En décembre 1947, un convoi de sept voitures de la Haganah, près de Ben Shemen, fut attaqué par des combattants arabes. Treize soldats ont été tués. Quelques mois plus tard, la plupart des habitants du village ont été évacués de la vallée de Lydda dans des autobus escortés par des véhicules blindés britanniques 1.

En juillet 1948, les Israéliens lancent l’opération 'Dani' dans le but de conquérir les villes de Lydda et Ramle. La première attaque contre Lydda se produit l’après-midi du 11 juillet quand une colonne de véhicules blindés et de jeeps du 89e bataillon2 traverse la ville en « mitraillant tout ce qui bouge. » 3

La milice arabe défendant la ville les a retenus avec des mitrailleuses. Entre-temps, le 89e Bataillon, dirigé par Moshe Dayan, était arrivé à Ben Shemen. En fin d'après-midi, le bataillon, composé d'un véhicule blindé géant monté avec un canon, des demi-pistes menaçantes et des jeeps équipées de mitrailleuses, a quitté Ben Shemen et a pris d'assaut Lydda. Dans un bombardement de quarante-sept minutes, des dizaines d'arabes ont été abattus, y compris des femmes, des enfants et des personnes âgées. Le 89e Bataillon a perdu neuf hommes. En début de soirée, les deux pelotons du 3e Bataillon ont pu entrer dans la ville. En quelques heures, les soldats ont occupé des postes clés dans le centre-ville et ont enfermé des milliers de civils palestiniens dans la Grande Mosquée. 4

« Des douzaines d’arabes (peut-être pas moins de 200) » sont tués. Selon Benny Morris, la description de ce raid par un des soldats « combine les éléments d’une bataille et d’un massacre ».

Plus tard, les troupes israéliennes entrent et prennent position dans le centre-ville. La seule résistance vient du fort de police tenu par « un petit contingent de légionnaires et d’irréguliers. » Des centres de détention sont mis sur pied dans les mosquées et les églises pour les mâles adultes et entre 300 et 400 soldats israéliens prennent garnison dans la ville. Le matin du 12 juillet, la situation est calme mais vers 11 h 30, un incident se produit. Deux ou trois véhicules blindés entrent dans la ville et des échanges de tirs se produisent. Les escarmouches font penser aux habitants que la Légion arabe contre-attaque et probablement quelques douzaines de snipers tirent sur les occupants. Les soldats israéliens se sentent menacés et vulnérables parce qu’ils sont isolés parmi des milliers de citadins hostiles et sont « en colère [parce qu’]ils considèrent que la ville s’est rendue. » « On leur ordonne de tirer sur toute cible visible » (ou sur « quiconque aperçu dans les rues »). Les habitants arabes de leur côté paniquent et beaucoup se ruent à l’extérieur où ils sont abattus.

Il existe une controverse entre historiens pour ce qui concerne les événements qui suivent. Selon Benny Morris, des prisonniers qui tentent de s’évader de la mosquée Dahaimash, sans doute par crainte d’être massacrés, sont abattus en masse.

L’historiographie palestinienne décrit les événements différemment. Selon elle, ce sont des civils qui se sont réfugiés dans la mosquée, pensant que les Israéliens n’oseraient pas profaner le sanctuaire. Mais les Israéliens tuent 176 personnes qui s’y trouvaient.

Alon Kadish et Avraham Sela écrivent qu’il y a une confusion entre deux mosquées. Selon eux, les détenus sont seulement rassemblés dans la grande mosquée, où aucun incident ne se produit tandis que c’est un groupe de 50 à 60 arabes armés qui se sont barricadés dans la mosquée Dahaimash. La prise du bâtiment se solde par la mort de 30 miliciens et civils, dont des vieillards, des femmes et des enfants.

Les morts du 12 juillet sont vus dans le monde arabe et par plusieurs historiens comme résultant d’un massacre. Walid Khalidi parle d’une « orgie de tuerie sans discrimination ». Benny Morris écrit que « des Palmachniks nerveux massacrent des détenus dans le complexe de la mosquée ».

Selon Yoav Gelber, ce fut un « massacre plus sanglant que Deir Yassin ». Alon Kadish et Avraham Sela écrivent que ce fut « une bataille intense où la démarcation entre civils, combattants irréguliers et unités de l’armée régulières n’existait pas »5

L'Eglise saint-Georges et la grande Mosquée de Lydda - Lod

Pour Ari Shavit, auteur israélien de 'Ma terre promise'

Lydda est la boîte noire du sionisme. La vérité est que le sionisme ne pouvait supporter la ville arabe de Lydda. Dès le début, il y avait une contradiction substantielle entre le sionisme et Lydda. Si le sionisme devait exister, Lydda ne pourrait pas exister. Si Lydda devait exister, le sionisme ne pourrait pas exister. Rétrospectivement, c'est vraiment très clair. Lorsque Siegfried Lehmann arriva dans la vallée de Lydda, en 1927, il aurait dû voir que si un État juif devait exister en Palestine, une Lydda arabe ne pourrait pas exister en son centre. Il aurait dû savoir que Lydda était un obstacle qui bloquait la route vers un État juif, et qu'un jour le sionisme devrait l'enlever. Mais le docteur Lehmann n'a pas vu, et le sionisme a choisi de ne pas le savoir. Pendant des décennies, les Juifs ont réussi à se dissimuler la contradiction entre leur mouvement national et Lydda. Pendant quarante-cinq ans, le sionisme a prétendu être l'usine d'Atid, les oliveraies et le jeune village de Ben Shemen vivant en paix avec Lydda. Puis, en trois jours dans l'été cataclysmique de 1948, Lydda n'était plus. 6

1 Ari shavit, Lydda 1948, A city, a massacre, and the middle East today in the new-yorker du du 21/10/2013.

2 Dirigé par Moshé Dayan

3 wikipedia

4 Ari shavit

5Wikipedia

6Lydda 1948