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A environ 12 kilomètres au sud de Jérusalem, sur une hauteur en forme de cône tronqué de 758 mètres d'altitude, se dresse Hérodion, le palais-forteresse construit par le roi Hérode. Surplombant, à l'est, le désert de Judée et les monts de Moab, et à l'ouest, les collines de Judée, il offre une vue impressionnante.

Hérodion est minutieusement décrit par Flavius Josèphe, l'historien juif du Ier siècle :

Cette forteresse, située à une soixantaine de stades de Jérusalem, est naturellement forte et convient tout à fait à une telle construction, car on trouve non loin une colline, élevée à une grande hauteur par la main de l'homme et façonnée comme une mamelle. Dans l'intervalle, se dressent des tours rondes, et il y a aussi une pente abrupte constituée de deux cents marches de pierre taillée. A l'intérieur se trouvent de somptueux appartements royaux conçus à la fois dans un souci de sécurité et d'esthétique. Au bas de la colline, s'étendent des parcs qui méritent d'être visités, entre autres, pour voir comment l'eau, qui manque sur place, est acheminée à grands frais sur une grande distance. La plaine environnante fut construite comme une véritable ville, la colline servant d'acropole aux autres habitations.
(Guerre I, 31, 10 ; Antiquités XIV, 323-325)

Selon Flavius Josèphe, Hérodion fut construit à l'endroit où Hérode remporta une victoire sur ses ennemis asmonéens et parthes en 40 avant l'ère chrétienne (Antiquités XIV, 352-360). Pour commémorer l'événement, le roi y bâtit une forteresse et un palais auxquels il donna son nom. Il fit également construire, dans la plaine, au pied de la colline, un centre administratif pour la région, qui n'avait pas encore été peuplée. A Hérodion, il érigea aussi une tombe royale pour lui-même. Josèphe décrit (Guerre I, 33, 8 ; Antiquités XVII, 196-199) le cortège funéraire et l'enterrement du roi.

Hérodion, ainsi que Machéronte (dans l'actuel royaume hachémite de Jordanie) et Massada près de la mer Morte, furent les trois dernières places fortes détenues par les combattants juifs après la destruction de Jérusalem en 70 de l'ère chrétienne. Hérodion fut conquis et détruit par les Romains en 71 (Guerre VII, 6, 1).

Le site fut identifié au XIXe siècle ; son nom arabe, Jabal Fureidis, correspond probablement à une corruption de l'ancien nom, Herodis (mentionné dans les lettres de Bar Kochba). Les vestiges du palais-forteresse, au sommet de la colline, ont fait l'objet de plusieurs fouilles depuis le début des années 1960. Les fouilles des édifices situés au pied de la colline ont été menées par intermittence depuis 1972 et jusqu'à nos jours.

Hérodion comprenait deux secteurs séparés, remplissant chacun une fonction distincte : une forteresse circulaire, incluant un palais travaillé, entouré d'un mur flanqué de tours au sommet de la colline ; le bas Hérodion, dans la plaine située au nord, constitué par un groupe de constructions royales s'ordonnant autour d'un grand bassin.

 

Le Palais-Forteresse

L'association d'une forteresse et d'un palais constitue une remarquable innovation hérodienne qu'il fit reproduire dans divers autres endroits, notamment Massada. A Hérodion, un palais-forteresse circulaire fut construit au sommet d'une colline qui s'élève à 60 mètres au-dessus des environs. Les fortifications consistent en deux murailles concentriques séparées par un espace de 2,5 mètres. Les murs extérieurs mesurent 62 mètres de diamètre. A l'origine, la fortification se dressait à 30 mètres de hauteur, sur sept étages. Deux de ces étages étaient des fondations souterraines, renforcées par des plafonds à voûtes en berceau, et la superstructure des cinq étages s'élevait considérablement plus haut que la cour du palais. Des plafonds de bois séparaient les étages utilisés pour l'entreposage et l'hébergement des soldats et des serviteurs. Sur les quatre côtés, d'immenses tours avançaient en saillie dans les murs. La tour orientée à l'est - la plus importante - ronde et massive, reposait sur une solide base de pierre et mesurait 18 mètres de diamètre. Elle possédait plusieurs étages supérieurs aménagés en pièces probablement destinées à l'entourage royal. Cette tour orientée à l'est dominait la forteresse tout entière, son toit commandant une vue panoramique ; elle servait aussi de cachette en cas de danger.

Les trois autres tours, semi-circulaires, mesuraient 16 mètres de diamètre et leurs étages supérieurs servaient d'entrepôts et de quartiers d'habitation. Après la construction de la fortification autour de la colline, un rempart de terre d'une hauteur considérable fut dressé contre les fondations extérieures de la fortification, élevant artificiellement la colline et lui conférant sa forme conique. On atteignait la porte d'entrée de la forteresse, située au nord-est, par un escalier raide et étroit montant dans un couloir construit dans le rempart de terre.

Sous la forteresse, des citernes remplies d'eau de pluie acheminée par le haut, assuraient l'approvisionnement en eau. De plus, trois citernes particulièrement grandes, étaient taillées dans la pente à l'extérieur de la forteresse (près de l'entrée de l'escalier) et l'eau de pluie y était amenée depuis le flanc de la colline. L'eau était puisée dans ces citernes par des serviteurs qui la transportaient dans celle du sommet de la colline qu'on gardait probablement toujours remplie.

De dimensions modestes, le palais privé d'Hérode occupait le centre de la place forte. Superbement aménagé avec ses sols de dalles colorées, ses mosaïques et ses peintures murales, il comprenait tout le confort imaginable. La partie est du palais était un jardin enchâssé dans un atrium de 41 x 18 mètres entouré sur trois côtés de portiques aux colonnes ornées de chapiteaux corinthiens. La partie occidentale du palais s'agençait sur deux étages, avec au rez-de-chaussée :

  • un salon (triclinium) au toit reposant sur quatre colonnes (des bancs de pierre furent ajoutés sur trois des côtés durant la révolte contre Rome [66-70] par les combattants juifs qui le convertirent en synagogue) ;

     

  • une cour en forme de croix avec des salles à chaque angle ;

     

  • des petits thermes (le toit à couple préservé dans l'une des salles est le plus ancien exemple de dôme découvert à ce jour en Israël).

     

Le Bas Hérodion

Dans la plaine située en contrebas de la forteresse au nord, le bas Hérodion couvrait une superficie d'une quinzaine d'hectares. Il était bien conçu, les bâtiments et les jardins s'ordonnant selon un axe nord-sud. Les bâtiments se dressaient autour d'un grand bassin (70 x 46 mètres et 3 mètres de profondeur), rempli d'eau provenant d'un aqueduc spécialement construit pour acheminer l'eau à Artas, près des piscines du roi Salomon, à l'ouest. Le bassin, enduit de plâtre pour prévenir toute infiltration, était utilisé en tant que principal réservoir d'Hérodion et comme piscine. Les fondations d'une construction ronde de 15 mètres de diamètre ont été retrouvées au centre du bassin. Recouverte autrefois d'un toit reposant sur une rangée de colonnes, il s'agissait probablement d'un pavillon de détente et de divertissement. Le bassin était entouré de grands jardins bien entretenus. Des portiques de six mètres de large, constitué par des colonnes ornées de chapiteaux ioniques, entouraient les jardins sur trois côtés, sur une longueur d'environ 250 mètres. Des salles, mesurant chacune 110 x 10 mètres, étaient construites le long des côtés est et ouest du bassin. La salle située à l'est s'étendait sur un mur de terrasse de 13 mètres d'épaisseur et extrêmement élevé. Au centre de la salle ouest, les murs d'une pièce octogonale étaient décorés de pilastres et de fresques. On suppose qu'il s'agissait d'une salle de réception ou peut-être même de la salle du trône lorsque le roi séjournait à Hérodion.

L'ensemble agencé autour de la piscine était entouré de constructions aux diverses fonctions. Au nord, un grand édifice comprenait des aires d'entreposage et des logements pour les domestiques. Au nord-ouest, un entrepôt a été mis à jour et des fragments de plusieurs dizaines de jarres en céramique ont été retrouvés parmi les débris. Au sud-ouest, de grands thermes ont été exhumés qui desservaient probablement l'entourage royal et les invités du roi. Ils comprenaient un certain nombre de pièces et de bassins, un caldarium (pièce chaude) chauffée par un système d'hypocaustes (le sol était surélevé sur des supports permettant à l'air chaud de circuler au-dessous. Les parois des thermes étaient décorées de motifs carrés peints et d'une imitation de marbre. Les sols étaient dallés de mosaïques de couleurs à motifs géométriques et floraux ainsi que de grenades, de feuilles de vignes et de grappes de raisin.

 

L'édifice monumental

Le bâtiment baptisé édifice monumental par les archéologues, se dresse au sud de la piscine, dans l'angle ouest sur une aire nivelée par l'homme de 350 x 30 mètres. Il comprend une salle carrée travaillée, ouverte sur le côté donnant sur l'aire nivelée ; mesurant 12 x 9 mètres, elle a été préservée jusqu'à une hauteur de 7 mètres. Les murs particulièrement épais de la salle sont soigneusement construits en pierre de taille, avec des niches entre les pilastres. Les éléments architecturaux aux décorations caractéristiques des monuments funéraires travaillés de Jérusalem et le bain rituel retrouvés ont laissé supposer que le bâtiment faisait partie du mausolée du roi Hérode. La salle décrite plus haut pourrait avoir servi de triclinium pour les cérémonies organisées à la mémoire du roi. L'aire aplanie s'étendant devant les bâtiments servit peut-être d'esplanade pour le cortège funéraire royal décrit par Josèphe (Guerre I, 33, 9). A la grande déception des archéologues, la tombe elle-même n'a pas encore été découverte. Elle est peut-être profondément enfouie dans les versants de la place forte d'Hérodion.

Au fur et à mesure que les fouilles avancent, une importante restauration a été réalisée sur les édifices d'Hérodion. On peut aujourd'hui se promener sur un agréable sentier au sommet de la forteresse, escalader les murailles et apprécier, comme par le passé, la vue de la région. On peut aussi descendre dans les tunnels de 300 mètres de long, dans les citernes et espaces taillés dans le roc sous la colline. Ces passages souterrains furent creusés en guise de cachette par les combattants juifs de la révolte de Bar Kochba (132-135) lorsque Hérodion subit à nouveau le siège de l'armée romaine. Et le grand bassin du bas Hérodion est, comme jadis, à nouveau entouré de portiques (restaurés).


Des fouilles ont été effectuées récemment au palais-forteresse et dans le bas Hérodion sous la direction de E. Netzer, pour le compte de l'Université hébraïque de Jérusalem.

(in notice archéologique du MFA sites archéologiques n°6, 2001)

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