Le 26 juillet 1956, quatre ans jour pour jour après la destitution du Roi Farouk, le président égyptien Gamal Abel-Nasser, qui a le soutien des Soviétiques, annonce à la foule sa décision de nationaliser le canal de Suez ( et les biens de la compagnie du canal, une société franco-britannique.

Il accompagne sa déclaration d'un retentissant éclat de rire, retransmis en direct par toutes les radios du monde arabe.

Les Britanniques et les Français décident de réagir et de répondre à la menace que fait peser, sur leurs intérêts dans la région, ce coup de force égyptien.

Dans cette optique, ils vont trouver un allié de poids dans la région. Il s'agit d'Israël qui craint également la montée en puissance de son voisin égyptien extrêmement menaçant. Persuadé de leur bon droit, Guy Mollet et Sir Anthony Eden, respectivement chefs de gouvernements de la France et de l'Angleterre, proclament qu'ils ne céderont donc pas à l'intimidation.

Les deux pays mènent une opération conjointe avec Israël et rassemblent plus de 60 000 hommes, 300 avions de combats et 6 porte-avions afin de mettre au pas le leader égyptien.

 

Voir aussi 1956 : La crise de Suez, le protocole de Sèvres et l'expédition franco-anglaise

 

Après des premières opérations militaires victorieuses, les trois pays sont contraints de se replier sous la pression de l'URSS et des États-Unis. Il s'agit là d'une humiliation cinglante pour les deux anciennes grandes puissances, soumises aux injonctions des deux nouveaux géants, américain et soviétique, soucieux de protéger leurs propres intérêts et d'éviter une conflagration militaire généralisée. (source Herodote )

 

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Citoyens,

En ce jour, nous accueillons la cinquième année de la Révolution. Nous avons passé quatre ans dans la lutte.

Nous avons lutté pour nous débarrasser des traces du passé, de l'impérialisme et du despotisme; des traces de l'occupation étrangère et du despotisme intérieur.

Aujourd'hui, en accueillant la cinquième année de la Révolution, nous sommes plus forts que jamais et notre volonté est toujours plus forte. Nous avons lutté et nous avons triomphé. Nous ne comptons que sur nous même et nous le faisons avec volonté, force et puissance pour la réalisation des objectifs proclamés par la

Révolution et pour la réalisation desquels nos ancêtres ont lutté et nos enfants se sont sacrifiés. Nous luttons et nous sentons que nous triompherons toujours pour consolider nos principes de dignité, de liberté et de grandeur, pour l'établissement d'un Etat indépendant d'une indépendance véritable, d'une indépendance politique et économique.

En regardant l'avenir, nous sentons très bien que notre lutte n'a pas pris fin. Il n'est pas facile, en effet, d'édifier notre puissance au milieu des visées impérialistes et des complots internationaux. Il n'est pas facile de réaliser notre indépendance politique et économique sans que la lutte se poursuive. Nous avons devant nous toute une série de luttes pour que nous puissions vivre dignement.

Aujourd'hui, nous avons l'occasion de poser les bases de la dignité et de la liberté et nous viserons toujours à l'avenir de consolider ces bases et de les rendre encore plus fortes et plus solides.

L'impérialisme a essayé par tous les moyens possibles de porter atteinte à notre nationalisme arabe. Il a essayé de nous disperser et de nous séparer et, pour cela, il a créé Israël, oeuvre de l'impérialisme.

[…]

 

L'union avec la Syrie

Aujourd'hui, je proclame que vos frères en Syrie ont annoncé leur union avec vous, d'une union digne pour la consolidation des principes de dignité et d'amour-propre et les bases du nationalisme arabe.

Et moi, aujourd'hui, je dis à vos frères de Syrie, soyez les bienvenus; nous sommes une partie de la nation

arabe. Nous irons de l'avant, unis, formant un seul bloc, un seul coeur, une seule main pour la pose des bases et des principes de la liberté, de la gloire et de la dignité, et pour réaliser l'indépendance politique et

l'indépendance économique en même temps.

 

L'Egypte dans le monde

Depuis que l'Egypte a proclamé sa politique libre et indépendante, le monde tout entier a les yeux braqués sur l'Egypte. Tout le monde tient compte de l'Egypte et des Arabes. Autrefois, nous perdions notre temps dans les bureaux des ambassadeurs et des envoyés extraordinaires; mais aujourd'hui, après que nous nous sommes unis pour former un front national unique, contre l'impérialisme et l'intervention étrangère, ceux qui nous dédaignaient ont commencé à nous craindre.

La voix de l'Egypte est devenue plus forte dans le domaine international et la valeur des Arabes est devenue plus grande.

 

La conférence de Brioni

C'est sur cette base que s'est déroulée la Conférence de Brioni.

Je suis parti pour la Yougoslavie, où j'ai eu des entretiens avec le Président Nehru et le Président Tito qui ont tous deux proclamé leur ralliement à la politique d'indépendance et de neutralité. En allant à Brioni, je suis passé par la Yougoslavie et j'ai vu combien le peuple yougoslave estime le peuple égyptien et combien il lui est attaché.

A Brioni, nous avons étudié les problèmes internationaux et la conférence s'est terminée par un grand triomphe pour la politique égyptienne.

La conférence de Brioni a décidé de suivre les principes proclamés par la Conférence de Bandoeng et le communiqué publié à l'issue de cette conférence de Brioni mentionnait que les points de vue des chefs des trois gouvernements étaient absolument conformes et que leur politique aidait à atténuer la tension internationale.

Le communiqué a ensuite précisé que la Conférence de Brioni prenait des décisions consacrant les principes proclamés par la Conférence de Bandoeng et que ces principes doivent servir de base dans les relations internationales.

[…]

 

L'indépendance économique

L'Egypte en menant sa Révolution, luttait pour mettre ses problèmes sur une voie autre que celle de la prière et de la mendicité. En 1952, nous étions certains de réaliser l'indépendance politique; mais nous étions fermement convaincus que l'indépendance politique ne pourrait jamais être réalisée que par l'aide et en allant de pair avec l'indépendance économique.

Nous travaillions pour réaliser l'évacuation par tous les moyens possibles; par la douceur et par la force, par les négociations et les conversations et nous voulions donner à l'Egypte, une politique indépendante et que ne soit hissé sur la terre d'Egypte que le drapeau de l'Egypte. Nous étions sûrs de réaliser cette indépendance politique du moment que nous allions avoir raison des complices de l'impérialisme.

Lorsque nous avons eu raison des complices de l'impérialisme, l'occupant a réalisé qu'il ne pouvait point rester sur une terre où tout son entourage n'est qu'ennemis. Et il est parti.

[…]

 

Développement de la production

Nous n'avons pas négligé l'indépendance économique : car nous étions fermement convaincus du fait que

l'indépendance politique ne pouvait être réalisée que par la voie de l’indépendance économique.

C'est pourquoi, nous avons accordé toute notre attention à la production et à son développement, en comptant uniquement sur nous-mêmes et sur nos propres moyens. Nous avons réussi à augmenter le revenu national dans une proportion de 16 % en deux ans de 1952 à 1954 et durant les deux autres années, de 54 à 56 l'augmentation du revenu national était dans la même proportion.

Après les fêtes de l'Evacuation, j'ai dit que l'Egypte oublie le passé et elle donnera la main à tous ceux qui seront pacifiques avec elle et elle sera hostile à ceux qui le seront avec elle. J'ai aussi proclamé que la politique de l'Egypte est issue du coeur même de l'Egypte et non de Londres on de Washington, ou d'ailleurs.

J'ai aussi dit que nous étions tout disposés à coopérer avec n'importe qui, à condition que cela ne soit pas au détriment de l'Egypte et de ses intérêts.

 

Les négociations

Aujourd'hui, je vais tout vous dire au sujet des négociations. Depuis 1952 et après le succès de la

Révolution, l'Angleterre et l'Amérique ont commencé à nous contacter et nous ont demandé de nous allier à elles et nous répondîmes toujours que nous ne pourrions jamais faire partie d'un pacte qui ne grouperait pas tous les Etats arabes.

Je leur disais aussi, si nous nous allions avec l'Angleterre, est-ce que nous pourrons nous considérer sur un même pied d'égalité ou serons-nous dépendants de l’Angleterre. Nous pouvons nous entendre et demeurer des amis.

A l'une des audiences des pourparlers, en avril 1952, le général Robertson nous a demandé de signer un accord de 25 ans avec l'Angleterre; mais nous avons refusé; et les pourparlers se sont arrêtés parce que nous n'avons pas voulu accepter un accord qui limiterait notre souveraineté et nous rendrait dépendants de

l’Angleterre, grande puissance.

 

L'histoire de l'armement

En 1952, nous avons commencé à parler de l'armement. Ils nous ont dit : nous ne vous donnons pas des armes, si vous ne signez pas le Pacte de Défense Commune et cela veut dire qu'une mission britannique vienne ici et s'occupe de toutes les affairas de l'armée égyptienne.

Nous avons répondu à cela que nous n'aimons pas les missions militaires et que nous les connaissions pour avoir un seul objectif, celui d'affaiblir l'armée et de la rendre impuissante.

Nous avons dit que nous voulons une armée égyptienne représentant les principes mêmes proclamés par la Révolution. Nous voulons une armée forte et puissante et nous n'admettrons pas que notre armée soit placée

sous les ordres de quelques officiers étrangers, américains, ou autres. Il faut que l'armée travaille pour le peuple et dans l’intérêt du peuple.

Nous leur avons dit que nous voulons acheter les armes avec notre argent et que nous ne voulions pas les avoir à titre d'assistance; mais ils n'ont pas voulu. Ils n'ont voulu nous donner les armes que contre signature du mandat établissant notre esclavage et portant atteinte à notre souveraineté.

Après cela a commencé la lutte du Canal et chacun de vous sait combien nous avons sacrifié et combien nombreux sont ceux qui sont morts sur le champ d'honneur au cours de ces batailles du Canal.

Les Anglais sont sortis d'ici. Ils ont évacué et la gloire en revient non aux négociations et aux discussions, mais au sang qui a été versé à flot dans le Canal, aux morts nombreux. La lutte a été âpre et violente, mais est-ce qu'elle s'est terminée ?

Non, aujourd'hui la lutte se poursuit contre les complices des impérialistes. Ces complices se trouvent partout, dans tous les pays et ils agissent sans armes.

 

Les manoeuvres impérialistes

Les impérialistes ont commencé, à l'aide de leurs complices et de leurs suppôts, à ourdir leurs complots et tresser les filets de leurs manoeuvres. Et ils l'ont fait dans chacun des pays arabes. Ils ont essayé leurs manoeuvres en Jordanie en décembre passé, lorsque le général Templer s'y est rendu. Mais le général Templer s'est empressé de s'enfuir; car le nationalisme arabe a triomphé.

Le Pacte de Bagdad, aussi, ils n'ont pas réussi à y joindre aucun des pays arabes; car le nationalisme arabe a, là aussi, triomphé.

La lutte se trouve partout dans tout le monde arabe. Lutte contre l'impérialisme qui aide la France en Afrique du Nord. L'Amérique et tous les pays du Pacte Atlantique ont oublié les principes qu'ils ont au début proclamés et mobilisent toutes leurs fores pour combattre les Algériens. Mais là aussi le nationalisme arabe triomphe.

 

Ces luttes en Jordanie, en Syrie, au Soudan, en Algérie, partout dans les pays arabes, nous ne pouvons pas dire qu'elles ne nous concernent pas, car nous tous, les pays arabes, nous sommes liés intimement les uns aux autres et nous n'acceptons jamais que nous soyons à la suite des puissances étrangères, que nous recevions nos instructions de telle ou telle puissance, tels que certains pays, je n'ai pas besoin de les mentionner car je ne veux point provoquer de crises diplomatiques.

[…]

 

Les armes

Nous avons demandé des armes à la Grande-Bretagne. On nous a répondu : Nous vous donnons des armes à deux conditions. D'abord que Gamal Abdel Nasser qui va à Bandoeng n’ouvre pas la bouche et la seconde condition est de cesser nos attaques à l'encontre de la politique des alliances et des pactes.

Nous avons répondu que nous voulions des armes pour consolider notre souveraineté et notre indépendance et notre entité et non pour nous plier à certaines conditions.

Nous avons pris les armes en Russie. Oui, je dis en Russie et non en Tchécoslovaquie. Nous avons conclu avec la Russie un accord pour nous fournir les armes et la Russie a accepté de nous fournir les armes et ainsi a été réalisée la transaction des armes.

Après cela, quelle histoire ! On a dit : Ce sont des armes communistes. Je me demande : Y a-t-il des armes communistes, et des armes non communistes ? Les armes, dès qu'elles arrivent en Egypte, elles s'appellent des armes égyptiennes.

Ensuite, ils nous ont dit qu'ils ont un plan pour l'équilibre des forces dans le Moyen-Orient. Mais quel est cet équilibre qui fait qu'on donne un fusil à 70 millions d'Arabes pour deux fusils à un million de Sionistes et un avion pour les uns et deux pour les autres.

Et puis, qui vous a fait nos tuteurs ? Qui vous a demandé de vous occuper de nos affaires ?

En mai 1948 ils ont voulu détruire tout nationalisme arabe, du golfe Persique jusqu'à l'Atlantique.

Il a été donc nécessaire de se fournir en armes par n'importe quel moyen, afin que nous ne soyons pas à la merci de nos ennemis et sous la menace d'Israël et des amis d'Israël.

Je dois vous dire que nous avons confiance dans ces principes.

[…]

 

Economie stable

Cet exposé a fait allusion aux dernières évolutions en Egypte. Quelles sont ces évolutions ? Sont-ce des évolutions politiques ou bien économiques ? Autre chose contenue dans l'exposé est le message de Foster Dulles au peuple égyptien. Or, nous avons auparavant connu ce moyen. L'exposé s'attache ensuite à la position économique de l'Egypte et soulève des doutes sur l'économie égyptienne durant les sept derniers mois. Je tiens à dire que l'économie égyptienne est devenue forte. Voici les statistiques tirées de l'annuaire statistique des Nations Unies. Le revenu national est passé de 748 millions de livres à 780 millions en 1953, et à 868 millions en 1954. Ainsi, notre revenu a augmenté de 120 millions de livres en deux ans. Le revenu agricole a augmenté de 15 % et la production industrielle a augmenté de 25 %; la production du fer et de la fonte a augmenté de 94 %. Le mouvement des échanges en 1956 a été de 91 millions de livres, soit une augmentation de 21 millions de livres.

Quelles sont donc les évolutions qui se sont produites durant les sept derniers mois ? Ce sont des évolutions d'indépendance, des évolutions de dignité et de grandeur. Nous avons décidé de renforcer notre armée et d'avoir une liberté indépendante.

Le Foreign Office avait alors émis son opinion le 20 juin, suivi par la Banque Internationale. Le but était de punir l'Egypte, car elle avait refusé les pactes militaires et avait proclamé et fait appel à la paix, et au respect des principes oubliés. L'Egypte avait également fait appel à la liberté et à l'indépendance, à la vie positive et paisible, et l'aide avec tous les pays.

Le Congrès américain qui représente les Etats américains, avait demandé que soit coupée toute aide à l'Egypte, car nous avons refusé d'accepter l'occupation et l'exploitation de notre territoire. Ce fut notre punition. Car en coupant l'aide à l’Egypte, le peuple égyptien dira que Gamal Abdel Nasser a nui au pays, et fera pression sur lui pour qu'il accepte des conditions néfastes au pays. Ils ignorent que le peuple égyptien refuse lui aussi tous ces arguments.

Lorsque M. Eugène Black vint au Caire, il nous déclara que la BIRD était une Banque Internationale, qui ne s'occupait nullement de politique. En effet, j'ai commencé à trouver en Eugène Black l'homme qu'il nous fallait, je voyais en lui Ferdinand de Lesseps, et ma mémoire me reporte à l’année 1854. J'ai mentionné à M. Black que nous avons des complexes et que nous ne voulions plus voir l’Egypte occupée militairement par l’entremise d'une occupation économique.

[…]

 

La nationalisation du canal

Pour que de Lesseps se désiste de certains avantages, l’Egypte a payé des dommages; l'Angleterre a acheté des actions du Canal pour quatre millions de livres.

[…] Jusqu'à présent, elle se considère comme Compagnie internationale, c'est-à-dire un Etat dans l'Etat. Les différends qui surgissent entre la Compagnie et les autres institutions relèvent des tribunaux égyptiens, et l'amitié qui a régné lors du creusement du Canal a eu pour résultat l'occupation de l’Egypte en 1882.

L'Egypte a été obligée de vendre sa part qui a été achetée par l'Angleterre, et Ismail se désista des bénéfices de l'Egypte. Ainsi, les actions prises par l’Angleterre lui sont revenues sans aucun débours.

Voici les faits de l'histoire, et l'on s'aperçoit que les mêmes faits reviennent. L'histoire se répète; et il n'est pas possible, pour nous, que nous laissions cette histoire se répéter pour l’Egypte. Nous sommes tous là, aujourd'hui, pour mettre une fin absolue à ce sinistre passé et si nous nous tournons vers ce passé, c'est uniquement dans le but de le détruire. Nous ne permettrons pas que le Canal de Suez soit un Etat dans l'Etat.

Aujourd'hui, le Canal de Suez, est une société égyptienne, des fonds desquels l'Angleterre a pris 44 % de ses actions. L'Angleterre profite, jusqu'à présent des bénéfices de ces actions; le revenu de ce Canal en 1955 a été évalué à 35 millions de livres, soit 140 millions de dollars, desquels il nous revient un million de livres, soit 3 millions de dollars. La voici donc la société égyptienne qui a été créée pour l'intérêt de l’Egypte, tel que l'a déclaré le firman.

La pauvreté n'est pas une honte, mais c'est l'exploitation des peuples qui l'est.

Nous reprendrons tous nos droits, car tous ces fonds sont les nôtres, et ce canal est la propriété de l’Egypte. La Compagnie est une société anonyme égyptienne, et le canal a été creusé par 120.000 Egyptiens, qui ont trouvé la mort durant l'exécution des travaux. La Société du Canal de Suez à Paris ne cache qu'une pure exploitation. Eugène Black est venu en Egypte dans le même but que de Lesseps. Nous construirons le Haut-

Barrage et nous obtiendrons tous les droits que nous avons perdus. Nous maintenons nos aspirations et nos désirs. Les 35 millions de livres que la Compagnie encaisse, nous les prendrons, nous, pour l’intérêt de l'Egypte.

Je vous le dis donc aujourd'hui, mes chers citoyens, qu'en construisant le Haut-Barrage, nous construirons une forteresse d'honneur et de gloire et nous démolissons l’humilité. Nous déclarons que l'Egypte en entier est un seul front, uni, et un bloc national inséparable. L'Egypte en entier luttera jusqu'à la dernière goutte de son sang, pour la construction du pays. Nous ne donnerons pas l’occasion aux pays d'occupation de pouvoir exécuter leurs plans, et nous construirons avec nos propres bras, nous construirons une Egypte forte, et c'est pourquoi j'assigne aujourd'hui l'accord du gouvernement sur l'étatisation de la Compagnie du Canal.

[…] « Nous irons de l’avant pour détruire une fois pour toutes les traces de l’occupation et de l'exploitation.

Après cent ans chacun a recouvré ses droits, et aujourd'hui nous construisons notre édifice en démolissant un Etat qui vivait à l’intérieur de notre Etat; le Canal de Suez pour l’intérêt de l'Egypte et non pour

l'exploitation. Nous veillerons aux droits de chacun. La nationalisation du Canal de Suez est devenue un fait accompli : nos fonds nous reviennent, et nous avons 35 millions de livres en actions. Nous n'allons donc pas nous occuper, maintenant, de 70 millions de dollars. Nous devons donc tous travailler et produire, malgré tous les complots ourdis contre nous. Je leur dirai de mourir de dépit, nous construirons l'industrie égyptienne. »

Je n'ai trouvé, de la part de ces Etats, aucune volonté de coopération technique pour industrialiser le pays.

En quatre ans, nous avons senti que nous sommes devenus plus forts et plus courageux, et comme nous avons pu détrôner le roi le 26 juillet, le même jour nous nationalisons la Compagnie du Canal de Suez. Nous réalisons ainsi une partie de nos aspirations et nous commençons la construction d'un pays sain et fort.

Aucune souveraineté n'existera en Egypte à part celle du peuple d'Egypte, un seul peuple qui avance dans la voie de la construction et de l'industrialisation, en un bloc contre tout agresseur et contre les complots des impérialistes. Nous réaliserons, en outre, une grande partie de nos aspirations, et construirons effectivement le pays car il n'existe plus pour nous quelqu'un qui se mêle de nos affaires. Nous sommes aujourd'hui libres et indépendants.

Aujourd'hui, ce seront des Egyptiens comme vous qui dirigeront la Compagnie du Canal, qui prendront consignation de ses différentes installations, et dirigeront la navigation dans le Canal, c'est-à-dire, dans la terre d'Egypte.

(Texte français d'après le Journal d'Egypte, 27-7-1956)

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