Ce document a été reconnu par les parties comme constituant une description relativement objective des négociations menées à Taba. Il a été publié dans la presse internationale et notamment dans le journal israélien Haaretz du 14 février 2002 dans un article rédigé par Akiva Eldar. C'est ce texte traduit par Marcel Charbonnier que nous publions ici.
1. Le territoire
Les deux parties sont convenues qu'en accord avec la résolution 442 du Conseil de Sécurité de l'ONU, les frontières du 4 juin 1967 représenteraient les bases pour la délimitation des frontières séparant Israël et l'Etat de Palestine.
1.1. Cisjordanie
Pour la première fois, les deux parties ont produit leurs propres cartes de la Cisjordanie. Ces cartes ont servi de base à la discussion sur le territoire et les colonies. La partie israélienne a présenté deux cartes, et la partie palestinienne s'est engagée sur cette base.
La partie palestinienne a présenté plusieurs cartes détaillant sa (propre) perception des intérêts israéliens en Cisjordanie.
Les négociations se sont attachées à examiner les différents aspects du territoire, qui pourrait inclure certaines des colonies (existantes) et la manière dont les besoins de chacune des parties pourraient être
satisfaits. Les paramètres Clinton ont servi de base générale, assez adaptable, pour la discussion, mais des différences d'interprétation en ce qui concerne l'étendue et la signification de ces paramètres ont surgi.
La partie palestinienne a déclaré admettre les propositions Clinton, mais avec certaines réserves.
La partie israélienne a déclaré que (à son sens) les propositions Clinton permettaient d'annexer des blocs de colonies. La partie palestinienne n'a pas admis que ces propositions inclussent des blocs (de colonies) et elle n'a (donc) pas accepté les propositions allant dans le sens d'une annexion de blocs (de colonies).
La partie palestinienne a déclaré que les blocs (de colonies) léseraient de manière importante les droits et les intérêts des Palestiniens, en particulier pour ceux des d’entre eux qui vivent dans les régions qu'Israël envisage(ait) d'annexer.
La partie israélienne a maintenu qu'elle était en droit de réclamer la contiguïté entre ses colonies et Israël même, ainsi qu'au sein des colonies. La partie palestinienne a affirmé, de son côté, que les besoins des Palestiniens avaient priorité sur (ceux) des colonies (israéliennes). Les cartes israéliennes incluaient des plans pour le développement à venir de colonies juives en Cisjordanie.
La partie palestinienne a manifesté son désaccord avec le principe d'autoriser le développement ultérieur des colonies en Cisjordanie, toute croissance devant se produire à l'intérieur d'Israël. La partie palestinienne a maintenu qu'Israël ayant des intérêts en territoire palestinien,c’était lui la partie tenue de proposer les modifications frontalières nécessaires. La partie palestinienne a réaffirmé que ces propositions ne doivent en aucun cas affecter négativement les besoins et les intérêts palestiniens.
La partie israélienne a affirmé qu'elle n'avait pas besoin de maintenir des colonies de peuplement dans la Vallée du Jourdain pour des raisons (généralement alléguées) de sécurité, et elle a proposé des cartes qui reflètent cette position. Les cartes israéliennes étaient principalement fondées sur un concept démographique de blocs de colonies qui regrouperaient approximativement 80 % des colons. La partie israélienne a dessiné
une carte présentant l'annexion de 6 % des territoires, ce qui représente le plafond des propositions Clinton. La carte fournie par la partie palestinienne affectait 3,1 % des territoires aux échanges possibles.
Les deux parties ont accepté la principe d'un échange de territoires, mais les pourcentages en cause sont encore l'objet de discussions. Les deux parties sont convenues que les zones sous souveraineté palestinienne
et israélienne bénéficieront d'une contiguïté avec leurs territoires souverains respectifs.
La partie israélienne désirait voir figurer des «avoirs» tels que les «passages/couloirs sécurisés» au nombre des territoires proposés à l'échange, même si cette proposition ne permettait pas de donner à la Palestine la souveraineté sur ces «avoirs». La partie israélienne a adhéré à la position voulant que l'échange territorial ne concerne pas plus de 3 % des territoires, rejoignant en cela les propositions Clinton.
Les cartes palestiniennes adoptaient un point de référence conceptuel similaire, en insistant sur l'importance de la non-annexion d'aucun village palestinien et de la continuité territoriale entre la Cisjordanie et Jérusalem. Elles étaient fondées sur le principe d'un échange territorial qui serait équitable tant en superficie qu'en valeur, et dans des zones adjacentes à la frontière du territoire dévolu à la Palestine, et dans la même proximité que celles annexées par Israël. La partie palestinienne continuera par la suite à insister sur le fait que des territoires qui ne seraient pas placés sous souveraineté palestinienne, tels les «passages/corridors sécurisés» proposés par Israël, ainsi que les intérêts économiques (israéliens) ne sauraient être inclus dans les
calculs afférents à l'échange (territorial) envisagé. La partie palestinienne a maintenu que le no man's land (région du Latrun) faisait partie de la Cisjordanie.
Les Israéliens n'étaient pas d'accord. La partie israélienne a exigé 2 % de territoire supplémentaires qui auraient fait l'objet d'un arrangement de location,
ce à quoi la partie palestinienne a répondu que la question de la location de territoires ne pourrait être discutée qu'après l'établissement de l'Etat palestinien et le transfert de territoires à l'Autorité palestinienne.
1.2. Bande de Gaza
Ni l'une ni l'autre des deux parties n'a présenté de carte relative à la bande de Gaza. Il était implicite que la bande de Gaza serait placée en totalité sous souveraineté palestinienne, mais certains détails doivent encore être aplanis. Toutes les colonies israéliennes de la bande de Gaza devront être évacuées. La partie palestinienne a réclamé que cela soit fait dans un délai de six mois, calendrier rejeté par la partie israélienne.
1.3. Couloirs/passages sécurisés entre Gaza et la Cisjordanie
Les deux parties sont convenues qu'il y aurait un passage sécurisé depuis le nord de Gaza (Beit Hanun) jusqu'au district d'Hébron, et que la Cisjordanie et la Bande de Gaza devront être reliées territorialement. La nature du régime régissant le lien territorial et la souveraineté le régissant n'ont pu faire l'objet d'un accord.
2. Jérusalem
2.1. Souveraineté
Les deux parties ont accepté en principe la suggestion Clinton d'avoir une souveraineté palestinienne sur les quartiers arabes et une souveraineté israélienne sur les quartiers juifs.
La partie palestinienne s'est déclarée prête à discuter de l'exigence formulée par Israël d'exercer sa souveraineté sur les quartiers-implantations de Jérusalem-Est, construits après 1967, à l'exception de Jabal Abu Ghneim (Har Homa) et Ras al-Amud. La partie palestinienne a rejeté l'idée d'une souveraineté israélienne sur les colonies situées dans l'ère métropolitaine de Jérusalem, notamment Ma'aleh Adumim et Givat Ze'ev. La partie palestinienne a cru comprendre qu'Israël était prêt à accepter la souveraineté palestinienne sur les quartiers arabes de Jérusalem-Est, y compris des parties de la Vieille Ville.
La partie israélienne a compris que les Palestiniens étaient prêts à accepter la souveraineté israélienne sur les quartiers juifs de la Vieille Ville ainsi que sur une partie du Quartier arménien.
La partie palestinienne a cru comprendre que la partie israélienne acceptait de discuter des revendications territoriales palestiniennes à Jérusalem-Ouest.
2.2. Jérusalem, ville ouverte
Les deux parties sont favorables à l'idée de Jérusalem Ville Ouverte.
La partie israélienne a suggéré la création d'une ville ouverte dont l'aire géographique comprendrait la Vieille Ville de Jérusalem et, audelà, une zone définie comme le Bassin Historique ou le Domaine Sacré. La partie israélienne a soulevé l'idée de la mise en place d'un mécanisme de coordination quotidienne et différents modèles de coordination et de coopération municipales ont été suggérés (en ce qui concerne l'infrastructure, la voirie, le réseau électrique, l'assainissement, le ramassage des ordures, etc.) Des arrangements de cette nature pourraient faire l'objet d'une présentation formelle dans le cadre d'un accord détaillé à venir. La partie israélienne a proposé un «régime de frontière souple», à l'intérieur de Jérusalem, entre Al-Quds et Yérushalaïm, qui accorde aux deux parties de la ville des avantages liés à «un régime de frontière symbolique». Par ailleurs, la partie israélienne a proposé un certain nombre de dispositions spéciales pour les Palestiniens et les Israéliens résidents de la Ville Ouverte (de Jérusalem), afin de garantir que les accords concernant la Ville Ouverte n'affectent ni leur vie quotidienne ni ne remettent en cause la
souveraineté de chaque partie sur la partie qui lui revient de droit de la Ville Ouverte.
2.3. Jérusalem, capitale de deux Etats
La partie israélienne a accepté que la Ville de Jérusalem soit la capitale de deux Etats : Yérushalaïm, capitale d'Israël, et Al-Quds, capitale de l'Etat de Palestine.
La partie palestinienne a réaffirmé sa revendication, connue, à savoir que Jérusalem-Est devienne la capitale de l'Etat de Palestine.
2.4. Le Bassin Sacré/Historique et la Vieille Ville
Il y a eu une tentative de développer un concept alternatif afférent à la Vieille Ville et à ses environs,
et la partie israélienne a avancé plusieurs modèles alternatifs à discuter, telle la mise sur pied d'un mécanisme permettant une coordination et une coopération étroites dans la Vieille Ville. L'idée d'un régime spécial pour les forces de police a été discutée, mais n'a pas abouti à un accord. La partie israélienne a exprimé son intérêt, et fait part de ses préoccupations pour l'aire géographique conceptualisée sous la dénomination de Bassin Sacré (qui inclut le Cimetière juif et le Mont des Oliviers, la Cité de David et la Vallée du Cédron).
La partie palestinienne a confirmé qu'elle était désireuse de prendre en considération les intérêts et les préoccupations israéliens pour peu que les lieux désignés demeurent sous souveraineté palestinienne.
Une autre suggestion concernant le Bassin Sacré, avancée de manière informelle par la partie israélienne, consistait en l'institution d'un régime spécial ou d'une quelconque forme d'internationalisation pour l'ensemble de cette zone, ou encore d'un régime conjoint accompagné d'une coopération et d'une coordination ad hoc.
La partie palestinienne n'a pas accepté de donner suite à l'une quelconque de ces suggestions, bien que la négociation à leur sujet soit susceptible d'être poursuivie.
2.5. Lieux Saints : Mur Occidental et Mur des Lamentations
Les deux parties ont accepté le principe d'un contrôle respectif sur les lieux saints respectifs de chacune des parties (contrôle religieux et gestion courante). Selon ce principe, la souveraineté israélienne sur le Mur Occidental devrait être reconnue, bien qu'il subsistât un différend relatif à la délimitation de l'aire couverte par celui-ci et en particulier le lien avec ce qui est désigné dans les propositions Clinton comme l'espace sacré pour le judaïsme, dont il est partie constituante.
La partie palestinienne a reconnu qu'Israël a demandé que lui soient attribuées les parties reconnues comme saintes du Mur Occidental, mais a maintenu que la question du Mur des Lamentations ou/et du Mur Occidental n'avait pas été résolue. Elle a insisté sur l'importance qu'elle voit à ce que l'on distingue le Mur Occidental du Mur des Lamentations, qui en est une partie, le Mur Occidental étant connu dans la religion musulmane pour constituer le mur d'Al-Buraq.
2.6. Al-Haram al-Sharif/Mont du Temple
Les deux parties sont convenues de la non-résolution de la question du Haram al-Sharif/Mont du Temple. Toutefois, elles étaient près d'accepter les propositions Clinton relatives à la souveraineté palestinienne
sur le Haram al-Sharif, en dépit des réserves tant palestiniennes qu'israéliennes. Les deux parties ont noté les progrès réalisés en matière de dispositions pratiques relatives aux évacuations, à la construction et à l'ordre
public dans l'aire du complexe (religieux). Une suggestion informelle a été soulevée selon laquelle, durant une période qui pourrait être de l'ordre de trois ans, le Haram al-Sharif/Mont du Temple serait placé sous la souveraineté du P5 + le Maroc (ou un autre pays musulman), et que durant cette période les deux parties pourraient se mettre d'accord sur une nouvelle solution ou convenir d'un commun accord de proroger les arrangements existants. En absence d'accord, les parties reviendraient à l'application des propositions Clinton. Ni l'une ni l'autre des parties n'a accepté cette suggestion.
3. Les réfugiés
Des documents «non-papiers» ont été échangés, ce qui fut considéré comme un bon début pour les discussions à venir. Les deux parties ont déclaré que le problème des réfugiés était fondamental pour l’avenir des relations israélo-palestiniennes et qu'une solution globale et juste à ce problème était essentielle si l'on voulait créer une paix durable et moralement juste. Elles ont accepté d'adopter les principes et les références susceptibles de faciliter l'adoption d'un accord. Les deux parties ont suggéré, comme point de départ, qu'elles
devraient convenir du fait qu'un règlement équitable du problème des réfugiés conformément à la résolution 242 du Conseil de Sécurité de l'ONU devrait conduire à la mise en application de la résolution 194 de l'Assemblée Générale de l'ONU.
3.1. Récit historique
La partie israélienne a mis en avant la suggestion d'un récit conjoint de la tragédie des réfugiés palestiniens.
La partie palestinienne a discuté de la narration proposée et des progrès significatifs ont été relevés ; toutefois un accord n'a pu être atteint dans la tentative d'établir une narration historique commune en vue du texte général.
3.2. Retour, rapatriement, réinstallation et réhabilitation
Les deux parties se sont engagées dans une discussion des modalités de la résolution du problème des réfugiés.
La partie palestinienne a réitéré l'affirmation que les réfugiés palestiniens devraient avoir le droit de retourner dans leur foyer en application de l'interprétation donnée par la résolution 194 de l'assemblée générale des nations-unies.
La partie israélienne a déclaré comprendre que le désir de retour, conformément à l'énoncé d'UNGAR 194, devrait être mis en actes à l'intérieur du cadre de l'un des programmes suivants :
A. Retour et rapatriement :
1. en Israël
2. dans les territoires remis à Israël dans le cadre d'un échange terri torial
3. dans l'Etat palestinien.
B. Réhabilitation et réinstallation :
1. Réhabilitation dans le pays d'accueil
2. Réinstallation dans un pays tiers.
Dans tous ces programmes, priorité devrait être accordée à la population palestinienne réfugiée au Liban.
La partie palestinienne a souligné que les options ci-dessus devraient faire l'objet du libre choix des réfugiés, et ne pas obérer leur droit à retrouver leur foyer, conformément à l'interprétation qu'elle fait d'UNGAR 194.
La partie israélienne, de manière informelle, a suggéré un programme d'absorption en quinze ans, comportant les trois pistes, programme qui a été discuté, mais non validé.
La première piste fait référence à l'absorption en Israël. Il n'y a pas eu d'accord sur un contingent déterminé, mais un document non-papier faisait référence à 25 000 personnes au cours des trois premières années de ce programme (le nombre de 40 000 réfugiés, sur les cinq premières années, non consigné dans le non-papier, a été évoqué verbalement).
La seconde piste fait référence à l'absorption de réfugiés palestiniens sur le territoire israélien destiné à être transféré à la souveraineté palestinienne,
et la troisième fait référence à l'absorption de réfugiés dans le cadre d'un plan de rapprochement familial.
La partie palestinienne n'a avancé aucun chiffrage, mais a déclaré que les négociations ne sauraient débuter sans que les Israéliens ne fassent une offre de départ. Elle a maintenu que l'acceptation par Israël du retour des réfugiés ne devrait en aucun cas se faire au détriment de programmes existant à l'intérieur d'Israël, tel celui du rapprochement familial.
3.3 Compensation
Les deux parties sont convenues de la création d'une Commission internationale et d'un Fonds international constituant un mécanisme permettant de traiter les compensations sous tous leurs aspects. Elles sont convenues que les compensations «modiques» devraient être versées aux réfugiés concernés par la procédure «rapide», les réclamations de compensations pour les pertes immobilières inférieures à un certain montant devant faire l'objet de cette procédure «accélérée».
Des progrès ont été enregistrés également dans le domaine des compensations par Israël des pertes matérielles, des terres et des capitaux expropriés, y compris un agrément sur un paiement engagé sur un fonds global israélien ou une somme forfaitaire à discuter qui devrait être versée par Israël au Fonds international.
D'après la partie israélienne, ce montant devrait être calculé en fonction d'une étude macro-économique destinée à évaluer les biens concernés afin d'en calculer une valeur actuariée objective.
La partie palestinienne, toutefois, a déclaré que cette somme devrait être calculée sur la base des relevés de l'UNCCP, l'Hypothèque des Propriétaires Absents et d'autres données idoines, en tenant compte d'un coefficient permettant de parvenir à une actualisation équitable.
3.4 L'UNRWA
Les deux parties sont convenues du fait que l'UNRWA devrait être progressivement mise en extinction en fonction d'un calendrier de cinq ans accepté d'un commun accord.
La partie palestinienne a ajouté la possibilité que cette période soit susceptible d'être prorogée, de manière à s'assurer que ce délai s'impose bien aussi à la mise en application des autres aspects de l'accord relatif aux réfugiés, ainsi qu'avec l'extinction du statut de réfugié pour les Palestiniens dans les divers endroits où ils vivent en exil.
3.5 Anciens réfugiés juifs
La partie israélienne a exigé que le problème des compensations à allouer à des juifs anciens réfugiés de pays arabes soit reconnu, tout en admettant que cela ne relève pas de la responsabilité des Palestiniens ni d'une responsabilité bilatérale.
La partie palestinienne a réaffirmé que cela ne saurait faire l'objet d'un accord bilatéral palestino-
israélien.
3.6 Restitutions
La partie palestinienne a soulevé la question de la restitution des biens des réfugiés.
La partie israélienne a rejeté toute restitution.
3.7 Fin des réclamations
La question de la fin des réclamations a été discutée, et il a été suggéré que la mise en application de l'accord devrait constituer une mise en application complète et définitive d'UNGAR 194 et, du même coup, entraîner l'échéance de toute réclamation.
4. La Sécurité
4.1 Les stations d'alerte avancée
La partie israélienne a exigé de disposer de trois stations d'alerte avancée en territoire palestinien.
La partie palestinienne s'était déclarée prête à accepter le fonctionnement permanent de stations d'alerte avancée (sur son territoire), mais soumis à certaines conditions.
Le mécanisme exact devra, par conséquent, en être détaillé au cours de négociations à venir.
4.2 Capacités militaires de l'Etat palestinien
La partie israélienne a maintenu que l'Etat de Palestine devrait être dépourvu de forces armées, conformément aux propositions Clinton.
La partie palestinienne était prête à accepter des limitations à ses acquisitions d'armement et à être définie comme un Etat à l'armement limité.
Les deux parties ne se sont pas encore mises d'accord sur la portée des limitations de cet armement, mais elles ont commencé à explorer diverses options. Elles sont tombées d'accord pour constater que ce problème est resté pendant.
4.3 Espace aérien
Les deux parties ont reconnu que l'Etat de Palestine jouirait de sa souveraineté sur son espace aérien.
La partie israélienne a convenu de recevoir et d'honorer tous les droits de l'aviation civile de l'Etat de Palestine conformément aux règlements internationaux, mais a exprimé son désir de parvenir à un système de contrôle aérien unifié, sous la supervision du contrôle aérien israélien. De plus, Israël a exigé l'accès à l'espace aérien palestinien pour ses opérations militaires et ses vols d'entraînement.
La partie palestinienne s'était montrée intéressée à étudier des modèles prévoyant une large coopération et une coordination dans la sphère de l'aviation civile, mais opposée à la cession de son contrôle aérien à un contrôle aérien israélien prépondérant. En ce qui concerne l'ouverture de l'espace aérien palestinien aux opérations militaires et aux vols d'entraînement (d'Israël), la partie palestinienne a rejeté cette demande comme contraire à la neutralité de l'Etat de Palestine, invoquant l'argument qu'elle ne saurait accorder ce privilège à Israël tout en le déniant aux pays arabes voisins.
4.4 Calendrier d'un retrait de la Cisjordanie et de la Vallée du Jourdain
En se basant sur les propositions Clinton, la partie israélienne est convenue d'un retrait de la Cisjordanie sur une période de 36 mois, 36 mois supplémentaires concernant le retrait de la Vallée du Jourdain en coordination avec une force internationale, en insistant sur le fait qu'une distinction devrait être faite entre le retrait de la Vallée du Jourdain et le retrait d'où que ce soit ailleurs.
La partie palestinienne a rejeté le processus de retrait en 36 mois de Cisjordanie, alléguant le fait qu'un processus aussi long serait de nature à exacerber les tensions palestino-israéliennes. Elle a proposé un retrait en 18 mois, sous le contrôle de forces internationales. En ce qui concerne la Vallée du Jourdain, la partie palestinienne était prête à ce que le retrait des forces armées israéliennes s'opère en 10 mois supplémentaires. Bien que les Palestiniens se fussent déclarés prêts à accepter la présence de forces internationales en Cisjordanie pour une période plus longue, elle a refusé d'accepter la continuation de la présence de forces israéliennes dans ce même territoire.
La partie israélienne a exigé de maintenir et de gérer cinq bases militaires d'urgence sur le territoire palestinien (dans la Vallée du Jourdain),
la réponse palestinienne n'acceptant qu'un maximum de deux bases d'urgence, conditionnées par le respect d'un délai quant à leur démontage. De plus, la partie palestinienne a considéré que ces deux bases militaires d'urgence devraient être placées sous contrôle international et non sous contrôle israélien.
De manière informelle, la partie israélienne s'est déclarée prête à étudier les moyens permettant à une présence multinationale de trouver les modalités susceptibles de répondre aux préoccupations de l'une et l'autre parties.
La partie palestinienne a refusé d'admettre le déploiement de forces armées israéliennes sur le territoire palestinien dans des situations d'urgence, mais elle s'est déclarée prête à examiner les modalités de recours à des forces internationales dans cette finalité, en particulier dans le cadre d'efforts en vue d'une coopération en matière de sécurité régionale.
4.6. Coopération en matière de sécurité et lutte contre le terrorisme
Les deux parties étaient disposées à s'engager à promouvoir la coopération bilatérale en matière de sécurité et de lutte contre le terrorisme.
4.7 Frontières et transit international
La partie palestinienne était confiante dans le fait que la souveraineté de la Palestine sur ses frontières et sur les points frontaliers internationaux se verrait reconnue dans l'accord final.
Les deux parties n'avaient, toutefois, pas encore résolu le problème concernant notamment la question de la surveillance et du contrôle aux frontières internationales de la Palestine (présence israélienne/ présence internationale ?).
4.8 Domaine électromagnétique
La partie israélienne a reconnu que l'Etat de Palestine exercerait sa souveraineté sur son espace électromagnétique et s'est engagée à ne pas chercher (dans le futur) à restreindre l'utilisation commerciale par
les Palestiniens de cet espace, mais en cherchant à exercer sur celui-ci un certain contrôle à des fins de sécurité.
La partie palestinienne s'est attachée à obtenir une souveraineté et des droits pleins et entiers sur sa sphère électromagnétique, mais s'est déclarée prête à satisfaire à des besoins raisonnables d'Israël dans le cadre d'un accord de coopération, en conformité avec les lois et règlements internationaux.
Problème de Ma'aleh Adumim
L'importance de la reconnaissance par Israël de la frontière du 4 juin 1967 réside en ceci que,
depuis 1967 (et encore aujourd'hui), la position officielle d'Israël est que la résolution 242 du Conseil de Sécurité de l'ONU exige un retrait «de» territoires conquis au cours de la guerre dite des Six Jours.
La position arabe, en revanche, est que cette résolution exige le retrait «des» territoires.
Le refus officiel d'Israël de reconnaître les frontières du 4 juin 1967 représente actuellement un obstacle devant le ministre des Affaires étrangères Simon Pérès, qui ne lui permet pas d'atteindre un point d'accord avec le président du Conseil Législatif Palestinien, Ahmed Qure'ï (Abu Ala). Il n'y a (à ce jour) pas de confirmation de l'affirmation faite par Pérès, selon laquelle les Palestiniens auraient accepté une formulation selon laquelle un accord définitif serait basé sur la résolution 242. Israël a accepté de reconnaître la frontière du 4 juin 1967 en tant que tracé de base pour la frontière entre Israël et la Palestine après que les Palestiniens eurent admis en principe de discuter d'échanges territoriaux en Cisjordanie, tels que proposés par Clinton, échanges qui permettraient à Israël d'annexer des parties de la Cisjordanie adjacentes à la Ligne Verte (mais pas des parties de la bande de Gaza).
Les cartes présentées par les Palestiniens à Taba donnaient à Israël 3,1 % de la Cisjordanie. C'est moins que la limite inférieure avancée dans le plan Clinton (selon lequel les Palestiniens se verraient accorder de 94 à 96 % de la Cisjordanie).
Israël avait exigé 6 % - ce qui était la limite supérieure des propositions Clinton - plus 2 % supplémentaires dans le contexte de l'agrément prévoyant une location de territoires. Les Palestiniens ont rejeté égalemen, la demande d'Israël que le no man's land autour de Latrun ne soit pas considéré comme faisant partie intégrante de la Cisjordanie. D'après le document, Israël a renoncé à la totalité des colonies dans la Vallée du Jourdain, insistant en revanche sur ses besoins, dans cette zone, en matière de sécurité.
Le différend a porté sur une large bande de territoire entre Ma'aleh Adumim et Givat Ze'ev, qui contient tout à la fois une importante population palestinienne et les réserves de terrain les plus importantes pour l'extension de Jérusalem-Est.
Les Palestiniens sont revenus sur leur inclination première à englober ces deux colonies dans les blocs de colonies devant être annexés à Israël après qu'ils eurent constaté qu'Israël insistait, par ailleurs, pour annexer la large bande de terre qui les unit, ce qui aurait signifié que des citoyens palestiniens se seraient retrouvés inopinément en territoire sous souveraineté israélienne.
Barak avait donné instruction à son négociateur en chef, Gilead Sher, de dire aux Palestiniens que la carte présentée par le ministre israélien des Affaires étrangères d'alors, Shlomo Ben-Ami, qui réduisait la superficie du bloc des colonies (incluant la bande de territoires entre Ma'aleh Adumim et Givat Ze'ev) à seulement 5 % de la Cisjordanie, n'était pas valable.
Une autre dissension, restée sans solution, découlait du refus d'Israël de recevoir la demande des Palestiniens d'un ratio de 1 à 1 entre la superficie de la Cisjordanie annexée à Israël et les parties du territoire israélien qui seraient données aux Palestiniens en contrepartie. Israël prônait un ratio de 1 à 2 (en sa faveur).
De plus, les Palestiniens rejetaient la proposition d'Israël en vertu de laquelle les dunes de Halutza, dans le désert du Néguev, l'aire de «libre passage» entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, et la partie du port d'Ashdod qui serait laissée à l'usage des Palestiniens seraient pris en compte dans l'échange de territoires. Ils insistaient sur la nécessité que les terres qu'ils recevraient (dans cet échange) soient contiguës tant avec la Cisjordanie qu’avec la Bande de Gaza, et n'incluent aucun territoire qui serait simplement mis à leur disposition, mais sur lequel ils n'auraient pas de souveraineté.
Combien le Mur Occidental mesure-t-il ?
La proposition Clinton a aplani le terrain en vue d'arrangements sur Jérusalem, mais elle a aussi créé le point principal de dispute entre les deux parties. Un accord s'est fait sur le fait que Jérusalem-Est, qui serait appelé Al- Quds, serait la capitale de la Palestine. On est également convenu d'une division des faubourgs de Jérusalem-Est permettant que des faubourgs juifs demeurent sous souveraineté israélienne (à l'exception de Har Homa, quartier que les premières familles juives sont en train de venir habiter actuellement, et Ras al-Amud), tandis que des faubourgs arabes seraient transférés à la souveraineté palestinienne.
De plus, il a été convenu que des parties de la Vieille Ville - le quartier musulman, le quartier nord et une partie du quartier arménien - seraient confiées aux Palestiniens. Mais la proposition Clinton n'a absolument pas aidé les deux parties à tracer des frontières mutuellement acceptées entre la Ville Ouverte (concept sur lequel les deux parties sont tombées d'accord) et les zones adjacentes palestiniennes, d'un côté, et israéliennes, de l'autre.
La Ville Ouverte (de Jérusalem) est un territoire sur lequel les citoyens des deux Etats peuvent pénétrer sans avoir à franchir aucun point de contrôle.
Les Palestiniens voulaient que cette zone englobe la totalité de Jérusalem, alors que les Israéliens voulaient limiter cette Ville Ouverte à la seule Vieille Ville.
De plus, les propositions Clinton ont compliqué les négociations sur le point le plus sensible : le Mur Occidental. Clinton avait fait allusion aux «parties sacrées» du Mur, ouvrant une brèche à la revendication
palestinienne selon laquelle seule la partie apparente de la muraille (le Mur des Lamentations) est considérée comme sacrée par les juifs, et que seule cette partie, par conséquent, devrait être laissée à la souveraineté d'Israël. Les Palestiniens affirmaient que les tunnels sous le Mur Occidental faisaient partie du Haram al-Sharif (Mont du Temple).
Depuis la fin des négociations de Taba, de nombreuses réunions et séminaires ont eu lieu, qui visaient à réduire les divergences auxquels ont assisté des politiciens et des experts des deux parties, ainsi que d'autres pays.
Les symboles de la souveraineté
Israël a insisté sur le fait qu'il voulait conserver la souveraineté sur les «passages sûrs» entre Gaza et la Cisjordanie, les Palestiniens ne recevant que des droits d'usage.
En ce qui concerne l'espace aérien, toutefois, Israël adoptait une approche plus généreuse qu'en matière de souveraineté. Néanmoins, il demandait des droits à utiliser l'espace aérien palestinien, y compris à des fins d'exercice pour son armée de l'air.
Le document révèle que les Palestiniens ont exprimé leur acceptation du principe de limites opposées à leur armement et ont même accepté de prendre en compte les impératifs qui s'imposent à Israël en matière de sécurité (ils ont donné leur accord à trois stations d'alerte avancée et à deux «bases d'urgence», à comparer aux cinq qu'Israël avait exigées en sus des stations d'alerte avancée).
Mais pour tout ce qui concerne les symboles de la souveraineté, les Palestiniens ont adopté une ligne plus intransigeante. Ainsi, ils ont insisté sur le fait que les «bases d'urgence» soient servies par des forces internationales, et non par l'armée israélienne. De plus, le problème du contrôle des frontières internationales de la Palestine est resté sans solution, pour la même raison : à savoir quelle réponse serait apportée à la question de savoir qui tiendrait les postes de contrôle.