L’histoire des Juifs en Argentine remonte à la période coloniale, mais c’est à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle que leur présence s’est significativement accrue. Aujourd’hui, la communauté juive argentine est l’une des plus importantes d’Amérique latine, avec une riche histoire culturelle, sociale et politique.
Les premiers Juifs arrivés en Argentine étaient des *conversos* (Juifs convertis de force au christianisme) qui fuyaient l’Inquisition espagnole et portugaise aux XVIe et XVIIe siècles. Cependant, ce n’est qu’au XIXe siècle, avec l’indépendance de l’Argentine (1816) et la constitution de 1853 garantissant la liberté de culte, que la communauté juive commence à s’organiser.
En 1860, les premiers Juifs ashkénazes d’Europe de l’Est s’installent en Argentine.
Ils sont suivis par des vagues d’immigration plus importantes à partir des années 1880, fuyant les pogroms en Russie et en Europe de l’Est.
En 1889, un groupe de 824 Juifs russes arrive à bord du navire *Weser* et fonde la colonie agricole de Moïseville, dans la province de Santa Fe. Cette colonie devient un symbole de l’établissement juif en Argentine.
Au début du XXe siècle, la communauté juive argentine connaît une croissance rapide.
"Les Juifs arrivèrent en Argentine avec l’espoir de trouver une terre promise, un endroit où ils pourraient vivre libres et prospères. Ils apportèrent avec eux leurs traditions, leur foi et leur détermination à construire une nouvelle vie." in Alberto Gerchunoff, *Los gauchos judíos* (1910)
En 1909, on estime qu’il y a environ 20 000 Juifs en Argentine. En 1920, ce nombre atteint 125 000, et en 1947, il dépasse les 250 000. Aujourd’hui, la communauté juive argentine est estimée à environ 180 000 à 200 000 personnes, principalement concentrées à Buenos Aires, mais aussi dans des villes comme Córdoba, Rosario et Mendoza.
La communauté s’organise autour d’institutions telles que l’*Asociación Mutual Israelita Argentina* (AMIA), fondée en 1894, qui devient le centre de la vie sociale, culturelle et religieuse juive. L’AMIA gère des écoles, des synagogues, des centres culturels et des services sociaux.
Malheureusement, l’AMIA est tristement connue pour l’attentat terroriste de 1994 qui a fait 85 morts et des centaines de blessés, l’un des actes les plus tragiques de l’histoire de la communauté juive argentine.
Plusieurs familles juives ont marqué l’histoire de l’Argentine. Parmi elles, la famille Tedesco, qui a joué un rôle clé dans le développement de l’industrie textile, et la famille Szterenfeld, active dans le commerce et l’immobilier. La famille Toker, quant à elle, est connue pour son engagement dans la presse et la culture.
Parmi les personnalités juives argentines célèbres, on peut citer :
Alberto Gerchunoff (1883-1950), écrivain et journaliste, considéré comme le père de la littérature juive argentine. Son œuvre la plus connue, Los gauchos judíos (1910), raconte la vie des immigrants juifs dans les colonies agricoles.
Manuel Puig (1932-1990), écrivain de renommée internationale, auteur de El beso de la mujer araña (1976).
Adolfo Pérez Esquivel, militant des droits de l’homme et lauréat du prix Nobel de la paix en 1980, bien qu’il ne se définisse pas comme juif, a des origines juives par son père.
Daniel Barenboim, pianiste et chef d’orchestre de renommée mondiale, né à Buenos Aires en 1942, bien qu’il ait passé la majeure partie de sa carrière en Europe.
La communauté juive aujourd’hui
La communauté juive argentine reste dynamique, malgré les défis économiques et sociaux auxquels le pays est confronté. Elle maintient un réseau d’écoles juives, de synagogues et d’organisations culturelles. La cuisine juive, comme les "knishes" et les "matzot", fait partie intégrante de la culture argentine, tout comme les festivals juifs tels que Hanoucca et Pourim.
Cependant, la communauté a également été touchée par l’émigration, en particulier vers Israël, en raison des crises économiques répétées en Argentine. Malgré cela, les Juifs argentins continuent de jouer un rôle important dans la vie culturelle, économique et politique du pays.
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