Sadate déclare :

Sur la question du retrait [ du Sinaï ], nous avons progressé, mais sur la question palestinienne, qui constitue à nos yeux le cœur même du problème dans cette région, les délégations égyptienne et israélienne ont longuement discuté.

Pour l’Égypte une Etat palestinien devrait être établi sur la rive occidentale du Jourdain et dans la bande de Gaza1. Pour Israël, les Arabes palestiniens de Judée, de Samarie, de la rive occidentale du Jourdain et de la bande de Gaza devraient jouir d'un statut d'autonomie.

Nous  avons décidé qu'étant donné nos divergences sur la question, celle-ci fera l'objet d'une discussion au sein du comité politique de la conférence préparatoire du Caire.

Begin répond qu'il est venu en homme optimiste et qu'il repart en homme heureux..nous avons parlé comme des amis. La suite de la rencontre d'Ismaïlia aura lieu en février 1978 à Jérusalem et sera plus houleuse. Lors d'une réunion d'un comité politique, la délégation égyptienne quitte la table s'estimant insultée par un message de Begin. Pour les observateurs ce serait l'Égypte qui a mal pris la proposition de compromis faite par Begin. La rupture est proche. Sadate écrit à Begin le 1er mars 1978 :

Le problème peut-être résolu dans sa globalité en quelques jours si nous arrivons à nous entendre sur les éléments d'un accord...Du côté égyptien nous ne nourrissons plus aucune amertume. Nous allons de l'avant malgré l'opposition de ceux qui nous rejettent dans cette voie.

Malheureusement le gouvernement israélien n'a pas encore compris cela. Il continue à penser uniquement en terme d'avantage stratégique et de revendications territoriales sur les autres. Mais notre terre n'est pas négociable. Hormis la terre et la souveraineté, je suis prêt à tout donner pour la paix, comme je l'ai démontré en me rendant à Jérusalem..Si j'ai fait cela c'est pour donner un sentiment de sécurité à Israël car j'ai compris qu'il en avait besoin....Vous monsieur le Premier ministre vous avez déformé mes propos sur les implantations, affirmant que je souhaitais les brûler...j'ai simplement dit qu'elles devraient être démantelées et que les Israéliens pourraient labourer sous les aéroports, comme ils l'ont fait en 1957, s'ils craignent que ceux-ci puissent être utilisés comme base pour les attaquer.

Vous avez également affirmé publiquement que j'étais revenu sur ma promesse concernant le déploiement des forces militaires égyptiennes dans le Sinaï. J'ai dit à Gamassy, en présence d'Ezer Weizzmann, que je vous avais promis que mes forces armées ne franchiraient pas les passes. Je ne reviens jamais sur ma parole.. je suis disposé à jouer gros. Si vous l'êtes également. Dans ce cas il faudra mettre de côté nos vieilles approches, et je suis prêt à assumer ma part de responsabilité.

 

Sadate et Begin. Malgré des relations parfois tendues, le contact n'a jamais été rompu.

Dans sa réponse Begin après avoir dissipé les malentendus et autres incompréhensions à l'origine de la tension entre eux commente la résolution 242 du conseil de sécurité de l'ONU et rejette l'idée d'un État palestinien :

Je souhaite réitérer une fois encore notre accord sur le principe d'un retrait , en conformité avec la résolution 242, mais pas d'un retrait sur les lignes du 4 juin 1967 [ avant la guerre des six jours]. C'est cette formulation, en principe, que nous vous suggérons afin de pouvoir avancer ensemble vers un processus de paix substantiel.

Dans votre lettre vous continuez de plaider pour la formation, après une période intérimaire, d'un État palestinien en Judée-Samarie et dans la bande de Gaza. Monsieur le Président, je dois répéter la chose suivante..un État palestinien, sous quelque forme que ce soit, constituerait un danger mortel pour Israël. Ce ne sont pas quelques années de transition qui élimineront ce péril. Aucune nation ne peut vivre normalement si ses jours sont comptés . Il ne faut pas créer de danger mortel...Nous maintenons notre suggestion d'accorder une plein autonomie administrative aux Arabes palestiniens vivant en Judée Samarie et dans la bande de Gaza étant entendu que la sécurité sera assuré pour les Juifs palestiniens.

Sadate :

Vous insistez pour conserver des colonies en territoire arabe. Or il s'agit d'une politique que le monde entier a clairement condamnée comme étant illégale et constituant un obstacle à la paix...Priver un peuple de trois millions de Palestiniens de ce droit à l'autodétermination ce n'est pas seulement contraire au droit et à la justice, c'est aussi une invitation à perpetuer le conflit et le bain de sang.2

1 Pour autant, l’Égypte n'a pas donné d'autonomie particulière à Gaza lorsqu'il l'occupait entre 1949 et 1967 (avec une brève interruption en 1956)

2 In la paix à l'œuvre : Correspondance 1977-1979. Récit des négociations pacifiste entre Begin et Sadate.

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