Après la guerre, la situation en Palestine mandataire est intenable. Arabes et Palestiniens ne sont pas partis pour s'entendre.
Le rapport Morrisson-Grady considère alors les options possibles dont le partage de la Palestine en deux "provinces" sous autorité du pouvoir mandataire
MORISSON - GRADY PLAN
31 juillet 1946
Extrait du discours prononcé par le très honorable Herbert Morrison à la Chambre des communes le 31 juillet 1946, décrivant le "Plan d'autonomie provinciale" de la Palestine (avec carte explicative)
Les REPRÉSENTANTS du Gouvernement de Sa Majesté et du Gouvernement des Etats-Unis, que je qualifierai de délégations d'experts, ont achevé leur examen des recommandations formulées dans le rapport de la Commission d'enquête anglo-américaine sur les problèmes des juifs d'Europe et de Palestine ("Divers n° 8 (1946)", Cmd.6806).
Les experts ont fait des recommandations unanimes des deux côtés, britannique et américain, quant à la politique à adopter en ce qui concerne toutes les questions couvertes par le rapport de la Commission anglo-américaine ; et je pense qu'il me faut exposer, inévitablement de manière assez détaillée, les principales caractéristiques de leurs propositions.
Les délégations d'experts se sont d'abord penchées sur les recommandations de la Commission anglo-américaine concernant la position des Juifs en Europe. Les événements de ces dernières années, après l'arrivée au pouvoir d'Hitler, ont particulièrement mis l'accent sur le caractère du Foyer National Juif en tant que sanctuaire pour ceux qui pouvaient y accéder parmi les quelques survivants tragiquement rares des Juifs européens.
C'est la pression de l'immigration en provenance d'Europe qui a tant intensifié les difficultés du problème palestinien. La Commission anglo-américaine a reconnu que la Palestine ne peut à elle seule répondre aux besoins d'immigration des victimes juives des persécutions nazies et fascistes et a recommandé que nos deux gouvernements, en association avec d'autres pays - le monde entier en partage la responsabilité - s'efforcent de trouver immédiatement de nouveaux foyers pour toutes les personnes déplacées, sans distinction de croyance ni de nationalité.
Les délégations d'experts ont proposé que nos deux gouvernements adoptent les moyens suivants pour apporter une contribution immédiate à la solution de ce problème.
Premièrement, ils ont proposé que nos deux gouvernements s'efforcent de créer des conditions favorables à la réinstallation d'un nombre substantiel de personnes déplacées en Europe même, puisqu'il est reconnu que l'écrasante majorité continuera à vivre en Europe. Dans les zones britannique et américaine de l'Allemagne et de l'Autriche, nos deux gouvernements font tout leur possible pour aider à la réinstallation et éradiquer l'antisémitisme. En Italie et dans les anciens États satellites ennemis, les traités de paix obligeront les autorités à garantir à toutes les personnes relevant de leur juridiction les droits de l'homme et les libertés fondamentales. En ce qui concerne les pays d'Europe, les délégations d'experts ont recommandé que nos gouvernements appuient les efforts déployés par l'ONU pour assurer la protection de ces droits et libertés. En outre, en aidant à rétablir la stabilité politique et économique en Europe, nous devrions continuer à contribuer au rétablissement des conditions de base qui permettront la réintégration en Europe d'un nombre important de personnes déplacées, y compris les Juifs.
Mais, lorsque tout ce qui est possible a été fait en Europe, il est clair qu'il faut trouver de nouveaux foyers à l'étranger pour beaucoup de ceux dont les liens avec leurs anciennes communautés ont été irrémédiablement rompus.
Les délégations d'experts ont présenté les mesures suivantes, dont certaines sont déjà en cours d'élaboration, destinées à promouvoir ce mouvement.
Premièrement, nous devons continuer à faire pression pour la création d'une Organisation internationale pour les réfugiés conçue pour traiter efficacement le problème des réfugiés et des personnes déplacées dans son ensemble.
Deuxièmement, nous devrions soutenir fermement, lors de la prochaine Assemblée générale des Nations Unies, un appel lancé à tous les gouvernements membres pour qu'ils reçoivent dans les territoires sous leur contrôle une partie des personnes déplacées en Europe, y compris les Juifs. Je dois ici interpoler le fait que le gouvernement de Sa Majesté au Royaume-Uni a déjà donné l'exemple en acceptant l'engagement de promouvoir la réinstallation d'environ 235 000 soldats et civils polonais et de leurs Dominions, et qu'il a déjà pris l'initiative dans ce domaine. Cela s'ajoute, bien sûr, aux réfugiés admis pendant la période de persécution nazie, dont quelque 70 000 Juifs demeurent au Royaume-Uni.
Les gouvernements de Sa Majesté dans les dominions ont été informés des mesures prises par le Gouvernement de Sa Majesté au Royaume-Uni et ils appuieront, nous l'espérons, l'appel lancé aux gouvernements Membres de l'ONU, appel qui comprendra une invitation à accueillir un certain nombre de personnes déplacées dans les territoires sous leur contrôle.
Je crois également comprendre que les États-Unis, où 275 000 réfugiés, dont 180 000 Juifs, se sont réinstallés définitivement au cours de la même période, reprennent maintenant une immigration normale et s'attendent à accueillir chaque année quelque 53 000 immigrants des pays européens d'où proviennent les personnes déplacées.
Enfin, en attendant la création d'une Organisation internationale pour les réfugiés, nous continuerons, en coopération avec le Gouvernement des Etats-Unis, à promouvoir la réinstallation des réfugiés et des personnes déplacées par l'intermédiaire du Comité intergouvernemental pour les réfugiés. Des plans sont en préparation, en coopération avec les pays concernés, pour réinstaller un grand nombre de personnes déplacées au Brésil et dans d'autres pays d'Amérique du Sud.
Il ressort donc de ce que j'ai dit que les aspects plus larges du problème des réfugiés et des personnes déplacées n'ont pas été négligés, pas plus que le rétablissement des conditions permettant la réintégration en Europe d'autant de personnes déplacées, y compris les Juifs, qu'ils souhaitent rester. La capacité et le talent des Juifs et des autres sont nécessaires pour les tâches difficiles de reconstruction qui nous attendent. Dans le même temps, nous prenons des mesures urgentes et pratiques pour faire en sorte que d'autres pays ainsi que la Palestine contribuent à la réinstallation de ces personnes déplacées, y compris les Juifs, qui doivent chercher ailleurs qu'en Europe leur foyer permanent.
En formulant une nouvelle politique pour la Palestine, les délégations d'experts ont accepté comme base les principes énoncés dans la troisième recommandation de la Commission anglo-américaine, à savoir que la Palestine dans son ensemble ne peut être ni un Etat juif ni un Etat arabe, qu'aucune des deux communautés en Palestine ne doit dominer l'autre, et que la forme du gouvernement doit être de nature à sauvegarder les intérêts en Terre Sainte, à la foi musulmane et juive.
Les délégations d'experts font valoir les arguments suivants : Les aspirations politiques des deux communautés en Palestine sont inconciliables. Le conflit que ces aspirations ont provoqué est si amer qu'il y a peu d'espoir d'assurer, dans un délai raisonnable, la coopération entre Arabes et Juifs qui permettrait l'établissement en Palestine d'un système de gouvernement unitaire, conforme à ces principes fondamentaux, dans lequel chaque peuple joue son rôle. La seule chance de paix et de progrès immédiat vers des institutions autonomes semble résider dans la formulation de la constitution du pays de manière à donner à chacun la plus grande mesure possible de pouvoir pour gérer ses propres affaires. Les experts estiment que, dans les circonstances actuelles, le meilleur moyen d'y parvenir est d'établir des provinces arabes et juives, qui jouiront d'une large autonomie sous un gouvernement central. Ils proposent que, à cette fin, la Palestine soit divisée en quatre régions, une province arabe, une province juive, un district de Jérusalem et un district du Néguev. La province juive comprendrait la majeure partie du territoire sur lequel les Juifs se sont déjà installés et une superficie considérable entre les colonies et autour de celles-ci. Le district de Jérusalem comprendrait Jérusalem, Bethléem et leurs environs immédiats.
Le district du Neguev comprendrait le triangle inhabité des terres incultes dans le sud de la Palestine au-delà des limites actuelles de la culture.
La province arabe comprendrait le reste de la Palestine ; elle serait presque entièrement arabe en ce qui concerne tant la terre que la population.
Les limites provinciales seraient des limites purement administratives, définissant la zone à l'intérieur de laquelle une assemblée législative locale serait habilitée à légiférer sur certains sujets et un exécutif local à administrer ses lois. Elles n'auraient aucune importance en matière de défense, de douanes ou de communications, mais, pour donner un caractère définitif, les frontières, une fois fixées, ne pourraient être modifiées que par accord entre les deux provinces. Une disposition à cet effet serait incluse dans tout accord de fiducie et dans l'instrument de mise en œuvre du régime. Les gouvernements provinciaux auraient le pouvoir de légiférer et d'administrer dans leurs domaines respectifs en ce qui concerne un large éventail de sujets d'intérêt principalement provincial. Ils auraient également le pouvoir de limiter le nombre et de déterminer les qualifications des personnes qui pourront établir leur résidence permanente sur leur territoire après l'introduction du plan. Les gouvernements provinciaux seraient tenus par l'instrument gouvernemental qui établit la loi fondamentale de garantir les droits civils et l'égalité devant la loi de tous les résidents, ainsi que la liberté de transit, d'échange et de commerce interterritoriaux.
Les gouvernements provinciaux auraient le pouvoir nécessaire pour recueillir des fonds aux fins de l'exercice de leurs fonctions.
L'autorité exclusive en matière de défense, de relations extérieures, de douanes et d'accises serait réservée au gouvernement central.
En outre, l'autorité en matière d'administration de l'ordre public, y compris la police et les tribunaux, ainsi qu'un nombre limité de sujets d'importance exclusivement palestine, serait initialement réservée au Gouvernement central.
Le gouvernement central aurait tous les pouvoirs qui ne sont pas expressément conférés aux provinces par l'instrument du gouvernement.
Une chambre législative élue serait établie dans chaque province. Un exécutif, composé d'un ministre en chef et d'un conseil des ministres, serait nommé dans chaque province par le haut-commissaire parmi les membres de la Chambre législative après consultation de ses dirigeants. Les projets de loi adoptés par les Chambres législatives nécessiteraient l'assentiment du Haut Commissaire. Toutefois, cela ne serait pas refusé à moins que le projet de loi ne soit incompatible avec l'instrument du gouvernement, dont les dispositions offriraient des garanties pour la paix de la Palestine et les droits des minorités.
Il serait également nécessaire de réserver au Haut Commissaire un pouvoir d'intervention d'urgence si un gouvernement provincial ne s'acquitte pas de ses propres fonctions ou les dépasse. Les fonctions exécutives et législatives du Gouvernement central seraient initialement exercées par le Haut Commissaire, assisté d'un Conseil exécutif désigné. Certains départements du Gouvernement central seront dirigés, dès que le Haut Commissaire le jugera utile, par des Palestiniens.
Le Haut Commissaire établirait un Conseil de planification du développement et une commission tarifaire composé de représentants du Gouvernement central et de chaque province. Dans le district de Jérusalem, un conseil serait créé avec des pouvoirs similaires à ceux d'un conseil municipal. La majorité de ses membres seront élus, mais certains d'entre eux seront nommés par le Haut-Commissaire. Le district du Neguev serait administré, pour le moment, par le gouvernement central.
Ce plan d'autonomie provinciale simplifierait grandement le problème de l'immigration juive en Palestine. Bien que le contrôle final de l'immigration resterait du ressort du gouvernement central, ce contrôle serait exercé sur la base des recommandations formulées par les gouvernements provinciaux.
Tant que la capacité d'absorption économique de la province n'est pas dépassée, le gouvernement central autorise l'immigration souhaitée par le gouvernement provincial. Il n'aurait pas le pouvoir d'autoriser l'immigration au-delà des limites proposées par les gouvernements provinciaux.
Alors que le gouvernement de la province arabe aurait le plein pouvoir d'exclure les immigrants juifs de sa province, la province juive serait normalement en mesure d'admettre autant d'immigrants que son gouvernement le souhaite.
Dans le cadre de ce plan, les experts suggèrent qu'il serait possible d'accepter les recommandations de la Commission anglo-américaine pour l'admission immédiate de 100 000 immigrants juifs en Palestine et la poursuite de l'immigration par la suite. Les experts ont préparé un plan pour le déplacement de 100 000 Juifs d'Europe vers la région juive de Palestine, et ce plan sera mis en œuvre dès qu'il sera décidé de mettre en œuvre l'ensemble du plan.
es certificats d'immigration seraient délivrés le plus rapidement possible et tous les efforts seraient faits pour terminer l'opération dans les 12 mois suivant la date à laquelle l'immigration commence. Les immigrants seraient sélectionnés principalement parmi les Juifs d'Allemagne, d'Autriche et d'Italie, et la priorité serait donnée à ceux qui ont déjà passé un certain temps dans des centres de rassemblement dans ces pays et à ceux qui, bien qu'ils ne soient plus dans ces centres, ont été libérés en Allemagne et en Autriche. Au sein de ces groupes, la priorité serait donnée aux artisans du bâtiment et aux travailleurs agricoles, aux jeunes enfants, aux handicapés et aux personnes âgées. La majeure partie des 100 000 certificats proviendra d'Allemagne, d'Autriche et d'Italie ; tous les certificats disponibles pour les Juifs d'autres pays d'Europe de l'Est et du Sud-Est ne seront délivrés qu'aux enfants orphelins. L'expédition se ferait au rythme maximum compatible avec le dédouanement des camps de transit en Palestine, dans lesquels les immigrants seraient temporairement hébergés jusqu'à ce qu'ils puissent être absorbés.
Dans le cadre de ce plan, le gouvernement des États-Unis serait invité à assumer seul la responsabilité du transport maritime des réfugiés juifs, dont j'ai parlé, de l'Europe vers la Palestine. Ils fourniraient les navires et prendraient en charge la totalité du coût du transport maritime. Ils fourniraient également de la nourriture aux immigrants pendant les deux premiers mois suivant leur arrivée en Palestine. Le coût du transfert et de l'installation de ce nombre de personnes en Palestine serait, bien entendu, considérable.
Les organisations juives ont accepté la responsabilité financière, et les experts ne voyaient aucune raison de ne pas trouver le financement nécessaire par des réparations, des contributions des juifs du monde entier et des prêts. Les experts ont accepté la recommandation de la Commission anglo-américaine selon laquelle il était souhaitable d'améliorer la situation économique et sociale des Arabes en Palestine. Le programme qu'ils ont suggéré comprendrait la fourniture d'un service de santé comparable à celui qui est déjà à la disposition des Juifs, l'expansion des établissements d'enseignement, l'octroi de crédits bon marché aux cultivateurs arabes et d'autres mesures destinées à accroître la productivité de la terre, la promotion du mouvement coopératif, le développement des industries légères et des améliorations des conditions de vie tant rurales que urbaines.
Les délégations d'experts ont mis en garde contre le fait que, pendant quelques années, la mise en œuvre de ces plans et d'autres plans visant à améliorer les perspectives économiques et le niveau de vie en Palestine entraînerait de lourdes dépenses en capital non admissibles au bénéfice de prêts et exercerait une forte pression sur les finances de la Palestine. La mise en place du système provincial entraînerait également un déficit dans le budget de la province arabe qui devrait être couvert par une subvention du gouvernement central. Une aide financière supplémentaire pour la Palestine serait nécessaire si le plan, dans son ensemble, devait être mis en œuvre. Pour faire face à cette situation, les experts ont suggéré qu'il soit demandé aux États-Unis d'Amérique d'accorder une subvention substantielle au Gouvernement palestinien, qui servirait principalement à financer des projets de développement arabes ne se prêtant pas à l'auto-liquidation et à aider à couvrir les dépenses extraordinaires pendant la période de transition, tandis que ce pays devrait être chargé d'assumer l'ultime responsabilité du déficit budgétaire annuel de la Palestine jusqu'au moment où l'augmentation des recettes ne serait plus nécessaire.
Les experts ont estimé que la nécessité d'un développement économique en Palestine devait être examinée dans le contexte du Moyen-Orient dans son ensemble. Ils ont cru comprendre que les gouvernements représentés au sein de la Ligue arabe examinaient actuellement les possibilités de développement économique de leurs pays et ils ont donc suggéré que si l'un de ces États éprouvait des difficultés à obtenir des prêts internationaux à cette fin, les États-Unis devraient autoriser des prêts au développement à grande échelle. Ces prêts seraient accordés par l'intermédiaire d'un organisme approprié pour le développement de la région du Moyen-Orient, y compris la Palestine. La plupart des projets de développement à grande échelle dont la Palestine pourrait bénéficier devraient être entrepris en coopération au moins avec la Transjordanie, et probablement avec la Syrie et le Liban.
Les experts ont proposé que, sous réserve de l'accord du Gouvernement de la Transjordanie, les ressources en eau communes de la Palestine et de la Transjordanie soient examinées dès que possible par des ingénieurs-conseils agissant sous les auspices du Gouvernement.
J'ai maintenant terminé mon exposé des recommandations des délégations d'experts. Le Gouvernement de Sa Majesté, estimant que ces recommandations représentent la meilleure voie à suivre pour parvenir à une solution du problème, a informé le Gouvernement des États-Unis qu'il était disposé à les accepter comme base de négociation.
Nous avions espéré avant le Débat recevoir l'acceptation du Président Truman, mais nous croyons comprendre qu'il a décidé, compte tenu de la complexité de la question, d'en discuter en détail avec la délégation d'experts américains qui sont de retour à Washington à cette fin.
Le Président poursuit donc l'examen de la question et nous espérons l'entendre à nouveau en temps voulu. Dans l'intervalle, cependant, la situation en Palestine ne connaîtra aucun retard. Nous invitons les représentants des Juifs et des Arabes à nous rencontrer pour discuter de ces problèmes et nous espérons pouvoir leur présenter comme base de négociation le plan recommandé par les délégations d'experts.
S'il est jugé acceptable, notre intention serait qu'il soit incorporé dans un accord de tutelle pour la Palestine. Mais je tiens à préciser que nous avons l'intention de poursuivre la discussion avec les Arabes et les Juifs sur un régime constitutionnel dans ce sens. Nous pensons qu'il offre de nombreux avantages aux deux communautés en Palestine. Les Juifs seront libres d'exercer un large contrôle sur l'immigration dans leur propre province et d'y faire progresser le développement du foyer national juif.
Le Règlement sur le transfert des terres sera abrogé. Le gouvernement de la province arabe aura la possibilité d'autoriser ou de refuser aux Juifs l'autorisation d'y acheter des terres, mais la superficie de la province juive sera plus grande que celle où les Juifs sont libres d'acheter des terres à l'heure actuelle.
Les Arabes y gagneront, en ce sens que la grande majorité d'entre eux seront libérés une fois pour toutes de toute crainte de la domination juive. Les citoyens de la province arabe jouiront immédiatement d'une grande autonomie et des garanties puissantes seront prévues pour protéger les droits de la minorité arabe qui reste dans la province juive.
Pour les deux communautés, le plan offre une perspective de développement, dont il y aurait peu d'espoir dans une Palestine unitaire.
A long terme, le plan laisse la voie ouverte au progrès pacifique et au développement constitutionnel, soit vers la partition, soit vers l'unité fédérale. L'association des représentants des deux provinces dans l'administration des sujets centraux peut mener à une constitution fédérale pleinement développée.
Par contre, si les forces centrifuges s'avèrent trop fortes, la voie est ouverte vers la partition.
Nos propositions ne préjugent en rien de cette question. Nous pensons que ce plan offre un compromis aussi juste et raisonnable que possible entre les revendications des Arabes et des Juifs, et qu'il offre les meilleures chances de concilier les intérêts contradictoires des deux communautés. Il faut toutefois que cela soit clair. La pleine mise en œuvre du plan des experts dans son ensemble dépend de la coopération des États-Unis. J'espère que ce sera bientôt le cas. Dans le cas contraire, nous devrons reconsidérer notre position, notamment en ce qui concerne les implications économiques et financières, ce qui ne manquera pas d'affecter le rythme et l'ampleur de l'immigration et du développement.
Telles sont donc nos propositions. Je demande l'indulgence de la Chambre pour le fait que j'ai dû m'en tenir à mes notes dans les circonstances pour prononcer ce discours, parce qu'une grande partie de ce discours était nécessairement fondée sur les recommandations des délégations d'experts, et j'étais extrêmement soucieux d'être exact dans mes propos. En tout état de cause, il serait impraticable d'entrer, à ce stade, plus en détail sur les propositions qui doivent servir de base de discussion avec les représentants des Arabes et des Juifs à qui nous avons promis une possibilité de consultation avant de prendre une décision finale.
Je recommande ces propositions à l'Assemblée et j'invite instamment les deux communautés de Terre Sainte à les examiner avec la plus grande attention. Pendant que nos consultations se poursuivent, je lance un appel à tous les hommes de bonne volonté de part et d'autre pour qu'ils coopèrent avec le Gouvernement afin de réprimer le terrorisme et de traduire en justice les responsables des crimes de violence. Qu'on ne dise ni ne fasse rien qui puisse rendre plus difficile la conclusion d'un règlement définitif. Le monde est las de cette lutte insensée entre Juifs et Arabes, et écœuré par ses incidents barbares. Elle leur demande de mettre fin à un chapitre sordide de l'histoire et de se joindre aux nations civilisées pour jeter les bases d'un monde plus noble et plus heureux. Leurs amis partout dans le monde attendront leur verdict avec impatience. Toutefois, la simple négation ne sert à rien et serait particulièrement dangereuse et regrettable dans une situation inflammable telle que celle que nous connaissons actuellement. Il est de la responsabilité des Juifs et des Arabes d'être prêts à s'asseoir en tant que personnes pragmatiques pour discuter, négocier et parler en vue de parvenir à une solution pratique, avec la mission et le sens de l'urgence qu'exige ce grave problème.
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voir aussi le télégramme du 24 juillet 1944 de Grady (anglais)
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