Le 20 juin 1997, M. Z et ses deux enfants, M. X et Mme Y, ont créé la société à responsabilité (SARL) A. Le capital de cette société, exerçant une activité de restauration, a été fixé à 8 000 euros et divisé en 500 parts, d’une valeur nominale de 16 euros, dont ils détenaient l’intégralité à hauteur respectivement 400, 25 et 75 parts.
La société s’est transformée en société par actions simplifiée le 7 décembre 2013.
A la date du 15 octobre 2015 ont été réalisées plusieurs donations des actions de la société :
- 50 actions données par Mme Y à son père M. Z ;
- 25 actions données par Mme Y à sa mère Mme Z ;
- 42 actions données par M. Z à son épouse Mme Z ;
- 25 actions données par M. X à son père M. Z.
Ces donations ont été révélées et déclarées à l’administration fiscale le même jour pour une valeur unitaire de chaque action de 1 898 euros et les mutations ainsi opérées ont été transcrites dans le registre des mouvements des titres de la société.
A l’issue de ces opérations, M. Z et son épouse détenaient respectivement 433 et 67 actions.
Leurs enfants ne possédaient plus aucun titre.
Quinze jours plus tard, le 30 octobre 2015, de nouvelles donations des actions de la société ont été réalisées :
- 50 actions données par M. Z à sa fille Mme Y ;
- 50 actions données par M. Z à son fils M. X.
Ces donations ont été révélées et déclarées à l’administration fiscale le même jour pour une valeur unitaire par action de 1 898 euros et les mutations ainsi opérées ont été transcrites dans le registre des mouvements des titres de la société.
A l’issue de ces nouvelles opérations, M. Z et son épouse détenaient respectivement 333 et 67 actions. Leurs deux enfants détenaient chacun 50 actions.
Par acte du 9 décembre 2015, les consorts Z, M. X et Mme Y ont conjointement cédé la totalité des actions de la société SAS A pour un prix unitaire de 1 773,76 euros et chacun des cédants a encaissé la fraction du prix lui revenant.
M. X a déclaré une moins-value de cession de 6 200 euros correspondant à la différence entre la valeur des actions fixée par les actes de donation et leur prix de cession.
Par une proposition de rectification en date du 30 octobre 2018, l’administration a mis en œuvre la procédure de l'abus de droit fiscal prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales.
Elle a considéré que les donations croisées réalisées les 15 et 30 octobre 2015 entre M. Z et son fils, M. X, à concurrence des 25 actions que ce dernier a initialement données à son père et qui ont presque immédiatement réintégré son patrimoine, étaient fictives dès lors que ces donations ne s’étaient pas traduites, dans cette mesure, par un dépouillement irrévocable du donateur ainsi que l’exige l’article 894 du code civil.
L’administration a écarté ces actes comme ne lui étant pas opposables et, par suite dans le cadre du calcul de la plus-value de cession des titres, pour fixer le prix d’acquisition de ces 25 actions, a remis en cause la valeur de 1 898 euros retenue par M. X et substitué la valeur nominale de 16 euros d’acquisition des parts qu’il possédait depuis la constitution de la société en 1997.
L’administration a retenu, pour l’application des articles 150-0 A à 150-0 E du code général des impôts, une plus-value imposable à l’impôt sur le revenu s’élevant après abattement pour durée de détention à 14 297 euros. La plus-value a aussi été imposée sans abattement aux contributions sociales. Les droits rappelés ont été assortis de la majoration pour abus de droit au taux de 80 %.
Le Comité a entendu ensemble le contribuable ainsi que le représentant de l’administration.
Le Comité rappelle que s’il est loisible à toute personne de choisir, pour atteindre un objectif, la voie fiscalement la moins onéreuse, c’est à la condition notamment que les instruments utilisés ne soient pas entachés de simulation.
Le Comité précise que, si les titres d’une société peuvent être transmis par don manuel, ce don manuel n'a d'existence que par la tradition réelle que fait le donateur de la chose donnée, effectuée dans des conditions telles qu'elle assure la dépossession définitive et irrévocable de celui-ci,
Le Comité relève que l’objectif affiché des donations consenties réciproquement entre M. X et son père les 15 et 30 octobre 2015 s’inscrivait dans le cadre d’une opération consistant notamment à égaliser les droits respectifs dans la société des deux enfants de M. et Mme Z et que, selon les indications mêmes du contribuable, ces deux enfants souhaitaient céder leurs participations dans la société SAS A depuis plusieurs années.
Il estime qu’au regard des buts ainsi poursuivis, M. X n’entendait donc pas se dépouiller de manière irrévocable au bénéfice de son père des 25 titres qu’il possédait dans le capital de la société, mais seulement prendre part à un montage familial portant sur la redistribution des titres au terme duquel il pourrait céder à un tiers sa participation.
Le Comité considère dès lors que la tradition du 15 octobre 2015 de 25 titres de la société entre M.
X et M. Z, matérialisée par une inscription au registre des mouvements des titres de la société, n’a pas mis ce dernier en possession des actions en cause mais a seulement organisé leur détention précaire et temporaire par l’intéressé, assortie de l’obligation de les restituer à M. X avant la réalisation de leur cession.
Il estime ainsi que M. X n’était pas animé d’une intention libérale à l’égard de son père et que, sous couvert d’un don manuel et de sa révélation à l’administration fiscale, cette tradition déguisait en réalité un simple dépôt.
Le Comité observe encore que la tradition effectuée le 30 octobre 2015 de 25 actions de la société entre M. Z et M. X ne procède pas davantage et pour les mêmes motifs d’une intention libérale mais matérialise l’exécution de l’obligation de restitution des titres litigieux découlant de ce dépôt.
Le Comité est en conséquence d’avis qu’entachées de simulation, les donations des 15 et 30 octobre 2015 de 25 actions de la société A comme leur révélation subséquente à l’administration fiscale en tant que don manuel sont inopposables à l’administration qui était en droit de les écarter dans le cadre de la procédure prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales et de fixer ainsi pour le calcul de la plus-value de cession la valeur d’acquisition de ces titres à leur valeur initiale définie lors de la constitution de la société.
Enfin, le Comité estime que M. X doit être regardé comme ayant été le principal bénéficiaire des opérations constitutives de l’abus de droit au sens du b) de l’article 1729 du même code. Il émet donc l’avis que l’administration est fondée à appliquer la majoration de 80 % prévue par ces dispositions.
Nota : l’administration a pris note de l'avis émis par la commission
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