Le seuil de richesse en France est déterminé selon l'observatoire des inégalité à 3470 € après impôt par unité de consommation (un foyer de deux adultes et deux enfants de + 14 ans compte trois unités de consommation). Pour un couple sans enfants c'est 5205 €)
8% de la population française serait riche sur ce critère, qui correspond au double du revenus médian (1735 € en 2017 )
( rapport de l'ODI commenté dans Le Monde 09/06/2020)
Un couple, soit 1,5 unité de consommation, est donc riche à partir de 5 205 euros par mois de revenus ; s’il a deux enfants de moins de 14 ans, soit 2,1 UC au total, à partir de 7 287 euros.
« Alors qu’il existe un voire plusieurs seuils de pauvreté, personne n’avait, jusqu’ici, fixé un seuil de richesse alors qu’il est une référence importante pour savoir qui peut contribuer à la solidarité collective, argumente Louis Maurin. Les politiques posent souvent cette question, ne serait-ce qu’en ce moment, avec le projet de proposition de loi sur la contribution des riches qui propose, lui, un seuil très élevé, de 250 000 euros par an, ce qui est une manière d’exonérer les classes aisées. Le riche serait donc toujours l’autre ? », s’interroge-t-il.
A l’aune de l’Obervatoire des inégalités, 5 millions de Français, soit 8 % de la population, sont riches, pas loin de la conception qu’en a l’Insee, qui parle, elle, de « catégorie aisée » pour les 10 % de la population dont le revenu mensuel dépasse 3 200 euros par UC.
« Un club très hétérogène »
Le seuil de la richesse fait écho à celui de la pauvreté, désormais fixé, selon les normes européennes, à 60 % du niveau de vie médian (soit 1 026 euros par mois) mais auquel Louis Maurin préfère l’ancienne norme de 50 % (855 euros), la jugeant plus réaliste. En France, cet étiage bas concerne 8 % de la population, en symétrie avec la proportion de riches.
« Ce seuil de la richesse peut paraître bas, notamment à un Parisien, qui ne pourra pas, avec ça, s’offrir un logement spacieux de plus de 60 m2, concède Louis Maurin, mais il s’agit d’un seuil d’entrée dans un club très hétérogène, avec des écarts de ressources impressionnants. Le niveau de vie moyen des 1 % les plus riches, à 14 750 euros par mois et par UC, a fortiori celui des 0,1 %, à 30 508 euros, n’a évidemment rien à voir avec celui des ménages du bas de la catégorie. »
Une révélation de ce rapport est que le 1 % des Français les plus riches a les revenus parmi les plus hauts de toute l’Europe. Pour faire partie de cette élite, il faut gagner au moins 6 848 euros par personne et par mois, plus qu’en Allemagne (6 500 euros) et qu’au Royaume-Uni (5 977 euros) ; seuls les Suisses font mieux (8 801 euros). « Cela met à mal la thèse selon laquelle les Français fortunés fuiraient leur pays, commente M. Maurin. La France compte 1,2 million de millionnaires, ce qui est énorme. »
Oasis de prospérité
Où habitent les 10 % des Français les plus riches ? Dans une quarantaine de villes, voire de quartiers, pour l’essentiel d’Ile-de-France, où leur entre-soi est assuré.
Ils s’éparpillent dans onze arrondissements parisiens, le 7e les dépassant tous avec un niveau de vie moyen de 132 690 euros par an (et même 210 000 euros dans le seul secteur du Gros-Caillou, près de la tour Eiffel), et dans quelques banlieues résidentielles comme Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine, 114 050 euros), Saint-Cloud (Hauts-de-Seine, 78 960 euros), Saint-Mandé (Val-de-Marne), Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), Maisons-Laffitte (Yvelines), Sèvres, Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) ou Saint-Germain-en-Laye (Yvelines), mais un seul arrondissement lyonnais, le 6e.
Les hauts revenus sont, bien sûr, à 90 % des propriétaires (contre 56 % pour le reste de la population) et, « bizarrerie française, 2 % des riches sont locataires d’un logement social, relèvent les auteurs. Visiblement, les offices HLM maintiennent dans les lieux des personnes qui n’ont plus de raison d’y être ».
Les inégalités de patrimoine sont plus considérables encore que celles de revenus car, par définition, être riche, c’est être en mesure d’épargner, donc d’accumuler du capital.
Patrimoine diversifié
Par convention, Louis Maurin a, là aussi, fixé le seuil de fortune à 490 000 euros, soit trois fois le patrimoine médian (163 000 euros). En France, 4,6 millions de ménages, soit 16 % de la population, se situent au-dessus de ce montant. Les 10 % des plus hauts patrimoines se situent, eux, au-delà de 607 700 euros, pour 2,9 millions de ménages, soit 10 % d’entre eux qui détiennent ainsi 51 % de la richesse française. Cette concentration situe la France au milieu du classement mondial, bien loin derrière les Etats-Unis, où ces mêmes 10 % les plus riches s’arrogent 79 % de la richesse nationale, ou l’Allemagne avec 60 %.
n France, ils ont un patrimoine diversifié composé à 47 % d’immobilier, 32 % d’actifs financiers, 11 % de patrimoine professionnel et 9 % de dépôts bancaires. Plus on grimpe dans le palmarès de la fortune, plus la détention d’actions devient prépondérante, jusqu’à 86 % pour le 0,1 % le plus doté.
L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) ne touche plus que 133 000 contribuables déclarant un patrimoine immobilier supérieur à 1,3 million d’euros, bien moins que l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) qu’il a remplacé et qui touchait, jusqu’en 2018, 358 000 foyers.
Isabelle Rey-Lefebvre