Promulguée le 1er juillet 1972, la loi relative à la lutte contre le racisme, dite "loi Pleven" du nom du ministre de la justice qui l’a portée, réforme et complète certaines dispositions de la loi de 1881 relative à la liberté de la presse. A côté de l’injure et la diffamation déjà réprimées par la loi de 1881, la loi Pleven crée des délits spécifiques pour la provocation à la discrimination, à la haine et à la violence raciales. Avec cette loi, le racisme n’est plus une simple opinion, il devient un délit puni par des peines qui vont de l’amende à la prison ferme.

Historique

A la veille de la Seconde guerre mondiale, dans un contexte marqué par la montée de l’antisémitisme, alimentée par la presse d’extrême-droite, un décret-loi du 21 avril 1939, dit "loi Marchandeau" vient sanctionner pour la première fois le racisme exprimé par voie de presse. Le texte punit les diffamations visant les personnes en raison de leur origine, leur race ou leur religion quand elles ont pour but "d’exciter à la haine entre les citoyens ou les habitants".

Le texte est cependant d’une portée limitée. Ni un particulier, ni une association n’ont la possibilité d’engager des poursuites, seul le ministère public est en mesure de le faire. Il vise par ailleurs un groupe de personnes victimes de diffamation, et non une personne en particulier. Enfin, la preuve selon laquelle l’auteur des propos avait pour but d’exciter à la haine entre les citoyens ou les habitants doit être apportée.

Après la guerre, le texte est jugé insuffisant, notamment pour faire face à l’augmentation du nombre d’actes racistes à l’encontre des travailleurs étrangers installés en France. Le racisme "anti-algérien" est particulièrement présent dans cette période de tensions, suscitées par la guerre d’Algérie, puis par l’accès à l’indépendance du pays.

En novembre 1971, la France ratifie la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Pour appliquer la convention, un projet de loi est déposé. La loi est rapidement adoptée, votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale et le Sénat.

Le contenu de la loi

La loi Pleven crée un délit nouveau de provocation à la haine, à la discrimination ou à la violence raciales, délit puni à l’époque d’un mois à un an d’emprisonnement et d’une amende de 2 000 à 300 000 francs. Elle introduit une distinction entre délit de provocation et délit de diffamation et d’injures raciales.

La loi punit également les discriminations raciales dans les domaines du travail et du logement, ainsi que les injures.

Elle modifie aussi la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combat et milices privées et permet de dissoudre des groupes incitant à la haine raciale.

Elle supprime les restrictions imposées par la loi de 1939 :

elle ouvre la possibilité à une personne, et non plus seulement un groupe de personnes, d’engager, à titre individuel, des poursuites. Les associations dédiées à la lutte contre le racisme peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile, tant pour ce qui concerne le délit de provocation à la discrimination et à la haine raciale que pour ceux de diffamation et d’injure raciales. La procédure peut également être engagée d’office par le ministère public ;

la preuve d’une intention d’excitation à la haine, telle que prévue par le texte de 1939, n’a plus à être apportée.

Jugé de nouveau insuffisant pour lutter contre le racisme, l’arsenal législatif est complété par la loi du 13 juillet 1990, dite "loi Gayssot", tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe. La loi Gayssot sanctionne la négation des crimes contre l’humanité perpétrés par le régime nazi. ("révisionnisme").

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