se trouver aux côtés des peuples arabes dans leur combat pour l’instauration et la reconstruction d’un « monde arabe » (Arab world) uni et délivré de la violence imposée par l’administration turque. Le gouvernement britannique s’engage à respecter les engagements pris en faveur de la libération des peuples arabes.

Au sujet des lieux saints de La Mecque et de Médine, le mémoire attire l’attention sur la proclamation faite par le gouvernement dans son communiqué officiel du 29 juillet 1916 avec le concours du Foreign Office : la Grande-Bretagne s’abstenait de toute interférence en matière de religion et garantissait la sécurité des Lieux Saints. Elle s’engageait à ce que ceux-ci se trouvent placés sous le contrôle d’une autorité arabe indépendante sous la responsabilité d’Hussein à qui il incombait de prendre les mesures adéquates pour s’assurer du bon déroulement du pèlerinage annuel.
A propos des limites et frontières du futur Etat arabe, se référant au télégramme du Foreign Office du 14 avril 1915 (n° 173), le mémorandum indique que le gouvernement britannique s’était publiquement engagé à conforter l’indépendance des territoires composant la péninsule arabique dans le cadre d’un Etat arabe constitué, tout en indiquant qu’il n’était pas alors en mesure d’en définir avec précision les limites. Aden devait rester sous protectorat britannique et l’insularité de Bahreïn plaçait l’émirat au-delà des limites du futur Etat (6). S’appuyant sur la lettre de McMahon à Hussein datée du 24 octobre 1915, ainsi que sur l’ensemble de la correspondance entre Le Caire et le Chérif, il était rappelé que l’indépendance du futur Etat devait s’inscrire dans le cadre des limitations imposées par les droits des puissances alliées concernant l’administration de la Palestine, de l’Irak et de la Syrie, par les relations négociées entre la Grande-Bretagne et Hussein, ainsi que par les accords et traités existant entre la Grande-Bretagne et les gouvernements établis dans la péninsule (7).

Au sujet des relations entre la Grande-Bretagne et Hussein, suite aux instructions du Foreign Office à McMahon (télégramme du 20 octobre 1915), le mémorandum reprend l’argumentaire développé par Sir Edward Grey qui insistait sur la nécessité pour le gouvernement britannique de ne pas assumer l’exclusivité de la défense et de la représentation des intérêts arabes incarnés dans la personne d’Hussein. Afin de persuader la France d’accepter l’inclusion des villes d’Alep, de Homs, de Hama et de Damas dans le futur Etat arabe, Grey était d’avis de ne pas donner suite à la demande d’Hussein de limiter ses relations avec les puissances alliées à la seule Grande-Bretagne. Grey concluait que la politique britannique n’avait pas pour objectif d’accroitre la sphère d’influence de Londres. En conséquence, malgré les tentatives d’Hussein de faire de la Grande-Bretagne le seul allié et la seule puissance reconnue au Hedjaz, le PID estime que la relation entre Londres et le Hedjaz, au moment de la publication du Memorandum on British Commitments to King Hussein n’était pas incompatible avec les accords passés entre la Grande-Bretagne et la France. Le Foreign Office considère donc que la position privilégiée de la Grande-Bretagne en Arabie devait être consolidée dès lors que les relations avec la France n’en étaient pas affectées (8).

Suite au déclenchement de la révolte contre les Turcs, la volonté d’Hussein de se voir reconnu comme roi des Arabes avait contraint les autorités britanniques à recadrer les ambitions du Chérif. Selon l’analyse du Foreign Office rappelée dans le Memorandum on Commitments, la rupture avec Constantinople avait placé Hussein, dont la souveraineté se trouvait de fait limitée au territoire du Hedjaz, au niveau des autres chefs de la péninsule arabique. Cependant, son prestige en tant que gardien des Lieux Saints et son importance pour le mouvement arabe confirmée par les relations initiées avec le gouvernement britannique avaient contribué à faire de sa titulature un enjeu politique impliquant les principautés arabes de la péninsule. Le 29 octobre 1916, un télégramme du Chérif Abdallah, fils d’Hussein et ministre des Affaires étrangères du Gouvernement Arabe, avait informé McMahon au Caire que les notables du Hedjaz assemblés à La Mecque avaient « reconnu Sa Majesté le Grand Chérif Hussein ben Aly ‘Roi de la Nation arabe’ […]. La Nation arabe a tout lieu d’espérer que vous la reconnaitrez membre actif de la Société des Nations, et connue telle. Elle le prouvera dans l’avenir. ». Hussein devait être couronné à La Mecque le 4 novembre 1916. Le 2 novembre, McMahon avait informé le Foreign Office qu’en raison des accords et traités conclus avec les autres principautés de la péninsule, la Grande-Bretagne ne pouvait reconnaitre Hussein que comme roi (Malik) du Hedjaz. Le lendemain, Londres avait répondu que la Grande-Bretagne, ainsi que la France, ne reconnaitraient pas la proclamation d’Hussein comme roi des Arabes et le 6 novembre 1916 le Foreign Office avait donné pour instructions à Reginald Wingate d’informer Abdallah, au nom des puissances alliées, qu’elle reconnaissait l’autorité de facto d’Hussein sur le Hedjaz mais que sa prétention au titre de roi des Arabes ne pouvait que provoquer l’opposition de ses voisins et retarder le futur règlement politique des affaires de la péninsule (9).

En résumé, le PID fait remarquer que la Grande-Bretagne s’est constamment refusée à accorder à Hussein un titre incompatible avec les engagements de Londres auprès de ses rivaux. La position britannique semble dès lors satisfaisante sur le papier mais le Mémorandum souligne cependant les conséquences néfastes du coup d’Etat du 29 octobre 1916 pour les relations avec le reste de la péninsule tout en admettant qu’Hussein n’avait jamais accepté de limiter sa prorogative royale au seul Hedjaz.

Le Memorandum souligne que les relations entre Hussein et ses voisins étaient placées sous le signe de la méfiance réciproque, et que le gouvernement britannique s’était constamment efforcé de faire reconnaitre par Hussein la validité des accords passés avec les principautés de la péninsule. Le 10 décembre 1915, le Foreign Office avait donné au Haut-Commissaire en Egypte des instructions en ce sens et dans sa lettre du 13 décembre à Hussein, McMahon avait rappelé que le gouvernement de la Grande- Bretagne ne pouvait dénoncer les engagements pris (10). En août 1916, Hussein fit parvenir à Ibn Saoud une lettre dans laquelle il lui demandait son appui. L’émir du Nedjd sollicita les autorités britanniques à Bagdad qui suggérèrent à Londres d’apporter à Ibn Saoud l’assurance que le gouvernement respecterait les termes du Traité de 1915. Cox conseilla en outre d’informer officiellement Hussein des clauses du traité, ce qui fut fait le 30 octobre 1916. Face à la mauvaise volonté d’Hussein, le Foreign Office demanda à ce que le Cherif soit averti que Londres déplorait son hostilité vis-à-vis d’Ibn Saoud et des Cheikhs de Mohammerah et du Koweït et exigeait qu’il se montre plus accommodant dans son propre intérêt (11). Pour conclure, le Foreign Office considérait qu’aucun accord passé avec les différentes puissances de la péninsule n’était en contradiction avec les engagements pris envers le roi du Hedjaz (12).

Le dernier point abordé dans le Memorandum concerne la question du califat. Après avoir rappelé dans un premier temps le message de Kitchener à Abdallah daté du 31 octobre 1914 dans lequel il évoquait l’éventualité d’une restauration d’un califat arabe, le document insiste sur la mise au point effectuée par le Foreign Office le 14 avril 1915. Dans un télégramme destiné au Haut-Commissaire en Egypte, le gouvernement britannique avait fait savoir que la question du califat était du seul ressort des Musulmans, excluant ainsi toute interférence des puissances non-musulmanes. Londres indiquait cependant que le choix, par les Musulmans, de rétablir un califat arabe serait naturellement respecté par les autorités britanniques (13). Au cours de l’année 1915, Hussein avait abordé à nouveau la question. Dans une première lettre à McMahon datée du 15 juillet 1915, il avait demandé au gouvernement britannique d’approuver la proclamation d’un califat arabe (14). Au moment de son accession au trône du Hedjaz en octobre 1916, les notables de La Mecque déclarèrent qu’ils considéraient Hussein comme leur chef religieux, déclaration confirmée par Abdallah dans un télégramme au Colonel Wilson, Résident politique à Jiddah. Le 1er novembre 1916, Abdallah informa Wilson que le Cherif estimait cependant que la question du califat relevait d’une décision ultérieure du monde musulman. Dans ces circonstances, le mémoire du PID souligne l’attitude constante de Londres. Dans les instructions rédigées à l’intention de Wingate, le ministère demandait à ce que l’on informe le Cherif que dans son propre intérêt, la question du califat devait rester en suspens jusqu’à la fin du conflit. Londres soulignait qu’il était impossible pour une puissance chrétienne gouvernant des millions de Musulmans de prendre parti dans une affaire interne à l’Islam et de faire le choix de soutenir un candidat en particulier (15). Le Memorandum évoque également, sans y accorder manifestement beaucoup de crédit, une conversation entre Hussein et T. E. Lawrence le 23 juillet 1917 au cours de laquelle le Chérif expliqua qu’il préférait être Commandeur des Croyants, chef spirituel de l’Imam doté d’un pouvoir temporel limité au Hedjaz plutôt que calife.

En conclusion, le document élaboré par le Political Intelligence Department du Foreign Office souligne que le gouvernement britannique est parvenu à convaincre Hussein de la bonne volonté de Londres tout en insistant sur la nécessité de considérer que la question du califat devait rester une affaire interne à l’Islam. En évitant de s’engager, il s’agit de ne pas heurter l’opinion des Musulmans et de ménager les susceptibilités du roi du Hedjaz (16).

Notes :
(1) Eric Goldstein, Winning the Peace : British Diplomatic Strategy, Peace Planning and the Paris Peace Conference, 1916-1920, Londres 1991.
(2) Eric Goldstein, British Peace Aims and the Eastern Question : the Political Intelligence Department and the Eastern Committee, Journal of Middle Eastern Studies, vol. 23, 1987, Issue 4, pp.419-436.
(3) Michael Dockrill and David French, Strategy and Intelligence, British Policy during the First World War, Londres 1996, pp. 296.
(4) Cab 24/68. GT 6185/12, War Cabinet, Memorandum on British Commitments to King Hussein,
(5) Reginald Wingate, général en charge des opérations militaires dans le Hedjaz en 1916, il succède à McMahon au poste de Haut-Commissaire en Egypte, (1/01/1917-7/10/1919).
(6) Ibid., Lettre de McMahon à Hussein, 30 aout 1915.
(7) Ibid., Relation of Commitments under (iii) to British Desiderata. pp. 6-7.
(8) Ibid., Relation of Commitments under (v) to British Desiderata, p. 11.
(9) Ibid., Telegram n°961, Sir Henry McMahon to Foreign Office, 2nd November 1916, Telegram n°880, Foreign Office to McMahon, 3rd November 1916, Telegram 221869/16, Foreign Office to Sir R. Wingate (Khartoum),6th November 1916.
(10) Ibid. (vii) Treaties and Agreements between His Majesty’s Government and other Arab Rulers in the independent area.
(11) Foreign Office to Sirdar of Egypt, Telegram n° 24, 25th November 1916.
(12) Memorandum on British Commitments. Relation of Commitments under (vii) to British Desiderata.
(13) Ibid., (viii) The Caliphate, Foreign Office to Sir Henry McMahon, n° 173, 14th April 1915.
(14) On peut consulter la correspondance entre Hussein et McMahon dans J.C. Hurewitz, ed., The Middle East and North Africa in World Politics : A Documentary Record, vol. 2, pp. 46-56.
(15) Foreign Office to Sir Reginald Wingate, 6th November 1916.
(16) Memorandum on British Commitments to King Hussein, Relation of Commitments under (viii) to British Desiderata.

 

Le bilan de l’action et des engagements de la Grande-Bretagne en Arabie centrale (Nedjd et Asir) en novembre 1918

Le Nedjd

Un deuxième mémoire à l’usage du Cabinet intitulé British Commitments to Ibn Saud faisant la synthèse de la politique de la Grande-Bretagne envers Ibn Saoud fut publié le 16 novembre 1918. Le document porte essentiellement sur l’accord signé en décembre 1915 avec Ibn Saoud (1).

La note du Political Intelligence Department (PID) rappelle tout d’abord les points essentiels du Traité : 1-reconnaissance par la Grande-Bretagne de l’indépendance d’Ibn Saoud et de sa souveraineté sur les territoires du Nedjd, el Hasa, Qatif ainsi que sur les ports du Golfe persique, 2-soutien, à la discrétion de la Grande-Bretagne, en cas d’agression par une puissance étrangère, 3- renonciation par Ibn Saoud à l’établissement de relations avec une puissance étrangère sans l’accord de la Grande-Bretagne, 4- ainsi qu’à la vente ou cession de territoires et l’octroi de concessions à des puissances ou des intérêts étrangers, 5- obligation pour Ibn Saoud d’assurer le bon déroulement du pèlerinage annuel vers La Mecque, ainsi que la sécurité des pèlerins, contenus les différents moments de la négociation avec Ibn Saoud, 6-engagement par Ibn Saoud de ne pas intervenir dans les affaires du Koweït, de Bahreïn et du Qatar. Le septième point stipulait qu’un traité plus détaillé serait conclu ultérieurement entre Londres et Riad (2).

Faisant référence à un télégramme de l’India Office du 30 janvier 1915, le mémoire récapitule les objectifs poursuivis par les autorités britanniques au cours de l’année 1915 (3). La conclusion d’un traité avec Ibn Saoud n’était pas seulement la conséquence du conflit en cours mais était déterminée par la nécessité d’anticiper la situation créée après la fin des hostilités par la disparition du pouvoir de la Turquie dans la province de Bassora et dans le Golfe Persique. En effet, l’émir du Nedjd ne devenait pas seulement le maitre d’une grande partie de l’Arabie centrale, mais s’imposait également sur une portion non négligeable du littoral. Il devenait donc essentiel pour la Grande-Bretagne, afin de garantir le maintien de la sécurité dans le Golfe et d’y pérenniser son influence, de traiter avec Ibn Saoud. En second lieu, un accord en bonne et due forme permettait de s’assurer des services de Riad dans le cadre des opérations militaires dans la péninsule et de neutraliser son pouvoir de nuisance. Le télégramme attirait l’attention sur l’article 2 du projet d’accord portant sur la garantie apportée en cas d’agression par une puissance extérieure, soulignant que la Grande-Bretagne ne devait pas être tenue d’intervenir dans les conflits internes de la péninsule arabique.

Le PID rappelle qu’avec l’assentiment du Government of India et de l’India Office, des points importants tels que la réglementation concernant le commerce des armes, le statut des ressortissants britanniques dans les territoires relevant de l’autorité d’Ibn Saoud, les obligations de Riad concernant sa participation au maintien de l’ordre dans le Golfe ont été laissées en suspens en conformité avec l’article 7, ces éléments devant faire l’objet d’une négociation ultérieure. Pour le Foreign Office, l’accord de décembre 1915, en l’état, comporte tous les éléments constitutifs des traités signés par la Grande-Bretagne avec les Etats de la Trêve, (trucial treaty), en particulier, a) les droits et obligations de la Grande-Bretagne d’arbitrer en cas de conflit entre la seconde partie contractante et un Etat voisin également lié à la Grande-Bretagne par un semblable traité, b) la renonciation à l’entretien de relations avec des puissances étrangères sauf avec l’accord et par l’intermédiaire du gouvernement britannique, c) l’engagement de ne pas vendre, céder ou aliéner une portion de territoire sans le consentement de Londres. Le PID considère que les points essentiels b) et c) sont couverts par les articles 3 et 4 du traité de décembre 1915, tandis que a) est garanti de manière convenable par l’article 2 et la dernière clause de l’article 4 du traité. Le Memorandum estime que l’accord signé avec Ibn Saoud est globalement plus satisfaisant que les engagements moins formels pris envers Hussein.

Les analyses du PID portent également sur les conséquences induites par le traité signé avec Riad et sur les nouvelles obligations que cela implique pour l’action de la Grande-Bretagne dans la péninsule. Le Memorandum souligne que la Grande-Bretagne reconnait l’indépendance d’Ibn Saoud et son autorité sur les territoires du Nedjd, d’el Hasa et de Jubail, ainsi que sur les zones dépendantes de ces territoires qui feront ultérieurement l’objet de discussions et de démarcations. Ibn Saoud est reconnu comme le chef absolu des tribus bédouines présentes sur ces territoires. En conséquence, le document fait remarquer que même si l’accord passé avec Ibn Saoud est moins explicite que le traité signé avec al-Idrisi par lequel la Grande-Bretagne s’engage, à la cessation des hostilités, à arbitrer entre les revendications d’al-Idrisi et de l’Imam Yahya du Yémen, il n’en demeure pas moins que l’article du traité de Dhahran contraint Londres à arbitrer les litiges territoriaux et frontaliers entre Ibn Saoud et Hussein (4). Au sujet de la préservation de la paix dans la péninsule, le Foreign Office fait remarquer qu’à la différence du traité conclu avec Ibn Saoud, les accords précédemment passés avec les Etats de la Côte de la Trêve ne prévoyaient pas l’éventualité d’une intervention britannique en cas de conflit territorial. Dans le cadre de ses rapports avec Hussein, Ibn Saoud et al-Idrisi, la Grande-Bretagne, après la fin du conflit, se trouve ainsi engagée à maintenir la paix entre des puissances locales dont la prospérité ne repose pas sur le commerce maritime mais dépend de la maitrise territoriale des oasis de l’intérieur et du contrôle politique des tribus bédouines qui les peuplent. Dans cette configuration et malgré son caractère indispensable au maintien de la sécurité dans le Golfe et dans la mer Rouge, une pax britannica qui n’intégrerait pas l’impératif territorial ne pourrait que partiellement contribuer à neutraliser les conflits potentiels entre le Hedjaz, le Nedjd et l’émirat idriside et ne permettrait pas au gouvernement britannique d’intervenir efficacement.

Le PID constate que face à ces difficultés structurelles, il est malaisé de mettre en place un blocus effectif à l’encontre d’un Etat en particulier sans bloquer l’ensemble de la péninsule. Il est donc plus difficile d’exercer une pression efficace sur le Nedjd ou le Hedjaz que sur Mascate ou Shargah, d’autant plus que ces “nouveaux alliés” de la Grande-Bretagne sont plus puissants que les potentats arabes avec lesquels Londres entretenait des relations. Concernant Hussein, qui apparait comme le plus susceptible de créer des difficultés dans ses relations avec ses voisins, le Memorandum fait remarquer qu’il sera compliqué pour la Grande-Bretagne de contrôler ses actions en raison du caractère sacré de son territoire et de l’importance du pèlerinage aux yeux du monde musulman (5). En conclusion, la préservation de la paix entre les Etats rivaux de la péninsule apparait comme le problème crucial et le défi principal auquel se trouve confrontée la Grande-Bretagne. Pour le PID, malgré les mises en garde de l’India Office concernant l’article 2 du traité portant sur le soutien apporté à Ibn Saoud en cas d’agression par un autre Etat de la péninsule, les obligations de la Grande-Bretagne en cas de contestation des arbitrages territoriaux énoncées à l’article 1 de l’accord avec Ibn Saoud pouvait contraindre le gouvernement britannique à intervenir de manière active (et non plus seulement diplomatique) dans un litige opposant l’émir de Riad et le Roi du Hedjaz. Pour le PID, une clarification de la position britannique à cet égard apparait comme nécessaire (6).

Les relations entre la Grande-Bretagne et l’émirat idriside d’Asir

Le Foreign Office publia également un mémoire portant sur les relations et les engagements pris par la Grande-Bretagne envers l’émirat idriside d’Asir. Le rapport du PID rappelle qu’avant le début des hostilités, cette portion de territoire située entre le Hedjaz et le Yémen jouissait d’une indépendance de facto après l’expulsion des Turcs et l’ouverture de relations avec les autorités italiennes lors de la guerre italo-turque de 1912-1913 (7). Cette indépendance n’avait toutefois pas été reconnue par les autres puissances et les Conventions entre la Grande-Bretagne et la Turquie du 29 juillet 1913 et du 9 mars 1914 (non ratifiée), avait implicitement admis que le territoire était placé sous la souveraineté de l’Empire ottoman.

Pour les autorités britanniques sur place, l’importance stratégique de ce territoire résidait dans la présence de deux ports, Maidi et Jizan, sur le littoral de la mer Rouge. C’est pourquoi, avant même l’entrée de la Turquie en guerre aux cotés de l’Allemagne, le Résident britannique à Aden télégraphia le 11 septembre à Bombay pour suggérer de faire une offre d’amitié et de protection à l’émirat, de le soutenir dans ses revendications territoriales contre l’Imam Yahya et de reconnaitre son autorité sur les iles de Farsan. La Grande-Bretagne, en retour, obtenait le contrôle de deux ports stratégiques (8). Les propositions du Résident reçurent l’approbation du Vice-roi qui télégraphia le 1er novembre 1914 à l’India Office qu’il lui semblait souhaitable de négocier le plus rapidement possible avec le représentant d’al-Idrisi à Aden selon les lignes exposées par le Résident tout en évitant cependant de s’engager à soutenir ses revendications territoriales. La question des îles de Farsan pouvait éventuellement être évoquée. L’India Office avait anticipé le 30 octobre 1914 en informant le vice-roi que le gouvernement britannique n’était pas disposé à s’engager de façon définitive auprès al-Idrisi, mais qu’il ne lui refuserait pas ses bons offices. L’India Office demandait en outre à ce qu’il soit assuré que la Grande-Bretagne et ses alliés n’envisageaient pas d’occuper Djeddah ainsi que les Lieux Saints. Le Résident devait assurer al-Idrisi que Londres lui apporterait un soutien diplomatique dans le cadre des règlements suivant la fin des hostilités. D’accord avec le Foreign Office, l’India Office ne faisait aucune mention des îles de Farsan. La situation évolua au cours des mois de novembre et décembre en raison de l’attitude du Yémen. Le 26 décembre 1914, le Government of India télégraphia à l’India Office d’informer al-Idrisi que le gouvernement était disposé à garantir son indépendance si ce dernier rejoignait les Arabes contre les Turcs et empêchait l’utilisation de son territoire comme base d’opération contre les forces britanniques. Le 28 décembre, l’India Office informa le vice-roi qu’il acceptait de garantir l’indépendance de l’émirat (9). Après un échange de télégrammes avec le Résident à Aden, le vice-roi, à la suite de l’annexion des îles de Farsan par l’émirat idriside et le Government of India informèrent l’India Office qu’ils avaient autorisé le Résident à négocier un traité avec al-Idrisi dont les termes furent finalement approuvés le 30 avril 1915. L’accord passé avec al-Idrisi stipulait qu’il devait attaquer les Turcs au Yémen tout en s’abstenant de provoquer l’Imam ; à l’article 5, la Grande-Bretagne s’engageait à défendre l’émirat contre toute attaque ou agression extérieure par la mer, à garantir son indépendance et à user après la guerre des moyens diplomatiques à sa disposition pour arbitrer les litiges avec l’Imam ou tout autre rival. L’article 6 stipulait que Londres ne nourrissait aucune ambition territoriale dans la partie occidentale de l’Arabie et désirait l’établissement de relations amicales entre tous les Etats arabes de la péninsule ainsi qu’avec le gouvernement britannique (10).

Le PID souligne que le traité conclu avec al-Idrisi constitue un élément de généralisation du système d’accords passés avec les Etats de la Trêve et participe au renforcement de la situation de la Grande-Bretagne à Aden. S’agissant du premier point, le mémoire fait cependant remarquer que la clause portant sur les obligations réciproques des parties ne mentionne pas l’engagement pour une des parties de ne pas entretenir de relations avec une tierce puissance sans l’aval et le consentement de la Grande-Bretagne et de ne pas céder, louer ou aliéner une portion de son territoire. Le PID considère, en conformité avec la note de l’India Office au Foreign Office du 17 juin 1915 que ce point devra être abordé lors d’une négociation ultérieure qui s’assurera qu’aucun port ne pourra être cédé à une puissance étrangère (11). Le document souligne également que les relations avec l’Imam et Hussein devront être définies plus précisément et que la Grande-Bretagne devra veiller à ce que ses liens avec ces trois protagonistes soient placés sur un plan d’égalité. Il lui faudra également contrôler leurs rapports mutuels. Le PID met en garde contre les litiges territoriaux qui ne manqueront pas de survenir et avertit que le gouvernement britannique ne parviendra pas à les régler de façon satisfaisante tant qu’un traité n’aura pas été conclu sur une base contraignante avec l’Imam, que le traité avec al-Idrisi n’aura pas été complété et que les relations avec Hussein n’auront pas fait l’objet d’une clarification (12).

En conclusion, les trois memoranda pointent dans la même direction. La politique de la Grande-Bretagne dans la péninsule, doit tenir compte des traités passés avec les chefs arabes avant le déclanchement des hostilités avec la Turquie ainsi que des accords négociés pendant le conflit. Pour le Foreign Office, l’extension à l’ensemble de la péninsule du système d’accords bilatéraux sur le mode des accords signés avec les Etats de la Trêve doit permettre à la Grande-Bretagne d’instaurer un ordre permettant la coexistence des différents protagonistes, de garantir leur intégrité territoriale et d’assurer son influence dans la région dans le respect ses conventions passées avec ses alliés français et italiens (13).

 

Notes :
(1) Pour un compte-rendu détaillé des négociations, le lecteur pourra se reporter à Yves Brillet, Ibn Saoud et la Grande-Bretagne. L’accord de Dharhan de décembre 1915, Les Clés du Moyen-Orient, 2017.
(2) Cab 24/70, GT 6341, War Cabinet, Memorandum on British Commitments to Bin Saud, p.3.
(3) Ibid., India Office to Foreign Office, 11837/1385/15, 30th Jan. 1915.
(4) Ibid., Relation of Commitments to British Desiderata, (1)-Demarcation of Territories.
(5) Ibid., Relation of Commitments to British Desiderata, (2)-Keeping the Peace.
(6) Ibid.
(7) CAB 24/68. G.T. 6184, Memorandum on British Commitments to the Idrisi.
(8) Ibid., p.1
(9) Ibid., p. 2.
(10) Ibid., Appendix, Text of Treaty of April 30, 1915.
(11) Ibid., Relation of Commitments to the Idrisi to British Desiderata.
(12) Ibid.
(13) Voir à cet égard l’article 10 de la Déclaration franco-britannique du 16 mai 1916 et l’article 7 de la Déclaration anglo-italienne du 18 aout 1917.

 

Réflexions prospectives sur la mise en œuvre d’une politique arabe de la Grande-Bretagne

 

Considérations d’ordre général

Le 24 novembre 1918, le Political Intelligence Department (PID) publia un long document élaboré par Arnold Toynbee détaillant les différents engagements pris part la Grande-Bretagne dans l’Empire ottoman et dans la péninsule arabique. Intitulé Memorandum respecting the Settlement of Turkey and the Arabian Peninsula, le mémoire de Toynbee porte sur les objectifs et les modalités de l’action de la Grande-Bretagne dans les provinces arabes de l’Empire turc (Syrie, Mésopotamie, Kurdistan, Palestine), en Arabie et dans la sphère reconnue comme faisant partie de la zone d’influence britannique par les Conventions entre la Turquie et la Grande-Bretagne du 29 juillet 1913 et du 9 mars 1914 (1). La note du PID rappelle tout d’abord les cadres juridiques et diplomatiques régissant les politiques futures de la Grande-Bretagne, tout en soulignant que les traités passés avec les chefs établis sur le littoral du Golfe ne sont pas susceptibles d’être remis en cause et ne seront donc pas abordés dans le document. Le Political Intelligence Department souligne que la Grande-Bretagne est tenue par les Règlements organiques concernant le Liban du 9 juin 1861 et du 6 septembre 1864. Elle est engagée par la proclamation du Government of India du 2 novembre 1914 concernant la garantie de sécurité des Lieux saints de Médine et de La Mecque, par le traité du 30 avril avec al-Idrisi, par les échanges entre les autorités du Haut-Commissariat britannique en Egypte et le Chérif Hussein, par le traité du 26 décembre 1915 avec Ibn Saoud, par l’accord franco-britannique du 16 mai 1916 ainsi que par la déclaration conjointe franco-britannique du 9 novembre 1918 (2).

En préambule, la note du PID, se référant aux engagements généraux pris par Londres, indique en premier lieu que la Grande-Bretagne œuvre à la libération et à l’amélioration des conditions matérielles et morales des populations non-turques et qu’elle s’est engagée à protéger les Lieux saints des différentes religions (chrétienne, juive et musulmane). Ces engagements (y compris les accords passés avant 1914 avec Mokalla, Mascate, Oman et le Koweït qui conservent leur validité) concernent les provinces arabes de l’Empire ottoman ainsi que les Etats de la péninsule arabique (Ibn Saoud et al-Idrisi) à l’exclusion du Protectorat britannique d’Aden et du Protectorat de Bahreïn (3).

Les engagements pris envers Hussein stipulent que ses territoires du Hedjaz ainsi que l’ensemble de la péninsule arabique au sud de la zone B telle que définie par les accords Sykes-Picot à l’exception d’Aden, seront reconnus comme arabes et indépendants. Par cela, le PID entend que la Grande-Bretagne n’est pas tenue par l’établissement d’un Etat unitaire ou par la formation d’une fédération d’Etats, ni par la reconnaissance de la suzeraineté d’Hussein au-delà des limites du Hedjaz. Le Foreign Office rappelle que la Grande-Bretagne n’avait apporté son soutien aux revendications du Chérif que dans la mesure où il agissait non en son nom propre mais comme porte-parole des populations concernées.
En dernier, grâce aux accords passés avec Hussein, les autres chefs arabes et les puissances alliées ont permis à la Grande-Bretagne d’obtenir la reconnaissance de son statut particulier dans la péninsule (4).

 

Considérations sur les situations particulières

S’agissant des relations particulières entre la Grande-Bretagne et chacun des protagonistes concernés par la situation dans la péninsule, (Hussein non compris), le PID indique que le gouvernement a passé des traités avec les Emirats de la péninsule sur le modèle des conventions de 1820, 1839 et 1892 avec les principautés du littoral du Golfe persique. Ces accords destinés plus particulièrement à réprimer les activités liées à la piraterie, stipulent que les gouvernements locaux sont responsables du maintien de l’ordre et de la paix dans leurs domaines respectifs et qu’ils font appel à la Grande-Bretagne pour régler les litiges les opposant. La Grande-Bretagne s’engage pour sa part à arbitrer leurs querelles et à veiller au respect de ces arbitrages. Les traités définissent également la nature des relations entre les gouvernements locaux et les puissances extérieures ; les Etats s’engagent à ne pas entretenir de rapports diplomatiques avec des puissances autres que la Grande-Bretagne, à ne pas céder de portion de territoire ni accorder de concessions à des puissances ou à des ressortissants étrangers sans le consentement du gouvernement britannique. En retour, la Grande-Bretagne s’engage à protéger les gouvernements locaux contre toute attaque non provoquée par une tierce puissance.

La note du PID fait remarquer à cet égard que cette clause restreint la portée de la protection en cas d’agression à une attaque par la mer, limitation qui n’apparait pas dans le traité avec Ibn Saoud, le Foreign Office estimant qu’il s’agit là d’un point nécessitant un éclaircissement. Le mémorandum souligne également que le traité signé avec al-Idrisi apparait moins contraignant et explicite que l’accord du 26 décembre 1915 avec Ibn Saoud. Il ajoute qu’aucun engagement n’a été pris envers l’Imam Yahya au Yémen, ni envers Ibn Rashid ; ce dernier ayant reconnu l’autorité d’Hussein rend inopérant tout accord entre la Grande-Bretagne et le Djebel Shammar.

Le rapport du PID souligne ainsi l’engagement de la Grande-Bretagne de faire de l’ensemble de la péninsule, à l’exception d’Aden, un territoire « arabe » et « indépendant » (5). En clair, il considère que la Grande-Bretagne s’est engagée à expulser les Turcs de la péninsule et à maintenir le statu quo, tout en reconnaissant l’indépendance des territoires libérés par les Arabes eux-mêmes.
A propos du Hedjaz, le
PID rappelle que ce territoire est couvert par accords et engagements pris par la France, la Grande-Bretagne et l’Italie au sujet de l’indépendance de la péninsule. Le gouvernement britannique a reconnu Hussein comme roi du Hedjaz mais non sa prétention au titre de roi des Arabes (proclamation de La Mecque novembre 1916). Pour le Foreign Office donc, l’autorité d’Hussein est limitée au territoire du Hedjaz et son statut dépend des arrangements provisoires relatifs à la conduite de la guerre (6).

Les objectifs de la Grande-Bretagne dans la péninsule : généralités

Le rapport rédigé par le PID indique que la Grande-Bretagne désire le maintien des traités existants assurant la protection des intérêts politiques, économiques et stratégiques britanniques dans la région. Le règlement des questions affectant l’ensemble de la zone située entre l’Egypte et l’Inde revêt une importance particulière pour les intérêts impériaux de la Grande-Bretagne. Ce règlement doit s’effectuer sur la base de la stabilité par l’établissement de gouvernements efficaces reconnus par les populations concernées et menant des politiques compatibles avec la défense des impératifs impériaux de la Grande-Bretagne. Ces politiques devront aussi être subordonnées au maintien de bonnes relations entre le gouvernement britannique et les puissances alliées, dans le cadre des accords passés avec la France et l’Italie, tant que les intérêts vitaux de la Grande-Bretagne seront préservés. La note du PID souligne aussi que la poursuite de ces objectifs ne doit pas entrainer un accroissement des responsabilités politiques et militaires de Londres (7).

Pour le Foreign Office, l’établissement d’une fédération d’Etats constitue une question à régler par les Arabes eux-mêmes. Le PID se montre conscient des difficultés inhérentes à la mise en place d’une telle organisation et ne peut risquer une remise en cause des relations négociées avec les principautés indépendantes qui garantissent un état de paix dans une très grande partie de la péninsule arabique. La Grande-Bretagne ne pourra pas non plus admettre qu’une fédération d’Etats vienne contrarier l’extension de son système d’accords bilatéraux (trucial treaties) si cela devait s’avérer nécessaire. En dernier lieu, la note fait remarquer qu’il est souhaitable, aux yeux de Londres, que le Califat soit transféré des Turcs aux Arabes avec l’assentiment de l’opinion musulmane ; il sera à cet égard nécessaire de veiller à ce que la séparation entre les questions d’ordre politique et les affaires religieuses concernant l’ensemble du monde musulman soit effective (8).

Le second objectif britannique est de faire en sorte que les puissances extérieures interviennent le moins possible dans les affaires intérieures de la péninsule et dans les relations inter-arabes. Dans le cas où une intervention directe s’avérerait nécessaire, dans le cadre du règlement d’un litige tribal ou d’un problème de délimitation de frontières, le PID estime souhaitable, sauf en ce qui concerne la Syrie, que cette intervention soit du seul ressort de la Grande-Bretagne afin d’éviter le développement de situations de co-responsabilité. Le maintien de la paix reposant principalement sur l’existence des traités bilatéraux, un partage des responsabilités ou des compétences entre puissances extérieures pourrait inciter les chefs locaux à tirer profit de la situation en attisant les rivalités. Le Foreign Office considère que la Grande-Bretagne est le pays le mieux placé et le plus légitime pour assurer le maintien de la paix en raison de ses intérêts spécifiques dans la région. Le mémorandum fait néanmoins remarquer que la Grande-Bretagne ne revendique cependant pas de monopole dans le domaine économique. La note résume la doctrine britannique en soulignant qu’il s’agit de mettre en place une doctrine Monroe à l’échelle de l’Arabie avec certaines spécificités selon les différents gouvernements de la péninsule (9).

 

Les objectifs de la Grande-Bretagne : situations spécifiques

Dans la péninsule arabique (à l’exception du Hedjaz), il s’agira de mettre en place un système de traités garantissant l’indépendance de tous les Etats avec lesquels la Grande-Bretagne n’a pas encore conclu d’accord. La note du PID fait remarquer qu’à la différence des accords signés avant la guerre, les signataires seront des gouvernants dont la puissance repose sur l’occupation des oasis de l’intérieur et l’allégeance des tribus qui les fréquentent. Si la Grande-Bretagne se montre disposée à maintenir la paix dans l’intérieur de la péninsule, il lui faudra assumer d’être éventuellement conduite à intervenir directement dans ces territoires, non seulement en cas d’agression par une puissance extérieure, mais aussi pour faire respecter ses décisions d’arbitrage en cas de litige frontalier (10).

Pour ce qui concerne le Hedjaz, le mémoire fait part des problèmes et difficultés inhérentes au statut particulier de ce territoire. Malgré cette spécificité, le PID insiste sur la nécessité d’intégrer le Hedjaz au système d’accords bilatéraux. Le Traité proposé au Chérif devra comporter une clause de non-aliénation. A cet égard, le mémorandum se montre relativement optimiste : la liberté d’action d’Hussein se trouvera limitée par l’opinion musulmane internationale qui considère comme sacré le territoire abritant les Lieux saints. En outre, toutes les puissances, y compris la Grande-Bretagne seraient concernées. En second lieu, le statut international du Hedjaz rend caduque la clause empêchant les relations avec les puissances extérieures autres que la Grande-Bretagne. La note suggère cependant de faire en sorte que ces relations se limitent aux questions liées au pèlerinage. L’objectif de Londres, selon le PID, sera donc de conclure un traité limité avec Hussein ; le maintien de l’influence prédominante de la Grande-Bretagne reposera sur la qualité de la relation avec le Chérif (11).

 

Les principes généraux de la politique arabe de la Grande-Bretagne

Pour le PID, les problèmes principaux porteront essentiellement sur la revendication italienne en Anatolie, et française en Syrie et en Irak (Djézireh). Pour ce qui concerne les pays arabes en général, il s’agira pour la Grande-Bretagne de faire appliquer les principes généraux d’autodétermination et de libre choix de la puissance mandataire et d’obtenir l’adhésion formelle d’Hussein à ce principe. La discussion pourra alors éventuellement porter sur la reconnaissance de la qualité de Roi des Arabes. La notion de fédération devra être abordée avec prudence. La note soulève en effet la question de l’attribution des mandats. Si les populations syriennes et mésopotamiennes font appel à la Grande-Bretagne, le PID considère qu’il serait avantageux pour Londres d’établir une connexion entre la Syrie, la Mésopotamie et le Hedjaz en obtenant la nomination des fils du Chérif aux trônes de Damas et de Bagdad (12).

Le mémorandum du PID souligne que les mêmes principes de libre choix et d’autodétermination s’appliquent à la péninsule arabique et fait remarquer que les traités existants ont été négociés dans cet esprit. Il s’agira d’obtenir la reconnaissance formelle par les puissances alliées lors de la prochaine Conférence de la Paix de l’existence de ces traités et du droit exclusif de la Grande-Bretagne à conclure de futurs traités avec les émirats de la péninsule (13).

Concernant le Hedjaz, la négociation avec les puissances alliées, notamment la France devra être reprise sur la base du projet arrangement initié dans les discussions avec la France et interrompu en 1917. Il s’agira de faire accepter par le gouvernement français de limiter ses rapports avec le Hedjaz aux questions relevant du pèlerinage. La Grande-Bretagne devra en outre s’opposer aux demandes de la France concernant l’ouverture de relations économiques, particulièrement l’établissement d’une banque française à Djeddah (14).

Ces analyses du PID se matérialisèrent dans une suite de résolutions du 13 et du 20 décembre 1918 portant sur la Syrie, la Mésopotamie, le Hedjaz et l’Arabie (15). Pour ce qui concernait l’Arabie, la résolution stipulait qu’il était souhaitable que la position spéciale de la Grande-Bretagne soit avalisée par les puissances sur la base de la reconnaissance acceptée par la France dans les correspondances et négociations tenues en 1916 et 1917. La Grande-Bretagne reconnaissait s’être engagée à ce que les Lieux saints demeurent sous la garde d’un Etat musulman indépendant. La souveraineté et l’indépendance du roi du Hedjaz devait être aussi complète que possible, les puissances alliées, y compris la Grande-Bretagne, s’engageant à ne pas tenter de contrôler les relations extérieures du royaume et à ne pas intervenir dans ses affaires intérieures. La résolution indiquait que les représentants au Hedjaz des puissances étrangères ne devaient pas jouir du statut diplomatique et devaient limiter leur action aux questions relevant de la bonne organisation du pèlerinage. En dernier lieu, le War Cabinet indiquait que la prise en charge financière du Hedjaz devrait incomber aux Etats arabes de Mésopotamie et de Syrie.

 

Les réactions de l’India Office aux notes du Political Intelligence Department

Les analyses du PID firent l’objet d’une vive réaction de la part de l’India Office. Dans une note rédigée le 30 novembre 1918, Hirtzel, Assistant Under Secretary of State et l’un des principaux responsables de l’élaboration de la politique moyen-orientale du ministère, critiqua l’accent mis sur la nécessité d’élargir et de renforcer le système de relations bilatérales qui devait permettre de conforter l’influence britannique dans la péninsule (16). Pour Hirtzel, la Grande-Bretagne ne doit pas être rendue responsable du maintien de l’ordre intérieur. Il considère en second lieu que le PID exagère l’importance et la portée des traités bilatéraux qui ne concernent qu’une partie limitée du territoire de l’Arabie. Ceux-ci s’appliquent en effet essentiellement aux principautés maritimes.

L’India Office critique les positions exprimées par le PID dans la mesure où il s’agit d’une remise en cause de la politique traditionnelle de la Grande-Bretagne dans la région. Les traités passés avec les principautés du littoral avaient principalement pour objet la suppression de la piraterie. Avant la guerre, le gouvernement britannique s’était prononcé contre toute intervention ou ingérence dans les affaires intérieures de la péninsule. Le changement d’attitude vis-à-vis d’Ibn Saoud était dû au fait que la prise de la province de Hasa avait fait du Nedjd un Etat riverain du Golfe.

Hirtzel insiste sur le fait que les interventions dans l’intérieur de la péninsule sont inexécutables et que la seule option envisageable pour contraindre un élément récalcitrant est la mise en place d’un blocus. Cette solution lui parait cependant impraticable : on ne peut bloquer le Hedjaz sans s’attirer l’hostilité du monde musulman, le blocus du Yémen et de l’Asir entrainerait l’opposition de la France et de l’Italie ; le Koweït rendrait inopérant un embargo sur le littoral arabe du Golfe persique.

Pour l’India Office, il est donc nécessaire de limiter autant que possible les engagements impliquant une intervention de la Grande-Bretagne. A cet égard, Hirtzel réfute l’argumentaire du PID concernant la portée du traité passé avec Ibn Saoud, notamment l’article 2 concernant l’aide à apporter à Riad en cas d’agression par une puissance extérieure. Il n’y a donc pas lieu, pour l’India Office, de souscrire de nouvelles obligations dans la péninsule. Hirtzel souligne que les tribus ont toujours été en conflit les unes contre les autres et que la situation ne devenait préoccupante que lorsque les disputes étaient instrumentalisées par la Turquie ; l’effondrement de l’Empire ottoman entraine la disparition de cette menace. Pour l’India Office, les obligations de la Grande-Bretagne devront se limiter à s’assurer que la France ou l’Italie ne viennent pas remplacer la Turquie comme facteur de trouble et d’instabilité dans la région et qu’elles reconnaissent ses intérêts spécifiques dans la région. Elle devra aussi mettre en place des mesures efficaces pour contrôler les trafics d’armes et veiller au bon déroulement du pèlerinage.

L’India Office critique essentiellement l’extension du système de traités bilatéraux entre la Grande-Bretagne et les principautés de la péninsule. Pour Hirtzel, faire de la Grande-Bretagne le garant de la paix dans la péninsule est proprement impensable.

 

Conclusion

Le débat brièvement évoqué entre l’India Office et le PID délimite le choix des stratégies possibles et des moyens à mettre en œuvre pour instituer la politique de la Grande-Bretagne dans la région. Les préférences du PID pour l’établissement d’un système de traités appliqué à l’ensemble de la péninsule rencontrent les réticences de l’India Office. Ces réticences portent d’une part sur la faisabilité d’une telle politique et constituent d’autre part une réflexion sur la nature et la portée des responsabilités futures de la Grande-Bretagne. Elles reflètent aussi un débat initié dès 1916-1917 sur la répartition des compétences entre le Foreign Office et l’India Office dans le règlement de deux problèmes principaux auxquels seront confrontées les autorités britanniques : la gestion de la rivalité entre Hussein et Ibn Saoud et la négociation avec la France et l’Italie sur la reconnaissance des intérêts britanniques dans le cadre de la Conférence de la Paix.

Notes :
(1) CAB 24/72, G.T. 6505, Memorandum Respecting the Settlement of Turkey and the Arabian Peninsula, 24 November 1918.
(2) Ibid. Part 1, Sect. 2, General Commitments.
(3) Ibid. Part 1, Sect. 2, 4.
(4) Ibid.
(5) Ibid., Part 1, Sect. 3, Commitments in the different Arab countries, Arabian Peninsula (excluding the Hejaz).
(6) Ibid., Part 1, Sect. 3, Commitments in the different Arab countries, the Hedjaz.
(7) Ibid., Part 2, Sect. 1, Desiderata, General.
(8) Ibid.
(9) Ibid.
(10) Ibid., Part 2, Sect. 2, Desiderata in different Areas.
(11) Ibid., Part 2, Sect. 2, The Hejaz.
(12) Ibid., Part 3, Policy, General Lines.
(13) Ibid., Part3, Policy, Details
(14) Ibid., Part 3, The Hejaz. Pour le texte du Projet d’Arrangement du 3 octobre 1917, voir John Fisher, Curzon and British Imperialism in the Middle East, 1916-1919, London 1999, 341 pp., Appendix 6, 317-318.
(15) CAB 24/72, GT 6508, Imperial War Committee, Resolution on Syria ; GT 6510, Imperial War Committee, General Resolution regarding the territories of the Middle East ; GT 6511, Imperial War Committee, Resolutions on Mesopotamia, Mosul, Bagdad and Basra ; GT 6521, Imperial War Committee, Resolutions as to the Hejaz and Arabia.
(16) Settlement of Turkey and Arabian Peninsula. Note by India Office on Foreign Office Memorandum. 30 November 1918, IOR/L/PS/18/B 298

 

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