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Rapport parlementaire sur le bilan de l'action de la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations (CIVS)1
Rapport d'information n° 550 (2017-2018) de M. Marc LAMÉNIE, fait au nom de la commission des finances, déposé le 6 juin 2018
source : site du sénat
* *
Même si elles sont entourées d'incertitudes, les données récapitulées dans le tableau ci-dessous témoignent de l'ampleur et de la diversité des spoliations commises contre les Juifs durant l'Occupation.
Agressions |
Éléments d'estimation |
Pillages d'appartements |
72 000 appartements dont 38 000 à Paris |
Spoliation professionnelle et immobilière |
Plus de 450 000 000 euros |
Confiscations financières (banques et assurances) |
520 000 000 euros |
Vol ou vente forcée de biens culturels mobiliers |
Plus de 100 000 objets d'arts |
Confiscation de valeurs durant l'internement dans des camps |
Plus de 750 000 000 euros |
Total |
Plus de 1 720 000 000 euros2(*) |
Source : commission des finances du Sénat d'après le rapport d'activité 2015 de la CIVS
Mesdames, Messieurs,
À la suite du discours du Président de la République M. Jacques Chirac, le 16 juillet 1995, lors de la commémoration de la rafle du Vel' d'Hiv', une mission d'étude sur les spoliations perpétrées durant l'Occupation contre les juifs résidant en France fut créée.
Le contexte international de la fin des années 90 mérite un bref rappel tant il s'est trouvé marqué par la résurgence des interrogations sur la portée des réparations mises en oeuvre après la Libération, après une longue période pendant laquelle cette problématique avait connu un déplorable essoufflement. La chute du mur de Berlin, sorte de retour de l'histoire propice aux remémorations, la sensibilité de l'administration américaine du moment à un passé qui ne pouvait passer, illustrée par la création d'un sous-secrétariat d'État chargé de ces questions comme de toutes autres comportant le soupçon de spoliations, avaient créé un environnement, par ailleurs traversé par les actions judiciaires, actions de groupe pour la plupart, contre les banques suisses ou françaises, et par d'autres contentieux plus latents, où il n'était plus question de frapper d'un déni, même discret, la réalité de ces spoliations et de leur nécessaire réparation.
L'important accord de Washington (voir infra) conclu entre la France et les États-Unis d'Amérique devait dès le 18 janvier 2001 marquer, pour les seules spoliations bancaires et financières, la réactualisation de cette problématique d'une dette mal réglée. Il faisait suite à la Déclaration de Washington, aux signataires plus diversifiés, consacrée à la question toujours lancinante des spoliations d'objets d'art et de culture.
La mission Mattéoli, constituée dans le prolongement de l'initiative du Président de la République, et confirmée dans sa tâche par le Gouvernement issu des élections consécutives à la dissolution de l'Assemblée nationale en 1997, a présenté ses travaux, travaux d'histoire qui ont souvent dû prendre la forme de travaux d'investigation, dans un rapport de plus de 3 000 pages dont l'une des recommandations visait à ce que le Gouvernement crée un organe chargé de l'examen des demandes déposées par les victimes des lois antisémites en vigueur en France sous l'Occupation nazie, et par leurs ayants droit, dans le but d'obtenir une réparation des préjudices alors subis.
Cette recommandation a conduit à l'institution de la commission d'indemnisation des victimes de spoliations (la CIVS) en 1999.
C'était, aux conditions du moment, tirer les leçons d'une histoire qui révélait que tous les préjudices matériels1(*) subis à raison de l'appartenance à une identité juive, alors motif de plus que des persécutions, n'avaient pas été réparés après la Libération et qu'il convenait d'instaurer un organe administratif spécialisé pour que les réparations puissent être efficacement complétées.
À la création de la CIVS, il était certain que celle-ci ne serait pas privée d'activité. D'emblée, cette prévision fut confirmée et même dépassée par le flux plus nourri que prévu des dossiers adressés à la commission.
Pourtant, très vite le maintien de la CIVS fut mis en cause. Les projets de dissolution furent cependant abandonnés.
Il faut s'en réjouir. La mise en extinction de la commission aurait été une faute, l'activité de la commission, restée soutenue depuis, l'attestant assez.
À l'heure où, semble-t-il, à nouveau, l'opportunité de maintenir l'existence de la commission, se trouve débattue, il faut conserver la mémoire des imprudences ainsi évitées.
Plus encore, malgré la résorption significative de la dette de réparation acquise sous l'égide de la CIVS, ce serait une faute de négliger que le renouvellement des approches de la spoliation antisémite et des défauts de la réparation conduit naturellement à réviser à la hausse l'ampleur de la dette de réparation rémanente, aux aspects plus diversifiés que ceux couramment envisagés.
C'est à cette aune que le bilan de la CIVS doit être mesuré.
À l'issue de l'examen de l'action de la CIVS, quelques convictions se forment.
Pour que le devoir de réparation, à l'accomplissement duquel la commission a largement contribué, soit plus complètement satisfait, il ne suffit pas d'en prolonger l'existence.
Il convient, aujourd'hui, d'étendre ses responsabilités et ses moyens tout en instaurant un contexte beaucoup plus favorable au succès de sa mission.
À cette fin, les dispositifs accessibles à des acteurs de la réparation plus responsabilisés, devront être rénovés afin de donner plus de puissance à une action de justice face à laquelle l'inaction n'est pas une option.
Tout en se dotant d'un appareil national plus fort, la France doit redonner un élan international à une mission dont les dimensions dépassent naturellement les frontières.
Les principales observations
Des spoliations antisémites massives, mais qui restent encore à ce jour à appréhender finement
Observation n° 1 : les spoliations antisémites ont présenté un caractère massif contribuant à une « persécution par les préjudices ».
Observation n° 2 : alors même que la Mission Mattéoli avait averti sur l'incomplétude de ses travaux (dont on trouvera quelques illustrations dans plusieurs observations infra) et recommandé des analyses complémentaires, ses observations servent encore largement de référence. Sans rien ôter à la très grande valeur des apports de la mission, force est de constater que les études qui auraient dû prolonger ces travaux n'ont pas été réalisées, alors même que les travaux ponctuels qui ont été proposés depuis ont pu en démontrer la très grande utilité.
Observation n° 3 : une période floue entre la débâcle et l'adoption des règles spoliatrices au cours de l'année 1941 a pu s'accompagner de « spoliations de fait » non prises en considération, et très difficilement identifiables, dans les travaux de la mission Mattéoli. En particulier (voir infra), une période de latence a existé entre la déchéance des droits personnels des personnes persécutées et l'organisation de l'aryanisation économique, qui a pu s'accompagner de spoliations « à la sauvage ».
Observation n° 4 : les travaux de la mission Mattéoli n'ont pas couvert la totalité du territoire sur lequel des spoliations antisémites ont pu intervenir. Il en va ainsi de l'Alsace-Moselle, mais également des territoires « coloniaux ».
Observation n° 5 : s'il faut reconnaître à la privation de leur « capital humain », de leurs « capabilités » pour faire référence aux travaux des économistes contemporains, une nature très différente des spoliations ayant directement porté sur leurs avoirs financiers, la persécution antisémite exercée par privation de capacité professionnelle mérite d'être mentionnée, dans la mesure où elle a eu des effets considérables sur la situation des victimes, notamment sur leurs revenus, qui sont fort mal pris en considération (voir infra) dans le bilan des réparations des préjudices infligés.
Observation n° 6 : au total, la spoliation « économique » des Juifs a été massive durant l'Occupation, certains circuits de la spoliation financière méritant, encore à ce jour, un approfondissement des analyses.
Observation n° 7 : le projet de mise à jour systématique des évaluations de la spoliation antisémite proposées par la mission Mattéoli, pourtant annoncé et recommandé par la mission n'a pas été conduit alors même que les travaux des historiens et l'approfondissement des connaissances, dont plusieurs exemples sont exposés dans le présent rapport en ont établi la totale justification. Ces mises à jour permettraient un meilleur pilotage de la politique de réparation.
Observation n° 8 : si le recensement des spoliations d'objets d'art et de culture manque sans aucun doute d'exhaustivité et fait l'objet d'appréciations très hétéroclites, il est avéré que la spoliation a été massive en ce domaine.
Des réparations significatives à la Libération, mais dont les contours doivent être mieux connus, et qui ont laissé une dette de réparation importante
Observation n° 9 : un nombre considérable de comptes bancaires confisqués pendant l'Occupation semblent être demeurés en déshérence après la Libération, ce qui a prolongé les effets des spoliations bancaires en procurant des avantages sans cause aux établissements concernés.
Observation n° 10 : en dépit de son apparente simplicité, la restauration des droits des spoliés sur leurs comptes de dépôts n'a pas été totalement assurée par les mesures prises après la Libération tandis que des difficultés importantes ont pu faire obstacle à la restitution des comptes de titres ; l'incomplétude des restitutions a permis aux établissements de faire des profits sur les comptes en déshérence avant que ceux-ci ne soient frappés de prescription.
Observation n° 11 : par rapport à l'ampleur du « musée disparu » pendant l'Occupation, le processus de réparation des spoliations d'objets d'art et de culture s'est limité aux objets récupérés dans l'immédiat après-guerre avec pour conséquence de consolider des spoliations.
Observation n° 12 : les circonstances dans lesquelles ont été collectés les objets d'art et de culture localisés sur le territoire des pays vaincus suggèrent qu'un nombre appréciable de ces objets n'ont pas été récupérés.
Observation n° 13 : si la Commission de récupération artistique (CRA) a abouti à la restitution d'un nombre important d'objets d'art et de culture, le bilan exhaustif de ces restitutions, qui, apparemment, ont été accompagnées de malfaçons, n'est toujours pas disponible.
Observation n° 14 : les cessions mises en oeuvre par le service des Domaines à l'issue de la phase de restitution prise en charge par la CRA ont conduit à disperser des objets d'art et de culture spoliés, qui peuvent à tout instant faire l'objet de justes revendications.
Observation n° 15 : dans un contexte marqué par la mise en sommeil du dossier des spoliations et de l'oeuvre de justice tendant à réparer les préjudices causés par celles-ci, au prix de la consécration de situations illégitimes, les performances des organismes publics, au premier rang desquels l'Office des Biens et Intérêts Privés (OBIP) et les dépositaires des oeuvres dites « Musées Nationaux Récupération » (MNR) ont été très inférieures aux attentes au regard de l'objectif de restitution. À la fin des années 1990, la dette de réparation des préjudices résultant des spoliations d'objets d'art et de culture demeurait aussi peu connue dans ses contours précis qu'à l'issue de la guerre alors même qu'elle était, vraisemblablement, considérable.
Observation n° 16 : alors que les spoliations antisémites se sont déroulées à l'échelle européenne, l'Europe ne s'est pas dotée d'un arsenal unifié pour les réparer, les États adoptant des règles de réparation hétéroclites à la portée très inégale.
Observation n° 17 : les conditions dans lesquelles les spoliations antisémites ont été réparées par l'Allemagne, dans le cadre des dispositifs BRüG, n'ont pas permis de suivre avec suffisamment de rigueur les indemnités accordées et ont laissé à la France une charge élevée au titre des compléments d'indemnisation.
Observation n° 18 : la France offre des voies de droit diversifiées pour obtenir réparation des spoliations, la congruence des jurisprudences administrative et judiciaire méritant d'être vérifiée, tandis que les règles d'imprescriptibilité doivent être une fois pour toutes stabilisées.
Observation n° 19 : le « forum judiciaire » des États-Unis recèle de fortes potentialités pratiques d'action judiciaire qui ont été largement utilisées dans le dossier des spoliations antisémites.
Observation n° 20 : pour avoir constitué un acte majeur de la réparation des spoliations antisémites, la création de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, qui a pu bénéficier d'une dotation de 393 millions d'euros, ne saurait être considérée comme équivalant à la réparation individuelle des spoliations antisémites.
L'action de la CIVS, un bilan précieux mais perfectible, une institution, qui, pour résorber plus significativement la dette de réparation rémanente, doit être adaptée, dans un contexte où il est souhaitable que la France porte sur la scène internationale un projet ambitieux.
Observation n° 21 : il est regrettable que le législateur n'ait pas été saisi de la création de la CIVS, dont la mission correspond à la déclinaison de nos principes constitutionnels les plus éminents.
Observation n° 22 : malgré un texte institutif de faible niveau dans la hiérarchie des normes françaises, paradoxal au vu de l'importance de sa mission, l'existence de la CIVS prolonge et assoit la crédibilité d'engagements internationaux de la France au respect desquels il convient de porter une attention sans failles.
Observation n° 23 : alors que la réparation des préjudices causés par les spoliations antisémites avait été placée sous un régime de proportionnalité, laissant envisager une correspondance entre la nature de la spoliation et celle de la réparation, les difficultés rencontrées pour assurer la restitution, en particulier dans le domaine des objets d'art et de culture, ont conduit à privilégier une réparation par les indemnisations. Les trop faibles moyens et prérogatives accordés à la CIVS ont ainsi abouti, dans certains cas significatifs, à une issue décevante tant pour les victimes qu'au regard de l'oeuvre de justice dans la mesure où les contribuables ont pu être conduits à consolider des détentions d'objets d'art et de culture très inégalement légitimes.
Observation n° 24 : le choix de rompre avec le principe d'indemnisation totale de tous les éléments constitutifs d'un préjudice, qui, en particulier, s'est incarné dans la décision de ne pas indemniser les pertes de revenu résultant des interdictions professionnelles infligées aux personnes considérées comme juives doit être considéré comme particulièrement regrettable, malgré sa validation jurisprudentielle.
Observation n° 25 : les règles suivies pour évaluer les préjudices réparés par la commission peuvent être considérées comme discutables en principe dans la mesure où les préjudices subis par les victimes auraient pu être considérés comme des préjudices continus, indemnisables aux conditions du moment de leur réparation plutôt qu'à celles de la décision de la commission des spoliations. Certes, une revalorisation destinée à tenir compte de l'inflation et a pu, en certains cas, se trouver favorable aux bénéficiaires, mais il est peu douteux que certains préjudices auraient été mieux indemnisés avec une règle d'évaluation alternative.
Observation n° 26 : la qualité « méta-juridictionnelle » de la CIVS présente, malgré certains inconvénients qu'il serait possible de surmonter, des avantages en termes de souplesse d'action qu'il conviendrait de mieux exploiter.
Observation n° 27 : le stock des affaires pendantes devant la commission demeure élevé, certaines situations, heureusement rares, étant marquées par une ancienneté extrême des demandes, particulièrement regrettables au vu des impératifs d'un traitement dans les meilleurs délais des dossiers présentés par les victimes et leurs ayants-droit.
Observation n° 28 : la CIVS a fait des efforts appréciables de communication pour faire connaître ses missions, notamment dans les pays d'émigration susceptibles d'abriter des demandeurs.
Observation n° 29 : malgré un taux de rejets des demandes relativement élevé, l'activité de la CIVS a donné lieu à peu de contentieux et à encore moins de contentieux perdus.
Observation n° 30 : le traitement des parts réservées dans le cadre des recommandations de la CIVS a longtemps été négligé avec pour effet de priver de toute portée pratique des recommandations de réparation au bénéfice des victimes mais aussi d'accentuer les difficultés suscitées par l'identification des ayants-droit et par la restauration de leurs droits.
Observation n° 31 : le nombre des dossiers traités par la commission a été plus élevé qu'anticipé et a permis d'attribuer une réparation à un nombre important de victimes.
Observation n° 32 : la baisse du nombre annuel des indemnisations accordées par la CIVS n'équivaut pas à une baisse de la valeur moyenne de ses indemnisations, qui a connu une hausse, constat qu'il convient de garder à l'esprit dans l'appréciation des enjeux indemnitaires ; la forte dispersion des indemnisations doit également être prise en compte pour apprécier au bon niveau, celui individuel des demandes adressées à la commission, l'oeuvre de réparation qui est accomplie par elle.
Observation n° 33 : la concentration de l'activité d'indemnisation de la commission sur quelques catégories de préjudices et le défaut de proportionnalité entre l'ampleur des spoliations et le niveau des indemnisations accordées par la commission suggère, malgré les incertitudes portant sur les spoliations et leur réparation lors de la période immédiatement postérieure à la Libération, que des besoins d'indemnisation complémentaires très significatifs subsistent, particulièrement dans certains domaines.
Observation n° 34 : malgré les préconisations de la mission Mattéoli qui remontent à la fin des années 1990, les bases de données à partir desquelles les réparations des spoliations bancaires sont accordées n'ont pas connu d'évolutions sensibles suggérant l'absence de progrès accomplis dans la connaissance de la dette de spoliation.
Observation n° 35 : l'accord de Washington a été un moteur très fort de l'indemnisation des spoliations bancaires accomplie sous l'égide de la CIVS, qui, en nombre de demandes satisfaites, a très majoritairement répondu à des déclarations sur l'honneur.
Observation n° 36 : le nombre de restitutions d'objets d'art et de culture assurées dans le cadre de la procédure CIVS a été minime, ne permettant aucunement de résorber de façon suffisamment significative la dette de réparation des spoliations les concernant.
Observation n°37 : le niveau des indemnisations accordées en réparation des spoliations d'objets d'art et de culture, une fois exclus de très gros dossiers, témoigne de la faiblesse des indemnités accordées, qui, elle-même, reflète sans doute largement la faible valeur des biens concernés.
Observation n° 38 : les modalités d'évaluation des indemnités accordées pour les spoliations d'objets d'art et de culture, même si elles sont économes des finances publiques et conformes au droit, peuvent être considérées comme présentant des motifs d'insatisfaction.
Observation n° 39 : les restitutions devraient être la modalité privilégiée de réparation tant les indemnisations présentent d'inconvénients, parmi lesquels celui de consacrer des détentions illégitimes, d'autant que le coût des indemnisations est mis à la charge des contribuables.
Observation n° 40 : la création du groupe de travail sur les MNR, pour avoir abouti à des résultats encore trop limités, a apporté la démonstration de l'utilité d'une démarche de réparation plus active.
Les principales recommandations
Recommandation n° 1 : mettre à jour le bilan des spoliations proposé par la mission Mattéoli en tenant compte des progrès acquis dans l'approche du phénomène, dont plusieurs sont mentionnés dans le présent rapport, en présentant les concordances avec les conclusions de la mission et les incertitudes qui demeurent.
Recommandation n° 2 : la mesure précise du périmètre des spoliations, en particulier celui des spoliations d'objets d'art et de culture n'est à ce jour pas faite, des circuits importants de la spoliation ayant été trop peu analysés, parmi lesquels doivent être mentionnées les transactions d'apparence commerciales portant sur ces objets. Il est essentiel que cette grave lacune soit comblée et que la recommandation formulée par la mission Mattéoli d'approfondir les connaissances sur les spoliations soit enfin mise en oeuvre.
Recommandation n° 3 : publier l'étude sur les ordonnances de restitution prises dans le cadre des missions de la Commission de récupération artistique (CRA).
Recommandation n° 4 : réaliser une mise à jour du bilan des objets pris en charge par la CRA et de ceux qu'elle a restitués ou remis à l'OBIP et identifier le devenir des objets ayant pu être distraits lors de ces opérations.
Recommandation n° 5 : dégager les moyens nécessaires afin de faire la lumière sur la disparition des archives correspondant aux aliénations du service des Domaines à la suite des remises d'objets d'art et de culture non sélectionnés par la CRA.
Recommandation n° 6 : établir un rapport sur les infractions commises par certains des personnels de ces deux administrations et sur les suites qui leur ont été réservées et exploiter toutes les informations disponibles sur les cessions auxquelles a procédé le service des Domaines afin de mieux cerner leurs conditions effectives.
Recommandation n° 7 : faire l'analyse des dispositions juridiques pouvant faire obstacle, soit pour des raisons de droit, soit pour des raisons pratiques, à la mise en oeuvre des principes adoptés par la communauté internationale pour accomplir l'oeuvre de réparation des spoliations antisémites dans les différents pays engagés par ceux-ci.
Recommandation n° 8 : dresser un bilan des effets associés au choix des règles d'évaluation des préjudices par rapport à une estimation reposant sur les conditions de valorisation prévalant au moment de la réparation.
Recommandation n° 9 : étendre l'aide juridictionnelle aux demandes adressées à la commission.
Recommandation n° 10 : résorber au plus vite le stock des demandes pendantes devant la commission.
Recommandation n° 11 : évaluer les parts réservées dans les indemnisations prononcées par la commission afin de disposer d'une image claire des engagements latents de l'État et des enjeux financiers qu'ils représentent.
Recommandation n° 12 : les travaux de recherche généalogique nécessaires à l'identification des titulaires de droits sur les parts réservées méritent d'être accentués et financés tout en conservant à l'esprit un principe de bon sens orienté par la proportionnalité entre les coûts des recherches et les créances individuelles. Une dévolution des sommes correspondant à des petites créances pourrait être mise en oeuvre avec la Fondation pour la mémoire de la Shoah, après une campagne d'information suffisante, et l'octroi d'un délai suffisamment long pour l'expression de revendications sur ces sommes.
Recommandation n° 13 : replacer les restitutions au coeur de la réparation des spoliations d'objets d'art et de culture.
Recommandation n° 14 : réaliser les enquêtes systématiques qu'appelle la disparition non élucidée d'un certain nombre de MNR. En particulier, confier, en ce sens, une mission commune à l'inspection générale des affaires étrangères et à l'inspection générale des affaires culturelles dans la perspective d'établir un rapport remis au Parlement sur ces disparitions.
Recommandation n° 15 : confier à l'inspection générale des affaires culturelles une mission visant à analyser les recherches de provenance réalisées sur les MNR, leurs résultats et les limites sur lesquelles elles ont pu buter, et à identifier les moyens d'une recherche de provenance systématique des oeuvres des collections publiques.
Recommandation n° 16 : étendre la mission de la CIVS à la recherche active des éléments de la dette de réparation rémanente, diversifier ses saisines et l'accompagner par l'instauration d'un collège de sages.
Recommandation n° 17 : mettre à la charge des personnes au profil professionnel ou quasi-professionnel une obligation de vigilance portant sur les actifs acquis ou détenus par eux au regard d'une éventuelle origine spoliatrice de ces actifs.
Recommandation n° 18 : procéder aux vérifications qu'impose la probabilité que des objets d'art et de culture d'origine spoliatrice figurent dans les collections publiques.
Recommandation n° 19 : assouplir les règles s'opposant à la sortie du patrimoine public des objets spoliés quelle que soit leur destination.
Recommandation n° 20 : instituer une obligation de signalement dans le cadre d'une procédure de déclaration de soupçon adaptée aux problèmes particuliers posés par l'identification des biens spoliés susceptibles d'entrer dans le champ de la dette de réparation subsistante. Désigner la CIVS comme destinataire de ces déclarations de soupçon.
Recommandation n° 21 : veiller à la complète application de la loi n° 2011-850 du 20 juillet 2011 de libéralisation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et réunir les conditions d'une action pleinement efficace du Conseil des ventes volontaires (CVV). Renforcer les moyens de détection des services de l'Office Central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) et mieux formaliser les relations entre ces organismes. Faire une analyse de la base de données TREIMA au regard de la problématique des spoliations antisémites.
Recommandation n° 22 : créer un fonds d'archives spécialement dédié aux spoliations antisémites.
Recommandation n° 23 : améliorer drastiquement l'état des archives portant sur les spoliations et les différentes étapes de l'action de réparation.
Recommandation n° 24 : sensibiliser par tout moyen pertinent les services d'archives à l'impératif d'un traitement prompt et complet des demandes de la CIVS.
Recommandation n° 25 : sensibiliser les organismes privés à la communication de leurs archives lorsqu'elle est jugée nécessaire à l'accomplissement de la mission de réparation des spoliations antisémites rémanentes et doter la CIVS d'un droit de communication de ces archives ainsi que des archives publiques
Recommandation n° 26 : favoriser les travaux historiques destinés à mieux appréhender les circuits de la spoliation et des réparations.
Recommandation n° 27 : le Gouvernement devrait présenter un rapport au Parlement sur la mise en oeuvre par chaque signataire des principes adoptés par les États signataires de l'accord de Washington et des déclarations subséquentes.
Recommandation n° 28 : le Gouvernement devrait prendre l'initiative de la création d'un organe permanent de coopération internationale de résolution des spoliations antisémites permanentes sur le modèle du Groupe d'action international (GAFI) destiné à renforcer par une coopération effective les conditions d'une réparation complète des spoliations. Il pourrait être institué autour des États signataires des Principes de Washington et de la Déclaration de Terezin.
Recommandation n° 29 : s'assurer que la coopération judiciaire et policière internationale fonctionne correctement.
Recommandation n° 30 : associer les ONG représentatives aux missions mises en oeuvre au niveau international ; renouveler l'attention du Conseil international des musées (ICOM) aux problèmes de la spoliation rémanente.