Art. 163-0 A

BOFIP-IR-LIQ-20-30-20 du 20/07/2016

Rép. Frassa : Sén. 9-6-2016 p. 2566 n° 17498

 

Principe :

L'imposition au quotient permet d'imposer des revenus exceptionnels ou différés au barème progressif applicable à une fraction de ce revenu (égale au premier quart du revenu concerné pour les revenus exceptionnels). Le mécanisme limite donc la progressivité de l'impôt en cas de revenus exceptionnels ou différés, sous conditions.

Les plus-values des particuliers étant imposées au barème progressif depuis 2013, elles ne sont plus exclues par principe du système du quotient.

I. Revenus exceptionnels

 

Modalité de calcul du montant imposable

1 - calculer l’impôt d’après le barème progressif sur le revenu net global « ordinaire » imposable du contribuable,

2 - calculer l’impôt par l’application du même barème au total formé par le revenu net global « ordinaire » imposable et 1/4 du revenu exceptionnel.

3 – Calculer la différence entre ces deux résultats.

4 – les droits simples calculés sur le seul revenu net global « ordinaire » imposable sont ajoutés à 4 fois le montant déterminé en 3-

 

 Ainsi, la totalité du revenu exceptionnel est taxable au même barème que celui applicable à son premier quart.

 

Conditions quant au montant des revenus

L'article 163-0 A cite deux critères quant au montant des revenus :

- c'est un revenu qui par sa nature n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement,

- le montant de ce revenu exceptionnel doit dépasser la moyenne des revenus nets soumis à l'impôt sur le revenu des trois dernières années.

Si, par exemple, un contribuable dont les revenus imposables de trois années (N-3; N-2; N-1) se sont élevés respectivement à 46 000 €, 51 000 € et 53 000 € (soit une moyenne de 50 000 €) réalise en N un revenu exceptionnel, l'application du système du quotient ne sera possible que si ce revenu dépasse 50 000 €.

 

Traitement et salaires : Pour la comparaison c'est le montant avant déduction des 10% pour frais professionnels qui est retenu.

Les revenus suivants notamment peuvent bénéficier du calcul selon le système du quotient sans condition de montant :

- Primes de départ volontaire,

- primes ou indemnités versées à titre exceptionnel aux salariés lors d'un changement de lieu de travail impliquant un transfert du domicile ou de la résidence,

- cession d'immeubles ou de titres dans les 14 années suivant celle de leur remise comme prix d'un bail à construction,

- fraction imposable des indemnités de licenciement, de mise à la retraite, de départ à la retraite ou en préretraite,

- les allocations pour congés de conversion capitalisées et versées en une seule fois

- la fraction imposable des indemnités spécifiques de rupture conventionnelle (art. L.1237-13 du code du travail)

 Conditions quant à la nature des revenus

Un revenu réalisé dans le cadre normal de d'une activité n'est pas susceptible d'être qualifié d'exceptionnel même si cette activité produit des revenus dont le montant varie fortement d’une année sur l’autre.Le caractère exceptionnel résulte donc à minima de recueuillir le revenu dans des conditions dérogatoires à l'exercice habituel de la profession, ou d'être dénué de tout lien avec celle-ci. Les revenus suivants peuvent être admis au système du quotient :

Traitements et salaires

- une gratification supplémentaire perçue par un salarié pour services exceptionnels ;

- des indemnités, allocations et primes versées par les employeurs à leurs salariés en vue de les dédommager des contraintes inhérentes à l'exercice de leur activité professionnelle et, notamment, des désagréments et sujétions résultant d'un changement de résidence (RM Millon n°43365 , JO, AN du 30 avril 1984, p. 2055) ;

- les primes de départ volontaire perçues par les salariés lorsqu'ils quittent l'entreprise sans faire l'objet d’un licenciement, d’une mise à la retraite ou en préretraite ;

- la fraction imposable de l'indemnité de licenciement ou de l’indemnité de rupture conventionnelle prévue à l’article L.1237-13 du code du travail ;

- les allocations servies aux salariés privés d'emploi qui créent ou reprennent une entreprise industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ou une activité libérale, à titre individuel ou dans le cadre d'une société, quelle qu'en soit la forme juridique et dont ils exercent effectivement le contrôle. Il est souligné que ces allocations présentent le caractère de traitements et salaires même si certains bénéficiaires les investissent dans l'entreprise qu'ils créent.

 

Bénéfices industriels et commerciaux

- la plus-value de cession d'un fonds de commerce ;

- le montant des taxes sur le chiffre d'affaires remboursées à un commerçant à la suite d'une instance contentieuse portant sur une période de plusieurs années ;

- une commission perçue à la suite d'une opération occasionnelle, en l'occurrence la vente d'immeubles, réalisée par un contribuable dont ce n'est pas la profession.

- un droit d'entrée perçu par une société en nom collectif ayant une activité principale de nature commerciale qui donne à bail accessoirement un immeuble commercial nu dont elle est propriétaire,

- les remboursements que les assureurs sont amenés à effectuer au titre d'une assurancevie contractée par certains commerçants ou industriels, lors de l'achat à crédit de matériel d'exploitation faisant partie de leur actif professionnel et destinée à couvrir leur dette en cas de décès.

 

Revenus de capitaux mobiliers

- le revenu résultant de la distribution par une société de capitaux des titres qu'elle détient en portefeuille ;

- la distribution de réserves régulièrement constituées par une délibération de l’assemblée générale et qui ne procéderait pas d’un abus de droit (CE, arrêt du 4 novembre 1990, n° 64822).

 

Bénéfices non commerciaux

- les droits d'auteurs perçus à la suite de l'attribution d'un prix littéraire (CE, arrêt du 31 juillet 1992 n° 67321).

 

Revenus fonciers

- l'indemnité de « pas-de-porte » perçue par un propriétaire : cette indemnité s'analyse comme un supplément de loyer perçu d'avance mais elle n'en a pas moins le caractère d'un revenu exceptionnel (CE, arrêt du 24 octobre 1963, n° 57313) ;

- le supplément de loyer résultant de l'attribution gratuite en fin de bail des aménagements effectués par le preneur (CE, arrêt du 3 mai 1989 n° 86262).

 

Plus-values

La nature exceptionnelle de la plus-value s'apprécie au vu des circonstances de l'espèce, mais il est possible d'appliquer le quotient à des plus-values de cessions ponctuelles de titres.

- Elle peut résulter notamment de l’absence de cession au cours des trois dernières années lorsque la cession porte sur des titres d'un portefeuille de valeurs mobilières ordinaires. Le système est exclu dès lors que le contribuable a réalisé au cours des années antérieures et postérieures des opérations de même nature (CE 15-6-2005 n° 250218).

- Elle peut également résulter du caractère exceptionnel de l’opération (par exemple cession de titres réalisée par un dirigeant de PME qui part à la retraite).

 

Le montant exceptionnel de la plus-value résulte de la comparaison avec les revenus des années précédentes :

ainsi, la plus-value (après abattement pour durée de détention) doit être supérieure à la moyenne des revenus imposables des trois dernières années précédant la réalisation de la plus-value. Pour effectuer cette comparaison, il convient de retenir (dans l'attente d'une clarification définitive des règles sur ce sujet) le montant de la plus-value imposable à l’impôt sur le revenu, c’est-à-dire, le cas échéant, après déduction des abattements pour durée de détention.

La plus-value résultant de cession dans le cadre de la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières n'est pas a priori exclue pour l'application du quotient (l'ancienne réponse Du Luart est caduque)

 

De plus, le fait d'agir ou non dans le cadre de la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières est sans incidence sur le bénéfice du système du quotient et a fortiori sur le caractère exceptionnel ou non du revenu généré lors de la cession.

 

2. Revenus différés

Il s'agit de revenus se rapportant à une ou plusieurs années antérieures, mais dont la date normale d'échéance, et indépendemment de la volonté du contribuable, sont perçus cette année. On y trouve notamment

- les rappels de salaires ou de pension

- les arriérés de loyers perçus suite à une décision de justice.

- les indemnitées versées en réparation d'un préjudice consistant en la perte d'un revenu normalement imposable ou en la perte d'une chance de réaliser un revenu.

- les indemnités versées aux titulaires d'options sur titres (stock-option) afin de compenser la perte du bénéfice de ces options, par exemple suite à une OPA (rescrit n°2006/19).

Par contre le versement décalé d'une prime de décembre à janvier n'entre pas dans le dispositif.

Les revenus différés ne sont pas soumis à une condition de montant pour l'application du quotient

Modalités de calcul pour les revenus différé imposés aux quotient

1 - calculer l’impôt d’après le barème progressif sur le revenu net global « ordinaire » imposable du contribuable,

2 - calculer l’impôt par l’application du même barème au total formé par le revenu net global « ordinaire » imposable et une fraction du revenu différé. La fraction est égale au nombre d'années sur lesquelles portent normalement les revenus différés (par exemple un rattrapage de salaires au titres des années n-4 et n -3 porte sur deux années) auquel on ajoute 1 (dans l'exemple 2+1 soit 3)

3- La différence entre ces deux résultats est multipliée par le coefficient calculé ci-dessus (diviseur).

4 - On ajoute alors au montant déterminé en 3- , les droits simples calculés sur le seul revenu net global « ordinaire » imposable.

 

Mise en oeuvre

L’imposition au quotient peut-être accordée aux contribuables qui en font la demande (BOI-IR-LIQ-20-30-20, § 390 et 400). La qualification du revenu et le bénéfice du quotient sont ensuite susceptibles d’être remis en cause dans le cadre d’un contrôle.

 

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Exemples (Ed Lefebvre)

 

a.  Le montant du revenu exceptionnel ou différé est déterminé selon les règles prévues pour la catégorie de revenus à laquelle il appartient (par exemple, s'il s'agit de salaires, après application de la déduction pour frais professionnels, laquelle est répartie au prorata entre le salaire « ordinaire » et le salaire exceptionnel ou différé).

b.  Pour l'application du quotient, un déficit net global ordinaire ne doit pas être pris en compte dans l'assiette du revenu exceptionnel. Par ailleurs, le déficit n'est reportable que s'il subsiste après imputation du revenu exceptionnel (CE 28-9-2016 n° 384465 :  RJF 12/16 n° 1054).

 

Un contribuable, marié avec un enfant à charge exclusive (quotient familial : 2,5), a perçu de son employeur en 2016 un salaire « ordinaire » de 63 000 €, plus une prime de mobilité de 20 000 € qui constitue un revenu exceptionnel (n° 4165, précision c). On suppose enfin qu'il n'a pas d'autres revenus que ses revenus salariaux et qu'il n'a aucune correction susceptible d'être appliquée à son impôt brut.

 

Si l'intéressé a demandé l'application du quotient pour la prime de mobilité, les calculs seront les suivants :

Salaire brut total : 63 000 € (salaire ordinaire) + 20 000 € (prime de mobilité) = 83 000 €.
Salaire net imposable (après application de la déduction de 10 %) : 74 700 €, à répartir comme suit :

-  salaire ordinaire : 74 700 € × 63 000 €/83 000 € = 56 700 €.

-  prime de mobilité : 74 700 € × 20 000 €/83 000 € = 18 000 €.

Impôt calculé sur le seul salaire ordinaire (56 700 €) : 4 539 €.

Impôt calculé sur le salaire ordinaire (56 700 €) majoré du quart de la prime de mobilité (4 500 €) : 5 547 €.

Différence : 1 008 €.

Impôt afférent à la prime de mobilité : 1 008 € × 4 = 4 032 €.

Montant total de l'impôt brut dû au titre de 2016 : 4 539 € + 4 032 € = 8 571 €. Si l'intéressé ne demandait pas l'application du quotient, son impôt s'élèverait à 9 597 €, soit une surcharge de 1 026 € (9 597 € − 8 571 €).

S'il présentait, par ailleurs, un déficit foncier imputable sur le revenu global de 60 000 €, son revenu ordinaire serait de - 3 300 € (56 700 € - 60 000 €).

Impôt calculé sur le seul salaire ordinaire (- 3 300 €) : 0 €.

Impôt calculé sur le revenu ordinaire majoré du quart de la prime de mobilité (soit sur : - 3 300 € + 4 500 €) : 0 €.

Dans ce cas, le montant total de l'impôt brut dû au titre de 2016 serait de 0 €.

 

 

 

 

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