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10 mars 1921

Mémorandum Fayçal

soumis aux alliés à la conférence de la paix

 

Mémorandum présenté à la Conférence des puissances alliées à la Chambre des communes

Présenté par le Général Hoddad Pacha (Armée Hejaz) et délégué par Son Altesse Royale Amir Faisal, le 10 mars 1921

 

 

Au nom de Sa Majesté

Les Arabes entrèrent dans la guerre du côté des Alliés avec des buts clairs. Ils voulaient obtenir leur indépendance et redevenir des hommes libres, maîtres de leur destinée.

Mais mon Père, Sa Majesté le Roi Hussein, n'a pas entrepris la tâche responsable et dangereuse de diriger la révolte arabe avant d'avoir obtenu des assurances du gouvernement de Sa Majesté britannique que les Arabes récolteraient une récompense proportionnée aux risques qu'ils courraient et aux sacrifices qu'ils devaient faire.

Ces promesses, données à mon Père par le gouvernement britannique, offraient aux Arabes la promesse définitive d'indépendance1 dans les limites incluses par une ligne tirée d'Alexandretta le long du 37e degré de latitude jusqu'à la frontière perse puis jusqu'au golfe Persique ; À l'ouest les mers,les frontières que sont la mer Rouge, la péninsule du Sinaï et la Méditerranée.

Certaines réserves ont été faites par le gouvernement britannique, dont certaines ont été approuvées par mon père; Il a affirmé que les autres, qui ne touchent qu'une partie relativement petite de la totalité de la zone concernée, devraient être réglés lors de discussions à tenir après la fin de la guerre.

Mon Père a estimé qu'en raison des promesses qui lui avaient été données, l'unité essentielle et l'indépendance des provinces arabophones de l'Empire turc étaient sûres en cas de succès des Alliés; En conséquence il se jeta dans la lutte et appela ses compatriotes Arabes à l'y rejoindre.

Avec un patriotisme certain, ils venaient de toutes les parties des provinces arabes pour accomplir leur part relativement petite, quoique non sans importance, dans la tâche commune;

Chaque lecteur des communiqués officiels émis pendant et après la guerre est au courant.

Pour aucun des Alliés, la paix n'a suscité plus de désillusion.

Les Arabes n'ont pas gagné l'indépendance et ils ont même perdu l'unité relative dont ils jouissaient quand ils possédaient une allégeance commune à Constantinople. Le fait que les provinces arabes soient séparées ne peut être justifié par aucune considération de politique pratique; Il y a encore moins de justification à la division de provinces au sein de divers États distincts et indépendants.

Racialement ils sont homogènes;

Économiquement, ils sont interdépendants.

A moins qu'il n'y ait une totale liberté de commerce dans tout le pays, ni la Syrie, où j'inclue la Palestine, ni la Mésopotamie ne peuvent s'épanouir; En effet, ils sont si étroitement unis que les tribus arabes nomades passent et repassent naturellement de l'un à l'autre chaque année. De nouveau, d'un point de vue militaire, les Arabes ne peuvent qu'espérer résister à la pression du Nord qui est un des facteurs constants de l'histoire du Moyen-Orient, s'ils peuvent montrer un front uni.

Divisés ils doivent tomber; unis ils peuvent défendre leurs frontières et maintenir cette sécurité de la menace externe qui est l'indispensable préalable au progrès ordonné.

Ces observations paraissent si évidentes que j'aurais dû hésiter à les soumettre à la Conférence, si les Puissances alliées ne les avaient pas tenues, en ce qui concerne les provinces arabes, dans le dessein qu'ils avaient établi au Moyen-Orient. Ils n'ont même pas établi de lien ou de lien qui soit l'indispensable préalable au progrès ordonné.

Que les puissances alliées s'intéressent à diverses parties des provinces arabes que mon Père a admis, et il sera le premier à dire que les Arabes devraient considérer ces intérêts et ces relations avec le respect dû et approprié.

Que les puissances alliées s'intéressent à diverses parties des provinces arabes que mon Père a admis, et il sera le premier à dire que les Arabes devraient considérer ces intérêts et ces relations avec le respect dû et approprié.

Les Puissances alliées ont également fait des déclarations à des entités raciales1 que mon Père est heureux de discuter à nouveau dans un esprit libéral, bien que rien n'y soit dit à leur sujet dans les engagements qu'il détient du gouvernement de Sa Majesté britannique. Mais de telles discussions devraient s'inspirer des sentiments exprimés par le Président des États-Unis le 4 juillet 1919:2

 

«Le règlement de toute question, qu'il s'agisse de territoire, de souveraineté, d'arrangement économique ou de politique, sur la base de la libre acceptation de ce règlement par le peuple immédiatement concerné, et non sur la base de l'intérêt ou de l'avantage matériel de toutes les autres nations ou peuples, qui peuvent désirer une autre colonie au profit de son influence extérieure ou sa maîtrise "

D'ailleurs les principaux hommes d’État des puissances alliées ont souvent déclaré guider leur politique d'après ces principes.

J'ai donc soumis au nom de Sa Majesté le Roi Hussein que cette Conférence devrait réexaminer le traitement réservé aux Arabes par le Traité de Sèvres.

Je suis ici au nom des Arabes et je demande solennellement cette indépendance et cette unité pour laquelle nous avons combattu, et pour laquelle beaucoup de milliers de mes compatriotes ont donné leur vie.

Nous voulons maintenir les relations amicales avec les Puissances alliées qui existaient entre nous alors que nous étions des nations frères d'armes; Nous ne voulons pas porter préjudice aux intérêts légitimes d'une Puissance étrangère; Mais surtout nous voulons, avec le patriotisme passionné que nous partageons avec les autres, être libres d'ordonner notre propre vie nationale afin que notre race, inspirée par sa grande histoire, puisse une fois de plus développer son génie et contribuer, comme par le passé, au socle commun de la civilisation humaine.

 

Jusqu'à ce que ce désir soit satisfait, la paix, qui est un des principaux objectifs de cette Conférence, ne pourra jamais être établie dans les provinces arabes.

(Signé) Faisal

 

1La déclaration Balfour

2 Les quatorze points Wilson.

 3 Voir la correspondance MacMahon - Hussein

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voir aussi l'accord Weizmann - Fayçal de 1920