Gilbert Roger , ancien maire de Bondy, est un sénateur socialiste du 93, président du groupe d'amitié France-Palestine au Sénat
Destructions en Cisjordanie occupée : question écrite au Sénat.
Question n° 18902 adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères
Publiée le : 19/11/2020
Texte de la question : M. Gilbert Roger attire l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur l’augmentation des démolitions d’infrastructures palestiniennes (maisons, magasins, entrepôts, puits, abris, canalisations, routes etc.) par les autorités israéliennes en Cisjordanie occupée.
Ces démolitions sont interdites par l’article 53 de la IVème convention de Genève qui dispose également que la puissance occupante a l’interdiction de procéder à des transferts forcés de populations dans le territoire occupé (article 49).
Le coordinateur du bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) pour les Territoires palestiniens occupés a déclaré, le 10 septembre 2020, que les démolitions et confiscations illégales de maisons et de biens n’ont jamais été aussi importantes depuis quatre ans. Selon l’OCHA, déjà 689 structures ont été démolies en 2020, rendant 869 personnes sans abri, dans un contexte sanitaire particulièrement inquiétant.
En effet, en pleine pandémie de Covid-19, le nombre de démolitions a atteint un pic inquiétant (en particulier entre mai et septembre 2020) et plusieurs structures de soins de santé ont été confisquées ou démolies. Ces nombreuses démolitions sont concomitantes à une progression de la colonisation en Cisjordanie (plus de 413 000 colons y résident, hors Jérusalem-Est) et sont le signe qu’une annexion de fait est déjà en cours sur le terrain.
Quand bien même l’annexion de jure a été suspendue à la suite des accords passés entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn, l’annexion de facto est tout aussi illégale qu’une annexion de jure et impose aux États tiers de prendre des mesures urgentes. Parmi les structures saisies ou démolies par les autorités israéliennes en 2020, au moins 63 ont été financées par l’Union européenne (UE), y compris la France. Les autorités militaires israéliennes prévoient également la démolition prochaine d’une école primaire à Ras At-Tin (en Cisjordanie) dont la construction a été financée par la France et l’UE.
La France a de nouveau appelé, conjointement avec l’Allemagne, le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Italie, le 16 octobre 2020, « à faire cesser immédiatement la construction de colonies de peuplement, les expulsions et la démolition des structures palestiniennes à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. »
Elle a également appelé, avec d’autres représentants européens et de plusieurs États membres, le 19 octobre, Israël à « ne pas entreprendre de démolitions » dans la zone de Masafer-Yatta, particulièrement vulnérable. Aussi souhaiterait-il savoir quelles actions concrètes la France compte prendre, au sein de l’Union européenne et de manière bilatérale, à l’encontre d’Israël pour empêcher ces destructions illégales d’infrastructures financées par les fonds au développement des États membres et obtenir des réparations et une reconstruction desdites infrastructures.
Réponse de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères
À publier le : 04/02/2021, page 773
Texte de la réponse : La France condamne la colonisation tant en Cisjordanie qu’à Jérusalem-Est.
La colonisation est illégale au regard du droit international humanitaire, ainsi que des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, notamment la résolution 2334 du 23 décembre 2016.
Elle contribue à attiser les tensions sur le terrain et constitue un obstacle à une paix juste, fondée sur la solution des deux États, ayant chacun Jérusalem pour capitale. La politique de colonisation ne doit pas servir un projet d’annexion de territoires palestiniens par une politique du fait accompli. Les destructions de structures palestiniennes sont une des matérialisations de la politique de colonisation.
Outre les déclarations de la France et ses partenaires européens en octobre 2020, la France a condamné la démolition, le 3 novembre 2020, par les autorités israéliennes, du village palestinien de Khirbet Humsa en Cisjordanie.
L’Union européenne a également appelé Israël à cesser ces démolitions. Le 18 novembre, au Conseil de sécurité des Nations unies, la France a appelé les autorités israéliennes à surseoir à toute démolition, notamment du village de Khan al Ahmar et de l’école de Ras al Tin, conformément à ses obligations de puissance occupante. Par ailleurs, des messages ont été, à plusieurs reprises, relayés aux autorités israéliennes, par la France et ses principaux partenaires européens.
La France condamne sans ambiguïté les annonces relatives à la construction de logements dans les colonies de Cisjordanie et de Jérusalem-Est, en particulier les annonces récentes concernant la colonie de Givat HaMatos, à Jérusalem-Est, dont l’expansion porte atteinte à la viabilité d’un futur État palestinien. Les chefs de mission d’un certain nombre de pays européens, dont la France, se sont rendus sur le terrain à Givat HaMatos pour marquer leur détermination.
La France s’attache à défendre les paramètres définis par la communauté internationale.
Elle est déterminée à œuvrer pour une paix au Proche-Orient juste et respectueuse du droit international, comme l’a assuré le Président de la République au Président Abbas le 18 août dernier, et lors de l’Assemblée générale des Nations unies.
La France œuvre en coordination avec ses partenaires européens et arabes. C’est dans cet esprit que le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères et ses homologues allemand, égyptien et jordanien se sont réunis à Amman le 24 septembre 2020, puis au Caire le 11 janvier 2021. Ils ont marqué une commune détermination à se mobiliser en faveur d’une reprise progressive du dialogue. Cette logique doit prendre le pas sur celle des actes unilatéraux, pour recréer le niveau de confiance nécessaire à la reprise de négociations crédibles en vue d’une paix durable.