Le Plan Daleth fut rédigé par Israël Ber et Moshe Pasternak, sous la supervision de Yigal Yadin, chef des opérations de la Haganah.

Le Plan Daleth est toujours sujet à controverse. Pour Ilan Pappé, il est la preuve du "nettoyage ethnique de la Palestine" selon le titre du livre éponyme. Pour Nathan Weinstock c'est un plan défensif logique visant à rendre possible la constitution de l'Etat Hébreu dans ses limites issues de la guerre d'indépendance.

 

 

Ygal Yadin

Ainsi Pappé écrit :

 C’est lui qui a scellé le destin des palestiniens sur les territoires que les dirigeants sionistes avaient en vue pour leur futur État juif. […] le Plan Daleth prévoyait leur expulsion totale et systématique de leur patrie. »

"Dans un article intitulé « Plan Daleth: Master Plan for the Conquest of Palestine », Walid Khalidi présente le plan comme une ligne de conduite donnée à la Haganah pour l'expulsion des villages palestiniens. D'autres historiens palestiniens partagent ce point de vue, tels Sharif Kan'ana, Nur Masalha et Rashid Khalidi.

 

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Walid Khalidi tire ses conclusions de plusieurs éléments du contexte liés au sionisme et à la guerre civile de 1947-1948 en Palestine mandataire et qui motivent le Plan Daleth tel qu'il le perçoit. Il considère ainsi que :

  • les sionistes étaient confrontés à un problème territorial en tant que mouvement nationaliste sans territoire sous son contrôle;

  • le transfert de la population arabe hors de Palestine était dans leur esprit depuis Théodore Herzl et qu'il fut mis en avant par d'autres à plusieurs reprises bien que les mouvements sionistes, à l'exception des révisionnites restèrent discrets sur ce point;

  • les sionistes ne pouvaient accepter de ne posséder qu'une faible proportion des terres cultivables dans la partie accordée à l'État juif par le plan de partition (1 500 000 de dounams cultivables seulement sur les 7 500 000 cultivables et les 13 000 000 de la surface totale);

  • l'État juif tel que défini par le plan de partage était peuplé d'autant de juifs que d'arabes;

  • les sionistes étaient conscients de leur puissance [militaire] et que le soutien des Russes et des Américains au plan de partition "enfla" encore leur "ego" à ce niveau; il souligne par ailleurs leur puissance militaire en mars 1948 juste avant la mise en œuvre du plan Daleth;

  • la défaite arabe palestinienne ne pouvait être effective que si les arabes étaient « délogés », étant donné que malgré la « surpuissance » des juifs, les Arabes étaient in situ;

  • le plan sioniste devait être mis en œuvre avant le 15 mai 1948, date à laquelle on pouvait s'attendre à ce que les armées régulières arabes interviennent pour respecter le statu quo en Palestine.

Walid Khalidi attire l'attention des lecteurs sur la section Contremesures du plan C (Gimmel) et la section Objectifs opérationnels des Brigades du plan Daleth7 ainsi que sur l'objectif du plan qui était le « contrôle de la zone donnée [aux Juifs] par les Nations unies et en addition, des zones occupées par [les Juifs] qui étaient en dehors de ses frontières8 et l'établissement de forces pour contrer l'invasion possible des armées arabes après le 15 mai ».

Dans la section 3b du plan, on trouve parmi les « Objectifs opérationnels des Brigades » comment traiter les « centres de populations ennemis occupés » :

« destruction de villages (y bouter le feu, les faire exploser et planter des mines dans les débris), en particulier les centres de population dont le contrôle continu est difficile. (...) Réaliser des opérations de recherche et de contrôle en fonction des lignes de conduite suivantes : encerclement de village et fouille de ceux-ci. En cas de résistance, les forces armées doivent être détruites et la population expulsée en dehors des frontières de l'État hébreu ».

Ilan Pappé considère également le plan Daleth comme un « plan global d'expulsion », voire comme un plan de « nettoyage ethnique ». Il considère que « le plan est le reflet d'un état d'esprit des soldats juifs avant, pendant et après la guerre, parfaitement résumé par les propos d'Ezra Danin (...) : les Arabes sur la terre d'Israël, il ne leur reste qu'une chose à faire, partir en courant »."

 

Lire aussi l'article de Walid Khalidi : "Master Plan for the Conquest of Palestine" (1988 : ) anglais

 

[lire aussi l'article wikipedia ]

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Tandis que pour Nathan Weinstock :

La stratégie organisée par l'Opération Na'hchone sera officialisée et détaillée par le « plan D » de l'état-major de la Hagannah ; Ce plan fait suite au « plan A » du Ychouv, élaboré au printemps 1941, et qui se donnait pour objectif de défendre la territoire Palestinien à l'aide de commandos régionaux contre toute invasion des forces allemandes ou de leurs satellites, au « plan B », établi au printemps 1945, qui esquissait les axes de la défense du Ychouv en cas de soulèvement arabe ainsi qu'au « plan C », de mai 1946, organisant les lignes directrices à suivre lors des actions de représailles fac aux attaques organisées.

Il ne constitue en aucune manière un programme secret d'expulsion des Arabes palestiniens, comme on le présente parfois à des fins polémiques, mais un projet stratégique défensif – qui n'a rien de clandestin ou de mystérieux (il figure en détail dans la très officielle histoire de la Hagannah ..). Conçu en mars 1948 pour sécuriser le territoire du futur Etat israélien ainsi que de les agglomérations juives situées à l'extérieur de celui-ci (à une époque où l'on envisageait pas que les unités de l'ALA envahiraient le pays avant le départ des Britanniques), ce plan prévoit, dans l'attente angoissante de l'invasion annoncée des États de la Ligue arabe, d'anéantir les milices palestiniennes et arabes, de gagner la bataille des voies de communication et de neutraliser à cette fin les forces effectivement ou potentiellement hostiles.

Dans le cadre de cette optique de la défense du Ychouv, les commandants locaux sont autorisés à procéder à des destructions de villages arabes ou à des expulsions en cas de nécessité. Le sens fondamental du plan Daleth – explique Henry Laurens – est l'élimination des forces hostiles à l'intérieur du territoire du plan de partage et dans les régions que l'on peut annexe en plus ; il faut assurer une continuité territoriale à l'espace juif en constitution et permettre l'établissement de limites de sécurités pour le futur Etat. Toutes les populations arabes sont considérées comme hostiles. Les accords de non-belligérance sont annulés. […] Le Plan D a un but essentiellement militaire : ce n'est pas un plan politique d'expulsion des populations arabes », même sa mise en pratique y aboutit en cas de résistance de la population arabe.

Pour comprendre ces instruction il faut se replacer dans le contexte concret de l'époque évoqué précédemment : en mars 1948 la quasi-totalité des villages juifs sont assiétés ou soumis à un blocus inexorable par les unités palestiniennes, toutes les voies de communication ont été coupées ou se trouvent menacées par des villages servant de base aux forces hostiles.

Au surplus, plusieurs convois successifs de vivres ou de secours – même pourvus d'un blindage de fortune -ont été anéantis au cours d'embuscades. Il faut donc rompre l'encerclement, libérer les voies de communication ...

 

Texte du plan Daleth

 

Source  : Sefer Toldot Hahaganah [Histoire de la Haganah], vol. 3, ed, de Yehuda Slutsky (Tel-Aviv: Bibliothèque sioniste, 1972), annexe 48, p. 1955-60 in site ism-france

 

I. Introduction

(a) L'objectif de ce plan est de prendre le contrôle des zones de l'Etat hébreu et de défendre ses frontières.

Il vise également à prendre le contrôle des zones de colonisation et de concentration juives qui se situent à l’extérieur des frontières [de l'Etat hébreu] aux petites forces régulières et semi-régulières opérant depuis des bases à l'extérieur ou à l'intérieur de l'État.



(b) Ce plan est basé sur trois plans précédents :

1. le Plan B, Septembre 1945.

2. le Plan de Mai 1946.

3. le Plan Yehoshua, 1948

 

(c) Dans la mesure où ces plans ont été conçus pour faire face à la situation à l'intérieur du pays (les deux premiers plans portaient sur la première phase d'incidents, tandis que le troisième plan portait sur la possibilité d'une invasion par des armées régulières des pays voisins), l'objectif du plan D est de combler les lacunes des trois plans et de les rendre plus adaptés à la situation attendue à la fin de la domination britannique dans le pays.

 

II. Idées de base

Ce plan est basé sur les hypothèses suivantes :

(a) L’Ennemi

1. Composition supposée des forces :

- Les forces armées semi-régulières de l'Armée de Libération affiliée à la Ligue Arabe, qui opèrent depuis des bases déjà occupées ou des bases qui seront occupées dans le futur.

- Les forces armées régulières des pays voisins qui lanceront une invasion et franchiront les frontières, ou opéreront à partir de bases dans le pays (la Légion Arabe).

- Les petites forces armées locales qui opèrent ou opéreront depuis des bases dans le pays et à l'intérieur des frontières de l'Etat hébreu.

- Les trois forces armées seront activées en même temps, conformément à un plan opérationnel commun, et parfois participeront à une stratégie coordonnée.

2. Opérations supposées de l'ennemi.

L'isolement et, si possible, l'occupation de la Galilée orientale, de la Galilée Occidentale et du Néguev.

Infiltrations au cœur de la zone de Sharon et d’Emek Hefer, en direction, en gros, de Qalqiliyyah-Herzliya et de Tulkarem-Netanya.

Isolement des trois grandes villes (en particulier de Tel-Aviv). ).

Perturbation des lignes de ravitaillement en nourriture et autres produits indispensables comme l'eau, l'électricité, etc

 

3. Méthodes stratégiques supposées :

-Des attaques lancées par les forces armées régulières et semi-régulières contre les colonies, utilisant des armes lourdes d'infanterie ainsi que l’artillerie, des blindés et l'aviation.

- Des frappes aériennes contre des centres au cœur de nos villes (en particulier Tel-Aviv)

- Des opérations de harcèlement effectuées par de petites forces armées contre les principales routes de transport et les colonies pour donner aux opérations mentionnées ci-dessus un soutien direct ou stratégique. Ces forces armées mèneront également des opérations de sabotage contre des installations économiques essentielles et des attaques terroristes dans les villes.


(b) les Autorités

Ce plan repose sur l'idée générale que, lors de sa mise en œuvre, les forces armées des autorités [Britanniques] ne seront pas présentes dans le pays.


Dans le cas où les forces britanniques continueraient de contrôler certaines bases et zones, le plan devra être modifié pour faire face à cette situation dans ces secteurs. Des instructions supplémentaires seront données à cet égard.

 

(c) Les Forces Internationales

Ce plan repose sur l'hypothèse qu'il n'y aura pas de forces internationales stationnées dans le pays capables de mener une action efficace,

 

(d) Objectifs opérationnels

 

1. L’auto-défense contre l'invasion de forces armées régulières ou semi-régulières.

 

Cet objectif sera atteint ainsi :

- Un système de défense fixe pour préserver nos colonies, nos projets de développement économique indispensables et propriétés, ce qui nous permettra de fournir des services gouvernementaux à l'intérieur des frontières de l'Etat (basés d’une part, sur la défense des régions de l'État, et d’autre part, sur le blocage des principales routes d’accès du territoire ennemi au territoire de l'État).

- Le lancement de contre-attaques pré-planifiées sur des bases ennemies et les lignes de ravitaillement au cœur de leur territoire : que ce soit à l’intérieur des frontières du pays [la Palestine] ou dans les pays voisins.

 

2. Garantir la liberté d’actions militaires et économiques à l’intérieur des frontières de l'Etat [hébreu], et dans les colonies juives à l’extérieur de ses frontières par l'occupation et le contrôle de positions élevées importantes sur un certain nombre de voies de communications.

 

3. Empêcher l'ennemi d'utiliser des positions de première ligne au sein de son territoire qui pourraient être facilement utilisées pour lancer des attaques. Cela sera effectué par leur occupation et leur contrôle.

 

4. Appliquer une pression économique sur l'ennemi en assiégeant certaines de ses villes afin de le forcer à abandonner certaines de ses activités dans certaines régions du pays.

 

5. Limiter la capacité de l'ennemi à effectuer des opérations limitées : l'occupation et le contrôle de certaines de ses bases dans des zones rurales et urbaines à l'intérieur de l'État.

6. Contrôler les services publics et les biens dans les frontières de l'État et assurer la fourniture des services publics de base de façon efficace.

 

III. Affectation des tâches

Compte tenu des objectifs opérationnels décrits ci-dessus, les différents services armés sont assignés aux tâches suivantes :

(1) Un renforcement du Système de Défense fixe pour défendre les zones, et une coordination dans son déploiement au niveau régional. En outre, les principales routes d’accès de l’ennemi aux terres de l'État doivent être bloquées par des opérations et des mesures.

(2) Une consolidation de l'appareil de défense.

(3) Un déploiement dans les grandes villes.

(4) Un contrôle des principales routes de transport dans l'ensemble du pays.

(5) Un encerclement des villes ennemies.

(6) Une occupation et un contrôle des positions ennemies sur la ligne de front.

(7) Des contre-attaques à l’intérieur et à l'extérieur des frontières du pays.


(a) Le Système de Défense fixe

 

1. Le système de défense fixe dans les zones rurales dépend de deux facteurs principaux: d'une part, l'utilisation des zones protégées afin de défendre le périmètre, et d'autre part, le blocage des principales routes de transport utilisées par l'ennemi.

 

2. Les dispositions sécuritaires des secteurs situés dans les zones rurales conçues, à l'origine, pour repousser les petites forces armées ennemies, doivent être modifiées en termes de planification et de renforcement en fonction des actions stratégiques qui devraient être utilisées par les forces ennemies régulières ou semi-régulières. Cela sera effectué conformément aux instructions données par la Direction Générale des opérations chargée de la défense et de la planification dans les zones rurales.




3. En outre, si l'on prend en considération les actions stratégiques qui devraient être utilisées par l'ennemi, des efforts doivent être faits pour effectuer la transition entre une défense de position en une défense régionale, de sorte que l'unité de défense soit la région et non la zone.

 

4, afin d'atteindre cet objectif, les mesures suivantes doivent être prises:

 

a) Transformation de l’état-major régional d'un état-major administratif en une direction d’état-major (sélection d'un lieu, mise en place d'un réseau de communications, etc)

 

b) Formation d'une force armée mobile régionale de réserve, à recruter parmi les forces armées affectées aux zones, ce qui permettrait de renforcer les forces ou de porter des contre-attaques dans les zones à l'intérieur de chaque région en fonction de plans fixés à l’avance.

 

c) Adaptation et intégration des plans concernant la fortification et l’ouverture du feu dans les zones aux plans de la région en tenant compte, dans la mesure du possible, des conditions géographiques et des types d'armes utilisées. Ces plans doivent également être coordonnés avec les opérations régionales de la force armée mobile de réserve.


5. Les colonies qui, en raison de leur localisation géographique, ne peuvent pas être incluses dans un plan de défense régionale fixe, doivent être organisées en zones de défense locales.

En conséquence, elles doivent avoir ce qu’il faut pour bloquer les voies de transport utilisées par l'ennemi, ou si les circonstances stratégiques le permettent, pour contrôler les hauteurs, mettre en place des fortifications et des barrières et poser des mines, etc Cela sera fait en plus de l’activation du système de défense de la zone.

Des forces armées supplémentaires doivent être affectées à l'exécution de ces tâches, comme il sera détaillé ci-dessous. Ces spécifications s'appliquent aussi aux régions isolées.

 

6. Blocage des principales voies de transport de l'ennemi.

 

a) Les principales voies de transport de l’ennemi, qui relient ses terres aux terres de l'État, comme les routes, les ponts, les principaux passages, les carrefours importants, les chemins, etc doivent être bloqués par les moyens suivants: actes de sabotage, explosions, série de barrières, champs de mines, ainsi qu’en contrôlant les points en altitude à proximité des routes et en y prenant position.


b) Un système de barrières doit être mis en place en plus du système de défense fixe. Les plans stratégiques concernant des barrières doivent être adaptés et coordonnés avec les plans de défense des zones situées près de ces barrières. Ils doivent aussi être coordonnés avec les plans de défense régionaux, si cela est possible d’un point de vue géographique.


(b) Consolidation des Systèmes de défense et fortifications

Si le système de défense fixe doit être efficace et l'arrière de ce système protégé, il faut effectuer les opérations suivantes :


1. Occupation des postes de police.

2. Contrôle des installations gouvernementales et des services publics dans chaque région.

3. Protection des voies de transport secondaires.

4. Montage d’opérations contre les centres de population ennemis situés à l'intérieur ou à proximité de notre système de défense afin d'éviter qu'ils ne soient utilisés comme bases par une force armée active. Ces opérations peuvent être portées selon les directives suivantes : encerclement du village et ratissage de celui-ci. En cas de résistance, la force armée doit être détruite et la population doit être expulsée hors des frontières de l'État.

Les villages vidés de la manière décrite ci-dessus doivent être inclus dans le système de défense fixe et doivent être fortifiés autant que nécessaire.

En l'absence de résistance, les troupes de garnison entreront dans le village et prendront position à l’intérieur ou dans des endroits qui permettront un contrôle stratégique complet. L'officier commandant l'unité confisquera toutes les armes, les radios et les véhicules motorisés du village. En outre, il placera en garde à vue tous les individus politiquement suspects.

Après consultation avec les autorités politiques [juives], des institutions seront nommées composées de personnes du village pour gérer les affaires internes du village. Dans chaque région, une personne (Juive) sera désignée comme responsable de l'organisation politique et administrative de tous les villages et centres de population [arabes] qui sont occupés dans cette région


(c) Déploiement dans les grandes villes

Les positions dans les grandes villes seront prises selon les principes suivants:

1. L'occupation et le contrôle des installations et des bâtiments gouvernementaux (bureaux de poste, centraux téléphoniques, gares, postes de police, ports, etc)

2. La protection de tous les services publics et installations indispensables.

3. L'occupation et le contrôle de tous les quartiers arabes isolés situés entre notre centre municipal et le centre municipal arabe, en particulier les quartiers qui contrôlent les entrées et les sorties de la ville. Ces quartiers seront contrôlés conformément aux directives établies pour la fouille des villages. En cas de résistance, la population sera expulsée vers la zone du centre municipal arabe.


4. L'encerclement de la zone municipale arabe et son isolement des voies de transport extérieurs, ainsi que, dans la mesure du possible, l’arrêt de ses services publics indispensables (eau, électricité, carburant, etc),


(d) Contrôle des principales artères de transport au niveau régional

1. Occupation et contrôle des endroits surplombant les principales artères de transport régional, comme les postes de police, les pompes à eau, etc Ces positions élevées seront transformées en postes de surveillance fortifiés qui seront utilisés lorsque le besoin s'en fera sentir comme bases pour les forces de défense mobiles. (Dans de nombreux cas, cette opération sera coordonnée avec l'occupation des postes de police, et aura pour but de consolider le système de défense fixe.)

2. Occupation et contrôle des villages arabes qui constituent un sérieux obstacle sur l'une des principales artères de transport. Des opérations contre ces villages seront effectuées conformément aux spécifications fournies dans l’article se rapportant à la fouille des villages.


(e) Les villes ennemies seront assiégées selon les directives suivantes:

1. En isolant les artères de transport par la pose des mines, la destruction à l’explosif des ponts, et un système d'embuscades fixes.

2. Si nécessaire, en occupant des positions élevées qui donnent sur les artères de transport menant aux villes ennemies et en renforçant nos unités sur ces positions.

3. En perturbant les services publics indispensables, tels que l'électricité, l'eau et le carburant, ou en utilisant les ressources économiques à notre disposition ou par le sabotage.

4. En lançant une opération navale contre les villes qui peuvent recevoir des approvisionnements par voie maritime, en détruisant les navires transportant les ravitaillements ainsi qu’en effectuant des actes de sabotage contre des installations portuaires.


(f) Occupation et contrôle des positions ennemies sur la ligne de Front

En règle générale, l'objectif de ce plan n'est pas une opération d'occupation à l’extérieur des frontières de l'Etat hébreu. Toutefois, en ce qui concerne les bases ennemies situées à proximité de la frontière qui pourraient être utilisées comme lieu d’infiltration dans le territoire de l'État, celles-ci doivent être occupées temporairement et ratissées à la recherche de personnes hostiles selon les directives ci-dessus, et elles doivent alors être intégrées dans notre système de défense jusqu'à ce que cessent les opérations.

Les bases situées en territoire ennemi qui sont destinées à être occupées et contrôlées temporairement seront listées parmi les cibles opérationnelles pour les différentes brigades.


(g) Contre-attaques à l’intérieur et à l'extérieur des frontières de l'État

Des contre-attaques seront utilisées en tant que mesures auxiliaires du système de défense fixe afin d'interrompre les attaques organisées lancées par les forces ennemies régulières et semi-régulières, que ce soit à partir de bases dans le pays ou à l'extérieur des frontières.


Les contre-attaques seront lancées selon les directives suivantes :


1. Des attaques de diversion, c'est-à-dire, lorsque l'ennemi sera en train de lancer une attaque contre l'un de nos secteurs, [nos forces lanceront] une contre-attaque profondément à l’intérieur d’une autre zone contrôlée par l'ennemi dans le but de détourner ses forces en direction de la contre-attaque.

2. La destruction des routes de transport et d'approvisionnement à l'intérieur du territoire ennemi, en particulier contre une force ennemie régulière qui franchirait la frontière pour nous envahir.


3. Attaquer l'ennemi dans ses bases arrières, tant à l'intérieur du pays [la
Palestine] qu’au-delà de ses frontières.


4. Les contre-attaques se dérouleront, en règle générale, comme suit : une force armée, en moyenne, de la taille d'un bataillon procédera à une infiltration en profondeur et lancera des attaques concentrées contre des centres de population et des bases ennemies dans le but de les détruire ainsi que la force armée ennemie stationnée à cet endroit;

sinon, cette force armée pourrait se séparer à effectuer des opérations secondaires, telles que des actes de sabotage et des diversions sur les routes et les artères de transport militaire de l’ennemi.



5. Une liste détaillée des contre-attaques sera incluse dans la [liste] des cibles opérationnelles de la Force Mobile Stratégique [PALMACH].

 

4. Tâches des forces armées

(a) Répartition des tâches dans le système de défense fixe :

1. Les fonctions suivantes sont à la charge des Forces armées de garnison [KHIM] : Défense des zones et des postes isolés et fortifiés et formation des unités de réserve régionales.


2. Dans le cadre du système de défense fixe, les forces armées de terrain [KHISH]. sont responsables des tâches suivantes:

Les opérations de blocage des routes de transport de l’ennemi. À cette fin, chaque opération de blocage sera affectée, sur la base de son importance et de son type, à une unité de force armée de terrain spécifique dont la taille sera adaptée à la nature de la mission.

En outre, la brigade de force armée de terrain en question sera chargée de tâches liées à la consolidation du système de défense fixe, comme indiqué dans l’article 3 (b).

 

3. Dans des circonstances exceptionnelles, des unités de la Force Armée de Terrain pourraient être positionnées dans des régions ou des zones, ou dans des endroits isolés et des positions fortifiées, afin de renforcer la défense locale ou régionale. Dans la mesure du possible, des efforts doivent être faits pour réduire le nombre de ces cas,.

 

4. En plus des tâches mentionnées ci-dessus, les responsabilités des Forces Armées de Terrain au sein du système de défense consisteront généralement dans le montage de contre-attaques impliquant des unités plus petites qu’une compagnie (des unités plus importantes pourraient être utilisées s’il le faut) contre les unités ennemies qui attaqueraient le système de défense fixe afin de bloquer leurs lignes de retraite et les détruire.

Ces contre-attaques seront généralement lancées depuis des bases opérationnelles fixes qui sont affectées aux Forces Armées de terrain dans le cadre des tâches sous leur responsabilité dans l’ensemble de la région.

Ces instructions exigent que les unités des Forces Armées de Terrain soient, autant que possible, concentrées et ne soient pas divisées en unités secondaires.


5. Dans les cas mentionnés ci-dessus, la chaîne de commandement sera conforme à l'Addendum 1 de l'Arrêté relatif à l'infrastructure régionale, Novembre 1947.


6. Si le système de blocage (que les Forces Armées de Terrain sont chargées de défendre) est incorporé au système de défense local ou régional, le commandant du bataillon des Forces Armées de Terrain concerné nommera le commandant responsable de l'ensemble du système de défense.


(b) En plus des tâches assignées à la brigade des Forces Armées de Terrain en question concernant la consolidation du système de défense fixe, la brigade réalisera également les tâches suivantes:

- Consolidation des positions dans les villes.

- Contrôle des principales artères de transport dans l'ensemble du pays.

- Encerclement des villes ennemies.

- Occupation et contrôle des positions ennemies sur la ligne de front. Cela sera effectué en conformité avec les tâches opérationnelles assignées aux différentes brigades des Forces Armées de Terrain.

Pour mener à bien tout ou partie de ces tâches, le commandement suprême peut affecter des unités de la Force Mobile Stratégique [PALMACH], qui constituent les forces de réserves de l'ensemble du pays, aux Forces Armées de Terrain.

2. Au cours de la mise en œuvre de missions communes avec les Forces Armées de Terrain, les unités de la Force Mobile Stratégique [PALMACH] tomberont sous le commandement de la brigade des Forces Armées de Terrain qui contrôle la zone dans laquelle ces unités opèrent.

3. Après l'achèvement de la mission, les unités de la Force Mobile Stratégique [PALMACH] rejoindront les forces de réserves du pays.

4. Des efforts devront être faits pour s’assurer que la période où les unités des forces de réserves de l'ensemble du pays sont affectées aux Forces Armées de Terrain soit la plus courte possible.


(c) 1. La Force Mobile Stratégique [PALMACH] est responsable de la mise en œuvre des contre-attaques à l’intérieur et à l’extérieur des frontières du pays.


2. Le commandement suprême pourra, à sa convenance, réduire le nombre de tâches assignées à l’une ou l'autre des brigades des Forces Armées de Terrain (c'est-à-dire celles ayant un rapport avec le siège de villes ennemies, le contrôle des voies de transport et l'occupation des positions de ligne de front) et les affecter directement à la Force Mobile Stratégique [PALMACH].


(d) Les différents départements et services de l'état-major sont tenus d’achever les ordres de préparation ci-dessus dans leurs divers domaines de responsabilité et de présenter les plans aux brigades des Forces Armées de Terrain.

 



Notes :


1. Il s’agit du Plan Gimmel ou Plan C.

2. Il s'agit d'une première version du Plan D, appelée ainsi après que Yehoshua Globerman, un commandant de la Haganah ait été tué au début du mois de Décembre 1947. Le Plan D lui-même a été finalisé le 10 Mars 1948.

3. Il s'agit de l'armée du roi Abdallah de Transjordanie, financée et commandée par les Britanniques, des unités qui ont servi en Palestine sous les ordres de l’armée britannique jusqu'à la fin du mandat le 15 Mai 1948. .

4. Sharon est la plaine côtière entre Haïfa et Tel-Aviv, Emek Hefer étant sa partie centrale (en arabe al-Wadi Hawarith).

5. Les deux autres sont à Jérusalem et Haïfa.

6. Ces "postes de police" étaient en fait des forteresses, dont 50 d’entre elles avaient été construites par les Britanniques dans l’ensemble de la Palestine après la rébellion arabe de 1936-39 afin de contrôler la population arabe.


7. Dans la traduction originale, le mot «srika" a été traduit par "ratissage". Il s’agit d’une référence à la recherche de forces hostiles.

8. Cette liste n'est pas dans le document original en Hébreu

9. [KHIM] est l'abréviation de Khayl Matzav, la deuxième ligne de troupes. À l'automne 1947, ils étaient au nombre d’environ 32.000. Voir Khalidi, From Haven to Conquest, 862. (Les sources israéliennes donnent un nombre beaucoup plus faible – AI)

10. KHISH est l'abréviation de Khayl Sadeh, les troupes de première ligne. Par Je Mai 1948, ils étaient environ 30.000. Voir Khalidi, From Haven to Conquest, 861. (Les sources israéliennes donnent un nombre beaucoup plus faible – AI)

11. Voir Appendice C, ci-dessous (A.I. – Non inclus dans la version internet).

12. PALMACH est l'abréviation de Plugot Machats, c'est-à-dire, écraser les bataillons. Au printemps 1948, cette force armée est composée de trois brigades (Yiftach, Harel, et HaNegev) comprenant un peu plus de 8000 hommes. Voir Walid Khalidi, From Haven to Conquest (Washington: Institut des Etudes Palestiniennes, 1987), 861. (PALMACH a été initialement créé avec l'intention de repousser une invasion de la Syrie sous contrôle de Vichy - AI)

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