Extraits du rapport 2019 sur la pauvreté de l'observatoire des inégalités ,

 

Cinq millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté en France
Par Anne Brunner


Depuis dix ans, le nombre de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté en France augmente. Cette aggravation est l’un des phénomènes les plus marquants parmi les évolutions analysées par l’Observatoire des inégalités.

En considérant une définition restrictive, c’est-à-dire le seuil de pauvreté situé à la moitié du revenu médian (855 euros par mois), le nombre de personnes pauvres a augmenté de 600 000 en dix ans, de 4,4 millions à 5 millions. Au cours de la même période, le taux de pauvreté est passé de 7,3 % à 8 % de l’ensemble de la population. La décennie 2000, et plus encore la crise déclenchée en 2008, ont marqué un retournement historique de la tendance : la pauvreté ne diminue plus en France.


Si l’on se réfère au seuil de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian (1 026 euros par mois) – seuil le plus souvent utilisé dans le débat public –, alors, c’est avec près de 9 millions de personnes pauvres qu’il faut compter en France (voir encadré). Ce chiffre a augmenté de 820 000 au cours des dix dernières années.

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Le seuil de pauvreté est déterminé en fonction du niveau de vie médian. La mesure de la pauvreté en Europe n’est pas absolue mais relative. Le seuil de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian d’aujourd’hui est deux fois plus élevé, après inflation, que dans les années 1970. Une augmentation de la pauvreté traduit un écart croissant entre le bas et le milieu de la hiérarchie des revenus : c’est une sorte d’indicateur des inégalités de revenu « par en bas ».
Ce qui se passe aujourd’hui dans les sociétés occidentales n’est pas un appauvrissement massif des plus pauvres, mais une augmentation du nombre de personnes qui décrochent du niveau de vie des classes moyennes. Ces milieux les plus modestes accèdent de moins en moins aux standards de vie, et en particulier de consommation, qui sont les plus courants. Cet écart est d’autant plus pesant que la valeur d’égalité constitue l’un des piliers de notre République d’un côté, et que la pression à consommer est énorme, de l’autre.


Des signes d’amélioration existent. Entre 2013 et 2016, le taux de pauvreté s’est stabilisé.


Le nombre de pauvres a baissé de 100 000 au seuil à 50 % et de 200 000 au seuil à 60 %. Les données sur les revenus ont deux années de retard. Que peut-on penser de ce qui s’est passé depuis 2016 ? L’activité économique est repartie et le chômage a diminué, c’est encourageant. On a de bonnes raisons de penser, sinon que la situation s’est améliorée, du moins qu’elle ne se détériore plus au niveau global. Allons-nous vers une stabilisation de la pauvreté ?
Cet optimisme doit être mesuré : ainsi, en 2017, la diminution du nombre d’allocataires du revenu de solidarité active (RSA), que nous avions constatée depuis fin 2015, s’est arrêtée. Un mauvais signe. Pour l’heure, la tendance est plutôt à une croissance atone, qui stabilise la pauvreté mais ne permet pas de créer suffisamment d’emplois.


De plus, si la pauvreté se stabilise, c’est en partie lié au fait que les revenus des classes moyennes stagnent.

 

 

 La pauvreté en voie de stabilisation ?


La pauvreté s’est accrue au cours des dix dernières années. Le taux de pauvreté a progressé de 7,3 % à 8 % entre 2006 et 2016 au seuil situé à 50 % du niveau de vie médian, et de 13,3 % à 14 % au seuil à 60 %. Selon le premier seuil, le nombre de pauvres est passé de 4,4 à 5 millions (+ 600 000), selon le second, de 8 à 8,8 millions (+ 800 000).
Si l’on se place sur une plus courte période, les choses sont différentes. Le taux de pauvreté a baissé en 2013 par rapport à 2012 et il est resté stable depuis. Cette situation résulte de la conjugaison d’un facteur négatif et d’un facteur positif. Côté négatif, si la pauvreté stagne aujourd’hui, c’est en partie que la crise atteint les couches moyennes… Cela demande quelques explications. La baisse de 2013 est principalement due au mode de calcul de la pauvreté. Le seuil de pauvreté est calculé en pourcentage du niveau de vie médian. Quand le niveau de vie médian diminue, le seuil de pauvreté fait de même (voir notre encadré page 30). Une partie des personnes comptabilisées comme pauvres hier ne le sont plus, même si leur revenu n’a pas évolué. (observatoire des inégaligés, rapport 2019)

 

 

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