Les dirigeants des pays arabes, par la voix du conseil de coopération du Golfe décident de proposer le plan au sommet de Fes (dit Fes I) le 25 novembre 1981. Mais l'opposition du Syrien Hafez El Assad provoque l'ajournement de la réunion.
Il faudra attendre le sommet Fes II, du 6 au 9 septembre 1982 pour que le plan soit de nouveau soumis aux pays arabes.
– Retrait d'Israël de la totalité des territoires arabes occupés en 1967, y compris de la ville arabe de Jérusalem.
– Démantèlement de toutes les colonies de peuplement établies par Israël dans les territoires arabes occupés depuis 1967.
– Garantie de la liberté d'accomplir les rites de toutes les religions dans les Lieux saints.
– Reconnaissance du droit du peuple palestinien au retour (dans sa patrie) et dédommagement de tout Palestinien ne désirant pas y retourner.
– Mise de la Cisjordanie et de la bande de Gaza sous la tutelle des Nations unies pour une période transitoire ne dépassant pas quelques mois.
– Création d'un État palestinien ayant Jérusalem pour capitale.
– Reconnaissance du droit de tous les États de la région à vivre en paix.
– Il revient aux Nations unies ou à plusieurs États membres de garantir l'exécution de ces principes.
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Pour le prince Abdallah, " Notre plan reconnaît le droit à l'existence d'Israël uniquement après l'acceptation d'un État palestinien, le retour aux frontières de 1967 et la fin de l'état de belligérance... Si ces conditions sont remplies, la reconnaissance d'Israël sera de facto. Comment pouvons-nous leur dénier ce droit ? "
Le plan est bien accueilli par les pays arabes. Coté Palestinien, Abu Jihad, numéro 2 de l'OLP estime que ces propositions sont " extrêmement importantes et positives ". le FDLP (M. Hawatmeh) et le FPLP (G. Habache) le refusent. Pour Sadate, le président Egyptien, le plan ne présente rien de nouveau.
Coté israélien, M. Yitzhak Shamir, déclare : " La reconnaissance implicite d'Israël qui perce à travers ce plan n'est pas un fait nouveau ; ce plan est, d'une manière générale, dangereux pour l'existence d'Israël. Nous l'avons rejeté dans le passé et nous continuerons à le rejeter. "
Begin propose le plan à la Knesset le 3 novembre. L'assemblée le rejette par 55 voix contre, 18 pour et 17 absentions. Les travaillistes sont divisés : 27 se sont abstenus et 10 ont voté pour le plan.
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(article Larousse en ligne journal de l'année 1982)
"Mettant à profit l'affaiblissement de ses rivaux du Golfe — l'Iran et l'Iraq — engagés depuis près de deux ans dans une lutte sanglante, l'Arabie Saoudite ne cesse d'affirmer sa vocation de puissance régionale. Ses dirigeants n'oublient pas pour autant le rôle privilégié qu'ils jouent dans la crise du Proche-Orient et s'efforcent de rassembler autour d'eux modérés et radicaux du monde arabe. Riyad souhaite en particulier prendre la relève de la politique de Camp David, virtuellement condamnée après l'assassinat du président Sadate et le refus de Jérusalem d'honorer le volet palestinien des accords de paix égypto-israéliens.
Fahd ibn Abdel Aziz, le prince héritier qui succédera en juin 1982 au roi Khaled, décédé, lance, le 7 août 1981, un appel aux États-Unis et à l'Europe occidentale pour que des efforts soient déployés en faveur d'un « règlement juste et global au Proche-Orient ». Le projet de paix saoudien, désormais connu sous l'appellation de plan Fahd, admet implicitement le droit à l'existence d'Israël dans le cadre d'une solution acceptable pour les Palestiniens et demande aux USA de reconnaître l'OLP comme représentant du peuple palestinien.
Le plan Fahd est accueilli avec une compréhension mesurée par l'ensemble des pays arabes modérés et par Yasser Arafat qui, selon certaines informations, aurait personnellement participé à son élaboration. Il est cependant combattu avec virulence par les organisations palestiniennes du Front du refus et par les pays arabes du Front de la fermeté, menés par Damas.
La France, par la voix de son ministre des Relations extérieures Claude Cheysson, rend hommage au prince Fahd et à « ses propositions constructives », qui seront au centre des entretiens du président Mitterrand, en visite officielle en Arabie Saoudite du 26 au 28 septembre 1981.
Le prince héritier saoudien reconnaît publiquement, à l'issue de ses entretiens avec le président Mitterrand, que son plan ne constitue pas une « proposition rigide à prendre ou à laisser », mais un ensemble de suggestions susceptibles d'être modifiées pour faciliter la recherche d'une solution acceptable par les deux parties. Il affirme qu'il espère convaincre les pays arabes que son plan « peut constituer un point de départ utile » pour une négociation au Proche-Orient.
Le plan Fahd échouera cependant lamentablement, en partie grâce aux réticences de Washington, peu soucieux de heurter de front M. Begin pour qui le projet saoudien « n'est qu'un nouveau plan de destruction d'Israël ». Pourtant, le 28 octobre 1981, la décision du Sénat américain d'autoriser la vente d'avions radars AWACS à l'Arabie Saoudite, saluée par Riyad comme « un succès de la politique de sagesse et de modération de l'Arabie Saoudite », paraît frayer le chemin à une coopération entre Riyad et Washington en vue d'un règlement israélo-arabe.
D'autant plus que la décision du Sénat précède de vingt-quatre heures une déclaration de R. Reagan qualifiant le plan Fahd d'« ensemble de propositions très intéressant ».
L'Arabie Saoudite réagit pour la première fois aux nombreuses violations israéliennes de son espace aérien en envoyant, le 9 novembre 1981, ses avions militaires à la rencontre des chasseurs israéliens qui ont pris l'habitude de survoler impunément la zone militaire de Tabouk. En révélant publiquement cet incident aérien, Riyad espère mettre les États-Unis face à leurs responsabilités. Le 10 novembre, l'Arabie Saoudite donne une nouvelle preuve de sa modération en faisant entériner le plan Fahd par les chefs d'État du CCG (Conseil de coopération du Golfe), qui décident de le soumettre officiellement au sommet des chefs d'État arabes de Fès.
Washington ne fera rien pour faciliter la tâche de l'émir Fahd et refusera avec obstination d'exercer la moindre pression sur ses alliés israéliens pour les inciter à rendre plus crédible — ne serait-ce que par un geste de bonne volonté — le plan de paix saoudien. Les manœuvres Bright Star 82, entreprises à grand renfort de publicité en Égypte, au Soudan, en Somalie et à Oman par des unités américaines, indiquent clairement que Washington est toujours décidé à organiser une alliance des États de la région — Israël compris — face à l'Union soviétique.
Une telle coalition inquiète la plupart des capitales arabes, pour lesquelles le règlement du problème palestinien est prioritaire. Le plan Fahd semble d'ores et déjà condamné et, malgré son ascendant indiscutable, Riyad ne peut sauver son projet de paix. Le sommet de Fès est suspendu sine die, avant même d'avoir réellement commencé ses travaux, le 26 novembre 1981. L'Arabie Saoudite ne sort pas grandie de l'épreuve, mais ne désespère pas de relancer son plan dès que l'Égypte aura réintégré la famille arabe, une perspective que les dirigeants de Riyad tiennent pour presque certaine à plus ou moins longue échéance."