Au sommet de Paris en 2008, le Président Sarkozy affirme que la France et l'Ukraine ont une histoire et des valeurs communes. Le propos fait évidemment réagir, notamment au regard du comportement de l'Ukraine envers les Juifs durant la seconde guerre mondiale, mais aussi sous Petlioura (voir infra) qui fut organisateur de sanglants pogroms.
"Dans l’ombre de la Shoah, les pogroms des guerres civiles russes de 1918-1921 sont restés un événement peu étudié, eu égard à l’ampleur exceptionnelle des massacres, les plus grands massacres de Juifs avant la Shoah : au moins 100 000 tués, 200 000 blessés et invalides, des dizaines de milliers de femmes violées, 300 000 orphelins dans une communauté de quelque cinq millions de personnes "1
1Nicolas Werth cité in Simon Petlioura et les pogroms antifjuif. La question de la responsabilité. Daniel Bensoussan-Bursztein Revue d'histoire de la Shoah 2018/2 n°209 p689 à 697 (Cairn)
Enfin, le pays garde toujours une attitude ambigüe vis à vis de son passé.
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Principaux extraits de la Déclaration conjointe sur l'accord d'association Union européenne-Ukraine adoptée lors du Sommet de Paris du 9 septembre 2008
La Déclaration conjointe prend acte de ce que « le partenariat entre l'Union européenne et l'Ukraine [a] avancé considérablement dans tous les domaines d'intérêt commun : coopération dans la politique étrangère et dans la gestion des crises, coopération économique et énergétique, coopération dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité y compris dans la politique des visas, et bien d'autres secteurs ».
Le texte indique que « les présidents [Iouchtchenko, Sarkozy et Barroso], conscients de l'importance stratégique de la relation entre l'Union européenne et l'Ukraine, ont décidé, à l'occasion du sommet de Paris, de donner une impulsion décisive au développement de nos relations. Ils ont reconnu que l'Ukraine, pays européen, partage avec les pays de l'Union européenne une histoire et des valeurs communes. Ils se félicitent que le nouvel accord entre l'Union européenne et l'Ukraine sera un accord d'association, qui laissera la voie ouverte à des développements progressifs supplémentaires dans les relations UE-Ukraine. L'Union européenne prend acte des aspirations européennes de l'Ukraine et se félicite de son choix européen. [...] »
La Déclaration commune note aussi que « la mise en place d'une zone de libre-échange complète et approfondie, accompagnée d'une large convergence réglementaire de l'Ukraine vers les normes européennes, contribuera à une intégration graduelle de l'Ukraine au marché intérieur de l'UE ».
Par ailleurs, les présidents « ont également décidé de lancer un dialogue sur les visas, visant à développer les conditions pertinentes, dans la perspective de long terme d'établir un régime d'exemption de visas entre l'UE et l'Ukraine ».
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Un rapport sénatorial1 considère que l'Ukraine, démocratie imparfaite, avance cependant dans la bonne direction. Le rapport met en exergue le comportement plutôt meilleur que d'autres pays durant la seconde guerre mondiale :
" Les Ukrainiens veulent de l'Europe, mais ils se demandent si l'Europe veut vraiment d'eux. C'est ainsi que l'on pourrait résumer l'état d'esprit qui prévaut actuellement dans le pays à l'égard de l'Union européenne.
L' « euro-déception » gagne en effet l'homme de la rue, et parfois aussi certains responsables politiques. De nombreux milieux ukrainiens ont le sentiment que les efforts accomplis n'ont pas été reconnus à leur juste valeur à Bruxelles.
Lors de leur déplacement en Ukraine, vos rapporteurs ont bien perçu le découragement, voire le sentiment d'injustice des dirigeants ukrainiens qui évoquent l'existence d'un « double standard ». Ces derniers ne comprennent pas, en effet, que l'Union européenne ne prenne pas davantage en considération, par exemple, le renoncement de l'Ukraine à l'arme nucléaire ou même le fait que, contrairement à l'Europe balkanique, le pays n'ait connu ni guerre civile ni génocide. Pourtant, les Balkans, contrairement à l'Ukraine, disposent d'une perspective européenne."
Le discours de Nicolas Sarkozy fait fortement réagir Michaël Prazan. Cet écrivain et documentariste est notamment l'auteur de "Einsatzgruppen, les commandos de la mort nazis", à la fois livre et documentaire pour la télévision. Il a interviewé des rescapés des actions de ces commandos, mais aussi d'anciens membres et auteurs de ces tueries. Faisant oeuvre d'historien, il maitrise ces sujets sur lesquels il a travaillé pendant des années. Il écrit alors l'article suivant au journal Le Monde :
Annexion soviétique et occupation nazie ont façonné une mémoire nationale et des "valeurs" aux antipodes de l'Union européenne.
"L'Ukraine, pays européen, partage avec les pays de l'Union européenne une histoire et des valeurs communes." C'est ainsi qu'est formulée la déclaration conjointe rédigée à l'issue du sommet Ukraine-UE qui s'est tenu sous la houlette du président Nicolas Sarkozy à Paris le 9 septembre, comme une invitation en bonne et due forme faite à l'Ukraine d'envisager son intégration à l'Union à partir de 2009.
Visiblement peu échaudés par l'aventure désastreuse menée par le président Mikheïl Saakachvili en Géorgie et la démonstration de force de la Russie qui s'en est suivie, les Européens persistent donc à voir en l'Ukraine un "pays européen" désormais parvenu au seuil de l'Union.
Or, le problème de la Crimée, presqu'île russophone riche en minerais et en hydrocarbures, n'est pas moindre que celui créé en Ossétie du Sud, et les attentes ou les velléités de la Russie sur ce territoire sans doute plus grandes encore. Si la Russie, pour des motifs géostratégiques, n'envisage probablement pas d'annexer demain la Crimée - une annexion d'ailleurs réclamée par une majorité de Criméens -, elle demeure une zone des plus sensibles et sera, si l'Ukraine est intégrée à l'UE, au mieux le noeud inextricable d'une prochaine guerre froide, au pire le théâtre d'un conflit larvé avec lequel auront à se débattre les Européens.
Mais revenons sur les termes de la déclaration citée plus haut. D'abord, "une histoire commune". De quelle histoire s'agit-il au juste ? En Ukraine, l'histoire est le lieu d'un continuum complexe où les héritages de la seconde guerre mondiale et de l'époque soviétique sont plus vivaces qu'ailleurs, et conditionnent encore des grilles de lecture culturelles, géographiques et idéologiques pour les populations locales.
A Simferopol, capitale de la Crimée, il est exceptionnel d'entendre parler ukrainien, dont le mot même est absent du vocabulaire, sauf quand il s'agit de conspuer le gouvernement "pro-occidental" de Victor Iouchtchenko. Dans leur immense majorité, à part peut-être cette partie de la minorité tatare qui avait prêté allégeance à l'envahisseur nazi, les Criméens se disent russes, parlent russe, et ne tournent les yeux vers Kiev que pour considérer la métropole ukrainienne avec mépris. Il faut dire que l'identité nationale ukrainienne est pour le moins paradoxale.
Chacune des frontières du pays, que ce soit au Sud avec la Roumanie, ou a fortiori à l'Ouest avec la Pologne, a fluctué au gré des invasions et annexions dont l'Ukraine fut l'objet tout au long de l'histoire - à tel point qu'on peut se demander où se situe exactement "l'intégrité territoriale" mentionnée par la déclaration signée par l'UE à Paris. L'invasion nazie de juin 1941, comme l'annexion soviétique entérinée à Yalta, y a laissé des traces indélébiles.
Car, aussi surprenant que cela puisse paraître, quand la Crimée vit tout entière dans la nostalgie de l'URSS, la Galicie, naguère polonaise et intégrée aujourd'hui à l'Ukraine, très nationaliste, est quant à elle nostalgique de son allégeance à l'occupant nazi, ce qui devrait nuancer cette terminologie "pro-occidentale" qui ne recouvre sans doute pas là-bas le même type de "valeurs". C'est si vrai que le 27 juillet, la ville de Lviv, ancienne Lemberg, capitale de la Galicie, organisait en partenariat avec la télévision locale une grande manifestation en l'honneur de l'UPA, le courant nationaliste ukrainien qui avait collaboré avec les nazis (avant de se retourner contre eux) et... de la SS Galicia, une unité supplétive de la SS constituée de nazis ukrainiens ayant commis des massacres de civils, notamment en ex-Yougoslavie.
Il fallait voir la ville portant fièrement les couleurs de l'unité SS, et les affiches annonçant l'événement, frappé de la croix gammée, au coeur de ce qui sera la future Europe ! Cette manifestation éclaire d'une lumière opaque les prétendues "valeurs communes" que nous partagerions avec les pro-occidentaux ukrainiens. Car en Ukraine, choisir le camp occidental, c'est souvent s'identifier à l'UPA et à la SS Galicia, tant l'opposition entre "prorusses" et "pro-occidentaux" se plaque sur les antagonismes radicaux issus des catastrophes du XXe siècle.
Les "anciens combattants" de ces milices nationalistes se voient encore aujourd'hui décerner médailles et décorations par le gouvernement de Kiev ; une rue de Lviv porte le nom de Stepan Bandera, grande figure du nationalisme des années 1940, allié aux "libérateurs" allemands dans les premiers mois de l'invasion nazie. La liquidation totale des juifs de Galicie par les commandos mobiles d'extermination et leurs supplétifs ukrainiens est un tabou qu'il n'y fait pas bon évoquer.
Le génocide des juifs, auquel une partie importante de la population d'Ukraine a participé, est le lieu d'une incessante réécriture de l'histoire par les plus hautes instances de l'Etat. Rappelons que les fosses où furent jetés les cadavres de près d'un million de victimes juives du nazisme, et qui jonchent de manière effrayante l'intégralité du territoire ukrainien, ne sont des lieux de mémoire que pour les Soviétiques et les organisations juives ; les seuls à y avoir fait construire stèles et monuments commémoratifs. L'Ukraine de Viktor Iouchtchenko, qui dirige une nation confusément démocratique et extrêmement corrompue, semble être moins sensible à la mémoire de ces victimes qu'à la bravoure patriotique des supplétifs de la SS Galicia.
Pour Ephraïm Zuroff, président du centre Simon Wiesenthal de Jérusalem qui dirige l'opération "Last chance", dernière occasion de faire passer en jugement avant qu'ils ne disparaissent les criminels nazis, l'intégration à l'Europe ou à l'OTAN permettra, comme ce fut le cas des pays baltes, qui refusent désormais de juger leurs criminels de guerre (l'intégration de ces pays à l'UE leur ayant permis de faire table rase du passé) d'accorder un blanc-seing à l'Ukraine sur son refus de considérer le passé avec lucidité et honnêteté : "La pire chose qui puisse advenir,commente Ephraïm Zuroff, c'est que l'Ukraine soit intégrée à l'UE ou à l'OTAN avant qu'elle n'ait pu se confronter à son passé et admettre la vérité. Parce que, une fois intégrée à l'UE et à l'OTAN, aucune pression ne pourra plus s'exercer sur elle, et la bataille pour la mémoire, la justice et la vérité, sera définitivement perdue."
Les indépendances des pays satellites de l'ex-URSS survenues à l'aube des années 1990 n'ont fait qu'endormir un temps les gigantesques fractures identitaires, linguistiques, historiques et géographiques qui se sont sédimentées durant le XXe siècle. Il est à craindre que la guerre pour l'Ossétie du Sud ne soit que le prologue à de longues convulsions à venir.
L'Europe, dans cette situation, serait bien avisée d'y réfléchir à deux fois avant de promettre à ces pays leur intégration à l'Union européenne. Enfin, sur les questions mémorielles, sur les questions relatives à notre "histoire commune", pourquoi exiger de la Turquie, comme préalable à toute discussion portant sur sa candidature à l'UE, la reconnaissance du génocide arménien, quand l'Ukraine se voit par avance dédouanée de toute responsabilité dans le génocide des juifs et dans son entreprise actuelle de falsification de l'histoire ?
Nicolas Sarkozy, en campagne électorale, s'était élevé contre l'intégration de la Turquie, de crainte - disait-il - d'avoir à gérer les questions kurde, irakienne et syrienne aux portes du continent européen. Or, après avoir pris la mesure de toutes ces questions, tant historiques, mémorielles que géopolitiques, il apparaît clairement qu'intégrer des pays tels que l'Ukraine (ou la Géorgie) provoquerait des crises aux conséquences plus graves encore.
1 Rapport d'information n° 448 (2009-2010) de MM. Simon SUTOUR et Gérard CÉSAR, fait au nom de la commission des affaires européennes, déposé le 12 mai 2010
2Le Monde - 15 septembre 2008
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Simon Petlioura, précurseur de l'Ukraine indépendante et nationaliste, est aujourd'hui honoré à Paris. En est-il digne ?
On se souvient de la magnifique "révolution orange" ukrainienne de fin 2004. Dénonçant la fraude massive, appuyé par la rue, Victor Iouchtchenko est élu président de la République. C'est l'état de grâce. Voilà l'Ukraine arrimée à l'Ouest avec la bénédiction des Etats-Unis.
Mais, très vite, la belle aventure "atlantiste" vire au cauchemar. L'Ukraine s'enfonce dans la crise. Pire, le souffle de la démocratie semble exhaler des relents nauséabonds dans une partie de l'Europe où nationalisme, antisémitisme et négationnisme font de nouveau bon ménage. Et la dernière péripétie orange a un nom : Simon Petlioura. Ce nom ne vous dit rien. Mais en Ukraine, l'ataman (général en chef) Petlioura est un héros. Pour la Licra, c'est un assassin.
Ce haut gradé, né en 1879, fut un temps, en 1917, l'un des chefs d'une éphémère République d'Ukraine qu'il défendit contre tous les envahisseurs possibles dans la région. A la même époque, des centaines de milliers de juifs sont massacrés dans ce qui restera l'un des plus sanglants pogroms du XXe siècle.
Après bien des péripéties, Simon Petlioura trouve refuge à Paris en 1924. Deux ans plus tard, il est abattu de plusieurs balles en pleine rue par un jeune horloger juif ukrainien naturalisé français, Samuel Schwarzbard, décoré de la croix de guerre obtenue dans l'armée française pendant la première guerre mondiale. Arrêté, le jeune homme avouera spontanément qu'il a voulu, par son geste, venger les siens victimes des pogroms organisés en Ukraine.
Simon Petlioura est enterré au cimetière du Montparnasse. Le procès, qui commence l'année suivante, aura un énorme retentissement et se transformera très vite en "procès des pogroms". Maxime Gorki vient même témoigner en faveur du jeune horloger. Finalement, grâce en partie au talent de Me Henri Torrès, Samuel Schwarzbard est acquitté. Dans la salle se trouve un jeune journaliste du nom de Bernard Lecache, qui crée, pour soutenir l'accusé, la Ligue contre les pogroms, qui devient, quelque temps plus tard, la Ligue internationale contre l'antisémitisme (Lica, puis Licra). Fin de l'histoire ? Non.
L'Etat ukrainien, dans un contexte de fortes tensions nationalistes, décide d'honorer la mémoire de Simon Petlioura à l'occasion du 80e anniversaire de sa mort, de sa "tragique disparition", pour reprendre la vulgate officielle. Où ? A Kiev, bien sûr ! Mais plus grave, à Paris aussi ! Du 25 au 27 mai, toute une série de commémorations et de colloques ont lieu, organisés par la bibliothèque ukrainienne Simon-Petlioura (ça ne s'invente pas !), le Comité représentatif de la communauté ukrainienne de France et, bien sûr, l'ambassade d'Ukraine à Paris. Au programme : un dépôt de gerbe au cimetière du Montparnasse, un colloque intitulé "La place et la perception de la personnalité de Simon Petlioura aujourd'hui", la visite du musée Simon-Petlioura (sic).
Mais il y a plus grave, ces organismes devaient se réunir, jeudi 25 mai, pour déposer une gerbe sur la tombe du Soldat inconnu, déjouant probablement la vigilance du Comité de la flamme, organisateur des cérémonies de ravivage. Trop, c'est trop ! Comment une telle manifestation peut-elle avoir lieu en plein coeur de Paris, qui plus est sous l'Arc de triomphe, notre Arc de triomphe ? Nous sommes tout simplement en train d'assister à un viol de la mémoire, à un déni d'histoire, à un second assassinat, posthume celui-là, des victimes juives.
C'est pourquoi, face à cette ignominie faite à la France, à tous les citoyens épris de liberté et à tous les défenseurs des droits de l'homme, nous demandons que le gouvernement français, par la voix de son ministre des affaires étrangères, proteste énergiquement auprès des autorités ukrainiennes en France contre cette sombre commémoration. Nous en appelons également au président de la République qui, plusieurs fois dans le passé, a su rendre hommage à toutes les victimes de la barbarie raciste et antisémite.
Tous les Français doivent savoir qu'un assassin est honoré sur le sol même de la République, dans ses lieux de mémoire et de paix. Cela, la Licra ne le tolère pas. Au nom de son histoire et de toutes celles et tous ceux qui périrent de la folie des hommes.
1Le Monde 26 mai 2006. Patrick Gaubert est le président de la Licra.
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Extraits d’informations de la commission de Kiev de l’Evobschestkom sur les pogroms à Belaïa Tserkov, province de Kiev de 1918 à août 1919 (fin 1920).1
« Les premières tentatives d’organisation d’un pogrom eurent lieu sous l’hetmanat (de Sokol, qui fût l’instigateur, notamment, du terrible massacre de Belaïa Tserkov, en août 1919), quand des troupes allemandes étaient encore cantonnées en Ukraine. On peut citer notamment une annonce en allemand et en russe, affichée partout dans Belaïa Tserkov par le colonel Nikish von Rosenek, commandant du district. Elle commençait par ces mots : « Annonce de la Kommandantur allemande. La Kommandantur a appris qu’une grande partie de la population juive, et surtout la majorité des commerçants voyageant d’un village à l’autre, mène une propagande active contre le gouvernement ukrainien et le pouvoir allemand. Ces Juifs essaient de persuader les paysans que les Allemands veulent réquisitionner tout le grain récolté après la moisson sans le payer (…). La Kommandantur connaît les noms de plusieurs perturbateurs juifs. Elle va poursuivre sans indulgence… », etc., suivant le schéma bien connu. Mais ce ne furent là que des prémices. Les véritables pogroms se développèrent sous Petlioura, successeur de l’hetman (Sokol).
Les hommes de Petlioura commencèrent par frapper la ville d’une énorme contribution de 1 million de roubles, qu’ils appelèrent « prêt bénévole ». Les méthodes qu’ils utilisèrent pour le percevoir parlent d’elles-mêmes. Un samedi de novembre 1918, les hommes de Petlioura, en armes, encerclèrent les synagogues et, perturbant la prière, obligèrent les Juifs à enlever leurs châles de prière et à les accompagner dans les locaux de la Kommandantur. Les Juifs restèrent enfermés là-bas pendant quelques jours, menacés de toutes sortes d’exactions en cas de non-paiement de la contribution exigée. (…) Au prix d’immenses efforts, une somme de 425 000 roubles fut rassemblée et apportée au quartier général le 3 décembre 1918. Cela n’apporta pas la paix dans la ville. (…) Les viols de femmes juives devenaient de plus en plus fréquents, surtout dans les rues Iourievskaïa et Miasnaïa. La population juive était terrorisée. Les Juifs avaient peur de sortir, ils fermaient les portes et les fenêtres de leurs maisons longtemps avant la nuit. Le cynisme et l’insolence des troupes étaient tels qu’un commandant d’unité, ayant obtenu par extorsion une somme de 250 000 roubles, exigea que la communauté juive lui remît un papier certifiant son « comportement correct » envers les Juifs. Il proposa à la communauté de signer (un) texte (certifiant que son régiment) n’a imposé aucune contribution aux Juifs de la ville et ne les a aucunement humiliés, mais il a, au contraire, empêché les excès des autres détachements militaires (…). ».