Cette manifestation qui regroupe un million d'Israéliens, constitue le point d'orgue du mouvement des tentes. L'économie israélienne est en berne du fait notamment d'une forte baisse des exportations. Or celle-ci représentent 40 % du PNB. Israël est un pays ont les inégalités sont très fortes. Entre 1992 et 2010, l'indice GINI qui mesure les inégalités de revenus a ainsi cru régulièrement (35,50 en 1992, 42,78 en 2010) malgré une très légère décrue en 2007.
En 2010, la part de revenu des 10 % les plus pauvres n'est que de 1,70 % ( 3,10 % en France). La population touchée étant à forte composante arabe et orthodoxe.
La part des revenus de 10 % les plus riches s'élève, en 2010, à 31,20 % (27,10 % en France)
Sur le marché du logement, l'étude économique annuelle de l'OCDE note dans son rapport de décembre 2011 :
D’après les conclusions de l’examen approfondi du marché du logement réalisé pour cette Étude, l’ampleur des exonérations fiscales accordées aux propriétaires occupants et aux investisseurs immobiliers devrait être revue à la baisse, et la politique du logement axée davantage sur le soutien du marché locatif ainsi que sur les ménages à bas revenu. Des dispositions juridiques précisant les droits et responsabilités minimums des bailleurs et des locataires devraient être adoptées, pour stimuler le développement du marché locatif.
Les prix de l'immobilier qui ont baissé au début des années 2000 sont ensuite repartis à la hausse avec une moyenne de 12 % annuelle entre 2007 et 2010, notamment suite à une baisse du rythme des constructions neuves, alors même que le foncier appartient très majoritairement à l’État. L'absence ou la difficulté à se loger n'est pas compensée par une mobilité accrue, le pays étant doté d'un réseau ferroviaire ni dense ni performant. Quant au parc automobile, le coût à l'achat est supérieur d'un tiers aux autres pays de l'OCDE et il y peu de voitures par habitants (50 % moyenne de l'OCDE) mais des embouteillages omniprésents.
A l'origine du mouvement, une campagne internet début contre la vie chère au printemps 2001. Le 14 juillet, Daphni Leef, une jeune vidéaste, qui a du quitter son logement en rénovation sans pouvoir s'y réinstaller du fait de la hausse de loyer conséquente, installe sa tente en plein Tel-Aviv, sur le boulevard Rothschild où culmine le prix de l'immobilier. Elle est à l'origine d'un mouvement qui fait état dès le lendemain de 60 campements dans les villes d'Israël. Sur ce boulevard chic de Tel-Aviv, il y a 400 tentes installés en deux semaines. Des manifestations sont organisés les samedi soir, à la sortie de Chabbath.
Le 26 juillet, Netanyahu annonce la construction de 50 000 logements dont la moitié seraient 30 % en dessous du prix marché du logement de l'époque. Le nombre de manifestants augmente, 300 000 le 6 août, Des marches de poussettes sont organisées par des parents souhaitant voir baisser le prix de l'école maternelle. Un boycott s'organise contre la hausse du prix des produits laitiers.
Le mouvement faiblit courant août mais la ‘marche du million’ du 3 septembre réunit près de 470 000 personnes, ce qui est considérable à l'échelle d'un pays comme Israël. Finalement une commission est nommée. Elle émet des recommandations afin de résoudre la crise :
La commission Trajtenberg a émis de nombreuses recommandations visant à faire baisser les prix de l’immobilier, à développer la concurrence au sein de l’économie, et à réduire les dépenses de la défense au profit du secteur social. Mais la seule proposition qui a été immédiatement retenue par le gouvernement, puis rapidement mise en place, a été celle d’instaurer la gratuité de l’école maternelle. Si on ne peut parler d’un tremblement de terre, la mesure est tout de même significative pour les nombreux parents qui travaillent. Voilà pour ce qui est des résultats directs.
...Le mouvement de 2011 ne présentait pas de leadership formel ; les médias sociaux ont été le principal outil de rassemblement, même si au fil des jours, certains protestataires ont émergé de fait comme les porte-parole de cette révolte des tentes. Parmi eux, Stav Shaffir et Itzik Shmuli, qui ont depuis rejoint la Knesset sous les couleurs du Camp sioniste. 1
▪ Principaux points des recommandations de la Commission Trajtenberg2
Mesures touchant les recettes
Annulation des réductions prévues des taux de l’impôt sur le revenu
- Le taux de l’impôt sur les sociétés devait revenir de son niveau actuel de 24 % à 18 % et, par exemple, le taux maximal de l’impôt sur le revenu des personnes physiques devait être ramené de 45 % actuellement à 39 %, d’ici à 2016 pour ces deux impôts.
Majoration des taux maximum de l’impôt sur le revenu des personnes physiques
- Relèvement du taux maximum de 44 à 48 % (ce taux s’applique aux revenus mensuels imposables dépassant 40 231 NIS, soit environ cinq fois le salaire moyen).
- Application d’un impôt supplémentaire de 2 % aux personnes ayant un revenu annuel de plus de 1 million de NIS (c’est-à-dire l’équivalent de 83 333 NIS par mois, soit environ dix fois le salaire moyen.
Modifications des cotisations de sécurité sociale
- Retour du plafond des cotisations de sécurité sociale des salariés à cinq fois le salaire moyen (le plafond avait été porté à neuf fois le salaire moyen à titre temporaire au lendemain de la récession de 2008-09).
- Relèvement de 5.68 % à 7.5 % du taux des cotisations patronales d’assurance nationale pour les personnes gagnant plus de 60 % du salaire moyen.
Alourdissement de la fiscalité sur le revenu des sociétés et sur les plus-values
- Relèvement de 24 à 25 % (et peut-être, ultérieurement, à 26 %) de l’impôt sur le revenu des sociétés.
- Relèvement de 20 % à 25 % de la taxe sur les plus-values.
Modifications de la fiscalité indirecte
- Annulation d’une hausse prévue des droits d’accise sur l’essence et le diesel.
- Engagement à réduire comme prévu les droits à l’importation, sauf pour les voitures et les produits agricoles.
- Annulation de la réduction prévue de 16 à 15.5 % de la TVA.
Allègements fiscaux supplémentaires pour les familles
- Extension aux pères des crédits d’impôt pour enfant à charge (auparavant, seules les mères y avaient droit). –1.0
- Majoration de 50 % du crédit d’impôt sur les revenus d’activité pour les mères.
Mesures nécessitant des dépenses publiques supplémentaires
Extension des services de garde d’enfants et de l’éducation pour la petite enfance
- Augmentation des dépenses publiques au titre des services de garde d’enfants pour les enfants jusqu’à l’âge de 3 ans ; mise en place de la scolarité obligatoire gratuite pour les enfants de 3 à 5 ans ; services supplémentaires de garde d’enfants après l’école ; réduction des frais de scolarité.
Dispositifs ciblés en faveur des minorités
- Il est proposé un certain nombre de dispositifs qui visent tous à encourager l’intégration des minorités dans la population active, en particulier les femmes arabes israéliennes et les hommes ultra-orthodoxes.
Mesures supplémentaires destinées à réduire les coûts du logement
Plusieurs dispositifs sont proposés, tels que l’offre de logements à louer à long terme à prix abordable, une augmentation des allocations de logement, une hausse de l’impôt foncier sur les logements vides. Dans le détail :
- doublement des impôts locaux pour les logements inoccupés
- construction de 300 000 logements en cinq ans (soit 60 000 par an)
- incitations financières aux promoteurs immobiliers qui réduiraient les délais de
construction
- construction de logements locatifs sous le contrôle de l’État
- aides aux loyers pour les familles les plus démunies
- priorité à la construction de petits logements et de chambres pour étudiants.
Économies de dépenses publiques
- Réduction annuelle des dépenses militaires de 2.5 milliards de NIS (par rapport au niveau de référence) pendant cinq ans.
- Privatisation de services publiques en vue d’accroître l’efficience et les économies. .
- Efforts accrus pour assurer l’efficience et la coordination dans la planification et la mise en oeuvre de l’action publique.