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Lorsque Jérusalem est assiégée en -701 par les armées d'Assyrie, le roi Ezéchias renforce les murailles et fait creuser un tunnel pour approvisionner la ville en eau.

“Le reste des actions d’Ezéchias, tous ses exploits, et comment il fit le bassin et le tunnel, et amena les eaux dans la ville…” (Rois II 20 - 20 )

“Ce fut aussi lui, Ezéchias, qui boucha l’issue supérieure des eaux de Guihon, et les conduisit en bas vers la Cité de David.” (Chroniques II 32-30)

 En fait, Ezéchias n'aura pas à combattre, les Assyriens qui ont montré leur force en assiégeant la ville voisine de Lakish, se satisfont d'un énorme tribut, et s'en vont.

La seule source d'approvisionnement en eau de Jérusalem est la source de Gihon. Située à l'est de la ville, elle est très vulnérable. Le tunnel permet de rediriger les eaux vers un endroit plus protégé, le bassin de Siloé (Silwan). La ville à l'époque est plus développée sur la colline de l'Ophel, celle que surplombe la muraille actuelle, à l'est de la mosquée d'Al-Aqsa. La source est d'autant plus vitale qu'elle ne tarit pas en été malgré le climat très sec.

Ce n'est pas la première fois qu'un tunnel est creusé comme l'ont découvert les archéologues. Ygal Shiloh qui dirigea les fouilles de la cité de David l'a expliqué lors d'une conférence :

"Le premier [tunnel ] était le plus sûr : il se composait d'une galerie souterraine - dite de Warren, depuis sa découverte par Warren en 1867 - en trois éléments : à partir de la source, un chenal souterrain de 20 mètres de long amenait l'eau jusqu'au bas d'un puits vertical d'une douzaine de mètres de hauteur ; en haut de ce puits, un tunnel en escalier long de 39 mètres et présentant une dénivellation de 12,7 mètres. L'eau était hissée du puits par seaux, puis portée le long du tunnel en escalier. Ainsi était résolu le problème des liaisons entre la ville et la source située hors des murailles. Et par la même occasion, tout ennemi éventuel pouvait difficilement couper l'eau ou pénétrer dans la ville par les tunnels d'amenée d'eau. C'était, en effet, par un tunnel cananéen que Joab, un compagnon de David, se serait faufilé dans Jérusalem assiégée par les Hébreux.

Le deuxième système d'approvisionnement en eau, construit au dixième ou au neuvième siècle avant notre ère, était le canal de Siloé, tantôt en tunnel, tantôt à l'air libre, qui suivait le versant ouest du Cédron et amenait, par gravité, l'eau de la source dans une première piscine. Sur le trajet du canal, des ouvertures permettaient, les unes de récupérer l'eau de pluie ruisselant sur le versant est de la colline, les autres de distribuer l'eau dans les lopins cultivés dans la vallée du Cédron.

Le troisième système, attribué au roi Ezéchias, était entièrement en tunnel : 503 mètres de galerie qui amenait l'eau de Gihon, aussi par gravité, dans les réservoirs (la "piscine") de Siloé.

Les trois systèmes d'approvisionnement en eau montrent l'importance de la ville au temps des rois : les autres centres royaux (Hatzor, Meggido et Gibéon) n'en avaient qu'un. De même, la qualité et la quantité des objets retrouvés (céramiques, outils, ustensiles, objets usuels, etc.) sont très supérieures à ceux qui ont été mis au jour sur les sites des cités contemporaines : David puis Salomon avaient vraiment installé là leur capitale." in Lemonde Yvonne Rebeyrol, 12 mai 1982

 Les fouilles sur le site ont commencé en 1978. En 1980 des Juifs orthodoxes ont tenté de faire interdire les fouilles qui selon eux profanaient un cimetière. Mais la Cour Suprême leur a donné tort et à autorisé la poursuite des fouilles archéologiques.

Le tunnel a été découvert en 1838 par l'archéologue Edward Robinson puis “nettoyé” par l’équipe de Montague Parker (1909-11). Le travail  a repris durant une quinzaine d'année à compter de1995. Les nouvelles excavations mirent au jour quelques outils et même l'équipement archéologique laissé derrière par l’expédition Parker.

 Le tunnel creusé est long de 533 mètres, suivant un trajet en "S". Il d'abord été dit assez sévèrement, en 1929, qu'il s'agissait "d'une oeuvre pathétique d'ingénierie". Les recherches actuelles permettent maintenant de penser que les ouvriers ont suivi une faille naturelle dans le rocher, suite à une dissolution karstique,  qui a facilité le creusement, au prix d'une trajectoire plus longue. A vol d'oiseau, la longueur n'est que de 440 mètres.

Le tunnel, haut de 1,63 m,  reliait la source de Gihon au bassin de Siloé, descendant sur un dénivelé de 2,27 mètres et fut creusé par deux équipes travaillant à chacune des extrémités. Une inscription en hébreu ancien, découverte sur place en 1880, près du bassin de sortie, rapporte la phase finale du creusement. Elle  a été trouvée par un jeune baigneur allemand et brisée lorsqu'un particulier a tenté de l'arracher. Heureusement plusieurs fragments sont sauf. Le texte récupéré décrit ainsi la fin des travaux de percement :

 « ...Le creusement. Voici l’histoire du creusement. Pendant que les tailleurs de la roche brandissaient leurs outils chacun en face de ses compagnons, un moment où manquaient trois coudées (1,50 m) pour la perforation, la voix d’un homme fut entendue, demandant à son compagnon pourquoi il y avait une crevasse. À la droite… Le jour de la perforation, les mineurs frappèrent chacun pour rencontrer son compagnon… et les eaux s’écoulèrent de la source jusqu’à la piscine, environ 1200 coudées (533 m). La roche était à 100 coudées (50 m) au-dessus de la tête des tailleurs de la roche. 

La pierre est la propriété du musée des oeuvres de l'Orient ancien d'Istanbul. Le texte ne mentionne pas Ezechias mais une datation au Carbone 14 a confirmé l'époque.

Le bassin de Siloé est constitué en fait de deux bassins en bas de la colline de l'Ophel, où se trouve actuellement le village de Silwan.  Les eaux du Gihon finissent donc dans ces bassins.

Flavius Josèphe mentionne cet endroit lorsqu'il décrit l'incendie qui suit la conquête de Jérusalem par Titus :

"Le feu ravage toute la ville jusqu’à Siloé », (Guerre VI,363)

Le bassin est situé géographiquement dans Néhémie. alors échanson (gouteur en quelque sorte) du roi achéménide Artaxerxès (-465 ; -424)  à Suse. Néhémie entame ses célèbres lamentations lorsqu'il apprend par son frère  que Jérusalem est une ville dévastée. Il obtient alors du roi l'autorisation de s'y rendre. Néhémie écrit alors :

« Shallum, chef du district de Miçpa, refit le mur de la citerne de Siloé jouxtant le jardin du roi jusqu’aux escaliers qui descendent de la Cité de David. » (Ne 3,15)

Le bassin inférieur est partiellement découvert, alimenté par le canal de Siloé (dit aussi canal II) en provenance lui aussi de la source de Gihon. L'accès au bassin se fait par trois séries de cinq marches en pierre, séparées par de larges plateformes. Au moins trois des côtés du bassin étaient équipés de marches. Le bassin comporte des traces de construction d'un bassin antérieur. 

Le bassin supérieur actuellement connu comme la « piscine de Siloam » est situé au nord du bassin inférieur. En 333, l'Anonyme de Bordeaux, un pèlerin qui a raconté son voyage de Bordeaux à Jérusalem, décrit une piscine qui date probablement d'une reconstruction sous Hadrien. Il est mentionné dans la Bible dans l'ancien testament :

Le Seigneur me parla encore une fois ; il me dit : « Puisque ce peuple a dédaigné les eaux de Siloé qui s’écoulent paisiblement, puisqu’il perd courage devant Recine et le fils de Remalyahou, eh bien ! voici que le Seigneur va faire monter contre eux les eaux puissantes et abondantes de l’Euphrate... Partout le fleuve sortira de son lit, il franchira toutes ses digues. Il forcera l’entrée de Juda, il l’inondera, le submergera, montera jusqu’à son cou. Ses ailes déployées couvriront l’étendue de ton pays (Isaie ch8 5-8)

Vous avez recueilli les eaux dans le réservoir inférieur (Isaïe 22-9 )

Mais aussi dans les évangiles :

« L’homme que l’on appelle Jésus a préparé de la boue et il l’a étalée sur mes yeux. Puis, il m’a dit d’aller à Siloé et de me laver. J’y suis donc allé, je me suis lavé et je pouvais voir à nouveau. » (Jean, 9:1-12)

Une église est construite au V^e siècle par l'impératrice byzantine Eudoxie à la sortie du tunnel d'Ézéchias pour commémorer le miracle de l'aveugle que Jésus de Nazareth envoie à la piscine de Siloé. Cette église est mentionnée dans plusieurs itinéraires de pèlerinage de l'époque byzantine. L'Anonyme de Plaisance en donne une description. Mais l'église est détruite par les Perses lors de l'invasion de 614. La colonnade entourant la piscine est encore décrite au Moyen Âge.

Une mosquée est construite sur le site en 1890" (cf wikipedia).